EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LE BUDGET DE LA CAISSE NATIONALE DE SOLIDARITÉ POUR L'AUTONOMIE

A. LE DÉROULEMENT DE LA CAMPAGNE BUDGÉTAIRE 2014 ET LES PERSPECTIVES POUR 2015

1. Un exercice budgétaire 2014 marqué par de fortes contraintes pesant sur le respect de l'Ondam

Le Parlement a voté un Ondam médico-social de 17,6 milliards d'euros pour 2014 , en hausse de 3 % par rapport à l'année 2013. L' objectif global de dépenses (OGD) a quant à lui connu une augmentation de 3,2 % pour s'établir à 18,8 milliards d'euros . L'Ondam médico-social a ainsi été alimenté à hauteur d'un peu plus de 1,1 milliard d'euros par une fraction du produit de la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA) et de 70 millions d'euros par les réserves de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

Comme les années précédentes, le secteur médico-social a contribué aux mesures de mises en réserve destinées à éviter tout risque de dépassement de l'Ondam dans son ensemble 1 ( * ) . Les 49 millions d'euros du plan d'aide à l'investissement (PAI) voté en loi de financement ainsi que 93 millions d'euros de l'OGD ont été gelés en début d'exercice.

Compte tenu du risque de dépassement de l'Ondam dû à l'accélération des dépenses de médicaments liée à diffusion de nouveaux traitements contre l'hépatite C, 100 millions d'euros de crédits mis en réserve seront annulés en fin d'année. L'article 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 rectifie ainsi le niveau de l'Ondam médico-social : celui-ci passe de 17,6 milliards d'euros votés en loi de financement pour 2014 à 17,5 milliards d'euros.

Cette annulation de crédits s'ajoute à celle de 43 millions d'euros intervenue à l'été 2014 lors de l'adoption de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale 2 ( * ) .

Au total, l'OGD aura contribué à hauteur de 0,76 % de son montant à la régulation des dépenses d'assurance maladie en 2014. Votre rapporteur note que ce niveau est bien supérieur à celui de 0,3 % de réserves prudentielles prévu par la loi pour l'ensemble des dépenses d'assurance maladie. Il en conclut que le principe de fongibilité asymétrique, qui doit permettre de préserver le niveau des crédits alloués au secteur médico-social, n'est, une fois de plus, pas respecté.

En outre, l'appréciation relativement positive portée l'année dernière par le Parlement sur la progression de l'Ondam médico-social pour 2014 doit désormais être nuancée. De même, il convient aujourd'hui d'évaluer la hausse des crédits prévue en 2015 au regard des débasages intervenus en 2014.

2. La poursuite de la décélération du rythme de progression de l'Ondam médico-social et de l'OGD en 2015

L'article 55 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 fixe à 8,7 milliards d'euros le niveau de l'enveloppe destinée aux dépenses des établissements et services pour personnes âgées et à 9,2 milliards d'euros celui de l'enveloppe destinée aux personnes handicapées. L'Ondam médico-social connaîtra donc une progression de 2,2 % l'année prochaine, égale à celle du sous-objectif soins de ville et très légèrement supérieure à celle de l'Ondam global, fixée à 2,1 %.

L'année 2015 marque par conséquent le réalignement du rythme de progression de l'Ondam médico-social sur celui de l'ensemble des dépenses d'assurance maladie.

En 2015, le Gouvernement prévoit d'abonder l'Ondam médico-social à hauteur de 1,2 milliard d'euros par une fraction du produit de la CSA. 348 millions d'euros seront destinés aux structures pour personnes handicapées et 994,4 millions d'euros à celles pour personnes âgées.

Doivent s'y ajouter 110 millions d'euros prélevés sur les réserves de la CNSA. Ce prélèvement, s'il n'est pas inédit (il était de 70 millions d'euros en 2014), n'en demeure pas moins inhabituel et doit conduire à s'interroger sur la façon dont sont construites les enveloppes de financement d'une année sur l'autre.

Votre rapporteur craint en effet que le niveau des réserves de la CNSA ne constitue une variable d'ajustement commode pour afficher un taux d'évolution de l'Ondam médico-social « responsable » sans pour autant freiner de façon réellement significative la progression des dotations allouées aux établissements et services médico-sociaux. Or un tel abondement ne lui apparaît pas soutenable dans le contexte d'assèchement progressif des réserves de la CNSA.

Dans l'hypothèse, plus que probable, où l'Ondam médico-social devra continuer de contribuer de façon soutenue à la régulation des dépenses d'assurance maladie, il apparaît indispensable à votre rapporteur que le Gouvernement puisse être en mesure de présenter au Parlement des éléments bien plus précis sur les hypothèses de construction de celui-ci au regard des prévisions d'évolution spontanée des dépenses.

En tout état de cause, l'OGD devrait s'établir en 2015 à 19,2 milliards d'euros , en hausse de 2,5 % par rapport à 2014.

Au total, ce sont 476 millions d'euros de moyens supplémentaires qui seraient alloués aux établissements et services pour personnes âgées et handicapées en 2015. Ces financements supplémentaires seraient répartis de la façon suivante :

- 100 millions d'euros seraient consacrés à la poursuite du processus de médicalisation et 10 millions d'euros à la réouverture du tarif global dans les Ehpad ;

- 145 millions d'euros seraient consacrés aux plans de créations de places dans le secteur des personnes handicapées, auxquels s'ajouteraient 21,4 millions d'euros destinés à la mise en oeuvre du plan autisme 2013-2017 ; s'agissant des personnes âgées, 47,4 millions d'euros doivent permettre l'achèvement des plans solidarité grand âge et Alzheimer ainsi que le lancement du plan maladies neuro-dégénératives ;

- le reste de l'enveloppe devrait assurer une revalorisation de 0,8 % des moyens existants dans les structures ; l'objectif est de tenir compte du glissement vieillesse technicité (GVT) et de la professionnalisation des salariés ; inférieur à celui de l'année dernière, qui s'établissait à 1 %, ce taux n'en apparaît pas moins raisonnable dans un contexte de faible inflation.

Figure n° 1 : Evolution de l'Ondam médico-social et de l'OGD
sur la période 2009-2015

Ondam médico-social

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Montant arrêté

Montant exécuté

Montant arrêté

Montant exécuté

Montant arrêté

Montant exécuté

Montant arrêté

Montant exécuté

Montant arrêté

Montant exécuté

Montant arrêté

Personnes âgées

6 417

6 267

7 270

7 170

7 587

7 587

8 045

8 045

8 389

8 389

8 609

Personnes handicapées

7 727

7 727

7 941

7 947

8 252

8 252

8 444

80 444

8 736

8 736

9 024

Total

14 144

13 994

15 211

15 118

15 839

15 839

16 489

88 489

17 124

17 124

17 633

Objectif global de dépenses

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Montant arrêté

Montant exécuté

Montant arrêté

Montant exécuté

Montant arrêté

Montant exécuté

Montant arrêté

Montant exécuté

Montant arrêté

Montant exécuté

Montant arrêté

Personnes âgées

7 592

7 250

8 182

7 960

8 547

8 302

8 925

8 736

9 261

9 105

9 511

Personnes handicapées

8 010

8 066

8 204

8 304

8 503

8 478

8 703

8 719

9 001

9 056

9 323

Total

15 602

15 316

16 386

16 264

17 050

16 779

17 628

17 455

18 261

18 161

18 834

3. Un objectif global de dépenses mieux consommé et des réserves en diminution continue
a) L'amélioration du niveau de consommation de l'OGD

Au cours des dernières années, chaque examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale a été l'occasion pour le Parlement de s'émouvoir de la sous-consommation récurrente de l'OGD . Il apparaissait en effet particulièrement regrettable que celui-ci vote chaque année un objectif de dépenses ne se traduisant qu'en partie par l'augmentation effective des moyens alloués aux établissements et services médico-sociaux.

La budgétisation des crédits en autorisations d'engagement et crédits de paiement (AE/CP), la publication plus précoce de la circulaire budgétaire ainsi que le déploiement de l'application HAPI (harmonisation et partage de l'information), qui permet d'assurer un suivi plus fin des dotations, contribuent aujourd'hui à améliorer le niveau de consommation des enveloppes.

Selon les informations fournies par la CNSA, à la date du 26 octobre 2014, le taux de consommation des crédits était supérieur à 97 % de l'OGD dans le champ des personnes âgées et à 98 % dans celui des personnes handicapées. L'essentiel des sommes restant à distribuer étaient des crédits de médicalisation ainsi que des crédits non reconductibles (CNR), destinés principalement au soutien à l'investissement et à des dépenses ponctuelles de personnel.

b) L'épuisement progressif des réserves de la CNSA

La sous-consommation chronique de l'OGD avait conduit à la constitution de réserves importantes au sein du budget de la CNSA . En 2008, leur niveau était ainsi supérieur à un milliard d'euros. Le fait que l'OGD soit désormais mieux consommé empêchera à l'avenir la reconstitution de niveaux de réserves aussi importants, ce qui est en soi positif. La CNSA se trouve cependant confrontée à un nouvel enjeu qui est celui de l'épuisement prévisible de ses réserves qui pourrait intervenir dans un délai relativement court.

Les réserves de la CNSA sont en effet régulièrement utilisées, soit pour la mise en oeuvre de mesures ponctuelles 3 ( * ) , soit pour venir compléter de façon récurrente les enveloppes de financement (contribution à l'OGD) ou pallier le gel systématique du plan d'aide à l'investissement (PAI).

A la fin de l'année 2013, le niveau des réserves de la CNSA s'établissait à 437,5 millions d'euros. Le prochain conseil de la caisse, prévu le 18 novembre prochain, devrait prendre acte d'un résultat déficitaire pour l'année 2014 de 160,5 millions d'euros. Ce déficit se décompose de la façon suivante :

- 70 millions d'euros sont dus à l'apport de réserves de la CNSA pour la construction de l'OGD 2014 ;

- 70 millions d'euros ont été utilisés pour financer le plan d'aide à l'investissement ;

- 13 millions d'euros correspondent à la perception de recettes moindres qu'anticipé de la part de la CNSA ;

- 7,5 millions d'euros ont été prélevés pour financer les emplois d'avenir.

Le niveau des fonds propre de la CNSA s'établirait donc à la fin de l'année 2014 à 277 millions d'euros. L'année 2015 devrait également conduire à une diminution des réserves de la CNSA. Comme cela a été indiqué précédemment, celles-ci doivent contribuer à hauteur de 110 millions d'euros à la construction de l'OGD. La CNSA anticipe par conséquent un déficit prévisionnel en 2015 de 116,6 millions d'euros, portant le niveau des réserves à 160,4 millions d'euros.

Figure n° 2 : Evolution du niveau des réserves de la CNSA

(en millions d'euros)

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Résultat

298

56

- 474

- 292

223

- 22

- 11

- 161

Réserves

958

1014

540

248

471

449

438

277

Source : CNSA

Ces prévisions montrent qu'à très court terme, les réserves de la CNSA pourraient être épuisées. Cette situation posera la question de la construction de l'OGD dont il est à nouveau prévu qu'il repose en 2015 sur un apport de réserves de la CNSA. Elle impliquera également que soient mis fin à des prélèvements qui n'ont pas de rapport avec le coeur de compétences de la CNSA.


* 1 Le III de l'article 10 de la loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 prévoit en effet que « une partie des dotations relevant de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, représentant au moins 0,3 % de cet objectif, est mise en réserve au début de chaque exercice ».

* 2 Loi n° 2014-892 du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.

* 3 En 2012, 170 millions d'euros sont venus alimenter un fonds exceptionnel de soutien aux départements en difficulté, géré par la CNSA pour le compte de l'Etat. 50 millions d'euros ont par ailleurs été utilisés pour le financement du fonds de restructuration des services d'aide à domicile.

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