EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er - Définition de la politique pour l'égalité entre les femmes et les hommes

De façon symbolique, le présent projet de loi s'ouvre sur un article 1 er qui tend à définir la politique pour l'égalité entre les femmes et les hommes.

Selon les termes proposés par le projet de loi, il appartiendrait à l'État, aux collectivités territoriales ainsi qu'à leurs établissements publics de mettre en oeuvre une politique pour l'égalité entre les femmes et les hommes selon une approche intégrée . Cette politique devrait s'accompagner d'une exigence d'évaluation des actions menées.

Cette politique devrait comporter notamment :

- des actions visant à garantir l'égalité professionnelle et la mixité dans les métiers ;

- des actions de lutte contre la précarité des femmes ;

- des actions tendant à faciliter un partage équilibré des responsabilités parentales ;

- des actions pour mieux articuler les temps de vie ;

- des actions destinées à prévenir les stéréotypes sexistes ;

- des actions de prévention et de protection contre les atteintes à la dignité des femmes ;

- des actions de prévention et de protection permettant de lutter contre les violences faites aux femmes.

Ces objectifs, revêtus de la force symbolique de la loi, ont vocation à traduire l'engagement du législateur en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes. Ils guideront l'action des collectivités territoriales tout comme celle des établissements publics dans ce domaine.

Votre commission a adopté l'article 1 er sans modification .

TITRE IER - DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES DANS LA VIE PROFESSIONNELLE

Article 2 (art. L. 531-1, L. 531-4 et L. 532-2 du code de la sécurité sociale) - Réforme du complément de libre choix d'activité

L'examen de ces dispositions a été délégué au fond à la commission des affaires sociales.

Votre commission a adopté deux amendements de la commission des affaires sociales.

Elle a adopté l'article 2 ainsi modifié .

Article 3 (art. 8 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005) - Interdiction des soumissionner aux marchés publics

Cet article complète les cas d'interdictions de soumissionner à un marché public prévus à l'article 8 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics. 17 ( * )

Il retient tout d'abord comme motif d'interdiction d'accès aux marchés publics et aux accords-cadres, la condamnation définitive, et depuis moins de cinq ans pour délit de discrimination , prévu à l'article 225-1 du code pénal 18 ( * ) et, en application de l'article L. 1146-1 du code du travail, pour méconnaissance des dispositions relatives à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes prévues aux articles L. 1142-1 et L. 1142-2 du même code 19 ( * ) .

L'article 8 de l'ordonnance de 2005 prévoit déjà un certain nombre d'interdictions de soumissionner, liées à une condamnation définitive pour des crimes et délits contre les personnes, les biens, la Nation, l'État et la paix publique, tels que le trafic de stupéfiants, l'escroquerie, l'atteinte au secret professionnel, l'abus de confiance, le blanchiment, le terrorisme, les atteintes au secret de la défense nationale, la corruption et le trafic d'influence, l'entrave à l'exercice de la justice, l'association de malfaiteurs. Il prévoit également d'autres interdictions liées à des condamnations pour infractions au code du travail comme le travail dissimulé, le marchandage et le prêt illicite de main d'oeuvre ou l'emploi d'étranger sans titre de travail.

Le troisième cas d'interdiction de soumissionner à un marché public prévu par le projet de loi est lié au non-respect de l'obligation qui pèse sur les entreprises de plus de 50 salariés, d'engager des négociations annuelles sur les objectifs d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l'entreprise, prévue à l'article L. 2242-5 du code du travail. Dans ce derniers cas, la situation pourra être régularisée jusqu'à la date de soumission.

Concrètement, cette obligation d'avoir engagé une négociation sur l'égalité professionnelle se matérialisera par l'ajout, dans les pièces constitutives du dossier de candidature à un marché public, d'une déclaration sur l'honneur qui atteste du respect de la législation en matière d'égalité professionnelle 20 ( * ) .

L'obligation de négociation sur les objectifs d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes

L'article L. 2242-5 du code du travail prévoit que l'employeur engage chaque année une négociation sur les objectifs d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l'entreprise, ainsi que sur les mesures permettant de les atteindre. Cette négociation porte sur les conditions d'accès à l'emploi, à la formation professionnelle et à la promotion professionnelle, les conditions de travail et d'emploi et en particulier celles des salariés à temps partiel, et l'articulation entre la vie professionnelle et les responsabilités familiales. Cette obligation pèse sur les entreprises de 50 salariés et plus.

L'article L. 2242-5-1 prévoit que les entreprises qui ne sont pas couvertes par un accord visé à l'article L. 2242-5 ou à défaut par un plan d'action unilatéral, sont soumises à une pénalité pouvant aller jusqu'à 1 % des rémunérations et gains versés aux salariés, au cours des périodes durant lesquelles l'entreprise n'est pas couverte par l'accord ou le plan d'action. Dans les entreprises de plus de 300 ce défaut d'accord est attesté par un procès-verbal de désaccord.

En mai 2013, plus de 65 % des entreprises de plus de 1 000 salariés et 36 % des entreprises de plus de 300 salariés étaient couvertes par un accord ou un plan d'action au sens des articles L. 2242-5 et L. 2242-5-1 du code du travail.

Par ailleurs, le Gouvernement a conclu, le 9 avril 2013, seize conventions avec les dirigeants réunis des sociétés Accenture, Accor, Air France, Areva, BNP Paribas, Carrefour, Coca-Cola, EADS, EDF, GDF, La Poste, Microsoft, Schneider Electric, SNCF, TOTAL, Véolia par lesquelles les groupes s'engagent à accompagner les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME), dans la mise en oeuvre de l'égalité entre les femmes et les hommes.

Les trois nouvelles interdictions créées par le texte sont soumises au respect des règles européennes qui régissent les marchés publics.

L'article 45 de la directive n° 2004/18/CE du 31 décembre 2004 21 ( * ) prévoit les cas dans lesquels la situation personnelle du candidat ou du soumissionnaire justifie de l'exclure de la participation à un marché public. Il dispose que « peut être exclu de la participation au marché, tout opérateur économique [...] :

- Qui a fait l'objet d'un jugement ayant autorité de chose jugée [...] constatant un délit affectant sa moralité professionnelle ;

- Qui en matière professionnelle, a commis une faute grave constatée par tout moyen dont les pouvoirs adjudicateurs pourront justifier ».

L'exposé des motifs de la directive (§ 43) précise que le non-respect des dispositions nationales transposant les directives 2000/78/CE 22 ( * ) et 76/207/CEE 23 ( * ) en matière d'égalité de traitement des travailleurs, qui a fait l'objet d'un jugement à caractère définitif ou à une autre décision ayant des effets équivalents, « peut être considéré comme un délit affectant la moralité professionnelle de l'opérateur économique ou comme une faute grave ».

Dès lors, les condamnations pour discrimination (article 225-1 du code pénal) ou pour irrespect des dispositions relatives à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (articles L. 1142-1 et L. 1142-2 du code du travail), prévues par le projet de loi comme nouveaux cas d'exclusion de la commande publique entrent dans le champ des exclusions autorisées par le droit communautaire.

Quant au troisième cas d'exclusion, le manquement à l'obligation de négociation sur les objectifs d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l'entreprise, il pourrait constituer une « faute grave », au sens du droit communautaire.

La Commission européenne laisse aux États membres le soin de déterminer le contenu de cette notion, et si le respect de certaines obligations sociales entre dans son champ.

Le législateur s'est d'ores et déjà prononcé sur le caractère fautif du manquement à l'obligation de négociation de l'article L. 2242-5, puisqu'il a prévu à l'article L. 2242-5-1 du code du travail que les entreprises qui ne la respecteraient pas encourent une pénalité pouvant s'élever à 1 % de leur masse salariale.

Si votre commission approuve la mise en place de ces mesures fortes, qui permettront de favoriser l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, elle n'en demeure pas moins attentive à la nécessité de les proportionner à l'objectif poursuivi, et de concilier cet objectif avec d'autres principes constitutionnellement garantis.

Selon les données recensées par l'observatoire économique de l'achat public, le montant des marchés publics en 2011 représentait 87,8 milliards d'euros en 2011.

Il apparait donc essentiel à votre commission que le Gouvernement, comme il s'y est engagé dans l'étude d'impact jointe au projet de loi 24 ( * ) , accompagne les entreprises, en particulier les plus petites, dans la mise en oeuvre de leur obligation de négociation professionnelle en matière d'égalité entre les femmes et les hommes, pour éviter qu'elles ne soient trop durement affectées par ces nouvelles dispositions.

S'agissant du manquement à l'obligation de négociation, il lui semble donc important, comme le prévoit cet article, que les entreprises puissent régulariser leur situation. Celles qui, au 31 décembre de l'année précédant le lancement de la procédure de marché public, ne l'auraient pas réalisée, pourront régulariser leur situation jusqu'à la date de soumission, c'est-à-dire jusqu'au moment de la remise des candidatures.

Sous l'ensemble de ces réserves, votre commission a adopté l'article 3 sans modification .

Article 4 (art. 18 de la loi n°2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises ; art. 5 de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations) - Modification du régime du contrat de collaboration libérale

L'examen de ces dispositions a été délégué au fond à la commission des affaires sociales.

Votre commission a adopté un amendement de la commission des affaires sociales.

Elle a adopté l'article 4 ainsi modifié .

Article 5 - Expérimentation en matière de financement des prestations de service à la personne

L'examen de ces dispositions a été délégué au fond à la commission des affaires sociales.

Votre commission a adopté un amendement de la commission des affaires sociales.

Elle a adopté l'article 5 ainsi modifié .

Article 5 bis [nouveau] (art. L. 1132-1 du code du travail) - Sanction des discriminations professionnelles fondées sur la parentalité

Cet article additionnel a été inséré par votre commission par la voie d'un amendement de la commission des affaires sociales.

Votre commission a adopté l'article 5 bis ainsi rédigé .

Article 5 ter [nouveau] (art. L. 2323-47 et L. 2323-57 du code du travail) - Extension du champ du rapport de situation comparée à la sécurité et à la santé au travail

Cet article additionnel a été inséré par votre commission par la voie d'un amendement de la commission des affaires sociales.

Votre commission a adopté l'article 5 ter ainsi rédigé .


* 17 Ces dispositions s'inspirent pour partie d'un rapport de l'inspection générale des affaires sociales de janvier 2013 : « La politique d'égalité professionnelle en France - Éléments de comparaison avec le Québec, la Belgique et la Suède ».

* 18 Ces discriminations résultent de distinctions opérées entre les personnes en raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs moeurs, de leur orientation ou identité sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Cette liste est commune aux discriminations entre personnes physiques et entre personnes morales. À cette liste s'ajoute, pour les personnes physiques, la discrimination fondée sur l'état de grossesse.

* 19 L'article L. 1142-1 du code du travail prévoit que constituent une méconnaissance des dispositions relatives à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes  : le fait de mentionner dans une offre d'emploi le sexe ou la situation de famille du candidat recherché, refuser d'embaucher ou de mettre fin au contrat de travail d'une personne en considération du sexe, de la situation de famille ou de grossesse d'une personne, de prendre en considération du sexe ou de la grossesse d'une personne des mesures en matière d'affectation, de promotion, de rémunération...

L'article L. 1142-1 fixe les conditions dans lesquelles il peut être dérogé aux interdictions prévues à l'article L. 1142-1.

* 20 Étude d'impact annexée au projet de loi page 39.

* 21 Directive n° 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services.

* 22 Directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail (JO L 303 du 2.12.2000, p. 16).

* 23 Directive76/207/CEE du Conseil du 9 février 1976 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (JO L 39 du 14.2.1976, p. 40). Directive modifiée par la directive 2002/73/CE du Parlement européen et du Conseil (JO L 269 du 5.10.2002, p.15).

* 24 Étude d'impact annexée au projet de loi page 39.

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