N° 626

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 15 juin 2011

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine en vue d' éviter les doubles impositions en matière d' impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir l' évasion et la fraude fiscales ,

Par M. Adrien GOUTEYRON,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Serge Dassault , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Yvon Collin, Philippe Dallier, Jean-Pierre Demerliat, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, Hubert Falco, André Ferrand, François Fortassin, Jean-Pierre Fourcade, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Roland du Luart, Philippe Marini, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

450 et 627 (2010-2011)

EXPOSÉ GÉNÉRAL
PREMIÈRE PARTIE : LE CONTEXTE

Le Sénat est saisi du projet de loi n° 450 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine (ci-après « Hong Kong ») en vue d' éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales.

Cet accord a été signé le 21 octobre 2010 par Christine Lagarde, alors ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, et John C. Tsang, secrétaire aux finances du Gouvernement de la région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine.

Il vise, en premier lieu , à garantir un traitement fiscal équitable des revenus des sociétés et des personnes résidentes de l'une des deux Parties. A cet effet, il prévoit, d'une part, des règles de répartition du droit d'imposition entre les deux Parties, et d'autre part, un mécanisme de suppression des doubles impositions lorsque ce droit n'est pas attribué exclusivement à l'une des deux Parties.

S'agissant de la portée de l'accord sur ce premier objet, votre rapporteur rappelle que 9 200 ressortissants français étaient résidents de Hong Kong en 2009. Ce chiffre est en constante augmentation. De surcroît, cette région administrative est la deuxième destination des investissements directs étrangers (IDE) français en Asie. Après deux années particulièrement exceptionnelles, en 2007 et 2008 1 ( * ) , les IDE se sont fixés à 703 millions d'euros en 2009. Au total, on dénombre à Hong Kong plus de six cent sociétés ou filiales d'entreprises françaises, qui emploient localement environ 30 000 personnes.

En second lieu, le présent accord tend à permettre un échange de renseignements dans des conditions conformes aux standards les plus récents de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) afin de lutter contre l'évasion fiscale internationale . Il s'inscrit, à cet égard, dans le cadre de la politique conventionnelle française, initiée ces dernières années, de mise en place d'une coopération administrative fiscale avec des Etats et territoires considérés comme peu coopératifs.

I. HONG KONG, UN PARTENAIRE STRATÉGIQUE

Votre rapporteur s'est particulièrement intéressé à Hong Kong en tant que partenaire économique afin de pouvoir évaluer l'impact de la présente convention fiscale. Il rappelle que Hong Kong, devenue une « région administrative spéciale » (RAS) de la République populaire de Chine depuis sa rétrocession le 1 er juillet 1997, constitue néanmoins un territoire fiscal, douanier et monétaire 2 ( * ) indépendant de la Chine continentale.

Elle continue, par ailleurs, d'être représentée en tant que membre à part entière dans plusieurs organisations internationales à vocation économique 3 ( * ) . Elle peut également conclure des conventions internationales sous l'appellation « Hong Kong/Chine ». Elle est, à ce titre, partie à plus de deux cents instruments de droit international, dont plus de quatre-vingt auxquels la Chine populaire n'est, elle-même, pas partie. Son autonomie et sa situation économique en font un partenaire économique stratégique.

A. UNE AUTONOMIE GARANTIE PAR LA LOI FONDAMENTALE

Le statut de Hong Kong a été défini le 4 avril 1990 par la « Loi Fondamentale 4 ( * ) » adoptée par l'Assemblée nationale populaire de Pékin. Elle garantit à Hong Kong « un large degré d'autonomie » par rapport aux autorités centrales de Pékin, selon le principe « un pays, deux systèmes ». Elle dispose, en effet que « le système capitaliste et le mode de vie du territoire demeureront inchangés pour les cinquante ans à venir ». Cette autonomie se manifeste dans l'ensemble de la sphère politique, économique, monétaire, sociale et migratoire, à l'exception de la Défense qui relève exclusivement de Pékin.

Illustration de l'autonomie Hongkongaise

- Politique sociale : les systèmes de santé, d'éducation et de protection sociale sont propres au territoire de Hong Kong. Ils sont caractérisés par les standards occidentaux.

- Sécurité et immigration : le maintien de l'ordre dans la région administrative relève de la responsabilité directe du Gouvernement local. Il est assuré par les forces de police de Hong Kong. De même, le territoire dispose d'une entière souveraineté en matière de politique migratoire (régime spécifique d'entrée, de séjour et de sortie du territoire). Un système très sélectif d'« immigration choisie 5 ( * ) » a été mis en place depuis 2006 afin d'accueillir des jeunes talents du monde entier.

- Système judiciaire et juridique : le système judiciaire, hérité de la Common Law britannique, est organisé selon une hiérarchie qui place au sommet la Cour d'appel final 6 ( * ) , puis la Haute Cour 7 ( * ) , elle-même composée de la Cour d'Appel 8 ( * ) et de la Cour de Première Instance 9 ( * ) , la Cour de district 10 ( * ) , les tribunaux d'instance 11 ( * ) et les tribunaux spécialisés. Hong Kong dispose également d'un médiateur 12 ( * ) aux pouvoirs étendus.

De surcroît, le système juridique et judiciaire garantit notamment le respect des droits de l'homme et des libertés publiques (liberté de conscience, d'opinion, de mouvements...), ainsi que le prévoit la Loi Fondamentale. Les lois chinoises en ce domaine ne s'appliquent pas au territoire de Hong Kong, à l'exception de quelques textes symboliques strictement définis (fête, emblème et hymnes nationaux...).

Source : Ministère des affaires étrangères et européennes

S'agissant de l'autonomie politique, sa mise en oeuvre demeure une question de premier plan .

Schéma institutionnel hongkongais

La région administrative est gouvernée par un Chef de l'exécutif, élu pour cinq ans par un collège électoral de 800 grands électeurs (ce chiffre s'établira à 1 200 lors de l'élection de 2012). L'actuel Chef de l'exécutif, Donald Tsang, a été réélu le 25 mars 2007 avec 81 % des suffrages des grands électeurs et un fort soutien populaire (près de 70 % d'opinions favorables). Le Gouvernement 13 ( * ) se compose de quinze ministres 14 ( * ) . Il n'est responsable que devant le Chef de l'exécutif.

Le pouvoir législatif est conféré à un Conseil législatif 15 ( * ) de soixante membres dont une moitié est élue au suffrage universel direct (scrutin proportionnel par circonscription géographique) et l'autre moitié dans le cadre de circonscriptions dites « fonctionnelles », c'est-à-dire des collèges professionnels (enseignants, banques, secteur immobilier...) d'importance très inégale (de plusieurs milliers d'électeurs à quelques dizaines). Le Conseil vote et amende les lois. Il peut introduire toute proposition nouvelle. Il approuve le budget, les impôts et la dépense publique. Il nomme les juges de la Cour d'appel final et le président de la Haute Cour. Il peut mettre en cause la responsabilité du chef de l'exécutif et interpeller le Gouvernement sur la conduite de sa politique, mais les ministres ne sont pas responsables devant lui.

Source : Ministère des affaires étrangères et européennes

Une proposition de réforme électorale a été élaborée en décembre 2009 , qui a été ensuite soumise à une consultation publique de trois mois, visant à mettre en oeuvre un système plus démocratique dans la perspective des élections du Chef de l'exécutif le 25 mars 2012, prélude à l'élection directe de celui-ci en 2017 et de celle de l'ensemble du Conseil législatif en 2020.

De nombreux débats ont rythmé les six premiers mois de l'année 2010. Un compromis a été finalement accepté par le parti démocrate, le Gouvernement de Hong Kong et le Gouvernement central à Pékin, qui a conduit au vote d'une réforme majeure en juin 2010 du code électoral ouvrant la voie à l'instauration du suffrage universel en 2017.


* 1 Les IDE se sont élevés respectivement à 1,4 et 1,2 milliard d'euros.

* 2 Hong Kong est dotée d'une devise convertible (dollar de Hong Kong), indexée sur le dollar américain.

* 3 Organisation mondiale du commerce, Organisation mondiale des douanes, Banque asiatique de développement.

* 4 Basic Law of Hong Kong.

* 5 Quality Migrant Admission Scheme.

* 6 Court of Final Appeal.

* 7 High Court .

* 8 Court of Appeal .

* 9 Court of First Instance .

* 10 District Court.

* 11 Magistrates Court .

* 12 Ombudsman .

* 13 Executive council .

* 14 Secretaries .

* 15 Legislative Council : le Conseil législatif est composé de 38,3% de pan-démocrates (23 sièges), de 56,6% des élus des partis pro-Pékin plus conservateurs (34 sièges) et des indépendants (3 sièges).

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