EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. UNE RÉORGANISATION INSATISFAISANTE DES RYTHMES SCOLAIRES AU SERVICE D'OBJECTIFS PÉDAGOGIQUES VAGUES

A. DES ÉLÉMENTS DE DIAGNOSTIC PARTAGÉS QUE DEVRAIT REPRENDRE TOUTE RÉFORME

1. La reconnaissance du rôle essentiel des collectivités territoriales

Le ministère de l'Éducation nationale souffre d'être une administration construite pour assurer un service uniforme dans le respect d'une réglementation très extensive et détaillée. Le culte de la circulaire y perdure alors que les systèmes éducatifs les plus performants ont su construire une autre organisation fondée sur le contrat et l'initiative locale.

Cette logique de réglementation, répondant à la tradition centralisatrice de notre pays, tend à transformer l'évaluation en contrôle et à privilégier ainsi le respect formel des textes sur une régulation des pratiques en fonction des besoins et des progressions des élèves.

L'école en tant qu'institution se présente comme un système pyramidal, très hiérarchisé et sans acteurs véritablement autonomes. Le manque criant de concertation avec les collectivités territoriales et l'inutilité de structures comme les conseils départementaux de l'éducation nationale (CDEN) et les conseils académiques de l'éducation nationale (CAEN) sont régulièrement pointés du doigt tant par les experts sociologues de l'éducation que par les élus locaux.

Plutôt que d'impulser des grands projets ministériels imposés par des voies hiérarchiques, il convient de s'appuyer sur les nombreuses initiatives nées aux échelons locaux, dans les établissements et dans les collectivités, pour les évaluer et en tirer des conséquences utiles pour l'ensemble du système éducatif.

Concertation, respect des initiatives locales et évaluation sont les trois piliers qui devraient supporter toute rénovation cohérente et efficace du système éducatif. Un très large accord peut être trouvé sur ce point. C'est un élément de diagnostic partagé, dont la portée est à la fois générale et particulièrement importante pour la mise en place d'une réforme des rythmes scolaires qui ne peut réussir sans l'investissement des communes. C'était déjà, en 2010, le sens des conclusions de votre rapporteur au nom de la mission commune d'information du Sénat sur l'organisation territoriale du système scolaire, présidée par notre ancien collègue Serge Lagauche.

2. La rupture souhaitable avec le paradoxe français en repensant le calendrier scolaire

Votre rapporteur estime qu'un consensus peut être également trouvé pour déplorer le paradoxe français des rythmes scolaires. Les élèves français ont le nombre de jours d'école le plus faible des pays de l'OCDE : 144 jours contre 187 en moyenne. Ils souffrent à la fois d'une année scolaire très courte et d'une journée scolaire très lourde par rapport aux autres enfants des pays développés. Sur 36 semaines de cours, se concentre un volume horaire annuel d'enseignement très important, qui s'élève à 864 heures par an contre 774 heures à 821 heures, en moyenne, selon l'âge des écoliers, au sein des pays de l'organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE).

Pourtant, et c'est là que se noue le paradoxe, l'accumulation de la charge d'enseignement ne parvient pas à garantir de bons résultats scolaires aux élèves français. Les évaluations du programme international de recherche en lecture scolaire ( PIRLS) et du programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) démontrent que la surcharge de l'année scolaire des écoliers français est sous-optimale. Des pays aussi différents que le Japon ou la Finlande conjuguent de meilleures performances avec des calendriers plus étalés et moins denses.

C'est le signe qu'une extrême concentration du temps d'enseignement est inadaptée et préjudiciable aux apprentissages. Ce constat est unanimement partagé, des scientifiques spécialistes des rythmes de l'enfant aux enseignants, en passant par les parents d'élèves.

Pour résoudre le paradoxe français, il faut impérativement agir simultanément sur tous les segments temporels pertinents : la journée, la semaine et l'année.

La question du rythme annuel est cruciale. Il convient de rouvrir le dossier de la durée des vacances scolaires et de leur zonage en tenant compte de l'impact des mesures nouvelles sur les industries touristiques, notamment dans les zones littorales et de montagne. C'est nécessaire pour trouver la bonne articulation entre trois ordres de temporalité distincts : le temps biologique des enfants et des enseignants, le temps économique et social, le temps climatique.

3. Des critiques recevables sur la semaine de quatre jours

Un consensus s'est formé, depuis 2008, sur la nécessité de revoir l'organisation du temps scolaire à l'école primaire, qui n'offrait pas un cadre optimal à l'épanouissement cognitif des enfants.

L'Académie nationale de médecine a souligné dans son rapport sur l'aménagement du temps scolaire et la santé de l'enfant, adopté le 19 janvier 2010, le risque de désynchronisation des enfants dû à la généralisation de la semaine de quatre jours. Précisément, elle s'est inquiétée d'une possible altération du fonctionnement de leur horloge biologique dès lors qu'elle n'est plus en phase avec les facteurs de l'environnement. Cette désynchronisation entraîne fatigue et difficultés de concentration qui nuisent aux apprentissages. L'Académie a nettement critiqué à cet égard le rôle néfaste de la semaine de quatre jours sur la vigilance et les performances des enfants. Les études de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) vont dans le même sens.

L'inspection générale de l'éducation nationale (IGEN) a régulièrement alerté sa tutelle sur les inconvénients pédagogiques de la semaine de quatre jours en raison du resserrement du temps scolaire. Elle évoque une baisse d'attention des enfants, la mise à l'écart de matières périphériques comme l'éducation artistique pour finir les programmes et la disparition du temps de concertation entre enseignants.

Il convient de noter qu'en 2008, le ministre de l'éducation Xavier Darcos n'avait pas imposé la semaine de quatre jours. Son objectif était avant tout de développer l'aide personnalisée et ensuite de libérer le samedi pour les familles. Les conseils d'école conservaient la faculté de répartir l'enseignement sur huit ou neuf demi-journées.

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