EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. L'OBJECTIF DE LA PROPOSITION DE LOI : METTRE EN oeUVRE L'ENGAGEMENT ABOLITIONNISTE DE LA FRANCE

A. L'ENGAGEMENT ABOLITIONNISTE DE LA FRANCE

1. Les différents régimes juridiques relatifs à la prostitution adoptés par la France au cours de son histoire
a) Des hésitations récurrentes entre une plus ou moins grande tolérance vis-à-vis de la prostitution et son interdiction totale

La prostitution a de façon constante suscité un mélange de crainte, de réprobation morale et d'acceptation tacite au cours de l'histoire de France. Accusées de véhiculer toutes sortes de maux, notamment sanitaires, pour les clients, d'encourager certains vices et de porter atteinte à l'ordre public, les personnes prostituées étaient en même temps considérées comme l'un des éléments indispensables au bon fonctionnement du corps social. L'ambivalence des attitudes face à la prostitution explique la variabilité du cadre juridique dans lequel celle-ci a évolué. La France a ainsi connu des hésitations entre une tolérance plus ou moins grande et une volonté d'éradiquer un phénomène considéré comme dangereux et source de désordres.

Des raisons religieuses ont parfois conduit à vouloir interdire la prostitution. C'est ce que tente Louis IX en 1254. Face aux difficultés d'application de cette mesure, il fait le choix, en 1256, de la tolérer tout en édictant un certain nombre de règles visant notamment à l'éloigner hors des murs de la cité. Les tentatives d'éradication de la prostitution ont également pu avoir des justifications sanitaires . La syphilis est identifiée en tant que maladie à la fin du XV e siècle. En 1561, l'ordonnance d'Orléans fait de la prostitution une activité illicite. Enfin, le souci de maintenir l'ordre et d'assurer le respect des bonnes moeurs dans l'espace public conduit par la suite Louis XIV à ordonner l'enfermement des personnes prostituées à la Salpétrière. En 1778 est mise en place la police des moeurs avant que ne soit établi, à Paris, en 1796, un registre de la prostitution.

b) L'échec du régime réglementariste mis en place au XIXème siècle

Le Consulat pose en 1802 les bases d'un système réglementariste fondé sur l'autorisation des maisons closes, le fichage et la visite médicale obligatoire pour les personnes prostituées. Qu'elles se prostituent dans la rue ou dans des maisons closes, les femmes font l'objet d'un contrôle policier, administratif et médical étroit, destiné à éviter les troubles à l'ordre public ainsi qu'à endiguer la propagation des maladies vénériennes.

Le modèle réglementariste est théorisé par un médecin hygiéniste Alexandre Parent-Duchâtelet, membre du conseil de salubrité de la ville de Paris, qui mène une longue étude sur la prostitution dans les années 1830 3 ( * ) . S'inscrivant dans le droit fil de la pensée augustinienne du « mal nécessaire » , Parent-Duchâtelet estime que « les prostituées sont aussi inévitables, dans une agglomération d'hommes, que les égouts, les voiries et les dépôts d'immondices » . Selon lui, « elles contribuent au maintien de l'ordre et de la tranquillité dans la société » . Comme le souligne Alain Corbin dans l'étude qu'il a consacrée à la prostitution, « en accord avec l'organicisme régnant, Parent-Duchâtelet considère que la prostitution est un phénomène excrémentiel indispensable qui protège le corps social de la maladie » 4 ( * ) .

Toujours selon Alain Corbin, le système prostitutionnel repose alors sur trois principes essentiels : la prostitution doit être cantonnée dans un milieu clos ; ce milieu clos, invisible au reste de la société, doit être placé sous la surveillance constante de l'administration ; il doit être enfin rigoureusement hiérarchisé et cloisonné , d'où le rôle essentiel de la « dame de maison ».

Le modèle réglementariste est imité par plusieurs autres pays européens sous le nom de « French system ». Ainsi, le Royaume-Uni l'adopte en 1866 dans les villes de garnison et les ports avant de l'étendre en 1869 à l'ensemble du territoire par les Contagious disease acts . Il est cependant rapidement contesté, notamment en raison de son inefficacité . L'existence des maisons closes n'empêche en aucun cas le développement de la prostitution de rue et les contrôles sanitaires exercés sur les personnes prostituées ne permettent pas d'endiguer l'extension de maladies vénériennes telles que la syphilis. Le mouvement abolitionniste, qui vise en premier lieu à mettre fin à la réglementation de la prostitution, se développe alors, notamment sous l'influence d'organisations féministes. Au Royaume-Uni, la féministe Joséphine Butler obtient ainsi l'abolition des Contagious disease acts en 1886. En France, des défenseurs des droits de l'homme tels que Victor Schoelcher et Victor Hugo, tous deux sénateurs, s'élèvent également contre le système réglementariste. Ce dernier écrit d'ailleurs dans « Les Misérables » : « on dit que l'esclavage a disparu de la civilisation européenne. C'est une erreur. Il existe toujours, mais il ne pèse plus que sur la femme et il s'appelle prostitution » .

Le 13 avril 1946, la loi dite « Marthe Richard » , du nom d'une ancienne prostituée devenue conseillère municipale de Paris, prévoit la fermeture des maisons closes sur l'ensemble du territoire métropolitain 5 ( * ) . Ce sont près de 1 500 structures qui sont concernées, dont 177 à Paris. La France n'en demeure pas moins un pays réglementariste, ce dont témoigne l'instauration par cette même loi d'un fichier sanitaire et social des personnes prostituées.

2. L'évolution du positionnement abolitionniste de la France
a) L'adoption d'un régime abolitionniste en 1960

C'est en 1960, lorsqu'elle ratifie la convention de l'Organisation des Nations unies (ONU) du 2 décembre 1949 pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui, que la France adopte définitivement un régime abolitionniste 6 ( * ) . Son article 6 stipule en effet que « chacune des Parties à la présente Convention convient de prendre toutes les mesures nécessaires pour abroger ou abolir toute loi, tout règlement et toute pratique administrative selon lesquels les personnes qui se livrent ou sont soupçonnées de se livrer à la prostitution doivent se faire inscrire sur des registres spéciaux, posséder des papiers spéciaux, ou se conformer à des conditions exceptionnelles de surveillance ou de déclaration ».

La convention établit un lien direct entre prostitution et traite des êtres humains puisque son préambule affirme que « la prostitution et le mal qui l'accompagne, à savoir la traite des êtres humains en vue de la prostitution, sont incompatibles avec la dignité et la valeur de la personne humaine et mettent en danger le bien-être de l'individu, de la famille et de la communauté » .

La France a tiré les conséquences en droit interne de la ratification de la convention en adoptant, le 25 novembre 1960, deux ordonnances qui renforcent les dispositions relatives à la lutte contre le proxénétisme, suppriment le fichage sanitaire et créent des services de prévention et de réinsertion sociale (SPRS), structures destinées à héberger et accompagner les personnes prostituées 7 ( * ) .

Dans ce cadre abolitionniste, la prostitution est une activité licite et informelle . Seuls son exploitation - à travers le proxénétisme - et les troubles qu'elle peut causer à l'ordre public - par le biais du racolage - sont punis par la loi. Celle-ci ne donne aucune définition de la prostitution, laissant à la jurisprudence le soin de déterminer ce qui en relève ou non. L'acception la plus couramment utilisée a ainsi été formulée par la Cour de cassation en 1996. Cette dernière a défini la prostitution comme le fait « de se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui » 8 ( * ) .

Définition légale du proxénétisme

Art. 225-5 du code pénal : « Le proxénétisme est le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit :

1° D'aider, d'assister ou de protéger la prostitution d'autrui ;

2° De tirer profit de la prostitution d'autrui, d'en partager les produits ou de recevoir des subsides d'une personne se livrant habituellement à la prostitution ;

3° D'embaucher, d'entraîner ou de détourner une personne en vue de la prostitution ou d'exercer sur elle une pression pour qu'elle se prostitue ou continue à le faire.

Le proxénétisme est puni de sept ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende. »

Définition légale du racolage

Art. 225-10-1 du code pénal : « Le fait, par tout moyen, y compris par une attitude même passive, de procéder publiquement au racolage d'autrui en vue de l'inciter à des relations sexuelles en échange d'une rémunération ou d'une promesse de rémunération est puni de deux mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende. »

b) Les évolutions récentes : le renforcement de la lutte contre la traite des êtres humains et la réaffirmation de l'engagement abolitionniste de la France

Au début des années 2000, la France a renforcé son arsenal répressif en matière de prostitution et adopté des mesures propres à la lutte contre la traite des êtres humains .

La loi du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale 9 ( * ) pénalise le recours à la prostitution auprès de personnes mineures de moins de 18 ans et la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure étend cette disposition aux personnes vulnérables 10 ( * ) . Est désormais puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende « le fait de solliciter, d'accepter ou d'obtenir, en échange d'une rémunération ou d'une promesse de rémunération, des relations de nature sexuelle » de la part d'un mineur ou d'une personne présentant une vulnérabilité particulière due à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse 11 ( * ) . La loi précitée du 18 mars 2003 fait par ailleurs du racolage, auparavant simple contravention, un délit , en y incluant expressément le racolage dit « passif ».

Elle introduit enfin dans le code pénal l'infraction de traite des êtres humains . Cette évolution fait suite à la ratification, en 2002, du Protocole de Palerme du 15 novembre 2000, qui enjoint les États parties à introduire l'incrimination de traite des êtres humains dans leur droit pénal. Enfin, la loi du 5 août 2013 12 ( * ) a transposé la directive du 5 avril 2011 qui vise à renforcer la lutte contre la traite des êtres humains ainsi qu'à mieux en protéger les victimes 13 ( * ) .

Définition légale de la traite des êtres humains

Art. 225-4-1 du code pénal : « I. - La traite des êtres humains est le fait de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l'héberger ou de l'accueillir à des fins d'exploitation dans l'une des circonstances suivantes :

1° Soit avec l'emploi de menace, de contrainte, de violence ou de manoeuvre dolosive visant la victime, sa famille ou une personne en relation habituelle avec la victime ;

2° Soit par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de cette personne ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;

3° Soit par abus d'une situation de vulnérabilité due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, apparente ou connue de son auteur ;

4° Soit en échange ou par l'octroi d'une rémunération ou de tout autre avantage ou d'une promesse de rémunération ou d'avantage.

L'exploitation mentionnée au premier alinéa du présent I est le fait de mettre la victime à sa disposition ou à la disposition d'un tiers, même non identifié, afin soit de permettre la commission contre la victime des infractions de proxénétisme, d'agression ou d'atteintes sexuelles, de réduction en esclavage, de soumission à du travail ou à des services forcés, de réduction en servitude, de prélèvement de l'un de ses organes, d'exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d'hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre la victime à commettre tout crime ou délit.

La traite des êtres humains est punie de sept ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende.

II. - La traite des êtres humains à l'égard d'un mineur est constituée même si elle n'est commise dans aucune des circonstances prévues aux 1° à 4° du I.

Elle est punie de dix ans d'emprisonnement et de 1 500 000 € d'amende.

Entrée en vigueur en France en 2008, la convention du 16 mai 2005 du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, dite « convention de Varsovie » , attache une importance particulière à la protection des victimes et à la sauvegarde de leurs droits. Elle précise en particulier que les victimes de la traite doivent disposer d'un délai de trente jours pour prendre la décision, en dehors de l'influence de leur réseau, de coopérer ou non avec les autorités. Elle prévoit également que leur soit accordé un permis de séjour renouvelable lorsque leur situation personnelle ou leur participation à une enquête judiciaire l'exige et que leur droit à une indemnisation soit garanti.

Le suivi de la mise en oeuvre de cette convention est assuré par un groupe de quinze experts sur la lutte contre la traite des êtres humains, le Greta . Le rapport d'évaluation publié par ce groupe en janvier 2013 note les efforts réalisés par la France, notamment en matière de coopération internationale et de confiscation des biens des réseaux. Il salue également la création d'une structure interministérielle, la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains, la Miprof 14 ( * ) , tout en insistant sur la nécessité pour celle-ci de disposer de l'autorité et des ressources nécessaires à l'exercice de ses missions.

Le rapport souligne en outre la nécessité de renforcer les dispositifs d'identification et de prise en charge des victimes de la traite et de clarifier l'articulation entre l'infraction de traite et celle des autres types d'exploitation afin de respecter pleinement les droits des victimes et de sanctionner à leur juste niveau les trafiquants. Votre commission spéciale a été alertée à plusieurs reprises sur ce point, notamment par la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH). L'attention portée à ce que l'incrimination de traite soit plus systématiquement retenue par les parquets constitue d'ailleurs l'une des 23 mesures figurant dans le plan d'action national contre la traite des êtres humains pour les années 2014 à 2016 15 ( * ) , dont la mise en oeuvre repose en grande partie sur l'adoption de la présente proposition de loi.

Parallèlement à ces efforts accrus en matière de lutte contre la traite des êtres humains, la France a réaffirmé son engagement abolitionniste avec l'adoption par l'Assemblée nationale, en décembre 2011, d'une proposition de résolution 16 ( * ) . Ce texte fait suite à la publication d'un rapport parlementaire prenant explicitement position en faveur de la pénalisation des clients de la prostitution 17 ( * ) . Il traduit clairement l'évolution du sens donné au terme abolitionnisme : il ne s'agit plus d'abolir la réglementation mais de se fixer pour objectif, « à terme, une société sans prostitution ».

Proposition de résolution
réaffirmant la position abolitionniste de la France en matière de prostitution adoptée le 6 décembre 2011 par l'Assemblée nationale

« L'Assemblée nationale, [...] considérant que la non-patrimonialité du corps humain est l'un des principes cardinaux de notre droit et qu'il fait obstacle à ce que le corps humain soit considéré, en tant que tel, comme une source de profit ;

Considérant que les agressions sexuelles, physiques et psychologiques qui accompagnent le plus souvent la prostitution portent une atteinte particulièrement grave à l'intégrité du corps des personnes prostituées ;

Considérant que la prostitution est exercée essentiellement par des femmes et que les clients sont en quasi-totalité des hommes, contrevenant ainsi au principe d'égalité entre les sexes ;

1. Réaffirme la position abolitionniste de la France, dont l'objectif est, à terme, une société sans prostitution ;

2. Proclame que la notion de besoins sexuels irrépressibles renvoie à une conception archaïque de la sexualité qui ne saurait légitimer la prostitution, pas plus qu'elle ne justifie le viol ;

3. Estime que, compte tenu de la contrainte qui est le plus souvent à l'origine de l'entrée dans la prostitution, de la violence inhérente à cette activité et des dommages physiques et psychologiques qui en résultent, la prostitution ne saurait en aucun cas être assimilée à une activité professionnelle ;

4. Juge primordial que les politiques publiques offrent des alternatives crédibles à la prostitution et garantissent les droits fondamentaux des personnes prostituées ;

5. Souhaite que la lutte contre la traite des êtres humains et le proxénétisme constitue une véritable priorité, les personnes prostituées étant dans leur grande majorité victimes d'exploitation sexuelle ;

6. Estime que la prostitution ne pourra régresser que grâce à un changement progressif des mentalités et un patient travail de prévention, d'éducation et de responsabilisation des clients et de la société tout entière. »


* 3 Alexandre Parent-Duchâtelet, « De la prostitution dans la ville de Paris considérée sous le rapport de l'hygiène publique, de la morale et de l'administration », 1837.

* 4 Alain Corbin, « Les filles de noce : misère sexuelle et prostitution aux 19 e et 20 e siècles », 1978.

* 5 Loi n° 46-685 du 13 avril 1946 tendant à la fermeture des maisons de tolérance et au renforcement de la lutte contre le proxénétisme.

* 6 Loi n° 60-754 du 28 juillet 1960 autorisant la ratification de la convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui, adoptée par l'assemblée générale des Nations unies le 2 décembre 1949.

* 7 Ordonnances n° 60-1245 et n° 60-1246 du 25 novembre 1960.

* 8 Chambre criminelle de la Cour de cassation, 27 mars 1996.

* 9 Loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale.

* 10 Loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure.

* 11 Article 225-12-1 du code pénal.

* 12 Loi n° 2013-711 du 5 août 2013 portant diverses dispositions d'adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l'Union européenne et des engagements internationaux de la France.

* 13 Directive n° 2011-36-UE du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2011 concernant la prévention de la traite des humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes, et remplaçant la décision cadre 2002-269-JAI du Conseil.

* 14 Décret n° 2013-7 du 3 janvier 2013 portant création d'une mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains.

* 15 Présenté en conseil des ministres le 14 mai 2014 par Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports.

* 16 Proposition de résolution n° 3522 de Mme Danielle Bousquet et M. Guy Geoffroy et plusieurs de leurs collègues, réaffirmant la position abolitionniste de la France en matière de prostitution, adoptée le 6 décembre 2011 par l'Assemblée nationale.

* 17 Rapport d'information de M. Guy Geoffroy au nom de la mission d'information sur la prostitution en France, n° 1334, avril 2011.

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