N° 213

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 décembre 2012

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances rectificative , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , pour 2012 ,

Par M. François MARC,

Sénateur,

Rapporteur général.

Tome I : Rapport

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Marini , président ; M. François Marc , rapporteur général ; Mme Michèle André , première vice-présidente ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Pierre Caffet, Yvon Collin, Jean-Claude Frécon, Mmes Fabienne Keller, Frédérique Espagnac, MM. Albéric de Montgolfier, Aymeri de Montesquiou, Roland du Luart , vice-présidents ; MM. Philippe Dallier, Jean Germain, Claude Haut, François Trucy , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Jean Arthuis, Claude Belot, Michel Berson, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Joël Bourdin, Christian Bourquin, Serge Dassault, Vincent Delahaye, Francis Delattre, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, Jean-Paul Emorine, André Ferrand, François Fortassin, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Charles Guené, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Yves Krattinger, Dominique de Legge, Marc Massion, Gérard Miquel, Georges Patient, François Patriat, Jean-Vincent Placé, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Richard Yung .

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) :

403 , 465 et T.A. 60

Sénat :

204 (2012-2013)

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Les principaux chiffres du troisième projet
de loi de finances rectificative pour 2012

1. - LES RECETTES

Recettes fiscales nettes : 270,1 milliards d'euros (-2,3*)

Recettes non fiscales : 14,0 milliards d'euros (-1,4)

2. - LES DÉPENSES ET LES EMPLOIS

Dépense sous norme « zéro valeur » : 273,7 milliards d'euros (0)

Dont dépenses de personnel (hors pensions) : 81,0 milliards d'euros (+0,6)

Dont PSR collectivités territoriales sous norme : 51,6 milliards d'euros (-0,1)

Dont PSR Union européenne : 19,1 milliards d'euros (+0,2)

Dépense sous norme « zéro volume » : 357,7 milliards d'euros (-1)

Dont charge de la dette : 46,4 milliards d'euros (-1)

Dont dépenses de pensions : 37,6 milliards d'euros (+0)

Plafond des autorisations d'emplois rémunérés par l'Etat : 1 936 014 ETPT (+0)

3. - LE SOLDE ET SON FINANCEMENT

Solde général (y compris opération Dexia) : - 86,1 milliards d'euros (-5,0)

Besoin et ressources de financement de l'Etat : 185,3 milliards d'euros (+6,4)

Plafond de variation de la dette à moyen et long termes : 99,2 milliards d'euros (-1)

* Les évolutions sont par rapport à la LFR-2 2012 pour les recettes et le solde, et par rapport à la LFI 2012 pour les dépenses et les emplois.

Nota bene : l'analyse de l'équilibre budgétaire repose sur les données contenues dans le projet de loi adopté en Conseil des ministres. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale en première lecture sont analysées dans le cadre du commentaire de l'article d'équilibre (article 4).

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

I. UNE ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE EN STAGNATION

La prévision de croissance pour 2012 associée au présent projet de loi de finances rectificative est de 0,3 % , inchangée depuis le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2012, déposé en juillet. La prévision du consensus des conjoncturistes 1 ( * ) est quant à elle de 0,1 % .

Cette croissance à peine positive représente une importante erreur de prévision du consensus des conjoncturistes, et plus encore du précédent Gouvernement. En effet, lors du dépôt du projet de loi de finances pour 2012, leurs prévisions étaient de respectivement 1,2 % et 1,75 % .

L'erreur de prévision, de l'ordre de 1,7 point pour le précédent Gouvernement, est historiquement élevée. Depuis la fin des années 1990, un tel écart entre prévision et exécution n'avait été constaté qu'au plus fort de la crise, en 2008 et en 2009.

La croissance du PIB : prévision et exécution

(en %)

* 2012 : Consensus Forecasts , novembre 2012.

** Commission des comptes de la Nation puis commission économique de la Nation.

Source : commission des finances, d'après les sources indiquées

Le graphique ci-après montre l'évolution des prévisions de croissance pour 2012 depuis l'automne 2011.

Lors du dépôt du projet de loi de finances pour 2012, la prévision de croissance du précédent Gouvernement était de 1,75 %, contre 1,2 % pour le consensus des conjoncturistes. L'écart, de 0,55 point, était presque deux fois supérieur à la moyenne observée depuis la fin des années 1990 (de 0,3 point), et le plus important observé sur la période.

Les perspectives de croissance se sont ensuite rapidement dégradées au cours de l'automne, le consensus des conjoncturistes ne prévoyant plus qu'une croissance à peine positive depuis décembre 2011. Le précédent Gouvernement, puis le Gouvernement actuel, ont adapté en conséquence leurs prévisions, qui demeurent toutefois très légèrement au-dessus de celles du consensus des conjoncturistes, comme le montre le graphique ci-après.

Les prévisions de croissance successives pour 2012

(en %)

* Consensus Forecasts .

** PLF 2012 (septembre 2011), premier PLFR pour 2012 (février 2012), deuxième PLFR pour 2012 (juillet 2012), présent PLFR.

Source : commission des finances, d'après les sources indiquées

La dégradation rapide des perspectives de croissance à l'automne 2011 s'explique par la faible croissance du second semestre 2011.

Cette faible croissance a tout d'abord eu un impact comptable sur la croissance de 2012, exprimée en moyenne annuelle. Ainsi, en juin 2011 l'Insee prévoyait une croissance de 0,5 % chacun des deux derniers trimestres de 2011, ce qui aurait correspondu au début de l'année 2012 à un acquis de croissance de 0,7 %, suffisant pour atteindre une croissance de l'ordre de 1 % en moyenne annuelle avec une croissance de 0,1 % ou 0,2 % par trimestre. Or, il est apparu que la croissance avait été un peu plus faible pendant l'été, et serait nulle au dernier trimestre, ce qui ramenait l'acquis de croissance de 2012 à 0,2 %.

A cela s'ajoute que la stagnation économique au dernier trimestre de 2011 a rendu moins probable une reprise en 2012. Une croissance de 0,5 % chaque trimestre en 2012 (soit de 2 % en rythme annualisé, ce qui est légèrement supérieur au potentiel, évalué à environ 1,5 %) aurait permis d'atteindre une croissance de 1,4 % en moyenne annuelle, mais un tel scénario de « fin de crise » est vite apparu irréaliste.

La stagnation de l'activité économique provient en particulier de la réduction rapide et simultanée des déficits publics, dont l'impact pourrait avoir été sous-estimé.

Dans ses Perspectives pour l'économie mondiale d'octobre 2012, le FMI écrit : « Le principal constat, basé sur des données concernant 28 pays, est que les multiplicateurs utilisés pour établir les prévisions de croissance sont systématiquement trop faibles depuis le début de la Grande Récession, dans une marge allant de 0,4 à 1,2 selon la source des prévisions et les spécificités de la technique d'estimation. Des indications informelles laissent penser que les multiplicateurs employés implicitement pour générer ces prévisions sont de l'ordre de 0,5. Les multiplicateurs réels pourraient donc être supérieurs et s'échelonner de 0,9 à 1,7 ». Le FMI explique ce phénomène par « le contexte actuel de sous-utilisation des capacités, de politiques monétaires contraintes par le plancher de taux d'intérêt nul et d'ajustement budgétaire synchronisé dans de nombreux pays ».

Dans le cas de la France, le déficit public structurel devrait diminuer de 1,2 point de PIB en 2012 2 ( * ) , ce qui, si l'on retient l'estimation usuelle d'un multiplicateur de 0,5, réduit la croissance de 0,6 point. Si on suppose que, sans politique de réduction du déficit, la croissance de trimestre à trimestre aurait été légèrement supérieure à son potentiel, ce qui aurait permis d'atteindre une croissance de 1,4 % en moyenne annuelle 3 ( * ) , l'effort budgétaire aurait ramené la croissance à 0,8 %, soit nettement plus que la prévision actuelle. En revanche, une hypothèse de multiplicateur budgétaire de 1 correspond à une croissance à peu près nulle. Ce calcul est évidemment schématique mais il suggère que la réduction rapide et simultanée du déficit public dans les Etats de la zone euro explique bien pour une large part la stagnation économique actuelle.

L'objectif de ramener le déficit public à 4,5 points de PIB en 2012 n'est toutefois par remis en cause par cette faible croissance. En effet, cette dégradation de la situation économique est connue depuis la fin de l'année 2011, et les mesures adoptées par la loi de finances rectificative de juillet 2012 devraient permettre d'y faire face. L'expérience des dernières années a toutefois montré qu'encore à cette période de l'année, il était possible de faire des erreurs de prévision significatives. Jusqu'à présent elles se sont toujours produites dans le bon sens, mais il convient de rester vigilant.


* 1 Consensus Forecasts, novembre 2012.

* 2 Source : projet de loi de programmation des finances publiques 2012-2017.

* 3 Ce qui aurait, on l'a vu, pu être atteint par une croissance de 0,5 % de trimestre à trimestre (soit légèrement au-dessus de son potentiel).

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