B. LA DÉFINITION, LA PRÉVENTION ET LA RÉPRESSION DES CONFLITS D'INTÉRÊTS

Les propositions de directives du Parlement européen et du Conseil E 6987 et E 6988 tendent également à introduire une définition unifiée des conflits d'intérêts à l'échelle de l'Union européenne et, corrélativement, à imposer la mise en place par les États membres de mécanismes de détection, de prévention et de « correction immédiate » de ces conflits pour tous les marchés d'un montant supérieur :

- à 5 000 000 € pour les marchés publics de travaux ;

- à 130 000 € pour les marchés publics de fournitures et de services de l'Etat ;

- à 200 000 € pour les marchés de fournitures et de services passés par les collectivités territoriales ou les « pouvoirs adjudicateurs sous-centraux » ;

- à 500 000 euros pour les marchés publics de services sociaux, éducatifs et culturels.

Reposant sur le constat selon lequel « les intérêts financiers en jeu et l'interaction étroite entre secteur public et secteur privé font de la passation de marchés publics une zone à risque, où peuvent se développer des pratiques commerciales malsaines », les deux propositions prévoient ainsi que les Etats membres seront tenus d'instaurer des règles efficaces de lutte contre les conflits d'intérêts à tous les stades des procédures de passation de marchés, y compris aux étapes les plus précoces (à savoir la conception et l'élaboration de la procédure et la rédaction des documents de marché) et jusqu'à l'attribution du marché.

Les conflits d'intérêts seraient définis comme couvrant « au moins toutes les situations où [les personnes impliquées, du côté du pouvoir adjudicateur, dans la passation des marchés publics] ont un intérêt privé direct ou indirect dans le résultat de la procédure de passation de marché qui peut être perçu comme portant atteinte à l'exercice impartial de leurs fonctions ».

Selon cette définition, la situation de conflit d'intérêts reposerait sur deux critères principaux :

- la personne en cause a un intérêt privé susceptible d'interagir avec le résultat de la procédure, c'est-à-dire un intérêt personnel « partagé avec les candidats ou les soumissionnaires ». La notion d'« intérêt » a, en l'espèce, un périmètre étendu : les propositions de directives précisent en effet que l'intérêt peut être « familial, sentimental, économique, politique ou autre » et qu'il est pris en compte même s'il est « indirect » ;

- le conflit d'intérêts pourrait être réel, potentiel, ou apparent 21 ( * ) .

Le public visé serait large : la situation de conflit d'intérêts pourrait en effet concerner l'ensemble du personnel du pouvoir adjudicateur -et de ses prestataires participant à la procédure de passation de marché-, mais aussi tous les membres des organes décisionnels du pouvoir adjudicateur qui, même s'ils ne participent pas à la procédure, peuvent avoir une influence sur son résultat.

Afin de lutter contre les situations de conflits d'intérêts ainsi définies, les propositions de directives obligeraient les États membres à mettre en place des règles garantissant :

- la divulgation des conflits d'intérêts par les membres du pouvoir adjudicateur ;

- la transmission, par tous les candidats et soumissionnaires au début de la procédure de passation de marché, d'une déclaration faisant état de « l'existence de tout lien privilégié » (i.e. qui risque de donner lieu à un conflit d'intérêts) avec les personnes travaillant pour le pouvoir adjudicateur ; de telles déclarations devraient être retracées dans le rapport individuel que les pouvoirs adjudicateurs devraient établir sur chaque marché 22 ( * ) .

En outre, dès lors que des « liens privilégiés » seraient détectés, le pouvoir adjudicateur devrait en informer l'« organe de contrôle » (v. infra ) et devrait prendre toutes les mesures susceptibles de mettre fin à la situation de conflit d'intérêts -mesures qui pourraient aller jusqu'à l'exclusion du candidat ou du soumissionnaire « lorsqu'il n'existe pas d'autre moyen efficace de remédier au conflit d'intérêts ».


* 21 Sur la distinction entre ces trois types de conflits d'intérêts, on pourra se reporter au rapport public du Service central de prévention de la corruption pour 2004, p. 27 :

http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics//054000473/0000.pdf

* 22 Article 85 de la proposition E 6988 et article 94 de la proposition E 6987.

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