EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 16 juillet 2013 sous la présidence de M. Jean-Louis Carrère, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a procédé à l'examen du présent projet de loi.

Mme Michelle Demessine, rapporteure . - Monsieur le Président, mes chers collègues, vous m'avez chargée de rapporter devant vous une convention relative à la coopération entre la France et le gouvernement de la région wallonne du Royaume de Belgique sur l'accueil des personnes handicapées. Cela peut paraître étonnant de devoir passer un accord international avec la Wallonie. Mais nous assistons depuis plusieurs années à une situation assez paradoxale : un nombre croissant d'enfants, de jeunes ou d'adultes handicapés sont contraints d'aller vivre dans des établissements belges, faute de place en France et aussi, il ne faut pas se le cacher, en raison de l'attrait des établissements belges réputés pour leur accueil et leur prise en charge du handicap et notamment de l'autisme.

Quelle est l'ampleur du phénomène ? C'est difficile de le savoir faute d'un dispositif adapté pour le mesurer. C'est d'ailleurs l'un des objets de la convention. On estime environ à 6.700 personnes handicapées françaises aujourd'hui accueillies dans des établissements belges. Ces familles vont chercher en Belgique des places disponibles, des structures qui sont dans l'ensemble plus petites, plus médicalisées, plus encadrées, et plus souples. Il y a en Belgique une véritable tradition de l'accompagnement des personnes handicapées et singulièrement des autistes. Ce phénomène est évidemment facilité par la proximité et la langue, il ne concerne cependant pas seulement les départements riverains, mais selon les données disponibles, plus de 42 des départements français.

Que plusieurs milliers de familles choisissent de placer leurs proches dans des structures géographiquement éloignées de leur domicile a suscité la perplexité, parce que c'est souvent une source de souffrance pour ces familles de se couper d'un enfant, c'est une cause de longs trajets, souvent mal pris en charge, en plus dans le cas de l'autisme, ces distances ne permettent pas une implication quotidienne des familles dans l'accompagnement des enfants, alors que l'on sait que la présence des parents est nécessaire aux progrès des enfants.

Du point de vue du financement de la politique du handicap, la situation est également paradoxale. Du côté français la Sécurité sociale prend en charge des familles françaises, qui s'adressent pour une large part à des structures privées belges. Certaines de ces structures ont été même créées pour répondre à cette demande française. Autrement dit, on a un secteur privé qui se développe en Belgique grâce au financement de la Sécurité sociale française. A un moment où le gouvernement cherche à redresser la situation de l'emploi, où la montée du chômage grève le financement de la Sécurité sociale, la situation est pour le moins paradoxale.

Ces établissements sont de qualité souvent très satisfaisante mais parfois inégale, et en tout cas, peu contrôlées. Un des objets de cette convention est de créer des inspections communes avec les autorités belges.

Du côté belge, cet afflux en provenance de la France déstabilise quelque peu le dispositif belge, dans certains cas les familles françaises s'adressent à des structures publiques belges financées par l'impôt alors que certaines familles belges ne trouvent plus de place dans ces structures.

Dans ce contexte, cet accord permet premièrement un échange de données sur les personnes accueillies en Belgique, cela permettra notamment de mieux estimer le besoin de places en France, et deuxièmement de faciliter la vie des Français pris en charge en Belgique en mettant en place un dispositif unique de conventionnement pour les personnes financées par l'Assurance maladie, et une convention type pour les personnes financées par les conseils généraux. On espère que cela permettra à terme à la fois de simplifier les procédures et de réduire les inégalités de prise en charge. Cet accord permet troisièmement une coordination dans l'inspection des établissements entre les autorités belges et françaises. Nos inspections permettront d'épauler les inspections belges pour s'assurer de la qualité de la prise en charge, notamment dans le secteur privé.

Cet accord, qui a été préparé par un travail de réflexion de Mme Gallez en 2008, va dans le bon sens. Nous avons toutes les raisons de le voter.

Il faut souligner que, à l'origine de ce phénomène il y a le manque de places en France. Le gouvernement actuel, comme le gouvernement précédent, essaie de remédier à la situation avec un plan pluriannuel de création de places. Il faut bien savoir que la France a pris beaucoup de retard dans le domaine du handicap et notamment dans le domaine de l'autisme et dans le domaine de l'accueil des personnes âgées. Derrière ce retard, il y a la souffrance des familles. Nous vivons évidemment une période difficile sur le plan budgétaire, mais il y a dans ce domaine des besoins considérables.

Sous réserve de ces observations, que j'aurais voulu évidemment plus longues, car je pense qu'il y a là un vrai sujet, si je m'en tiens à l'examen de cette convention internationale, je ne peux que vous recommander de l'adopter.

Je souhaite néanmoins que l'on adresse à la commission des affaires sociales un message pour qu'elle suive avec attention l'application de cette convention.

M. Daniel Reiner. - Je savais que ce phénomène concernait la Lorraine mais j'ignorais qu'elle touchait également d'autres départements. Cette situation met en lumière la faiblesse de notre capacité d'accueil des handicapés, mais aussi des personnes âgées. Nombre de retraités vont s'installer dans des maisons en Belgique, qui sont bien meilleur marché.

M. Jean-Louis Carrère, président . -Le coût et la qualité des EPAD dépendent très largement de la politique menée par les départements. Dans les Landes, une politique volontariste du conseil général a conduit à une réduction substantielle du prix de journée pour des établissements de très bonne qualité.

M. Alain Gournac. - Dans mon département où j'ai eu la responsabilité de ces dossiers, nous avons construit de nombreux établissements sans pouvoir pour autant répondre à l'intégralité de la demande. Force est de constater que les maisons de retraite belges sont 15 à 17 % moins chères.

M. Gilbert Roger. - J'observe la même situation en Seine-Saint-Denis. Il n'y a pas assez de places pour accueillir les handicapés et les autistes. Nous avons construit un équipement destiné à ces derniers après 7 ans de pure négociation avec les administrations. Nous avons même dû affronter l'opposition des riverains. Ce sujet sensible mériterait un véritable débat national.

M. Alain Néri. - La France doit créer des accueils de qualité pour les personnes dépendantes, les handicapés et les autistes à des prix convenables. Nous avons un retard considérable dans ce domaine. En revanche, la réussite de la politique de maintien à domicile a permis, il faut le reconnaître, de repousser l'âge moyen d'entrée dans les maisons de retraite. Mais nous sommes maintenant confrontés à un nouveau problème. Avec une entrée vers les 86 ans dans des maisons de retraite, ces personnes âgées ont elles-mêmes des enfants à la retraite, avec un pouvoir d'achat limité et des difficultés de financement sensibles. La commission des affaires sociales du Sénat devrait suivre ce sujet avec attention et nous devrions pouvoir avoir le débat national sur la dépendance que le Président de la République s'était engagé à ouvrir.

M. André Vallini. - Il me semble que François Hollande a déjà indiqué que ce débat s'ouvrirait à l'automne.

M. Marcel-Pierre Cléach. - Dans mon département, j'ai pu, grâce à la double casquette de responsable de l'Office HLM et de responsable des politiques en faveur des personnes âgées, favoriser la création d'établissements de qualité à des prix convenables.

M. Jean-Claude Peyronnet. - La difficulté c'est moins le financement de l'investissement que les coûts de fonctionnement.

M. Jean-Louis Carrère. - C'est vrai. D'ailleurs le prix de journée varie du simple au double selon les départements.

Mme Michelle Demessine. - La question de l'autisme et celle des personnes âgées ne doivent pas être confondues. Les problématiques sont différentes, les modalités de financement le sont également. Je suis heureuse que cette convention ait été l'occasion d'un débat sur ce thème. Ce débat doit être pris en charge par la commission des affaires sociales. En attendant, je vous invite à adopter cette convention sous une forme simplifiée de façon à accélérer sa ratification.

Puis la commission a adopté le projet de loi et proposé qu'il fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifié en séance publique.

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