III. UN ENVIRONNEMENT PLUS PROPICE À L'INVESTISSEMENT

Le troisième et dernier volet du plan d'investissement consiste, selon la communication de la Commission européenne du 26 novembre 2014, « à lever les obstacles à l'investissement partout en Europe et à renforcer encore le marché unique en créant les conditions-cadres optimales pour l'investissement en Europe » 47 ( * ) , soit à créer un environnement plus propice à l'investissement . Ce volet, nécessairement de plus longue haleine dans sa mise en oeuvre que les deux précédents, eu égard à l'ambition poursuivie, doit se déployer à plusieurs niveaux ; au niveau communautaire, tout d'abord, le Parlement européen et le Conseil étant invités, en tant que législateurs de l'Union européenne, à adopter des mesures tendant à améliorer le cadre réglementaire relatif à l'investissement et au niveau national, ensuite, chaque État membre se voyant incité, notamment dans le cadre du semestre européen, à adopter des mesures allant en ce sens.

Dans la communication précitée, la Commission identifie trois axes d'amélioration de l'environnement de l'investissement. En premier lieu, il s'agit de simplifier la réglementation et d'en renforcer la prévisibilité , en particulier afin de réduire une incertitude qui affecte l'investissement 48 ( * ) ainsi que les charges administratives des entreprises ; à cet égard, il convient de relever que, lors de l'engagement de son programme de réduction des charges administratives dans l'Union européenne en 2007, la Commission avait estimé que ces charges représentaient près de 3,5 % du PIB européen ; aussi, selon cette dernière, réduire les charges administratives de 25 %, conformément à l'objectif fixé dans le cadre du programme précité, permettrait d'accroître le PIB de l'Union de 1,4 %, soit de 150 milliards d'euros par an à moyen terme 49 ( * ) . Dans cette perspective, la Commission européenne souhaite, notamment, renforcer son programme pour une réglementation affûtée et performante (REFIT) - ce qui ressort clairement de son programme de travail pour l'année 2015, rendu public le 16 décembre 2014 50 ( * ) - et invite les États membres à améliorer l'efficacité de leurs dépenses publiques, l'efficience des systèmes fiscaux et la qualité de leurs administrations .

En deuxième lieu, la Commission souhaite développer les nouvelles sources de financement à long terme , alternatives au financement bancaire qui demeure prégnant dans l'Union européenne. L'objectif premier est de faciliter l'accès aux financements des projets d'investissement de long terme, en particulier dans le domaine des infrastructures, et des PME. À cet effet, la Commission accorde une grande importance à la création d'une union des marchés de capitaux (UMC) intégrant l'ensemble des États membres ; une consultation a donc été engagée en ce sens à la suite de la publication d'un livre vert le 18 février 2015 51 ( * ) . Celui-ci précise que « si nos marchés de capital-risque étaient aussi profonds que ceux des États-Unis, 90 milliards d'euros de fonds auraient été disponibles entre 2008 et 2013 pour financer les entreprises ». En particulier, la Commission identifie les pistes suivantes : favoriser une titrisation de haute qualité afin de libérer des liquidités en allégeant le bilan des banques ; faciliter la levée de fonds par les entreprises et, notamment, par les PME ; améliorer la disponibilité de l'information de placement sur la solvabilité des PME, afin de renforcer leur attractivité à l'égard des investisseurs ; mettre en place un régime paneuropéen de placement privé ; soutenir le recours aux nouveaux fonds européens d'investissement à long terme (FEILT) 52 ( * ) . En tout état de cause, le livre vert fait apparaître la volonté de l'exécutif européen de disposer d'un plan d'action opérationnel d'ici à 2019 afin de poser les bases d'une union des marchés de capitaux .

À cet égard, lors de son audition par la commission des finances, le directeur général du Trésor, Bruno Bézard, a souligné : « L'union des marchés de capitaux ou Capital Markets Union (CMU) est une initiative européenne très positive, bien que son contenu soit encore flou. La France doit y prendre une part active, en faisant en sorte que cette réforme ait des effets concrets, perceptibles par nos concitoyens. Elle peut, par exemple, faciliter le financement des entreprises en capitaux propres - car le problème global actuel est moins celui de la liquidité que de l'accès à l'equity - et favoriser le développement de la titrisation, non pas celle qui nous a menés où nous sommes, mais la titrisation de haute qualité, qui repose sur des actifs solides. Sachons aussi défendre nos intérêts industriels : comme l'a rappelé Michel Sapin lors du dernier comité « place de Paris 2020 », celle-ci représente de nombreux emplois qualifiés. Enfin, l'union des marchés de capitaux est un moyen de réduire la fragmentation de la zone euro, où les conditions de financement des entreprises diffèrent grandement d'un pays à l'autre, et de créer ainsi de la valeur ».

En troisième lieu, la communication susmentionnée de la Commission souligne la nécessité de « supprimer les obstacles à l'investissement dans le marché unique » 53 ( * ) , ce qui suppose l'accélération de la réforme de l'union européenne de l'énergie , de supprimer les obstacles à l'investissement dans les infrastructures et les systèmes de transport , ou encore l'institution d'un marché unique numérique - notamment au moyen de mesures législatives dans les domaines de la protection des données et de la régulation des télécommunications de même que par la simplification des règles applicables au droit d'auteur et aux consommateurs pour les achats en ligne. En outre, la Commission juge nécessaire, afin de renforcer le rapprochement des marchés de services et de produits, d'« accélérer les réformes pour lutter contre les exigences disproportionnées en matière de forme juridique, d'actionnariat et d'autorisation et d'améliorer la reconnaissance mutuelle, en particulier pour les secteurs et les professions où le potentiel de commerce transfrontalier est élevé » et de « veiller à une application efficiente des règles de passation des marchés publics » 54 ( * ) .

Sur le long terme, ce troisième volet devrait constituer le plus important du plan d'investissement pour l'Europe . Aussi, de ce fait, la proposition de résolution « insiste sur la nécessité de parvenir à un environnement plus favorable aux investissements grâce à un allégement et à une harmonisation des règlementations européennes et nationales et souhaite à ce titre que le volet règlementaire du plan d'investissement soit mieux documenté, en particulier pour ce qui concerne la contribution de l'union de l'énergie et du marché unique du numérique à la levée des obstacles réglementaires à l'investissement dans l'Union européenne dans le respect des normes sociales et environnementales ». ( alinéa 32 ).


* 47 Id.

* 48 Différents travaux économiques ont montré que l'incertitude, en particulier fiscale et réglementaire, contribuait à décourager l'investissement des entreprises (e.g. N. Bloom, S. Bond et J. Van Reenen, « Uncertainty and Investment Dynamics », Review of Economic Studies , vol. 74, n° 2, 2007, p. 391-415).

* 49 Communication de la Commission européenne au Parlement européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 24 janvier 2007, « Action Programme for Reducing Administrative Burdens in the European Union », COM(2007) 23 final.

* 50 Communiqué de presse de la Commission européenne du 16 décembre 2014 (IP/14/2703).

* 51 Livre vert de la Commission européenne du 18 février 2015, « Construire l'union des marchés de capitaux », COM(2015) 63 final.

* 52 À la suite de l'adoption, le 10 mars 2015, par le Parlement européen, de l'accord négocié en trilogue sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux fonds européen d'investissement à long terme - qui vise à créer un nouvel instrument juridique répondant aux besoins des investisseurs institutionnels et privés désireux de mobiliser leur capital dans des actifs à long terme -, la création des FEILT devrait être effective dans un délai proche.

* 53 Communication de la Commission du 26 novembre 2014, op. cit. , p. 17.

* 54 Id.

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