B. LES MODES DE SCRUTIN DES ÉLUS DES FRANÇAIS ÉTABLIS HORS DE FRANCE

Les élus représentant les Français établis hors de France, qu'ils exercent le mandat de conseiller consulaire ou de conseiller à l'AFE, procèdent du suffrage universel, conformément à l'article 3 de la Constitution. La durée de leur mandat est fixée de manière identique à six ans ( article 29 ter ).

1. L'élection des conseillers consulaires

Les traits essentiels de l'élection des conseillers consulaires, nouveaux élus des Français établis hors de France, n'ont pas été fondamentalement modifiés en première lecture par le Sénat, l'Assemblée nationale n'ayant à son tour pas bouleversé l'équilibre proposé par le Gouvernement. L'élection aurait lieu dans le cadre de circonscriptions pour désigner entre un et neuf conseillers consulaires en fonction de la population représentée. Relevant du législateur, le découpage des circonscriptions d'élection, qui s'appuie sur les circonscriptions consulaires existantes, n'a pas été sensiblement modifié par le Sénat en première lecture. Il a été conservé en l'état par l'Assemblée nationale au cours des deux lectures suivantes ( article 29 terdecies ).

Le scrutin uninominal majoritaire s'appliquerait logiquement aux circonscriptions ne comptant qu'un siège, tandis que le scrutin de liste à la représentation proportionnelle serait la règle pour les autres circonscriptions, dont aucune ne compterait deux sièges ( article 29 quaterdecies ).

Quant au choix de la date du scrutin, prenant en compte les difficultés techniques et juridiques actuelles tenant à l'établissement des listes électorales consulaires, votre commission accepte de se rallier à la proposition de l'Assemblée nationale consistant à organiser l'élection des conseillers consulaires au mois de mai et non, comme le Sénat l'avait souhaité, en mars simultanément au premier tour des élections municipales, de façon à marquer le caractère d'élus de proximité des conseillers consulaires ( article 29 ter ). En outre, cette assimilation se justifiait d'autant plus que les conseillers consulaires ont vocation à composer l'essentiel du collège électoral des sénateurs représentant les Français établis hors de France. Votre rapporteur considère que ce choix, accepté dans un souci de compromis, résulte de la difficulté technique que poserait la mise en oeuvre d'un scrutin électronique dès le mois de mars, alors que la liste électorale n'est connue que début mars. Toutefois, ce constat ne doit pas faire obstacle à une réflexion sur l'évolution des règles d'établissement des listes électorales consulaires, afin d'envisager à terme un alignement de la date de l'élection des conseillers consulaires sur celles de l'élection des conseillers municipaux.

2. L'élection des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger

L'examen en première lecture au Sénat avait conduit la Haute Assemblée à modifier en profondeur le mode de scrutin des conseillers à l'AFE, en prévoyant leur élection au scrutin direct contrairement à la proposition initiale du Gouvernement, tout en conservant cependant le mandat de conseiller consulaire comme condition d'éligibilité.

Votre commission, à l'initiative de son rapporteur, avait proposé un processus électoral unique conduisant à élire au cours d'un même scrutin direct les conseillers consulaires et les conseillers à l'AFE, à l'aide d'un bulletin de vote unique. Aux yeux de votre rapporteur, l'essentiel était d'assurer l'unité du processus électoral afin d'éviter une concurrence de légitimité entre les deux niveaux de représentation. Le Sénat avait ainsi traduit les demandes unanimes exprimées lors des auditions menées par votre rapporteur. Le Gouvernement, par la voix de Mme Hélène Conway-Mourret, ministre délégué aux Français de l'étranger, n'avait pas exprimé devant le Sénat d'opposition au principe de l'élection des conseillers à l'AFE au scrutin direct, ni aux dispositions envisagées par votre rapporteur. En outre, l'élection de l'AFE au scrutin direct permettait de lever les sérieux doutes pesant sur la constitutionnalité du dispositif proposé par le Gouvernement. En effet, vu, le nombre restreint de personnes éligibles à l'AFE dans certaines circonscriptions, le scrutin indirect tel qu'envisagé ne permettait parfois la constitution que d'une seule liste de candidats à l'AFE.

Dans le même esprit, ayant regroupé à l'occasion de la première lecture l'ensemble des dispositions électorales au sein du titre II du projet de loi qu'elle avait créé, votre commission avait intégré un tronc commun de dispositions électorales s'appliquant indifféremment à l'élection des conseillers consulaires et des conseillers à l'AFE, par exemple la législation sur le financement des campagnes électorales ( article 29 duodecies ).

En première lecture, l'Assemblée nationale a rétabli le scrutin indirect des conseillers à l'AFE, par les conseillers consulaires en leur sein, revenant sur le fond à la proposition du Gouvernement. Lors des débats à l'Assemblée nationale, des inquiétudes quant à la constitutionnalité du dispositif adopté par le Sénat ont été formulées, notamment par le Gouvernement.

A cet égard, votre commission relève que le mode de scrutin qu'elle a adopté en première lecture a été établi dans le respect des principes constitutionnels applicables à une élection au suffrage universel. Les doutes sur sa complexité - inévitable dès lors qu'est envisagé le cumul obligatoire entre les mandats de conseiller consulaires et de conseiller à l'AFE - et le risque d'atteinte au pluralisme politique peuvent être largement levés au regard de la décision rendue par le Conseil constitutionnel lors de l'examen du scrutin régional en 2003 1 ( * ) .

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a marqué un infléchissement s'agissant de l'élection des conseillers à l'AFE. Tout en maintenant un mode de scrutin indirect, l'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur, a mieux articulé l'élection des conseillers consulaires et des conseillers à l'AFE, répondant ainsi en partie au souhait exprimé en première lecture par le Sénat. En effet, plutôt que de prévoir deux élections successives et éloignées dans le temps de près de quatre mois, l'Assemblée nationale a créé les conditions d'un processus électoral intégré qui conduirait à l'élection des élus des Français établis hors de France dans un délai d'un mois. A compter de l'élection des conseillers consulaires, la convocation pour l'élection des conseillers à l'AFE serait publiée une semaine plus tard au maximum, les candidatures seraient déposées la semaine suivante et l'information pré-électorale parviendrait aux conseillers consulaires les jours suivants. Finalement, l'élection des conseillers à l'AFE aurait lieu un mois au maximum après celle des conseillers consulaires. Ce faisant, l'Assemblée nationale n'a pas remis en cause le double degré d'élection mais a atténué sa portée. L'élection des conseillers à l'AFE ne serait pas le fruit d'une campagne électorale indépendante de celle des conseillers consulaires mais bien sa conclusion, de la même manière que l'élection des maires par les conseils municipaux est la dernière phase de l'élection municipale.

L'obligation, proposée par le Gouvernement, de détenir un mandat de conseiller consulaire pour être éligible à celui de conseiller à l'AFE a été maintenue en première lecture dans les deux chambres ( articler 29 quater ).

S'agissant du découpage des circonscriptions pour l'élection des conseillers à l'AFE, la première lecture au sein des deux chambres avait marqué une nette différence d'approche : l'Assemblée nationale avait opté en faveur de cinq circonscriptions correspondant aux continents, après que le Sénat eut fait le choix, à l'initiative de notre collègue Catherine Tasca, de seize circonscriptions assurant une représentation de proximité. Dans un souci de compromis qu'il importe à votre rapporteur de souligner, l'Assemblée nationale a adopté en nouvelle lecture, sur proposition de son rapporteur, un découpage comprenant quinze circonscriptions. Votre rapporteur relève que les contraintes résultant de l'obligation d'être conseiller consulaire pour être éligible à l'AFE ont rendu particulièrement difficile l'exercice de délimitation des circonscriptions électorales de l'AFE, afin de permettre, en droit, la constitution d'au moins trois listes dans chaque circonscription, ce qui n'était pas le cas du projet de loi dans sa rédaction itniale.

3. L'élection des sénateurs représentant les Français établis hors de France

S'agissant de l'élection des sénateurs représentant les Français établis hors de France, le Sénat avait maintenu en première lecture les dispositions essentielles du projet de loi telles que proposées par le Gouvernement. En n'apportant que des modifications rédactionnelles et de coordination, l'Assemblée nationale avait alors respecté la tradition républicaine qui veut qu'une assemblée parlementaire observe une certaine réserve sur le mode d'élection des membres de l'autre assemblée.

Le collège électoral des sénateurs représentant les Français établis hors de France serait ainsi étendu à l'ensemble des conseillers consulaires, auxquels seraient adjoints des délégués consulaires, et non plus limité aux membres élus de l'AFE ( article 33 bis ), faisant ainsi droit aux critiques sur l'étroitesse du collège électoral de cette catégorie de sénateurs.

Les délégués consulaires, élus directement par les électeurs en même temps et sur les mêmes listes que les conseillers consulaires, dans les circonscriptions comptant une population française importante, ne détiendraient pas un mandat électoral mais auraient simplement pour fonction de participer à l'élection des sénateurs tous les trois ans ( articles 30 à 33 ), avec les députés élus par les Français établis hors de France et les conseillers consulaires.


* 1 CC, 3 avril 2003, n° 2003-468 DC.

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