Rapport n° 349 (2014-2015) de M. Albéric de MONTGOLFIER , fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 mars 2015

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N° 349

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 mars 2015

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur la proposition de résolution de MM. Jean-Paul EMORINE et Didier MARIE au nom de la commission des affaires européennes, en application de l'article 73 quater du Règlement, sur le Plan d' investissement pour l' Europe ,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Sénateur

et TEXTE DE LA COMMISSION

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Jean Germain, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Eblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Alain Houpert, Jean-François Husson, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel, Richard Yung .

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

298 (2014-2015)

Mesdames, Messieurs,

Dans un contexte marqué par l'atonie de la croissance économique dans l'Union européenne, en particulier en raison d'un déficit d'investissement, le président de la Commission, Jean-Claude Juncker, a annoncé en juillet 2014, un plan d'investissement pour l'Europe visant tout à la fois à mobilier au moins 315 milliards d'euros d'investissements supplémentaires au cours des trois prochaines années, à renforcer les financements profitant à l'économie réelle et à instaurer un environnement plus propice aux investissements.

Ce plan d'investissement, communément appelé « plan Juncker », est entré dans sa phase de mise en oeuvre, avec la publication le
13 janvier 2015, par la Commission européenne, d'une proposition de règlement sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS). En application de l'article 88-4 de la Constitution, Jean-Paul Emorine et Didier Marie ont présenté, au nom de la commission des affaires européennes, une proposition de résolution européenne, visant à exposer les orientations que le Sénat souhaite voir défendues par le Gouvernement au cours des négociations qui continueront à se dérouler jusqu'à ce que le plan d'investissement pour l'Europe soit pleinement opérationnel.

Aussi le présent rapport examine-t-il cette proposition de résolution européenne préalablement à son adoption par la commission des finances, avant que celle-ci ne devienne résolution du Sénat, conformément à la procédure prévue par l'article 73 quinquies du Règlement du Sénat.

PREMIÈRE PARTIE
UN DÉFICIT D'INVESTISSEMENT DANS L'UNION EUROPÉENNE

Le plan d'investissement pour l'Europe, annoncé en juillet 2014 par l'actuel président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, intervient dans un contexte marqué par une indéniable apathie de l'investissement dans l'Union européenne , après une période de fort recul à la suite de la crise économique et financière. Une telle situation n'est pas sans lien avec la faiblesse de la reprise économique européenne , relativement aux autres régions du monde, l'insuffisance actuelle de l'investissement venant peser sur les perspectives de croissance des économies des États membres.

I. UN FORT RECUL DE L'INVESTISSEMENT AU LENDEMAIN DE LA CRISE ÉCONOMIQUE...

Les données d'Eurostat relatives à la formation brute de capital fixe (FBCF) font apparaître un net recul des dépenses d'investissement dans l'Union européenne (UE-28) , celles-ci étant passées de 2 927,5 milliards d'euros à 2 609,6 milliards d'euros entre 2008 et 2013, soit une diminution de 10,9 % en valeur (cf. graphique n° 1).

Graphique n° 1 : Évolution de l'investissement dans l'UE-28

(en milliards d'euros, prix courants)

Source : Eurostat (SEC 2010)

De même, le poids des investissements dans le produit intérieur brut (PIB) des États membres de l'Union européenne a reculé de 22,5 % en 2008 à 19,3 % en 2013 , soit une variation de - 14 %. Cette baisse des dépenses d'investissement au lendemain de la crise a concerné l'ensemble des économies européennes, de manière toutefois plus ou moins prononcée.

Parmi les cinq principales économies de l'Union européenne, trois « profils » d'évolution de l'investissement peuvent être distingués. Le premier concerne la France et le Royaume-Uni , pays dans lesquels les dépenses d'investissement ont reculé à la suite de la crise - et ce plus particulièrement au Royaume-Uni, où celles-ci ont chuté de 32,9 % entre 2007 et 2009 -, avant de revenir progressivement à niveau proche de celui constaté en 2008, puis de « stagner » entre 2012 et 2013. L' Italie et les Pays-Bas ont, quant à eux, également connu une diminution significative, suivie d'un léger rebond au début de la décennie 2010 et d'un nouveau recul ; au total les dépenses d'investissement sont inférieures de plus de 15 % à leur niveau de 2008. L' Allemagne , enfin, est parvenue à combler la baisse des dépenses d'investissement survenue en 2009, le niveau observé en 2008 ayant été dépassé dès 2011 (cf. graphique n° 2).

Graphique n° 2 : Évolution de l'investissement dans les principales économies de l'Union européenne

(base 100 en 2008)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données d'Eurostat, SEC 2010)

Les États membres dans lesquels le recul de l'investissement a été le plus prononcé entre 2008 et 2013 sont la Grèce (- 64 %), l' Espagne (- 40 %), le Portugal (- 37 %), l' Irlande (- 41 %) et Chypre (- 53 %), ainsi que le fait apparaître le graphique ci-après, ces derniers ayant, d'ailleurs, bénéficié des programmes d'assistance financière européens.

Graphique n° 3 : Évolution de l'investissement dans les États bénéficiaires de l'assistance financière européenne

(base 100 en 2008)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données d'Eurostat, SEC 2010)

Ceci ne saurait surprendre, et ce pour deux raisons. Tout d'abord, les États bénéficiaires des programmes d'assistance financière ont été parmi les pays les plus touchés par l'éclatement de la bulle immobilière - en particulier en ce qui concerne l'Espagne et l'Irlande -, la construction étant comptabilisée au sein des investissements 1 ( * ) . Ensuite, ces mêmes États sont ceux ayant consenti l'effort le plus significatif en termes de redressement des comptes publics. À cet égard, dans son rapport préparatoire au débat d'orientation des finances publiques (DOFP) pour 2015, François Marc, alors rapporteur général de la commission des finances, avait déjà relevé que « les ajustements budgétaires réalisés dans la zone euro se sont faits essentiellement au détriment de l'investissement public [...], dès lors que les dépenses de fonctionnement présentent une certaine inertie et que l'accroissement des prestations sociales dans un contexte de dégradation de la situation économique joue un rôle de stabilisation conjoncturelle » 2 ( * ) . Ainsi, les données disponibles à ce jour font apparaître que la formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques est passée de 3,5 % à 2,9 % du PIB entre 2010 et 2013 dans l'Union européenne et de 3,4 % à 2,8 % du PIB dans la zone euro au cours de la même période.

Cependant, il convient de relever l'hétérogénéité des États membres au regard de l'investissement public . Ainsi, aux côtés de pays où la formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques est restée relativement stable tout au long de la période 2008-2013, comme l' Allemagne (2 % du PIB) et la France (4 % du PIB), d'autres ont vu leur investissement public reculer fortement, à l'instar de l' Italie (2,4 % du PIB en 2013, contre 3 % en 2008), de l' Espagne (2,1 % du PIB, contre 4,6 %), du Portugal (2,2 % du PIB, contre 3,7 %), de la Grèce (2,7 % du PIB, contre 4,9 %), ou encore de Chypre (3,1 % du PIB, contre 4 %).

Il ne fait donc aucun doute que la crise économique et financière a fortement pesé sur l'investissement total. Pour autant, plus que l'intensité de la baisse de l'investissement, c'est la pérennité de l'atonie de ce dernier qui caractérise les pays européens . En effet, les données disponibles à ce jour montrent que la formation de capital fixe (FBCF) aux États-Unis a retrouvé son niveau de 2007 dès l'année 2012, ce qui n'est toujours pas le cas dans l'Union européenne, ni même dans la zone euro (cf. graphique n° 4).

Graphique n° 4 : Évolution de l'investissement dans l'Union européenne,
la zone euro et aux États-Unis

(base 100 en 2008)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données d'Eurostat, SEC 2010)

Ainsi, depuis quelques années, l'investissement dans l'Union européenne affiche un net « décrochage » en comparaison des États-Unis . Plusieurs causes peuvent venir expliquer ce phénomène, comme l'ampleur de l'ajustement budgétaire opéré en Europe, et plus particulièrement au sein de la zone euro en raison de la crise des dettes souveraines, l'importance du taux de chômage , qui atteignait encore 11,5 % en moyenne dans l'Union à la fin de l'année 2014 selon Eurostat 3 ( * ) , ou encore l'affaiblissement de la confiance des consommateurs, mais également des entreprises , qui ne peuvent accroître leurs investissements au vu de la faiblesse de la demande anticipée.

De même, une récente étude publiée par le cabinet d'audit et de conseil Ernst & Young a fait apparaître un fort recul de l'attractivité européenne pour les investisseurs étrangers ; ainsi la part des investissements directs étrangers (IDE) en Europe est passée de 50 % des IDE entrants mondiaux en 2002 à seulement 20 % en 2013 4 ( * ) . Si cette même étude semble montrer le retour d'un certain optimisme des investisseurs en ce qui concerne l'Europe - ce qui est cohérent avec le léger rebond de la formation brute de capital fixe (FBCF) observé au titre de l'année 2014 5 ( * ) -, il n'en demeure pas moins que le déficit d'investissement observé au cours des dernières années pèse sur les perspectives de croissance des pays européens à moyen et long termes .

II. ... QUI PÈSE SUR LES PERSPECTIVES DE CROISSANCE DE L'UNION EUROPÉENNE

La faiblesse de l'investissement au cours des années passées est de nature à affecter la croissance potentielle de l'Union européenne par plusieurs canaux 6 ( * ) ; en effet, elle peut réduire aussi bien la quantité que la qualité du capital productif disponible. Tout d'abord, l'insuffisance de l'investissement a une incidence sur le rythme d'accumulation du capital , favorisant une destruction du capital existant par le biais des faillites et des fermetures d'unités de production qui les accompagnent ; de même, elle limite le renouvellement du capital productif et entraîne un accroissement de son obsolescence. Sur ce dernier point, il convient de relever qu'une récente étude publiée par la Banque de France a fait apparaître que le vieillissement de l'appareil productif, consécutif à la crise économique, dans les principales économies de la zone euro avait eu un impact significatif sur la productivité globale des facteurs (PGF) 7 ( * ) et, donc, sur la croissance potentielle de ces économies 8 ( * ) .

En outre, les études empiriques semblent indiquer que les dépenses de recherche et développement (R&D) - porteuses à long terme du progrès technique - sont pro-cycliques 9 ( * ) , ce qui tend à indiquer que le ralentissement de l'investissement se serait accompagné d'une baisse des dépenses de R&D, venant, là encore, minorer la dynamique d'évolution de la productivité des facteurs.

Enfin, en raison, notamment, du recul de l'investissement public à la suite de la crise économique et de la persistance d'un faible niveau de la formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques dans un pays comme l'Allemagne (cf. supra ), se fait jour un déficit d'investissements dans les infrastructures . À cet égard, dans les seuls réseaux d'infrastructures de transport, d'énergie et de télécommunications, le besoin d'investissements pour la période allant jusqu'à 2020 a été estimé, l'an dernier, à 1 000 milliards d'euros par la Commission européenne 10 ( * ) . Or, l'analyse économique a mis en évidence l'incidence substantielle des investissements en infrastructures sur la croissance économique. Les infrastructures publiques sont en mesure de renforcer la productivité des facteurs de production, venant soutenir les activités des ménages et des entreprises ; par exemple, les infrastructures routières viennent réduire les coûts et la durée des transports 11 ( * ) . Un raisonnement similaire peut être tenu avec les infrastructures de télécommunication, d'énergie, etc. Par ailleurs, par l'intermédiaire de l'augmentation de la productivité des facteurs de production, les infrastructures peuvent entraîner une augmentation du rendement du capital et favoriser, par conséquent, une hausse de l'investissement privé 12 ( * ) . Certains auteurs ont même identifié des liens plus indirects entre les infrastructures publiques et la croissance ; ainsi, les infrastructures de transport peuvent encourager les échanges commerciaux et, de ce fait, l'activité économique 13 ( * ) . Dans ces conditions, le Fonds monétaire international (FMI) a estimé nécessaire, en octobre 2014, l'engagement de programmes d'investissement en infrastructures 14 ( * ) ; une telle préoccupation apparaît également dans le plan d'action défini lors de la réunion du G20 qui s'est déroulée à Brisbane en Australie en novembre 2014 , ce qui montre qu'une telle problématique dépasse les frontières de l'Union européenne.

Au total, l'Union européenne se trouve aujourd'hui dans une situation paradoxale, marquée par un niveau d'investissement insuffisant, qui obère une croissance potentielle déjà limitée de l'Union européenne
- estimée à 0,8 et 0,9 % en 2014 et 2015 par la Commission européenne
15 ( * ) -, alors même que les liquidités y ont rarement été aussi abondantes , en particulier du fait de la politique monétaire accommodante menée par la plupart des banques centrales des pays industrialisés, et notamment par la Federal Reserve américaine et la Banque centrale européenne (BCE). Ceci vient parfaitement illustrer le discours de Mario Draghi, président de la BCE, au symposium annuel des banques centrales à Jackson Hole en août 2014, dans lequel il était rappelé que la politique monétaire à elle seule ne pouvait constituer le seul levier d'une reprise de l'activité économique en Europe.

DEUXIÈME PARTIE
LE PROJET DE PLAN D'INVESTISSEMENT POUR L'EUROPE

Face au déficit d'investissement qui touche actuellement l'Union européenne et pèse sur ses perspectives de croissance, dès le mois de juillet 2014, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a annoncé sa volonté de « mobiliser jusqu'à 300 milliards d'euros supplémentaires d'investissements publics et privés dans l'économie réelle au cours des trois prochaines années ». Il a ensuite présenté un plan d'investissement au Parlement européen le 26 novembre 2014, avalisé par le Conseil européen du 18 décembre suivant.

Ce plan d'investissement pour l'Europe, communément appelé « plan Juncker », comporte, selon la communication de la Commission du 26 novembre dernier 16 ( * ) , trois volets : la mobilisation d'au moins 315 milliards d'euros d'investissements supplémentaires au cours des trois prochaines années, et ce par l'intermédiaire d'un nouveau Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS), des financements pour l'investissement qui profitent à l'économie réelle , qui doivent résulter de la mise en place d'une réserve de projets à l'échelle de l'Union européenne et par la création d'une « plateforme de conseil en investissement » et, enfin, l'instauration d'un environnement plus propice à l'investissement . Si ce dernier volet constitue une ambition de plus long terme, l'institution du FEIS, mais également de la réserve de projets et de la plateforme de conseil est attendue, selon les voeux de la Commission européenne, pour juin 2015 - de manière à ce que le plan d'investissement puisse pleinement contribuer à la reprise économique en Europe.

I. PRÈS DE 315 MILLIARDS D'EUROS MOBILISÉS À TRAVERS LE FONDS EUROPÉEN POUR LES INVESTISSEMENTS STRATÉGIQUES (FEIS)

Dans la perspective d'une mise en oeuvre rapide du plan d'investissement pour l'Europe, la Commission européenne a rendu publique le 13 janvier 2015 une proposition de règlement sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) 17 ( * ) . Examinée conformément à la procédure législative ordinaire 18 ( * ) , cette proposition est actuellement en cours d'examen par le Parlement européen, un vote étant prévu le 1 er avril prochain en commission puis le 24 juin en séance plénière, avant transmission au Conseil de l'Union européenne. Toutefois, de manière à s'assurer d'un accord entre le Parlement et le Conseil à l'issue de la première lecture, permettant une entrée en vigueur du règlement dès le mois de juin 2015, le Conseil de l'Union européenne a arrêté, le 10 mars dernier, une position de négociation commune aux vingt-huit États membres , devant servir de fondement aux échanges à venir avec les parlementaires européens 19 ( * ) .

Il convient également de préciser que, concomitamment à la proposition de règlement précitée, est examiné un projet de budget rectificatif 20 ( * ) afin de tirer les conséquences financières, au titre de l'année 2015, de la mise en place du FEIS .

Le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) , dont il est proposé la création, constitue la « pierre angulaire » de la mobilisation d'au moins 315 milliards d'euros d'investissements supplémentaires au cours des trois années à venir. Si la mise en place du FEIS doit résulter d'un accord entre la Commission européenne et la Banque européenne d'investissement (BEI) 21 ( * ) , le cadre juridique du Fonds est précisé par la proposition de règlement précitée , portant sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques. Aussi les développements qui suivent s'attachent-ils à préciser les modalités selon lesquelles seront mobilisés des investissements supplémentaires par le biais du FEIS, puis les conditions de fonctionnement de ce dernier.

A. UNE GARANTIE DE L'UNION EUROPÉENNE ET DE LA BEI

Le FEIS a vocation à être intégré au sein du groupe Banque européenne d'investissement (BEI) 22 ( * ) ; à cet égard, il est prévu que le Fonds soit créé sous la forme d'un fonds fiduciaire dédié. Le rattachement du Fonds européen pour les investissements stratégiques à la BEI a, avant tout, une finalité opérationnelle ; ainsi la mise en place du Fonds sera-t-elle plus rapide, bénéficiant du financement et de l'expertise de la Banque européenne d'investissement en matière d'opérations de prêts et de gestion des risques .

Le recours à une structure accolée à la Banque européenne d'investissement mais indépendante de cette dernière se justifie, à titre principal, par le fait que le nouveau Fonds aura vocation prendre davantage de risques que ne le fait actuellement la BEI ; en effet, comme l'a souligné lors de son audition par les commissions des affaires économiques et monétaires et des budget du Parlement européen le 2 mars 2015, Philippe Maystadt, ancien président de la Banque européenne d'investissement, une modification du profil de risque de celle-ci pourrait conduire à une dégradation de sa notation financière de nature à détourner les principaux acquéreurs des obligations qu'elle émet, à savoir les banques centrales. Par suite, le FEIS sera en mesure de soutenir des projets plus risqués, pour lesquels les financements font actuellement défaut alors même qu'ils présentent une valeur sociétale et économique importante .

Il est prévu que le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) s'appuie sur une garantie de 16 milliards d'euros 23 ( * ) établie dans le cadre du budget de l'Union européenne , complétée par une contribution de la BEI d'un montant de 5 milliards d'euros .

Afin d'assurer les paiements requis, le cas échéant, en cas d'appel à la garantie de l'Union européenne par la BEI, doit être institué un fonds de garantie - un « coussin de sécurité » -, dont le montant cible est fixé à 50 % des obligations de garantie totales 24 ( * ) , soit 8 milliards d'euros 25 ( * ) . Ce fonds de garantie serait abondé, notamment, par des versements du budget général de l'Union européenne. Néanmoins, il a été retenu pour principe que la garantie de l'Union serait financée au moyen de ressources existantes ; ceci doit permettre d'assurer le respect du dernier cadre financier pluriannuel (CPF), adopté à la fin de l'année 2013, qui couvre la période 2014-2020 26 ( * ) . Ainsi, des redéploiements de crédits en provenance des marges du budget général de l'Union , du Mécanisme pour l'interconnexion en Europe (MIE) et du programme-cadre pour la recherche et l'innovation « Horizon 2020 » au profit du fonds de garantie seront opérés progressivement jusqu'en 2020
- selon un échéancier précisé en annexe de la proposition de règlement du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques, dont les principaux éléments figurent dans le tableau ci-après.

Tableau n° 5 : Sources de financement du fonds de garantie
(crédits d'engagement)

(en millions d'euros)

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Total

MIE

790

770

770

970

-

-

3 300

Programme Horizon 2020

70

860

871

479

150

270

2 700

ITER*

490

-

- 70

- 150

- 270

-

Marge non allouée

-

400

1 000

600

-

-

2 000

Total

1 350

2 030

2 641

1 979

-

-

8 000

* En raison de la reprogrammation des coûts inhérents au projet ITER, celui-ci contribuera à hauteur de 490 millions d'euros au fonds de garantie en 2015 ; toutefois, ce montant sera restitué à ITER au moyen d'une réduction équivalente des crédits d'engagements du programme « Horizon 2020 » pour la période 2018-2020.

Note de lecture : MIE : Mécanisme pour l'interconnexion en Europe ; ITER : International Thermonuclear Expertimental Reactor 27 ( * ) .

Source : Fiche financière législative annexée à la proposition de règlement sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques.

Au titre de l'exercice 2015, le projet de budget rectificatif susmentionné prévoit la réallocation de 1 350 millions d'euros de crédits d'engagement , provenant du Mécanisme pour l'interconnexion en Europe, pour 790 millions d'euros, du programme « Horizon 2020 », pour 70 millions d'euros et du projet ITER, qui contribuerait à hauteur de 490 millions d'euros (cf. supra ). Toutefois, aucun crédit de paiement ne serait apporté au fonds de garantie en 2015 , conformément à l'échéancier avancé par la Commission européenne ; en effet, les premiers crédits de paiement seraient versés à compter de 2016, comme le montre le tableau ci-après 28 ( * ) .

Tableau n° 6 : Provisionnement du fonds de garantie
(engagements et paiements)

(en millions d'euros)

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Total

Crédits d'engagement

1 350

2 030

2 641

1 979

-

-

8 000

Crédits de paiement

-

500

1 000

2 000

2 250

2 250

8 000

Source : Fiche financière législative annexée à la proposition de règlement sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques.

Au total, le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) bénéficierait donc d' un apport initial de 21 milliards d'euros , dont il est attendu qu'il découle au moins 315 milliards d'euros d'investissements supplémentaires - correspondant à un effet multiplicateur de 1:15, un euro mobilisé par le Fonds devant entraîner 15 euros d'investissements.

La communication de la Commission du 26 novembre dernier relative au programme d'investissement pour l'Europe prévoit que les États membres de l'Union auront la possibilité de contribuer au Fonds au moyen d'apports de capitaux . À ce titre, il est précisé que « dans le contexte de l'évaluation des finances publiques réalisée dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance, la Commission adoptera une position favorable à l'égard de ce type d'apports de capitaux au Fonds » 29 ( * ) - position qui a été confirmée dans une communication de la Commission du 13 janvier 2015 intitulée « Utiliser au mieux la flexibilité offerte par les règles existantes du Pacte de stabilité et de croissance » 30 ( * ) . À cet égard, la proposition de résolution formule un avis favorable à cette prise en compte spécifique des apports des États membres au Fonds dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance ( alinéa 17 ).

En dépit de cela, les différents États semblent privilégier une intervention par le biais de co-financements de projets plutôt qu'un apport au FEIS ; il ressort clairement des échanges de votre rapporteur avec Jeromin Zettelmeyer, directeur général de la politique économique au ministère fédéral de l'économie et de l'énergie, lors d'un déplacement conjoint avec les présidents des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat au début du mois de mars 2015 à Berlin, que l'Allemagne ne souhaitait pas, à ce stade, réaliser un tel apport. Une position similaire semble avoir été retenue par le gouvernement français. En tout état de cause, les dernières informations disponibles font apparaître un engagement de participer au financement de projets dans le cadre du plan d'investissement pour l'Europe à hauteur de 15 milliards d'euros pour l'Allemagne, de 8 milliards d'euros pour l'Italie et la France, par le biais de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et de Bpifrance ; de même, l'Espagne a fait part de son souhait de consacrer 1,5 milliard d'euros au co-financement de projets .

B. UN EFFET MULTIPLICATEUR ATTENDU DU FEIS DE 1:15

Selon quelles modalités la garantie de 21 milliards d'euros dont disposera le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) devrait-elle permettre des investissements supplémentaires d'un montant de 315 milliards d'euros ? Comme l'illustre le graphique ci-après, la garantie fournie à la Banque européenne d'investissement (BEI) dans le cadre des activités du FEIS doit permettre à cette dernière de constituer une capacité de financement par recours à l'emprunt, d'un montant trois fois supérieur à la garantie initiale ; cette capacité de financement permettant, ensuite, au FEIS d'investir dans les tranches les moins sûres des projets d'investissement - par le biais, notamment, de fonds propres et de dette subordonnée 31 ( * ) . À ce titre, sur la base de données passées, la BEI estime que les apports dans les tranches les moins sûres permettent d'attirer des investissements privés représentant quatre fois le montant de ces apports - ce qui correspond à un effet de levier de 5.

Graphique n° 7 : L'effet multiplicateur du FEIS

Source : Commission européenne

Au total, l'effet multiplicateur attendu du FEIS s'élève à 1:15. Dès lors que cet effet multiplicateur correspond à une moyenne prévisionnelle, il ne fait aucun doute que celui-ci a vocation à varier selon les projets retenus et les modalités d'intervention du Fonds. Si l'effet multiplicateur annoncé pose souvent question, en raison de son caractère prétendument élevé, il n'en demeure pas moins qu'il semble s'agir d'une hypothèse « conservatrice » .

En effet, l'augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement (BEI) intervenue en 2012 a eu un effet multiplicateur de 1:18 - l'augmentation de capital de 10 milliards d'euros étant en passe d'avoir permis 180 milliards d'euros d'investissements supplémentaires ; à cet égard, les récentes déclarations du président de la BEI, Werner Hoyer, indiquent que cet objectif serait atteint avec neuf mois d'avance 32 ( * ) . De même, l'actuelle facilité « garantie de prêts » en faveur des petites et moyennes entreprises (PME) du programme COSME, mise en place à la fin de l'année 2013, afficherait un effet multiplicateur de 1:20. Enfin, lors d'une audition conjointe organisée par la commission des finances le 11 mars dernier 33 ( * ) , Philippe de Fontaine Vive, vice-président honoraire de la BEI, a précisé que les effets de levier observés dans le cadre des programmes de la Banque européenne d'investissement étaient généralement compris entre 18 et 28.

En réalité, plus que dans l'estimation de l'effet multiplicateur, la question paraît résider dans le surcroît d'investissements permis par la création du FEIS, compte tenu du fait que les crédits apportés au sein du fonds de garantie proviennent de programmes eux-mêmes susceptibles d'être à l'origine d'un effet multiplicateur significatif - à savoir le Mécanisme pour l'interconnexion en Europe (MIE) et le programme-cadre pour la recherche et l'innovation « Horizon 2020 ». À cet égard, lors de son audition précitée au Parlement européen le 2 mars 2015, l'ancien président de la Banque européenne d'investissement Philippe Maystadt s'est interrogé sur la capacité du FEIS à susciter un montant d'investissements supplémentaires plus élevé que les deux programmes susmentionnés. Aussi votre rapporteur a-t-il souhaité apporter une modification à la proposition de résolution afin qu'une précision sur ce point y figure ( alinéa 13 ).

Dans ces conditions, une attention toute particulière devra être portée à ce que les crédits du budget général de l'Union européenne réalloués dans le cadre de la mise en oeuvre du plan d'investissement soient ceux présentant le plus faible effet multiplicateur ; à ce titre, à l'initiative de votre rapporteur, un amendement à la proposition de résolution a été adopté afin d'y souligner cette nécessité ( après l'alinéa 13 ). En outre, la sélection des projets d'investissement n'en présentera que plus d'importance ; ces derniers devront présenter une attractivité pour les acteurs privés particulièrement forte, afin d'être en mesure de susciter davantage d'investissements que les projets habituellement financés dans le cadre du MIE et du programme-cadre de recherche « Horizon 2020 ».

Graphique n° 8 : La structure du financement du FEIS

Source : Commission européenne

C. LA SÉLECTION DES PROJETS D'INVESTISSEMENT

La logique sous-jacente à la mise en oeuvre du plan d'investissement pour l'Europe réside dans l'application du principe d'additionnalité à la sélection des projets par le FEIS ; ceci signifie que seuls les projets d'investissement qui n'auraient pu être financés en l'absence de ce plan, notamment dans le cadre des interventions « classiques » de l'Union européenne et de la Banque européenne d'investissement (BEI), devraient être retenus - et ce afin de dégager un « supplément » d'investissements. Cette exigence est clairement rappelée par la présente proposition de résolution - insistant en particulier sur la nécessité que le FEIS retienne des projets présentant un profil de risque élevé, conformément à la logique ayant présidé à la création du Fonds ( alinéa 20 ).

S'agissant des critères de sélection, selon la proposition de résolution, les projets bénéficiant des financements du FEIS devront répondre à trois critères cumulatifs : « une dimension européenne, une perspective raisonnable de bonne viabilité économique et un impact à court terme sur l'activité économique » ( alinéa 21 ) ; ce dernier critère présente un intérêt particulier dans la mesure où l'objectif du plan d'investissement pour l'Europe est non seulement de renforcer les perspectives de croissance européennes, mais également de contribuer à la reprise de l'activité économique . Aussi l'impact à court terme des investissements découlant du plan doit-il résulter du surcroît de demande associé à la mise en place des projets d'investissement - construction, achat d'équipements, etc.

La proposition de règlement du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques précise que les opérations susceptibles de bénéficier d'un financement dans le cadre du plan doivent être « compatibles avec les politiques de l'Union » et soutenir l'un des objectifs généraux suivants 34 ( * ) :

- le développement d'infrastructures, notamment dans le domaine des transports, en particulier dans les centres industriels ; l'énergie, notamment les interconnexions énergétiques, et l'infrastructure numérique ;

- l'investissement dans l'éducation et la formation, la santé, la recherche et le développement, les technologies de l'information et de la communication et l'innovation ;

- l'expansion des énergies renouvelables et l'efficacité énergétique et des ressources ;

- les projets d'infrastructures dans le domaine de l'environnement, des ressources naturelles et du développement urbain, ainsi que le domaine social ;

- la fourniture d'un soutien financier aux entreprises comptant jusqu'à 3 000 salariés, y compris le financement du risque de fonds de roulement.

Les critères de sélection des projets devront être définis de manière plus précise par le comité de pilotage du FEIS (cf. infra ). Toutefois, la proposition de résolution demande que, « dès lors que le plan d'investissement prévoit de financer des projets dans des secteurs pour lesquels le retour d'investissement est plus aléatoire et plus long et donc a priori moins attractifs pour des investisseurs privés, par exemple l'éducation et la formation, la santé, la recherche et le développement ou encore le domaine social, [...] soient précisés les critères de sélection de projets dans ces secteurs » ( alinéa 22 ). Par ailleurs, cette proposition de résolution insiste, d'une part, sur la nécessité que les collectivités territoriales puissent bénéficier du plan d'investissement pour l'Europe, eu égard à la contribution significative que ces dernières sont susceptibles d'apporter au plan 35 ( * ) ( alinéa 23 ) et, d'autre part, sur le fait que le plan d'investissement puisse financer des projets identifiés et mis en oeuvre sur une base bilatérale ( alinéa 25 ).

Enfin, tout en rappelant que l'éligibilité des projets d'investissement au FEIS doit être « préservée de toute interférence de nature à favoriser un "saupoudrage" des crédits et la tentation d'une répartition nationale ou par secteur » ( alinéa 27 ) - ce qui doit garantir une sélection des projets sur la seule base de leur rentabilité sociétale et économique -, la proposition de résolution « souhaite que soient établis des critères de sélection des projets aboutissant à une couverture équilibrée du territoire européen » ( alinéa 24 ). Ces deux principes peuvent, de prime abord, paraître difficiles à concilier. Cependant, il convient d' éviter une concentration des investissements financés par le Fonds dans certains État membres ; l'existence d'un tel risque a notamment été relevée par Philippe Maystadt, ancien président de la BEI, lors de son audition susmentionnée au Parlement européen le 2 mars 2015, dès lors que le FEIS pourrait avoir tendance à investir dans les pays où il peut atteindre rapidement un volume important d'investissements - par exemple en raison de l'importance et de l'efficacité de la banque nationale de développement (BND) de l'État concerné.

Il convient de relever qu' un quart des ressources du FEIS - soit 5 milliards d'euros - serait consacré au financement des petites et moyennes entreprises (PME) et aux entreprises à moyenne capitalisation , qui devraient donc bénéficier de 75 milliards d'euros de financement au total en raison de l'effet multiplicateur. L'importance de ce volet du plan a été relevé par la proposition de résolution, tout en sollicitant des informations quant à « la façon dont il s'articulera avec les dispositifs existants, en particulier avec le fonds européen d'investissement 36 ( * ) de la Banque européenne d'investissement » ( alinéa 15 ).

Lors de l'audition conjointe susmentionnée, organisée par la commission des finances le 11 mars 2015, Philippe de Fontaine Vive, vice-président honoraire de la BEI, a insisté sur le fait qu' une attention toute particulière serait portée, dans la phase de sélection, à la structure financière des projets - et ce afin de privilégier celles qui favorisent une large intervention des investisseurs privés. Ceci semble s'inscrire dans une logique plus globale consistant à encourager le recours à des instruments financiers innovants, en particulier par les États dans le cadre des Fonds structurels et d'investissement européens, plus à même de provoquer un effet de levier significatif. Pour autant, dans certains secteurs, les projets semblent être moins à même de reposer sur un effet de levier et nécessitent des subsides directs ; à cet égard, le 2 mars dernier, Philippe Maystadt donnait l'exemple, devant le Parlement européen, du secteur des transports et, notamment, des transports ferroviaires. Cette problématique a également été identifiée par la proposition de résolution, qui regrette que le recours à des subventions ait été, a priori , écarté ( alinéa 14 ) ; toutefois, votre rapporteur a souhaité modifier la rédaction de l'alinéa concerné afin de préciser que le fait pour un projet de nécessiter des subventions ne devrait pas interdire pas sa sélection par le FEIS .

D. LA GOUVERNANCE DU FEIS

La gouvernance du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) devrait reposer, à titre principal, sur deux comités : un comité de pilotage et un comité de sélection. La proposition de règlement du 13 janvier 2015 relative au Fonds prévoit que le comité de pilotage « décide de son orientation stratégique, de la répartition stratégique de ses actifs et de ses politiques et procédures opérationnelles » 37 ( * ) . Dans sa version actuelle, la proposition de règlement précitée prévoit que le comité de pilotage est composé, en principe, de représentants des parties à l'accord relatif au FEIS, le nombre de membres et de votes étant réparti en fonction de l'importance des contributions apportées ; toutefois, la position de négociation arrêtée le 10 mars dernier par le Conseil de l'Union européenne exclut du comité de pilotage tout autre membre que la Commission européenne et la Banque européenne d'investissement , interdisant la participation à ce comité des États membres, mais également des tiers - à l'instar des fonds d'investissement, souverains notamment. L'objectif ainsi poursuivi est de « dépolitiser » la gouvernance du Fonds, de manière à maintenir intact le principe selon lequel les financements du FEIS vont aux projets présentant le plus grand intérêt sociétal et économique. Il en résulte que les développements de la proposition de résolution demandant à ce que « soient apportées des précisions sur la possibilité pour des investisseurs non ressortissants d'États membres de l'Union européenne de contribuer au FEIS et donc sur les conditions de leur participation au comité de pilotage » ( alinéa 29 ) ne sont plus nécessaires ; aussi ceux-ci ont-il été supprimés.

Le comité d'investissement , quant à lui, sera « chargé d'étudier les interventions potentielles [du FEIS] conformément à ses politiques d'investissement et d'approuver le soutien d'opérations par la garantie de l'Union ». Concrètement, le comité d'investissement devrait avoir pour fonction de sélectionner les projets devant bénéficier d'un financement du Fonds, après une première instruction réalisée par la Banque européenne d'investissement (BEI) . La sélection des projets par le comité se ferait sur la base des objectifs généraux fixés par le règlement sur le FEIS (cf . supra ) ainsi que des orientations arrêtés par le comité de pilotage.

Le comité d'investissement serait composé de six experts indépendants , nommés par le comité de pilotage en raison de leur « expérience du marché dans le domaine du financement de projets », et du directeur exécutif , qui assure la gestion courante du FEIS, de même que la préparation et la présidence du comité d'investissement. Il convient de relever que le projet de rapport des commissions des affaires économiques et monétaires et des budgets du Parlement européen, publié le 10 mars 2015 38 ( * ) , fait apparaître une volonté des parlementaires européens de pouvoir approuver, après audition, la nomination des membres du comité d'investissement. En outre, la proposition de résolution a tenu à préciser que certains experts devaient aussi disposer « d'une solide expérience des collectivités territoriales et des politiques sociales » ( alinéa 27 ) ; toutefois, considérant qu'une telle précision n'était pas nécessaire, votre rapporteur en a proposé la suppression.

En dépit de la « dépolitisation » du comité de pilotage et de l'indépendance des membres du comité d'investissement, la proposition de résolution souligne que « la mise en oeuvre du plan d'investissement et le fonctionnement du FEIS ne sauraient être soustraits à toute responsabilité de nature démocratique » ( alinéa 28 ) ; par suite, elle demande « que soit précisée l'obligation de rendre compte au niveau du comité de pilotage », de manière à rendre effective cette responsabilité, et réclame que « dans le même objectif, [...] qu'un bilan régulier en termes coûts/bénéfices du plan d'investissement et du fonctionnement du FEIS soit effectué et que le Parlement européen et les parlements nationaux puissent exercer un contrôle véritable à leur endroit ». À cet égard, il convient de noter que la proposition de règlement sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) prévoit d'ores et déjà qu'« à la demande du Parlement européen, le directeur exécutif participe à une audition du Parlement européen sur la performance [du Fonds] » et que celui-ci répond oralement ou par écrit aux questions adressées au FEIS par le Parlement européen dans un délai de cinq semaines 39 ( * ) .

II. AMÉLIORER LE FINANCEMENT DE L'ÉCONOMIE RÉELLE

Le deuxième volet du plan d'investissement pour l'Europe, selon la communication de la Commission européenne du 26 novembre 2014, « consiste à prendre des initiatives ciblées de sorte que le financement supplémentaire des investissements ainsi généré réponde aux besoins de l'économie réelle » 40 ( * ) ; parmi ces initiatives figurent, notamment, la mise en place d'une réserve de projets d'investissement à l'échelle de l'Union européenne et la création d'une « plateforme de conseil en investissement » .

A. UNE RÉSERVE DE PROJETS À L'ÉCHELLE DE L'UNION EUROPÉENNE

La proposition de règlement sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques du 13 janvier 2015 prévoit que la « Commission et la BEI promeuvent, avec l'aide des États membres, la création d'une réserve transparente de projets d'investissements actuels et potentiels futurs dans l'Union » 41 ( * ) ; cette réserve devra être actualisée et diffusée de manière régulière. Jonathan Angel, chef d'unité à la direction générale des affaires économiques et financières de la Commission européenne, a même laissé entendre, lors de l'audition conjointe précitée, organisée par la commission des finances le 11 mars 2015, que l'accès à cette réserve de projets pourrait se faire, à terme, par l'intermédiaire d'une carte interactive accessible par Internet.

Dans sa communication du 26 novembre 2014, la Commission européenne a estimé que « pour de nombreuses parties prenantes, le principal problème n'est pas un niveau de financement insuffisant, mais l'absence apparente de projets viables » 42 ( * ) . Toutefois, comme l'ont montré les travaux de la task force sur les investissements, menés conjointement par les États membres, la Commission européenne et la Banque européenne d'investissement (BEI), il existe actuellement un nombre élevé de projets potentiellement viables et suffisamment aboutis dans l'Union européenne ; dans ce cadre, comme l'indique le rapport final de la task force publié en décembre 2014, ont été identifiés près de 2 000 projets, correspondant à des investissements de 1 300 milliards d'euros, dont 500 milliards d'euros pourraient être réalisés dans les trois années à venir . À cet égard, il convient de souligner que les projets ainsi récolés n'auront pas nécessairement vocation à bénéficier des financements du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) ; pour être sélectionnés, ils devront faire l'objet d'un examen par le comité d'investissement du Fonds. De même, des projets ne figurant pas parmi ceux qui ont été identifiés par la task force pourront être retenus par le Fonds.

En prévoyant la constitution d'une réserve de projets à l'échelle de l'Union européenne, le plan d'investissement cherche donc à donner de la visibilité aux projets d'investissement viables existant et à « signaler » la qualité de ces derniers . En effet, il s'agit, sur la base d'une analyse indépendante, de confirmer si un projet est économiquement viable et s'il satisfait à l'ensemble des exigences règlementaires et administratives
- permettant, par suite, aux investisseurs de faire l'« économie » d'une analyse de cette nature, nécessairement coûteuse. La logique retenue est donc celle d'une « labélisation » des investissements dans le cadre de la réserve de projets ; à ce titre, la communication de la Commission du 26 novembre 2014 précise que « ces travaux pourraient, à terme, déboucher sur un système de certification européenne pour les projets d'investissement viables remplissant certains critères. Cette certification pourrait être utilisée par la BEI et les [banques de développements nationales] pour attirer les investisseurs privés. Elle serait utile en ce qu'elle permettrait d'apposer un "label de crédibilité" clair sur les projets d'investissement européens » 43 ( * ),44 ( * ) .

B. LA CRÉATION D'UNE « PLATEFORME DE CONSEIL EN INVESTISSEMENT »

La proposition de règlement sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques du 13 janvier 2015 prévoit, enfin, la création, concomitamment au Fonds européen pour les investissements stratégiques, d'une « plateforme de conseil en investissement » au sein de la Banque européenne d'investissement (BEI) . Cette plateforme aurait « pour objectif de fournir, en s'appuyant sur les services de conseil existants de la BEI et de la Commission, un soutien consultatif au recensement, à la préparation et au développement de projets d'investissement, et de faire office de guichet unique pour le conseil technique au financement de projet dans l'Union » 45 ( * ) . Selon la communication de la Commission du 26 novembre 2014, il s'agirait ainsi de « fournir une aide renforcée à l'élaboration de projets dans l'ensemble de l'UE, en s'appuyant sur l'expertise de la Commission, de la BEI, des [banques de développements nationales] et des autorités de gestion des Fonds structurels et d'investissement européens » 46 ( * ) , et ce au profit tout à la fois des promoteurs de projets, des investisseurs et des autorités de gestion publiques. À ce titre, la proposition de résolution « demande des informations complémentaires sur le fonctionnement de la plateforme européenne de conseil en investissement [...], en particulier sur son articulation avec les guichets uniques existants et sur son rôle envers les collectivités territoriales et dans l'accompagnement des PME-ETI » ( alinéa 30 ).

La plateforme aurait ainsi pour finalité d'aider chaque investisseur à déterminer l'instance à même de le conseiller au mieux - qu'il s'agisse de la Banque européenne d'investissement elle-même, ou encore des banques nationales de développement. Parce que ces dernières auront vocation à jouer un rôle significatif dans le cadre du plan d'investissement pour l'Europe, la proposition de résolution demande également « que les relations entre la Banque européenne d'investissement et les banques nationales de développement en vue de la mise en oeuvre du plan d'investissement soient précisées et considère que celle-ci sera favorisée par la constitution d'un réseau européen des banques nationales de développement » ( alinéa 18 ).

Conformément à la proposition de règlement sur le FEIS, la « plateforme de conseil en investissement » sera, jusqu'au 31 décembre 2020, partiellement financée par l'Union européenne à concurrence de 20 millions d'euros par an . Au titre de l'année 2015, 10 millions d'euros de crédits d'engagement et de crédits de paiement du budget de l'Union européenne seraient redéployés au profit de la plateforme depuis le projet ITER (cf. supra ) - qui lui seraient toutefois restitués en 2018 ; pour les années ultérieures, les 20 millions d'euros versés annuellement proviendraient de marges non allouées du budget général de l'Union européenne. Au total, la création de cette plateforme devrait donc représenter un coût de 110 millions d'euros au titre du budget de l'Union au cours de la période 2015-2020 .

III. UN ENVIRONNEMENT PLUS PROPICE À L'INVESTISSEMENT

Le troisième et dernier volet du plan d'investissement consiste, selon la communication de la Commission européenne du 26 novembre 2014, « à lever les obstacles à l'investissement partout en Europe et à renforcer encore le marché unique en créant les conditions-cadres optimales pour l'investissement en Europe » 47 ( * ) , soit à créer un environnement plus propice à l'investissement . Ce volet, nécessairement de plus longue haleine dans sa mise en oeuvre que les deux précédents, eu égard à l'ambition poursuivie, doit se déployer à plusieurs niveaux ; au niveau communautaire, tout d'abord, le Parlement européen et le Conseil étant invités, en tant que législateurs de l'Union européenne, à adopter des mesures tendant à améliorer le cadre réglementaire relatif à l'investissement et au niveau national, ensuite, chaque État membre se voyant incité, notamment dans le cadre du semestre européen, à adopter des mesures allant en ce sens.

Dans la communication précitée, la Commission identifie trois axes d'amélioration de l'environnement de l'investissement. En premier lieu, il s'agit de simplifier la réglementation et d'en renforcer la prévisibilité , en particulier afin de réduire une incertitude qui affecte l'investissement 48 ( * ) ainsi que les charges administratives des entreprises ; à cet égard, il convient de relever que, lors de l'engagement de son programme de réduction des charges administratives dans l'Union européenne en 2007, la Commission avait estimé que ces charges représentaient près de 3,5 % du PIB européen ; aussi, selon cette dernière, réduire les charges administratives de 25 %, conformément à l'objectif fixé dans le cadre du programme précité, permettrait d'accroître le PIB de l'Union de 1,4 %, soit de 150 milliards d'euros par an à moyen terme 49 ( * ) . Dans cette perspective, la Commission européenne souhaite, notamment, renforcer son programme pour une réglementation affûtée et performante (REFIT) - ce qui ressort clairement de son programme de travail pour l'année 2015, rendu public le 16 décembre 2014 50 ( * ) - et invite les États membres à améliorer l'efficacité de leurs dépenses publiques, l'efficience des systèmes fiscaux et la qualité de leurs administrations .

En deuxième lieu, la Commission souhaite développer les nouvelles sources de financement à long terme , alternatives au financement bancaire qui demeure prégnant dans l'Union européenne. L'objectif premier est de faciliter l'accès aux financements des projets d'investissement de long terme, en particulier dans le domaine des infrastructures, et des PME. À cet effet, la Commission accorde une grande importance à la création d'une union des marchés de capitaux (UMC) intégrant l'ensemble des États membres ; une consultation a donc été engagée en ce sens à la suite de la publication d'un livre vert le 18 février 2015 51 ( * ) . Celui-ci précise que « si nos marchés de capital-risque étaient aussi profonds que ceux des États-Unis, 90 milliards d'euros de fonds auraient été disponibles entre 2008 et 2013 pour financer les entreprises ». En particulier, la Commission identifie les pistes suivantes : favoriser une titrisation de haute qualité afin de libérer des liquidités en allégeant le bilan des banques ; faciliter la levée de fonds par les entreprises et, notamment, par les PME ; améliorer la disponibilité de l'information de placement sur la solvabilité des PME, afin de renforcer leur attractivité à l'égard des investisseurs ; mettre en place un régime paneuropéen de placement privé ; soutenir le recours aux nouveaux fonds européens d'investissement à long terme (FEILT) 52 ( * ) . En tout état de cause, le livre vert fait apparaître la volonté de l'exécutif européen de disposer d'un plan d'action opérationnel d'ici à 2019 afin de poser les bases d'une union des marchés de capitaux .

À cet égard, lors de son audition par la commission des finances, le directeur général du Trésor, Bruno Bézard, a souligné : « L'union des marchés de capitaux ou Capital Markets Union (CMU) est une initiative européenne très positive, bien que son contenu soit encore flou. La France doit y prendre une part active, en faisant en sorte que cette réforme ait des effets concrets, perceptibles par nos concitoyens. Elle peut, par exemple, faciliter le financement des entreprises en capitaux propres - car le problème global actuel est moins celui de la liquidité que de l'accès à l'equity - et favoriser le développement de la titrisation, non pas celle qui nous a menés où nous sommes, mais la titrisation de haute qualité, qui repose sur des actifs solides. Sachons aussi défendre nos intérêts industriels : comme l'a rappelé Michel Sapin lors du dernier comité « place de Paris 2020 », celle-ci représente de nombreux emplois qualifiés. Enfin, l'union des marchés de capitaux est un moyen de réduire la fragmentation de la zone euro, où les conditions de financement des entreprises diffèrent grandement d'un pays à l'autre, et de créer ainsi de la valeur ».

En troisième lieu, la communication susmentionnée de la Commission souligne la nécessité de « supprimer les obstacles à l'investissement dans le marché unique » 53 ( * ) , ce qui suppose l'accélération de la réforme de l'union européenne de l'énergie , de supprimer les obstacles à l'investissement dans les infrastructures et les systèmes de transport , ou encore l'institution d'un marché unique numérique - notamment au moyen de mesures législatives dans les domaines de la protection des données et de la régulation des télécommunications de même que par la simplification des règles applicables au droit d'auteur et aux consommateurs pour les achats en ligne. En outre, la Commission juge nécessaire, afin de renforcer le rapprochement des marchés de services et de produits, d'« accélérer les réformes pour lutter contre les exigences disproportionnées en matière de forme juridique, d'actionnariat et d'autorisation et d'améliorer la reconnaissance mutuelle, en particulier pour les secteurs et les professions où le potentiel de commerce transfrontalier est élevé » et de « veiller à une application efficiente des règles de passation des marchés publics » 54 ( * ) .

Sur le long terme, ce troisième volet devrait constituer le plus important du plan d'investissement pour l'Europe . Aussi, de ce fait, la proposition de résolution « insiste sur la nécessité de parvenir à un environnement plus favorable aux investissements grâce à un allégement et à une harmonisation des règlementations européennes et nationales et souhaite à ce titre que le volet règlementaire du plan d'investissement soit mieux documenté, en particulier pour ce qui concerne la contribution de l'union de l'énergie et du marché unique du numérique à la levée des obstacles réglementaires à l'investissement dans l'Union européenne dans le respect des normes sociales et environnementales ». ( alinéa 32 ).

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION CONJOINTE SUR LE PRINCIPE ET LES MODALITÉS DE MISE EN oeUVRE DU PLAN D'INVESTISSEMENT POUR L'EUROPE (11 MARS 2015)

Réunie le 11 mars 2015, sous la présidence de Michèle André, présidente, la commission a procédé à l'audition conjointe sur le principe et les modalités de mise en oeuvre du plan d'investissement pour l'Europe de MM. Philippe de Fontaine Vive, vice-président honoraire de la Banque européenne d'investissement, Benjamin Angel, chef d'unité à la direction générale des affaires économiques et financières de la Commission européenne, et Antoine Quero-Mussot, expert confirmé en instruments financiers innovants auprès de la direction générale du budget de la Commission européenne.

Mme Michèle André , présidente . - Face à l'atonie de l'activité économique et au déficit d'investissement qui touchent actuellement l'Union européenne, dès le mois de juillet 2014, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, avait annoncé sa volonté de « mobiliser jusqu'à 300 milliards d'euros supplémentaires d'investissements publics et privés dans l'économie réelle au cours des trois prochaines années ». Aussi, ce dernier a présenté un plan d'investissement au Parlement européen le 26 novembre 2014, avalisé par le Conseil européen du 18 décembre suivant. Le mois de janvier 2015 a marqué le début de la mise en place concrète du plan d'investissement pour l'Europe, souvent appelé « plan Juncker ». En effet, la Commission européenne a publié une proposition de règlement sur le nouveau Fonds européen pour les investissements stratégiques, en cours d'examen par le Parlement européen.

Dans ce cadre, nous recevons aujourd'hui Philippe de Fontaine Vive, vice-président honoraire de la Banque européenne d'investissement, ainsi que Benjamin Angel, chef d'unité à la direction générale des affaires économiques et financières, et Antoine Quero-Mussot, expert confirmé en instruments financiers innovants auprès de la direction générale du budget de la Commission européenne.

Notre commission examinera la semaine prochaine le rapport de notre rapporteur général Albéric de Montgolfier sur la proposition de résolution européenne sur le plan d'investissement pour l'Europe, adoptée par la commission des affaires européennes à l'initiative de nos collègues Jean-Paul Emorine et Didier Marie. Dans cette perspective, l'audition de ce jour nous permettra de mieux appréhender les modalités concrètes de mise en oeuvre de ce plan. Ainsi, MM. Angel et Quero-Mussot nous présenteront, au cours d'une intervention de cinq à dix minutes chacun, les trois « volets » constituant le plan d'investissement, l'effet multiplicateur attendu du Fonds européen pour les investissements stratégiques, de même que le « montage » budgétaire sous-jacent à la mise en place du Fonds. Philippe de Fontaine Vive, quant à lui, précisera les modalités de sélection des projets financés par le Fonds européen et reviendra sur les effets multiplicateurs constatés sur les programmes d'investissements passés de la Banque européenne d'investissement. À l'issue de ces interventions liminaires, chacun pourra adresser ses questions à nos invités.

M. Benjamin Angel, chef d'unité à la direction générale des affaires économiques et financières de la Commission européenne . - La raison pour laquelle ce plan d'investissement a été lancé est que nous avons assisté à un effondrement relativement significatif de l'investissement durant ces années de crise, qui est tombé de 22 % du produit intérieur brut (PIB) en moyenne en 2007 en Europe à environ 18 % l'année dernière. Cela est dû essentiellement à une baisse des investissements publics, mais pas uniquement. Nos prévisions montrant que l'investissement ne devait pas redémarrer par lui-même, nous en avons conclu qu'il fallait mettre en place un outil spécifique permettant de soutenir l'investissement.

Le « plan Juncker » a trois composantes : un instrument financier destiné à soutenir l'investissement, une assistance technique ou « pipeline de projets » visant à aider l'investissement à atteindre l'économie réelle et une composante de réformes structurelles. Ce dernier volet, le moins visible actuellement, est le plus important à long terme puisqu'il vise à faire en sorte de lever les obstacles à l'investissement. Les mesures structurelles concernées vont être définies au cours du travail de la Commission, et j'aimerais à ce stade me focaliser sur les deux autres volets.

S'agissant du volet « soutien financier », un fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) a été créé. Il est situé au sein de la Banque européenne d'investissement (BEI) et n'a pas de personnalité juridique propre. Il s'agit d'un vecteur qui accueille une garantie de 16 milliards d'euros venant du budget de l'Union européenne et 5 milliards d'euros venant de la BEI et de ses ressources propres. Avec ces 21 milliards de capacité, la BEI va lever des fonds pour un montant d'environ 60 milliards d'euros, qui devraient eux-mêmes générer 315 milliards d'euros d'investissements. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, ces estimations sont conservatrices : la dernière augmentation de capital de la BEI de 10 milliards en 2012 était censée générer 180 milliards d'investissements supplémentaires d'ici fin 2015, objectif qui sera atteint dès le milieu de cette année. Cela représente un effet de levier de dix-huit. Certains instruments communautaires, comme le programme pluriannuel européen pour la compétitivité des entreprises et des PME intitulé « COSME », ont des effets de levier de vingt-huit. Ici, nous avons ciblé un effet de levier de quinze, car la prise de risque attendue est importante. Le fonds d'investissement doit permettre à la BEI de faire plus mais aussi autrement, c'est-à-dire de se focaliser sur les investissements qu'elle ne pourrait normalement pas financer car ils ne remplissent pas ses critères, ou qui ne pourraient pas être financés par le secteur privé. La BEI va donc se concentrer essentiellement sur des projets plus risqués, par exemple en prenant une tranche subordonnée dans un projet, ou en restant plus longtemps dans un projet que ne le feraient d'autres investisseurs.

Au sein du FEIS, la garantie de 16 milliards d'euros venant du budget communautaire est préfinancée par un fonds de garantie de 50 %. Il aurait été possible de se passer de ce fonds puisque la signature européenne est assez bonne pour qu'on puisse accorder une garantie de 16 milliards d'euros sans avoir besoin de la préfinancer. La raison de ce préfinancement à hauteur de 50 % est de permettre à l'Union européenne d'honorer les appels à garantie sans avoir à faire face aux difficultés posées par les discussions budgétaires annuelles. Le montant de 50 %, soit 8 milliards d'euros, résulte des calculs de risque qui ont conclu que l'on risquait de perdre 6,5 milliards d'euros à horizon de dix ans, assortis d'une marge de sécurité pour éviter les mauvaises surprises.

Dans la proposition initiale de la Commission européenne, les États pouvaient contribuer à trois niveaux : au niveau du fonds lui-même, au niveau des plateformes d'investissement ou au niveau des projets. Les États ayant tous indiqué qu'ils ne souhaitaient pas faire de contribution au fonds lui-même, le texte adopté au Conseil ce mardi a fermé cette possibilité. Ce n'est pas une surprise, car un des éléments essentiels qui caractérise ce fonds est qu'il n'y a pas d'enveloppe géographique ou sectorielle, ce qui réduit l'intérêt des contributions nationales. Ce n'est pas non plus un problème, car il existe la possibilité de créer des plateformes d'investissements nationales, régionales ou internationales, au sein desquelles les États peuvent grouper les projets auxquels ils tiennent le plus et qu'ils souhaitent cofinancer. Ces plateformes sont ensuite soumises à la décision d'un comité d'investissement compétent pour décider de l'utilisation de la garantie de l'Union européenne. Ce comité, composé d'experts de marché, est indépendant à l'égard de la BEI, des États membres, mais aussi de la Commission européenne. Il vise à garantir que les projets respectent les critères prévus, sont compatibles avec les objectifs de l'Union, sont économiquement viables et apportent une additionnalité.

Cette condition de viabilité économique des projets a été beaucoup critiquée. Or il faut rappeler que le « plan Juncker » vise à diriger les liquidités du secteur privé vers le financement de l'investissement productif. 80 % de l'argent est censé venir du secteur privé. Le seul moyen de permettre cela est d'avoir une sélection rigoureuse des projets afin de garantir qu'ils sont économiquement viables.

Les États membres ont également la possibilité de contribuer via leurs banques publiques. Quatre États ont fait des annonces en ce sens : l'Allemagne pour un montant de 8 milliards d'euros, la France et l'Italie pour des montants similaires et l'Espagne pour 1,5 milliard d'euros. Les modalités concrètes de ces contributions sont encore en discussion, mais il faudra s'assurer que celles-ci s'ajoutent au plan et qu'elles ne se substituent pas aux contributions déjà prévues.

S'agissant du volet « assistance technique », je rappelle qu'il s'agit d'un point très important. Certains instruments financiers ne sont parfois pas utilisés car ceux en charge de les mettre en oeuvre ne les comprennent pas. Par exemple, dans le cadre des fonds structurels, il existe des instruments innovants de soutien aux PME qui ne sont utilisés qu'en Espagne et à Malte. Avoir une assistance technique est donc important pour garantir l'utilisation des fonds et pour aider au montage de projets en général. Dans le cadre du « plan Juncker », on met en place un centre européen de conseil en investissements, point unique d'accès, afin d'aider les investisseurs publics ou privés à monter leurs projets en bénéficiant d'une assistance juridique gratuite.

Enfin, un instrument qui vise à apporter de la visibilité aux investisseurs sur les opportunités d'investissement est créé : les promoteurs pourront faire figurer leurs projets sur un site web de manière à ce que les investisseurs potentiels puissent facilement voir les opportunités existantes.

M. Antoine Quero-Mussot, expert confirmé en instruments financiers innovants auprès de la direction générale du budget de la Commission européenne . - La logique de cette intervention budgétaire est financière de l'Union européenne est assez innovante. Trouver le moyen de mobiliser 315 milliards d'euros d'investissements a constitué un véritable défi, pour trois raisons fondamentales.

Le premier défi est la contrainte budgétaire. Le cadre financier de l'Union est fixé pour une période pluriannuelle de sept ans, ce qui permet d'avoir une certaine visibilité et d'éviter des affrontements annuels autour de la question budgétaire. La cadre actuel 2014-2020, qui a résulté d'un accord politique difficile adopté à l'unanimité des États membres, programme des crédits répartis par rubriques soumis à des plafonds, ce qui constitue une certaine rigidité. Le « plan Juncker » devant être adopté rapidement par le Conseil et le Parlement du fait de son caractère urgent pour l'Europe, la Commission a écarté l'idée de rouvrir le cadre financier pluriannuel 2014-2020 afin de l'y inclure. Il a donc fallu faire avec les crédits déjà programmés. Ainsi, deux possibilités ont été étudiées pour financer ce plan : soit se servir des marges existantes au sein du cadre, soit procéder à un redéploiement entre programmes. En réalité, le choix était contraint du fait que ce plan rentrait dans la rubrique « compétitivité », plafonnée à hauteur de 120 milliards d'euros sur sept ans, et au sein de laquelle il a donc fallu trouver des redéploiements. Sur les 960 milliards d'euros prévus par le cadre financier pluriannuel, seuls 2 milliards d'euros de marges disponibles ont été trouvés. Pour pouvoir provisionner les 8 milliards d'euros du fonds de garantie, il a donc fallu trouver 6 milliards d'euros par redéploiement en prenant dans les dotations de certains programmes. Le choix s'est porté sur les programmes qui intervenaient dans les mêmes domaines que le « plan Juncker ». Ainsi, des dotations prévues pour des subventions ayant un effet multiplicateur limité ont été redéployées dans le plan d'investissement dont l'effet multiplicateur sera efficace. Les deux grands programmes qui étaient suffisamment dotés pour procéder à ce redéploiement sans trop de difficulté étaient le programme pour les infrastructures, dans lequel 3,3 milliards d'euros ont été pris (soit 10 %), et le programme cadre de recherche, dans lequel 2,7 milliards d'euros ont été pris (soit 3,5 %). Ces 2,7 milliards d'euros sont pris sur l'ensemble du champ de la recherche, de la recherche fondamentale à la recherche appliquée, pour les mettre dans un plan d'investissement destiné à des interventions plus proches du marché. Il y a donc une redistribution au sein du programme de recherche, mais ce montage va permettre de faire davantage pour l'innovation et la recherche en Europe.

Le deuxième défi auquel nous sommes confrontés tient au fait que le budget communautaire est limité, par une règle quasi constitutionnelle, à 1,23 % du PIB de l'Union européenne. Il n'a, par conséquent, pas les moyens de jouer un rôle de stabilisateur macroéconomique ou de redistribution dans des proportions qui permettraient de répondre à un choc asymétrique au sein de l'Union. Son rôle consiste essentiellement à financer des interventions structurelles. Sur les 960 milliards d'euros dont seront dotés les fonds européens sur les sept prochaines années, 325 milliards d'euros seront ainsi consacrés, sous forme d'investissements, à la politique de cohésion. En prenant en compte les financements nationaux, ce sont 500 milliards d'euros qui seront investis en Europe. Pour prendre l'exemple du pays d'où je viens, l'Espagne, les fonds structurels européens ont représenté, pendant la crise, 10 % des investissements publics. Or, je le rappelle, l'Espagne est le cinquième client de la France, devant les États-Unis. L'ensemble des États membres bénéficient donc de cet effort, y compris indirectement. Sur un autre sujet, 77 milliards d'euros seront consacrés aux dépenses de recherche et le développement, ce qui représente le troisième poste budgétaire de l'Union européenne, après l'agriculture et la cohésion. Il s'agit, là encore, d'un effort important, structurel et de long terme.

Le plan d'investissement est destiné à mobiliser l'investissement, qui constitue l'un des éléments principaux de la demande agrégée, afin de permettre à l'Europe de sortir de la crise et de créer des emplois.

Le troisième défi réside dans le fait que, si les investissements sont insuffisants, cela n'est pas dû à un manque de liquidités. En effet, les banques centrales ont triplé leur bilan, les liquidités sur les marchés de capitaux sont donc très élevées. On constate cependant que les investisseurs préfèrent souvent des titres dont les rendements sont négatifs plutôt qu'investir dans des projets de l'économie réelle. Il nous a donc fallu réfléchir à un moyen d'orienter ces liquidités vers l'économie réelle, de jouer un rôle de « catalyseur », sans nécessairement mobiliser de grands volumes d'investissement public.

Le plan d'investissement proposé résulte de ces trois défis. Il s'agit d'une solution qui n'a peut-être pas été suffisamment exploitée par l'Europe. L'Union européenne est en effet dotée de deux principaux « bras » budgétaires et financiers : le budget de l'Union européenne et la BEI. Mais ces deux « bras » ne coopèrent que très rarement directement. Je citerais toutefois un précédent : lors de la chute du mur de Berlin, les États européens se sont retrouvés face à un défi géopolitique majeur tenant à la nécessité d'aider les pays de l'Est à moderniser leur économie. Cet accompagnement s'est traduit par une extension de la BEI qui, je le rappelle, constitue la plus grande banque d'investissement publique au monde, loin devant la banque mondiale, vers l'Europe de l'Est. Cet accompagnement a nécessité l'intervention du budget européen sous la forme d'une garantie. L'objectif du plan d'investissement est de transposer en interne ce qui est actuellement réalisé par la BEI dans le cadre de son mandat externe. Cette solution devrait permettre de mobiliser d'importants moyens budgétaires et financiers et de jouer ce rôle de catalyseur.

En conclusion, je dirais que le « plan Juncker » constitue un montage solide et prévisible, parce que programmé. En effet, dès son adoption par le Conseil et le Parlement, ce plan ne sera plus soumis à des aléas politico-budgétaires. Cette stabilité répond à une attente des contribuables et des investisseurs.

Mme Michèle André, présidente . - Je salue la présence parmi nous de notre collègue Jean-Paul Emorine, auteur avec Didier Marie, d'une proposition de résolution européenne sur le plan d'investissement pour l'Europe, déposée au nom de la commission des affaires européennes.

M. Philippe de Fontaine Vive, vice-président honoraire de la Banque européenne d'investissement . - Je ne peux que m'associer aux propos qui ont été tenus par mes collègues de la Commission européenne. L'objectif principal de ce plan d'investissement est en effet de dynamiser la dépense publique. Quand Jean-Claude Juncker a été pressenti pour présider la Commission européenne, il a demandé à la BEI de lui proposer un mécanisme permettant, à moyens budgétaires constants, de répondre aux besoins urgents d'investissement de l'économie européenne et pouvant être mis en oeuvre dès le début de l'année 2015. Cette discussion avec la BEI a constitué la base de son discours devant le Parlement du mois de juillet 2014.

Nous avions déjà lancé des projets destinés à dynamiser la dépense publique réunissant la BEI et la Commission européenne qui ne reposaient pas sur une logique traditionnelle, budgétaire, visant à sélectionner des projets et à allouer des lignes de crédits en fonction de leur intérêt, mais sur une sélection effectuée par un tiers expert, en l'occurrence la BEI, chargé d'analyser ce projet. Ce mode de sélection ne s'appuie donc pas sur des critères politiques, nationaux, régionaux ou sectoriels mais il est fondé sur la rentabilité économique et sociale du projet concerné. La BEI est d'ailleurs l'une des rares institutions qui continue de mesurer ce type de rentabilité pour les projets qu'elle finance. Cette analyse des hypothèses retenues par les promoteurs du projet doit lui permettre d'établir si ce dernier est viable et est conformé à un « bon usage de l'argent public », indépendamment des questions de rentabilité financière.

Cette méthode est originale s'agissant de l'emploi de fonds budgétaires. Nous l'avons cependant déjà mise en oeuvre sur quelques programmes pilotes. Un fonds de garantie provisionne ainsi à hauteur de 9 % les projets financés par la BEI à l'extérieur de l'Union européenne. Ce niveau de garantie, qui est le même depuis la fin des années 1970, s'est avéré suffisant pour faire face à un risque de défaut. Pour être précis, nous n'avons été confrontés qu'à un seul cas de défaut, celui de la Syrie. Pour autant, si la BEI a pris part au financement de projets dont les impacts microéconomiques lui apparaissaient positifs, tels que la construction de ports ou encore l'amélioration de la production d'électricité, ou de gaz, les conséquences financières d'évènements politiques qu'elle ne maîtrise évidemment pas ont été supportées par le budget européen.

Ce type de financements n'existait cependant pas en tant que cadre à l'intérieur de l'Union européenne, même si un certain nombre de projets pilotes, associant la BEI et la commission européenne, ont pu être lancés, tels que le programme de soutien aux PME (COSME), que nous avons développé, en France, en partenariat avec la BPI et certaines banques commerciales. Je citerais également l'instrument de garantie dans le domaine des transports qui a notamment permis le financement de la ligne Sud-Europe-Atlantique (Tours-Bordeaux), qui n'a pu être financée que parce que la BEI, soutenue par le dispositif de la Commission européenne, a pu apporter une garantie au nom de l'Union européenne. Dans le domaine de la recherche, nous avons lancé en 2005 un programme de garantie effectif depuis 2008. Ces exemples ont montré que nous pouvions mobiliser des investisseurs sur des projets « certifiés » par l'analyse menée par la BEI. Le dernier projet en date concerne le développement des project bonds ou obligations de projet, destiné à orienter les liquidités des marchés obligataires vers le financement de projets d'infrastructures dans les domaines des transports, des télécoms ou de l'énergie. En France, un tel projet a vu le jour dans le domaine des télécoms, en partenariat avec Axione, filiale de Bouygues, qui visait à déployer la fibre optique dans douze départements français. Sur l'ensemble de ces projets, nous avons constaté un effet multiplicateur compris entre 18, 25 et 28 suivant les cas.

Pour répondre à votre question, Madame la Présidente, le mécanisme de sélection sera relativement simple et reposera sur une logique pragmatique. Il n'y aura pas d'allocation nationale ou sectorielle. Les promoteurs publics ou privés pourront présenter librement leurs projets à la BEI. Avec la Commission européenne, nous nous sommes engagés à ce que l'ensemble de la procédure de sélection soit transparente. La BEI analysera la viabilité de ces projets.

Les promoteurs seront appelés à faire des choix significatifs. Soit ils opteront pour une attitude classique visant à obtenir un prêt accordé par la BEI correspondant à environ un tiers du financement, la participation de la BEI n'excédant jamais 50 %. Cette solution classique n'a cependant aucun effet d'attraction pour le secteur privé.

Soit le promoteur estime qu'il est préférable, par exemple, de constituer une société de projet à laquelle participera la BEI via la prise en charge d'une tranche risquée. Cette solution permet d'accueillir, soit à un même niveau de risque, soit à un niveau inférieur, des co-financeurs, qui bénéficieront du travail de certification et de validation réalisé en amont par la BEI.

L'effet de levier retenu d'un commun accord avec la Commission européenne repose sur une hypothèse relativement conservatrice de 15, soit un niveau inférieur à tout ce que nous avons constaté jusqu'à présent, l'effet de levier étant plutôt compris entre 18 et 28 pour chacun des produits financiers que nous avons développés.

Si le dispositif est loin d'être arrêté, des discussions étant toujours en cours entre les États membres et au sein du Parlement européen, les promoteurs sont toutefois invités à présenter dès maintenant leurs projets à la BEI. Cette notion d'urgence est importante comme l'a rappelé Jean-Claude Juncker.

Le 16 janvier dernier, j'ai reçu les principales banques françaises pour leur présenter dispositif. Je leur ai toutefois indiqué qu'il leur revenait de développer des produits permettant de financer à la fois de très grands projets, comme la ligne Sud-Europe-Atlantique, mais aussi des projets plus limités, dont le montant n'excède pas quelques millions d'euros.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général . - Ce plan d'investissement devrait permettre d'apporter des moyens de financement supplémentaires à nos économies, dans un contexte de contraction des investissements. On ne peut que souscrire à un tel objectif. Je retiens des différentes interventions qu'il n'y aura aucun contingentement national dans la sélection des projets d'investissement et que les porteurs de projet auront la possibilité de s'adresser directement à la BEI. Alors que notre commission vient tout juste de procéder ce matin à l'audition de Bruno Bézard, directeur général du Trésor, j'ai différentes questions à vous poser.

Tout d'abord, je m'interroge sur le calendrier envisagé : nous savons qu'en matière de relance de l'investissement, les projets prennent souvent plusieurs années à se finaliser, surtout dans le secteur des transports. Il nous a été indiqué que différents projets avaient été identifiés par la France, à l'image du projet de métro Grand Paris Express, du prolongement du RER E dit « Eole », ou encore la rénovation de différentes lignes ferroviaires. Or les procédures pour ce type de travaux sont longues et complexes, des enquêtes publiques sont nécessaires etc. Pour une route, il faut compter au moins cinq ans, pour un canal, comme en témoigne de cas du canal Seine-Nord, il faut vingt ans et, enfin, pour une ligne ferroviaire à grande vitesse, il faut trente ans. J'émets donc des doutes quant à l'émergence rapide des projets. Je pense aussi aux projets d'autoroute entre Vienne et Bratislava ou, encore, dans le sud de la Sicile.

Ensuite, je souhaite vous interroger sur le choix de recourir à un mécanisme de garanties. J'ai noté que l'effet de levier de un à quinze était réaliste sachant que l'augmentation de capital de 10 milliards d'euros de la Banque européenne d'investissement (BEI) avait engendré un multiplicateur de dix-huit. Vous nous avez aussi expliqué qu'un tel mécanisme induisait une prise de risque. J'estime pour ma part qu'au-delà de garanties, certains investissements nécessiteront des subventions publiques élevées. Deux exemples peuvent être cités : la rénovation thermique des logements sociaux d'une part, les équipements des hôpitaux et des universités d'autre part. Dans un contexte où la France doit faire des économies supplémentaires, de tels investissements sont-ils réalistes ? Par ailleurs, une part des projets concernés par le Fonds européen pour les investissements stratégiques ne sera qu'un simple recyclage de projets déjà prévus : à la lumière de cet élément, pensez-vous réellement pouvoir attirer les investisseurs privés de la manière aussi ambitieuse que vous nous l'avez décrite ?

M. Benjamin Angel, chef d'unité à la direction générale des affaires économiques et financières de la Commission européenne . - Je voudrais répondre au rapporteur général en commençant par lever une source de confusion, les projets identifiés par la France et dont a fait état Bruno Bézard, directeur général du Trésor, n'ont rien à voir avec le plan européen de relance de l'investissement. Une liste d'environ 2 000 projets a été établie par la task force sur l'investissement dans l'UE, qui a réuni, à la fin de l'année 2014, la Commission européenne, la BEI et les vingt-huit États membres. Mais ce n'est pas une sélection de projets. Ces derniers seront adressés à la BEI et un comité composé d'experts indépendants sera chargé de sélectionner les projets pertinents.

S'agissant de la question du rapporteur général relative au calendrier, j'indique qu'il est question d'un plan consistant à engager 315 milliards d'euros sur la période 2015-2017, soit trois ans. C'est l'objectif, mais vous avez raison de souligner qu'il faudra au moins dix à quinze ans pour débourser les sommes en questions de manière effective. Au sein de ce plan d'investissement, un volet de 75 milliards d'euros est destiné aux petites et moyennes entreprises (PME), c'est ce volet qui pourra être mis en oeuvre le plus rapidement. Et nous utiliserons des instruments existants déjà au sein de l'offre de la BEI, comme le programme COSME.

Enfin, pour ce qui concerne les projets nécessitant des subventions publiques, je confirme tout d'abord que certains investissements devront s'accompagner d'un subventionnement direct. La rédaction actuelle du règlement relatif au FEIS prévoit de manière explicite la possibilité de versement de subventions des États membres aux projets. Cela étant, et c'est un point très important, il sera également possible de mettre en oeuvre des projets sans aucune subvention publique, en faisant intégralement financer l'investissement par le secteur privé. Le mécanisme n'est pas un multiplicateur d'investissements publics mais un catalyseur d'investissements privés.

M. Philippe de Fontaine Vive, vice-président honoraire de la Banque européenne d'investissement . - Je précise que je suis totalement d'accord avec les propos qui viennent d'être énoncés par la Commission européenne. Je relève en particulier la confusion entre le plan européen de relance de l'investissement et la liste des projets identifiés par la France, à laquelle il ne faut pas donner trop d'importance. Nous avions d'ailleurs conscience de ce risque de confusion et c'est pourquoi nous avons ajouté dans le document issu de la task force sur l'investissement dans l'UE la mention « ce document n'engage ni la Commission européenne ni la BEI ». Les banques sont en contact étroit avec l'économie réelle et il sera donc préférable de reposer sur leur expertise.

S'agissant des cas pratique dont a fait état le rapporteur général, je souhaite formuler quelques remarques, tout particulièrement au sujet du projet de métro Grand Paris Express. Deux pistes sont possibles en la matière : faire porter le projet par une structure publique ou créer une société de projet qui attire les investissements privés. Le choix de la stratégie appartient à la société Grand Paris Express, mais le FEIS pourra aider au montage de la deuxième piste si elle est retenue. L'autre point évoqué concernait les investissements nécessitant des subventions publiques en plus de garanties. Je suis plus optimiste que le rapporteur général. L'exemple du bilan sur cinq ans des actions réalisées par l'intermédiaire de prêts dans le domaine de la rénovation thermique des logements sociaux le démontre, surtout que le plan était prévu sur vingt ans. Il incombe aux organismes confédéraux et locaux de l'habitat social de privilégier ces actions au lieu de thésauriser. Enfin, il est vrai que les universités étaient interdites de prêt jusqu'à la période récente, mais la France a créé un mécanisme original qui gagnerait à être généralisé dans l'action publique nationale : le plan Campus mobilisera ainsi 950 millions d'euros d'investissements - à moyens constants - en recourant à des prêts. En effet, des crédits budgétaires sont mis de côté par l'établissement pour constituer un capital, et celui-ci lui permet ensuite d'emprunter en fonction de sa capacité financière à rembourser ses propres emprunts.

Mme Michèle André, présidente . - Je m'interroge sur les relations entre, d'une part, le FEIS et, d'autre part, la CDC et la BPI. Comment va s'articuler cette structure jeune et originale avec des institutions plus anciennes et bien établies ?

M. Philippe de Fontaine Vive . - En la matière il y a un avant et un après « plan Juncker ». Il y avait, depuis deux ans, une recherche de complémentarité entre l'action de la BEI et celle de la CDC et de la BPI, l'idée générale étant de ne pas les mettre en concurrence. Avec le FEIS, la question du rôle des structures nationales de financement comme la CDC et la BPI est posée. Mais cette question n'est pas posée à la BEI, elle est posée aux institutions européennes, Commission européenne, Conseil et Parlement européen : les partenaires nationaux tels la CDC et la BPI seront-ils des acteurs intervenant en complément du FEIS ou en seront-ils de simples utilisateurs ? La réponse n'appartient pas à la BEI.

M. Jean-Paul Emorine . - Avec notre collègue Didier Marie, nous avons récemment déposé une proposition de résolution européenne et un avis politique au sujet du plan d'investissement pour l'Europe, qui ont été adoptés à l'unanimité par la commission des affaires européennes le 11 février 2015. J'indique que nous avons pu présenter nos travaux à Philippe de Fontaine Vive. Le sujet est complexe surtout quant à la mise en oeuvre du dispositif, même si les intervenants se montrent rassurants et prennent le temps d'expliquer le dispositif. Je souligne que le plan d'investissement pour l'Europe est un plan d'urgence sur trois ans, permettant notamment de financer de grands projets d'infrastructures en évitant le recyclage de crédits. Deux exemples permettent d'en faire ressortir les enjeux. Tout d'abord, les garanties apportées doivent permettre d'aider les entreprises à investir dans la recherche et dans l'innovation alors qu'elles sont timides à ce sujet et que le contexte économique y incite peu. Ensuite, il y a la question des infrastructures et des interconnexions et qui est plus compliquée pour les élus que nous sommes. Dans le cas du numérique, il s'agit en particulier du déploiement des réseaux haut débit, or ce sont les collectivités territoriales qui sont les maîtres d'oeuvre, même si l'État peut aussi y participer. Je m'interroge donc sur la place des collectivités territoriales dans le plan d'investissement pour l'Europe et sur la place des enjeux du monde rural en son sein ?

M. Claude Raynal . - J'ai eu l'occasion de rencontrer la BEI lorsque je faisais partie des responsables de la métropole de Toulouse : je sais toute l'importance de cette institution, qui fonctionne bien. Je souhaiterais disposer de renseignements complémentaires sur plusieurs points.

Je serais tout d'abord assez curieux que l'on m'explique ce qu'est un expert indépendant, et où un tel individu peut être recruté : les experts réellement qualifiés ne travaillent-ils pas déjà depuis longtemps en lien avec les services de la BEI ou de la Commission européenne ?

Par ailleurs, il faut noter que la BEI manie en général des sommes très importantes : son intervention se concentre d'ordinaire sur peu de projets, avec chacun un gros « ticket financier ». Autour de ce système s'articule le fonctionnement d'institutions comme la Caisse des dépôts et consignations, qui peut regrouper un ensemble de petits projets dans un programme commun, pouvant ainsi bénéficier des instruments financiers mis à disposition par le BEI. J'aimerais donc savoir, dans le cadre du plan d'investissement Juncker, quel sera le montant minimum des sommes engagées permettant l'intervention de la BEI ? L'ordre de grandeur sera-t-il, comme c'est habituellement le cas, d'environ 50 millions d'euros ? Comment le comité d'expert, quand il examinera une enveloppe de projets, pourra-t-il analyser l'ensemble des investissements proposés ?

Il serait également intéressant de savoir comment le réseau bancaire privé, avec lequel vous entretenez de bonnes relations mais pour lequel vous constituez néanmoins un concurrent, va se rémunérer. Maîtrisez-vous les paramètres de cette rémunération ? Limitez-vous, par exemple, le taux de prêt de la banque ? On peut en effet imaginer que lorsqu'une institution porte une part du risque, elle souhaite également augmenter son taux en conséquence. La rémunération des investissements privés dans le cadre du « plan Juncker » doit rester intéressante afin d'attirer durablement les investisseurs.

Je pense qu'il faudrait que nous soyons en mesure d'identifier un certain nombre de beaux petits projets, qui agglomérés, soient de nature à être financés par le « plan Juncker ». L'idée n'est pas de replacer les « rossignols », les projets récurrents et non menés à terme, de chaque gouvernement. Si je considère que c'est réellement dans les petits projets que peut résider l'apport du « plan Juncker », c'est que tout le reste, la BEI le fait déjà, et je ne sache pas que les fonds manquent en matière de transport, d'énergie, recherche, et télécoms. Ces secteurs ont déjà donné lieu à des accords, ciblés sur certains projets, avec la Commission européenne. Pouvez-vous nous éclairer à ce sujet ?

Enfin, vous nous dites, la main sur le coeur, qu'il n'y aura pas de répartition géographique : une analyse politique oblige à nuancer cette idée, puisque de tous petits pays comme Malte, par exemple, bénéficieront certainement du plan sur un ou deux projets. La distribution du financement ne sera certes peut-être pas exactement proportionnelle au poids de chaque État-membre dans le budget, mais il est permis de douter que même le plus petit des États européens ne recevra absolument aucun financement, alors même qu'un point de vue strictement économique aurait pu le justifier.

M. Éric Doligé . - Il ressort de nos échanges que, si trouver de l'argent et des projets à financer ne pose pas de problème, c'est le facteur temps qui peut susciter une certaine inquiétude. En effet, en matière de financement de projets, un horizon à trois ans est considéré comme un horizon de court terme.

Cela signifie-t-il que les projets sélectionnés seront, globalement, des projets déjà prêts à démarrer, et qui ne rencontraient plus que des problèmes de financement ? En d'autres termes, le « plan Juncker » va-t-il permettre la mise en place de projets nouveaux, ou accélérer celle de projets déjà bien avancés ? Il faut en effet rappeler que le but du plan était, dans un contexte où certaines institutions, dont les collectivités territoriales, tendent à ralentir leurs investissements, d'injecter dans l'économie un volume important d'investissements nouveaux.

L'assistance technique devrait jouer un rôle important pour que chacun comprenne le fonctionnement du plan et les modalités de sélection des projets.

Ce qui me préoccupe donc avant tout, c'est la rapidité avec laquelle nous sommes capables de déployer ces investissements. Vous avez parlé des universités, plus exactement de la façon dont elles pourraient mobiliser un milliard d'euros sans augmenter leurs budgets, mais en les utilisant mieux. Je pense également à un autre plan, sur les établissements d'hébergement des personnes âgées dépendantes (EHPAD). Un plan de cette nature pourrait sans difficulté représenter 10 milliards d'euros sur trois à quatre ans pour remise aux normes au plan national. Il s'agirait d'un grand nombre de petits projets, probablement 2 000 à 3 000 projets, qui pourraient être mis en oeuvre.

Mme Michèle André, présidente . - Il est bien connu qu'en France, notre réglementation est tout particulièrement exigeante, et peut ralentir des procédures que l'on souhaiterait plus rapides. Sans préjuger de la situation dans d'autres pays, y aurait-il un volet réglementaire général dans le « plan Juncker » ? Cela vous semblerait-il utile ?

M. Michel Canevet . - Je voudrais savoir si vous disposez, à la suite de vos travaux préparatoires, d'une typologie des différents types de projets qu'il faudrait privilégier en France pour permettre un effet de levier important.

Vous avez évoqué une durée de financement pouvant aller jusqu'à vingt ans : cette durée sera-t-elle la durée moyenne d'accompagnement des projets, ou constitue-t-elle une durée maximale ? Si les financements sont de courte durée, cela amènerait à se poser la question d'un plan d'investissement ultérieur.

Enfin, nous avons parlé de l'assistance technique mise à la disposition des États-membres. Les structures existantes en France vous semblent-elle adaptées au « plan Juncker », ou faudrait-il en imaginer d'autres ?

M. Benjamin Angel, chef d'unité à la direction générale des affaires économiques et financières de la Commission européenne . - En ce qui concerne la possibilité d'accès direct des collectivités territoriales, je confirme qu'il n'y aura pas de médiation par les États pour la présentation de projets : tout promoteur peut soumettre son projet à la BEI, qui l'étudiera et, le cas échéant, le soumettra au comité d'experts responsable du choix final.

L'indépendance des experts est une question importante. Il est envisagé à l'heure actuelle - mais tout ceci est encore fluctuant - que le comité d'investissement comporte huit personnes, dont l'indépendance sera assurée par une procédure de sélection ouverte, à travers un appel à candidatures. La sélection sera faite vraisemblablement par la Commission européenne, et les conditions de leur nomination viseront à leur donner des garanties statutaires de complète indépendance. Ces experts ne pourront en aucun cas prendre d'instruction auprès d'acteurs publics ou privés, sous peine de leur renvoi.

Un point très important, pour tous les acteurs du « plan Juncker », est de s'assurer que ces huit personnes réunissent bien l'expertise nécessaire, c'est-à-dire une connaissance suffisante des différents secteurs, mais aussi des différents marchés géographiques : on n'investit pas en Estonie comme on investit à Chypre.

Le montant minimum du ticket est un des points en discussion par le co-législateur. Le Conseil n'a pas introduit d'éléments particuliers à ce sujet. Le projet de rapport issu du Parlement européen fait référence de façon très claire à la micro finance. Plusieurs éléments convergents laissent à penser que le Parlement européen ne souhaite pas instaurer un engagement financier minimum permettant l'accès à la BEI. Celle-ci a mené quelques expériences en matière de micro finance - pas beaucoup. En général, les tout petits projets sont plutôt traités par le fonds européen d'investissement, dont les activités sont intermédiées : ce sont les banques publiques qui distribuent les fonds mis à disposition. Pour le volet infrastructure et innovation, on ne souhaite pas, pour le moment, avoir de trop petits projets, car ils induiraient pour le comité d'investissement - qui devra les analyser - une charge de travail disproportionnée par rapport aux enjeux financiers. Il s'agira donc d'agréger ces projets de faible ampleur sur une plate-forme d'investissement, qui puisse être examinée en une seule fois.

Vous avez indiqué que la BEI finance déjà des projets économiquement intéressants. Cependant, le « plan Juncker » vise à assurer l'additionnalité des fonds levés : en d'autres termes, il s'agit de ne financer par ce biais que des projets qui ne pourraient l'être dans les conditions normales de fonctionnement de la BEI. On veut permettre, par la garantie européenne, que des projets soient menés qui n'auraient pas pu voir le jour sans elle. Cela suppose un examen projet par projet. Ce sera le rôle du comité d'investissement de s'assurer que ce critère est bien rempli - dans le cas contraire, il n'aurait été question que de transférer l'activité de la BEI vers des fonds sous garantie publique, ce qui présente, du point de vue du contribuable européen, un intérêt limité.

Concernant la répartition géographique des investissements, les États ont accepté qu'il n'y en ait aucune. Seul demeure un principe de bon sens, visant à éviter qu'un seul secteur ou qu'une seule zone géographique ne concentre une proportion excessive d'investissements. Pour donner un exemple, volontairement caricatural, il ne satisferait personne que l'Allemagne bénéficie de 90 % du plan...

Mme Michèle André, présidente . - Sauf les Allemands, peut-être !

M. Benjamin Angel, chef d'unité à la direction générale des affaires économiques et financières de la Commission européenne . - Peut-être, en effet.

Dans les débats sur l'opportunité d'un critère de répartition géographique, les petits pays avaient tendance à défendre cette option. Nous les avons convaincus d'y renoncer, car un tel critère aurait conduit à ce qu'un nuage de suspicion, de la part des investisseurs privés, pèse sur tous les projets menés. Chacun se serait demandé si le financement de l'investissement obéissait à une logique économique ou était le fruit d'interférences politiques excessives. Ce problème est évité en laissant la BEI et le comité d'experts seuls juges de la pertinence des projets.

Concernant le facteur temps, je pense utile de mentionner que le contrôle par la Commission européenne des investissements publics susceptibles de constituer des aides d'État sera allégé dans le cas où le projet reçoit un financement agréé par le comité d'investissement. En effet, la BEI et le comité d'experts auront déjà analysé le projet et ses risques en matière de distorsion de la concurrence : la Commission européenne n'effectuera donc qu'un examen accéléré du dossier, qui devrait prendre deux mois au lieu d'un an. Il s'agit d'un élément susceptible de renforcer la rapidité de mise en place des investissements.

Vous avez évoqué, Madame la Présidente, la réglementation : il y a effectivement, dans le « plan Juncker », un volet qui vise à lever les obstacles à l'investissement. Il y a certains domaines dans lesquels la Commission européenne a d'ailleurs déjà lancé des actions, comme la création d'une union de l'énergie, d'une union des marchés de capitaux : tout ceci va être décliné dans une succession de textes. Il faut avoir conscience que les différents États membres ont, en matière de réglementation, des performances spectaculairement variables. Un classement indépendant et au-dessus de tout soupçon, celui de la Banque mondiale, concernant la facilité à faire des affaires, montre que certains États européens sont parmi les meilleurs : il s'agit notamment du Royaume-Uni, du Danemark, de la Suède et de la Finlande. Il est d'ailleurs intéressant de noter que ces pays sont pour les uns de tradition libérale, pour les autres largement orientés vers la social-démocratie : la facilité à faire des affaires ne recouvre donc pas une fracture politique entre droite et gauche. D'autres États européens, d'après le classement de la Banque mondiale, sont moyens : la France en fait partie. D'autre encore sont très mauvais : Malte et Chypre notamment. Il y a donc une réelle réflexion à avoir, dans l'Union européenne, sur l'élaboration d'un cadre plus favorable à l'investissement.

Sur la durée des projets, il est difficile de répondre a priori : les prêts accordés dépendront des projets présentés. Il n'y a pas de durée moyenne établie à l'avance et nous ne pourrons l'évaluer qu' ex - post .

M. Philippe de Fontaine Vive, vice-président honoraire de la Banque européenne d'investissement . - J'ai insisté en parlant des projets et des promoteurs sur le mot « pragmatisme ». Je confirme que les collectivités locales sont des promoteurs qui sont les bienvenus. Ensuite, il y a un problème qui est de faire en sorte que les élus ne se retrouvent pas dans une situation déséquilibrée dans leurs rapports avec les experts européens. Il y a donc besoin d'agglomérer les projets, par exemple par programmes. L'idée d'Éric Doligé, s'agissant des EHPAD, est typiquement le genre d'innovation intéressante : il s'agit de déceler un besoin économique qui connait une difficulté financière, de le transformer en programme de prêt et, s'il y a une réalité économique, des intermédiaires de prêts pourront se montrer intéressés. C'est comme cela que sont menés les projets de programme en matière d'efficacité énergétique ou les programmes « collèges » et « lycées » des départements et des régions, et c'est ce genre de projets que j'ai demandé aux banques françaises de nous proposer.

Pour continuer sur la volonté de pragmatisme, il n'y aura pas une typologie et une maturité moyenne qui seront fixées ex ante . Dans l'analyse des projets, l'originalité de la BEI est de fixer comme maturité de prêt la durée de vie économique du projet moins un à deux ans.

La relation avec le réseau bancaire est déterminante pour cette assurer une capacité de diffusion sur le territoire. Cela nécessite que la BEI soit en discussion avec les banques afin de les intéresser aux projets, tout en prenant garde à ce que ce soit bien le bénéficiaire final de l'investissement qui tire l'avantage financier et non l'intermédiaire financier, car sinon il n'y aurait aucune raison d'avoir un dispositif public de financement. Pour cela, la BEI mise beaucoup sur la transparence et sur la mise en concurrence des réseaux bancaires.

La BEI n'a pas raisonné sur un plafond de taux du fait de leur forte variation. En revanche, elle a indiqué, par exemple s'agissant des prêts aux PME, un minimum d'avantages financiers à transférer aux PME. Celles-ci doivent ainsi bénéficier d'au moins 25 points de base de moins que si elles avaient fait appel à la même banque mais sans un dispositif financier soutenu par l'Europe.

La BEI a beaucoup de doutes sur l'indépendance des experts. À la différence de la Banque mondiale et de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, la BEI estime que les experts les plus indépendants sont ses salariés. Elle a donc constitué en son sein un département d'ingénieurs, qui tirent leur expérience des projets qu'ils évaluent dans l'ensemble de l'Europe, ce qui permet une performance de la critique.

Une autre question que je considère comme majeure est de savoir si l'on arrivera à descendre la taille moyenne des projets financés. La BEI compte 2 200 salariés pour une activité de l'ordre 70 milliards d'euros, ce qui fait qu'elle n'arrive pas à appréhender les projets qui représentent moins de 50 millions d'euros de financement. Elle a pu s'adresser à des entreprises de taille intermédiaire sur des montants compris entre 7 et 50 millions d'euros mais uniquement s'agissant de projets pilotes, soit un nombre peu élevé de cas. Une des grandes décisions à prendre dans les moins à venir est le recrutement de centaines de personnes pour être capable de faire face à l'afflux de projets. La question se pose également de savoir si ces salariés nouveaux doivent être basés à Luxembourg ou s'il faut renforcer les bureaux présents dans les États membres.

Dans la mise en oeuvre pratique du plan, un point important est d'assurer de bonnes conditions d'échanges avec les banques, les élus locaux, les fédérations professionnelles, ou la Caisse des dépôts et consignations en France, afin notamment de leur apporter l'expertise technique dont ils ont besoin. D'où l'importance du volet « assistance technique » de ce plan d'investissement. Il convient d'avoir davantage de personnels proches des marchés pour être capable de répondre aux questions notamment juridiques que poseront les promoteurs et qui diffèrent selon les États membres.

M. Francis Delattre . - Actuellement, la Banque centrale européenne (BCE) rachète massivement des dettes d'État, ce qui a pour conséquence d'accroitre le flux de liquidités disponibles, qui ne viennent pas toujours alimenter l'économie réelle. Ainsi, le CAC 40 a pratiquement augmenté de 15 à 20 %, ce qui laisse croire que l'argent investi dans les entreprises est mieux rémunéré, ce qui ne serait pas un mauvais signe. Ma première question est donc de savoir quelles sont les relations qui existent entre la BCE et la BEI.

Par ailleurs, un intervenant a expliqué qu'un relais de croissance a été trouvé suite à l'ouverture de l'Europe aux pays de l'Est. Or ce que l'on constate sur le terrain, c'est que ce sont moins les États que les entreprises qui ont bénéficié des investissements européens, et en particulier beaucoup d'entreprises allemandes, par exemple dans le secteur automobile. Est-ce que la BEI prend en compte ce facteur ?

M. François Marc . - Ma question rejoint celle de Claude Raynal et porte sur l'expertise. Les éléments apportés par Philippe de Fontaine Vive y répondent cependant assez largement. Il me semble que, dans la mesure où de nombreux établissements font déjà ce travail d'analyse, le recours à des experts traduit la nécessité de pouvoir distinguer de projets présentant un très haut degré de risque. Or, dès lors que le risque est élevé, apparaît, en filigrane, la question de l'opportunité. J'ai donc du mal comprendre quel sera le degré d'indépendance des experts par rapport à la décision politique.

Par ailleurs, il me semble que l'on pourrait davantage s'appuyer sur les experts déjà en postes plutôt que de lancer un vaste programme de recrutements. Il me semblerait plus opportun, alors que les États doivent réaliser des économies sur de nombreux postes budgétaires, d'avoir recours aux experts nationaux, tels que les agents de la Caisse des dépôts ou de la BPI, pour ce qui concerne la France.

M. Philippe de Fontaine Vive, vice-président honoraire de la Banque européenne d'investissement . - J'apporterai deux éléments de réponse aux questions qui viennent d'être posées. S'agissant des relations entre la BCE et la BEI, nous constatons une évolution positive. Lorsque j'ai été nommé, en 2003, j'ai souhaité rencontrer Jean-Claude Trichet, alors gouverneur de la BCE. Celui-ci s'est montré surpris de cette initiative. Pendant douze ans, les relations entre la BEI et la BCE ont été pratiquement inexistantes et personne ne jugeait opportun de modifier cette situation. Aujourd'hui, la BEI a accès à la liquidité de la BCE, ce qui rassure les investisseurs obligataires. Par ailleurs, dans le cadre du programme qui se met en oeuvre, les titres émis par la BEI seront éligibles au rachat par la BCE. En douze ans, des liens se sont donc créés au-delà des réticences administratives et culturelles.

S'agissant des besoins de recrutement, j'ai demandé à la direction générale du Trésor et à la Caisse des dépôts et consignations qu'elles puissent mettre certains de leurs agents à la disposition de la BEI. Cette demande n'a trouvé aucun écho. Les « machines nationales » semblent organisées pour empêcher le transfert d'agents vers les organismes communautaires, alors qu'il serait intéressant que des agents français puissent travailler sur des dossiers allemands, britanniques, etc. et réciproquement. Toutes les demandes qui ont été formulées, y compris sur une base temporaire de trois ans, n'ont pas été suivies d'effet. Pour autant, il existe un vrai besoin pour une force de travail capable de mener ce plan de manière efficace. À titre de comparaison, la Banque mondiale compte cinq fois plus de personnel pour un chiffre d'affaires équivalant aux deux tiers de celui de la BEI. Or, ces personnels sont, pour l'essentiel, également payés par les contribuables.

Mme Michèle André, présidente . - Tout à fait.

M. Philippe de Fontaine Vive, vice-président honoraire de la Banque européenne d'investissement . - Nous avons d'un côté 10 000 personnes pour un chiffre d'affaires de 45 milliards d'euros par an, alors qu'avec 2 200 personnes, la BEI réalise un chiffre d'affaires de 70 milliards d'euros.

Il y a donc un besoin réel de personnels, qu'ils soient issus du monde de l'entreprise ou des administrations publiques.

M. Antoine Quero-Mussot, expert confirmé en instruments financiers innovants auprès de la direction générale du budget de la Commission européenne . - On nous demande constamment le niveau de retour des investissements réalisés. Or, pardonnez-moi cette expression, mais le concept du juste retour nous « empoisonne » la vie, même s'il est légitime. En effet, il nous est difficile d'avoir une idée précise de l'ensemble des retours. À titre d'exemple, le contribuable allemand a l'impression de payer pour tout le monde.

Or, en Espagne, pendant vingt ans, 1 % du PIB provenait des aides destinées à la cohésion. Ces aides ont permis à l'Espagne d'acquérir des trains à grande vitesse Siemens, ce qui s'est traduit par le recrutement d'ouvriers allemands qui, pour certains d'entre eux, sont partis en vacances dans les Baléares et ont dépensé une partie de leurs revenus dans des restaurants de Palma de Majorque, dont les propriétaires ont ensuite acheté des Mercedes. À travers cet exemple, je veux montrer qu'il y a une circularité.

Le « plan Juncker » n'a pas de quota national, d'enveloppe géographique. L'Allemagne ne sera pas le premier bénéficiaire de ce programme. La balle sera donc dans le camp des États membres, des collectivités, des promoteurs de projets publics comme privés.

M. Benjamin Angel, chef d'unité à la direction générale des affaires économiques et financières de la Commission européenne . - Pour répondre à la question relative à la relation entre la BCE et la BEI, il me semble important de comprendre que ce n'est pas le fonds d'investissement européen qui ira sur les marchés directement, mais la BEI. Or, les titres émis par la BEI sont éligibles au rachat par la BCE dans le cadre de sa politique d'assouplissement quantitatif. Cela permettra de bénéficier de conditions de financement plus favorables. Je rappelle que la mécanique standard de l'assouplissement quantitatif passait par le canal du taux d'intérêt. Dans une situation où les taux sont historiquement bas, les canaux principaux de transmission seront plutôt, d'une part, un phénomène de substitution et, d'autre part, le canal du taux de change. En effet, l'assèchement des titres d'État disponibles sur les marchés devrait pousser les investisseurs à se tourner vers d'autres actifs, ce qui se traduira par une hausse des prix et une baisse des rendements de ces actifs de nature à faciliter les conditions d'accès au financement pour l'ensemble de l'économie. Le deuxième canal de transmission est celui du taux de change. Au regard de l'évolution récente du cours de l'euro, il semblerait que cela canal soit fortement à l'oeuvre. Cela constitue une bonne nouvelle pour les économies qui ont du mal à être compétitives au niveau international, dont la France.

Sur la question du contrôle des aides, je rappelle que les aides dépassant un certain montant ou qui peuvent avoir un impact sur le marché font l'objet d'un contrôle exercé par la direction générale de la concurrence de la commission, laquelle n'a pas fait preuve de timidité, loin s'en faut. Je citerais l'exemple de la SABENA, dont la faillite a notamment résulté du refus d'une aide d'État par la commission. Or, le premier client de cette compagnie était précisément la Commission elle-même...

S'agissant de la question de François Marc concernant les besoins en experts et la possibilité de laisser le politique décider en la matière...

M. François Marc . - J'ai dit le contraire. Je constate que les experts travaillent sur un champ de risque élevé et sont donc, d'une certaine manière, conduits à s'exprimer dans un domaine politique, ce qui m'intrigue.

M. Benjamin Angel, chef d'unité à la direction générale des affaires économiques et financières de la Commission européenne . - J'avais mal compris votre question. La tâche qui leur incombe est en effet difficile et susceptible d'avoir des implications politiques. Mais je suis heureux que nous partagions ce souhait de dépolitiser la prise de décision. Dans le cadre de ce plan, il nous faut en effet éviter, pour reprendre l'expression de Claude Raynal, non pas un rossignol, mais un concert de rossignols au niveau européen.

II. EXAMEN DU RAPPORT (18 MARS 2015)

Réunie le 18 mars 2015, sous la présidence de Michèle André, présidente , la commission procède à l'examen du rapport de M. Albéric de Montgolfier et à l'élaboration du texte de la commission sur la proposition de résolution n° 298 (2014-2015) de MM. Jean-Paul Emorine et Didier Marie, au nom de la commission des affaires européennes, sur le plan d'investissement pour l'Europe.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Notre commission a été saisie d'une proposition de résolution européenne adoptée, à l'initiative de nos collègues Jean-Paul Emorine et Didier Marie, par la commission des affaires européennes.

Cette proposition porte sur le plan d'investissement pour l'Europe, communément appelé « plan Juncker ». Dans ce cadre, la Commission européenne a publié, en novembre dernier, une communication précisant les principaux aspects du plan d'investissement et a déposé, le 13 janvier 2015, une proposition de règlement sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques.

Le plan d'investissement pour l'Europe intervient dans un contexte marqué par la faiblesse de l'activité économique et, en particulier, de l'investissement. En effet, les données disponibles à ce jour montrent que la formation brute de capital fixe totale a reculé de près de 320 milliards d'euros entre 2008 et 2013, ce qui correspond à une diminution de 10,9 % en valeur. Les causes de ce phénomène sont multiples. À côté de l'éclatement des bulles immobilières, qui a tout particulièrement touché des pays comme le Royaume-Uni, l'Irlande, ou encore l'Espagne, peuvent être également mentionnés les ajustements budgétaires menés dans l'Union et, plus particulièrement dans la zone euro. De même, l'importance du taux de chômage, qui atteignait encore 11,5 % en moyenne dans l'Union à la fin de l'année 2014 selon Eurostat, ainsi que l'affaiblissement de la confiance des consommateurs et des entreprises, participent à la faiblesse des investissements.

Il ne s'agit pas uniquement d'un problème européen. L'insuffisance de l'investissement constitue désormais une préoccupation mondiale ; ceci ressort clairement des récentes publications du Fonds monétaire international (FMI) et du plan d'action défini lors de la réunion du G20 de Brisbane en Australie en novembre 2014, qui appellent à l'engagement de programmes d'investissement en infrastructures.

Dans ce cadre, il existe un véritable contraste entre la situation européenne et celle des États-Unis. En effet, dans ce pays, la formation brute de capital fixe a retrouvé son niveau de 2007 dès l'année 2012, ce qui n'est toujours pas le cas dans l'Union européenne, ni même dans la zone euro.

Ce « décrochage » de l'Europe en matière d'investissements est d'autant plus inquiétant qu'il vient menacer les perspectives de croissance à moyen et long termes dans les différents États européens. En effet, le manque d'investissement réduit le niveau de capital consacré aux activités productives ; il accroît l'obsolescence des infrastructures et des équipements, ce qui dégrade la productivité des facteurs de production. Enfin, une telle situation nuit aux dépenses de recherche et développement (R&D), qui sont porteuses de progrès techniques à long terme.

Dans ces conditions, il paraissait nécessaire d'activer l'ensemble des leviers susceptibles de permettre une relance de l'investissement dans l'Union européenne.

C'est pourquoi la proposition de résolution européenne qui nous est soumise vise à exposer les orientations que le Sénat souhaite voir défendues par le Gouvernement au cours des négociations qui continueront à se dérouler jusqu'à ce que le plan d'investissement pour l'Europe soit pleinement opérationnel. La proposition de règlement sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques est, en effet, encore en cours d'examen par le Parlement européen ; son adoption définitive par le Parlement et le Conseil de l'Union européenne est prévue pour le mois de juin prochain, en dépit de la complexité des négociations en cours.

La proposition de résolution européenne s'organise autour des trois « volets » qui composent le « plan Juncker ».

Le premier « volet » consiste en la création d'un Fonds européen pour les investissements stratégiques devant permettre la mobilisation d'au moins 315 milliards d'euros d'investissements supplémentaires au cours des trois prochaines années.

Ce Fonds doit être créé auprès de la Banque européenne d'investissement, sur la base d'un accord entre cette dernière et la Commission européenne. Le Fonds devrait disposer d'un apport initial de 21 milliards d'euros, comprenant une garantie de 16 milliards d'euros issue du budget général de l'Union européenne et d'une contribution de 5 milliards d'euros de la Banque européenne d'investissement.

Cet apport de 21 milliards d'euros devrait permettre au Fonds de lever des financements d'un montant trois fois supérieurs, qui seraient réinvestis sous la forme, notamment, de fonds propres et de dette subordonnée, ce qui doit permettre d'attirer des investissements privés représentant quatre fois le montant des financements apportés.

Au total, l'effet de levier attendu du Fonds s'élève à 15. Si un tel effet multiplicateur pose souvent question, en raison de son caractère prétendument élevé, nous avons eu l'occasion de constater, lors de notre audition de la semaine dernière, qu'il s'agissait d'une hypothèse plutôt « conservatrice ». En effet, l'augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement intervenue en 2012 a eu un effet de levier de 18 - l'augmentation de capital de 10 milliards d'euros étant en passe d'avoir permis 180 milliards d'euros d'investissements supplémentaires. De même, au cours de l'audition, Philippe de Fontaine Vive, vice-président honoraire de la Banque européenne d'investissement, a précisé que les effets de levier observés dans le cadre des différents programmes de la Banque européenne d'investissement étaient généralement compris entre 18 et 28.

En réalité, plus que dans l'estimation de l'effet multiplicateur, la question paraît résider dans le surcroît « net » d'investissements permis par la création du Fonds. En effet, les crédits apportés au sein du Fonds proviennent de programmes eux-mêmes susceptibles d'être à l'origine d'un effet multiplicateur significatif - notamment le Mécanisme pour l'interconnexion en Europe (MIE) et le programme-cadre pour la recherche et l'innovation « Horizon 2020 ». À ce titre, je relève que certains députés européens souhaitent amender la proposition de règlement sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques pour exclure le financement de celui-ci par le MIE et le programme « Horizon 2020 ».

Sur ce point important, je vous proposerai de compléter la proposition de résolution européenne et de souligner la nécessité que les crédits du budget général de l'Union européenne réalloués dans le cadre de la mise en oeuvre du plan d'investissement soient ceux présentant le plus faible effet multiplicateur.

Par ailleurs, l'effet de levier du Fonds européen pour les investissements stratégiques dépendra étroitement des modalités de sélection des projets financés. En particulier, comme le souligne la proposition de résolution européenne, il conviendra de veiller à ce que les projets retenus n'eussent pu bénéficier de financements en l'absence du plan d'investissement, conformément au principe d'additionnalité. En outre, cette proposition de résolution relève que les projets sélectionnés devraient avoir un impact à court terme, de manière à ce que le « plan Juncker » contribue pleinement à la reprise de l'activité économique en Europe ; elle insiste également sur la nécessité que les collectivités territoriales puissent bénéficier du plan d'investissement pour l'Europe - la Banque européenne d'investissement nous a rassurés sur ce dernier point. Enfin, elle rappelle qu'un compromis doit être trouvé entre l'exigence d'éviter un « saupoudrage » des crédits et celle d'aboutir à une couverture équilibrée du territoire européen.

S'agissant de la gouvernance du Fonds, celle-ci devrait reposer sur un comité de pilotage qui devra décider « de son orientation stratégique, de la répartition stratégique de ses actifs et de ses politiques et procédures opérationnelles » et d'un comité d'investissement, dont la fonction sera de procéder à une sélection des projets d'investissement proposés par les services de la Banque européenne d'investissement.

À ce stade, la position de négociation adoptée par le Conseil de l'Union européenne le 10 mars 2015 exclut du comité de pilotage tout autre membre que la Commission européenne et la Banque européenne d'investissement, écartant donc la représentation des États membres ou encore des tiers. C'est la raison pour laquelle je proposerai de supprimer les développements de la proposition de résolution demandant à ce que « soient apportées des précisions sur la possibilité pour des investisseurs non ressortissants d'États membres de l'Union européenne de contribuer au FEIS et donc sur les conditions de leur participation au comité de pilotage ». De même, la proposition de résolution souhaitait préciser que les experts indépendants du comité d'investissement devaient aussi disposer « d'une solide expérience des collectivités territoriales et des politiques sociales » ; je propose également de supprimer cette précision qui ne me paraît pas nécessaire.

Pour finir, la proposition de résolution européenne insiste sur la nécessité que le Fonds européen pour les investissements stratégiques soit responsable démocratiquement, devant le Parlement européen et les parlements nationaux.

Le deuxième « volet » du plan d'investissement pour l'Europe vise à prendre des initiatives ciblées de sorte que le financement supplémentaire des investissements ainsi généré réponde aux besoins de l'économie réelle.

À cette fin, il est tout d'abord prévu la mise en place d'une réserve de projets à l'échelle de l'Union européenne. Il s'agit d'établir, sur la base d'une analyse indépendante réalisée sous l'égide de la Commission européenne et de la Banque européenne d'investissement, une liste des projets viables existant en Europe pour en renforcer la visibilité auprès des investisseurs. La logique retenue est donc celle d'une « labélisation » des investissements dans le cadre de la réserve de projets.

Je précise que cette réserve de projets est distincte de la liste de 2 000 projets, correspondant à des investissements de 1 300 milliards d'euros, identifiés par la task force composée de la Commission, de la Banque européenne d'investissement et des États membres à la fin de l'année 2014, dont nous avons parlé la semaine passée.

Ensuite, il est proposé de créer une « plateforme de conseil en investissement » au sein de la Banque européenne d'investissement, qui aura vocation à apporter une aide technique aux promoteurs de projets, aux investisseurs ou encore aux autorités publiques, dans le recensement, la préparation et le développement des projets d'investissement. Cette plateforme ferait ainsi office de guichet unique pour le conseil technique au financement de projets dans l'Union.

La proposition de résolution européenne demande des informations complémentaires sur le fonctionnement de cette plateforme, « en particulier sur son articulation avec les guichets uniques existants et sur son rôle envers les collectivités territoriales », ainsi que sur les relations à venir entre la Banque européenne d'investissement et les banques nationales de développement.

Le troisième et dernier « volet » du plan d'investissement consiste à créer un environnement plus propice à l'investissement dans l'Union européenne. Ce « volet », nécessairement de plus longue haleine dans sa mise en oeuvre que les deux précédents, doit se déployer à plusieurs niveaux. Au niveau communautaire, le Parlement européen et le Conseil sont invités, en tant que législateurs de l'Union européenne, à adopter des mesures tendant à améliorer le cadre réglementaire relatif à l'investissement. Au niveau national, chaque État membre est évidemment incité, notamment dans le cadre du semestre européen, à adopter des mesures allant en ce sens.

Dans sa communication du 26 novembre 2014, la Commission a identifié trois axes d'amélioration de l'environnement de l'investissement.

Premièrement, la simplification de la réglementation et le renforcement de sa prévisibilité, en particulier afin de réduire une incertitude qui affecte l'investissement, ainsi que les charges administratives des entreprises.

Deuxièmement, le développement de nouvelles sources de financement à long terme, alternatives au financement bancaire qui demeure prégnant dans l'Union européenne, ce qui passe notamment par la création d'une union des marchés de capitaux intégrant l'ensemble des États membres. À cet égard, je vous rappelle qu'Alain Papiasse, directeur général adjoint de BNP Paribas, a considéré, lors de son audition par notre commission le 18 février dernier, que la mobilisation de 315 milliards d'euros par le « plan Juncker » serait particulièrement difficile « sans l'union des marchés de capitaux et sans activités de tenue de marchés dans les grandes banques européennes ».

Troisièmement, la suppression des freins à l'investissement dans le marché unique. Ceci suppose, selon la Commission européenne, d'accélérer la réforme de l'union européenne de l'énergie, de supprimer les obstacles à l'investissement dans les infrastructures et les systèmes de transport, ou encore d'instituer d'un marché unique numérique.

Sur le long terme, ce troisième « volet » devrait constituer le plus important du plan d'investissement pour l'Europe. Aussi, très logiquement, la proposition de résolution européenne « insiste sur la nécessité de parvenir à un environnement plus favorable aux investissements grâce à un allégement et à une harmonisation des règlementations européennes et nationales et souhaite à ce titre que le « volet » règlementaire du plan d'investissement soit mieux documenté, en particulier pour ce qui concerne la contribution de l'union de l'énergie et du marché unique du numérique à la levée des obstacles réglementaires à l'investissement dans l'Union européenne dans le respect des normes sociales et environnementales ».

Eu égard à l'importance du plan d'investissement pour l'Europe tant pour la reprise de l'activité que pour la croissance à long terme, il me semble que la proposition européenne qui nous est soumise doit recueillir notre soutien. Toutefois, dans la mesure où elle a vocation à orienter la conduite des négociations menées par le gouvernement français, il m'a semblé opportun de vous soumettre six amendements tendant à préciser la proposition de résolution européenne, sur lesquels nous reviendrons plus en détails dans quelques instants.

M. Jean-Paul Emorine , auteur de la proposition de résolution européenne . - Ce plan d'investissement est, en fait, une idée assez ancienne portée par la Banque européenne d'investissement (BEI), à laquelle je souscris pleinement. Le fonds devrait disposer initialement de 21 milliards d'euros, dont 16 milliards d'euros sous forme de garantie à partir du budget général de l'Union européenne et 5 milliards d'euros apportés par la BEI. Ceci permettrait d'atteindre 315 milliards d'euros d'investissements, grâce à un effet de levier très important.

Le fonctionnement du Fonds est complexe. Pour rédiger cette proposition de résolution européenne (PPRE), mon collègue Didier Marie et moi-même avons rencontré des représentants de la BEI, de la Banque publique d'investissement (BPI), de Bercy ou encore les commissaires européens concernés.

Au total, 2 000 projets ont été identifiés par le task force à la fin de l'année 2014, mais il est possible qu'aucun d'entre eux ne soit finalement retenu par le FEIS. Un point positif est que ce Fonds est destiné à un public assez large. Toutes les entreprises de moins de 3 000 salariés sont concernées, si bien qu'il devrait véritablement permettre d'aider les entreprises qui ont besoin dans la recherche et le développement (R&D).

Le Fonds doit servir à financer des projets qui n'auraient pas pu trouver de financement autrement. Je pense qu'il pourrait notamment être utilisé pour les investissements dans le haut débit. Ces projets peuvent être opérationnels très rapidement. En revanche, les investissements dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) n'auraient pas d'effet avant un certain temps. Or l'objectif est d'« injecter » plus de 300 milliards d'euros en trois ans. Il faut être pragmatique dans la sélection des projets.

Pour répondre à Albéric de Montgolfier, les États membres sont exclus du comité de pilotage car ils ont tous refusé d'y investir, dans la mesure où l'on ne sait pas encore quels projets seront financés.

Je relève, en outre, que la BEI a mis en place une plateforme qui pourra aider les collectivités à solliciter des financements, ce qui comble une lacune que nous avions constatée avec la BPI.

M. François Marc . - Je suis favorable à ce texte, d'autant plus que j'ai voté en sa faveur en tant que membre de la commission des affaires européennes. Je pense que les modifications proposées par le rapporteur général vont dans le bon sens.

Le « plan Juncker » est tout à fait légitime. Il y a une épargne abondante en Europe et c'est donc le rôle de la puissance publique de la mettre au service de l'investissement de long terme, en ces temps où l'on privilégie une vision à court terme.

Les investissements concernés seront ceux pour lesquels il y a une « perspective raisonnable de bonne viabilité économique ». Il s'agit donc d'investissements relativement risqués, ce qui pose la question de la sélection des projets. Je pense que c'est une bonne chose que cette tâche ne soit pas confiée aux États, qui pourraient avoir tendance à privilégier leurs propres priorités. Je pense, par exemple, à l'Allemagne et à la modernisation de ses infrastructures.

Je m'interroge en revanche sur le comité d'experts indépendants. La notion même d'indépendance des experts me laisse sceptique : on est toujours influencé par son parcours, ses relations, etc. Philippe de Fontaine Vive nous expliquait la semaine passée qu'ils avaient recruté plusieurs centaines d'ingénieurs et qu'ils seraient donc capables d'évaluer les projets. Ne devrait-on pas s'appuyer sur cette expertise interne à la BEI ? En France, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) a également une vraie compétence et devrait être un interlocuteur essentiel.

M. Francis Delattre . - J'ai quelques inquiétudes sur l'atteinte de l'objectif de 315 milliards d'euros. Le FEIS est en fait un fonds de garantie, puisqu'il repose essentiellement sur un effet de levier. Mais est-ce que les investisseurs privés seront vraiment au rendez-vous ? Les banques que nous avons rencontrées n'étaient pas enthousiastes...

La Banque centrale européenne (BCE) a lancé un vaste programme d'assouplissement quantitatif, à travers lequel elle va injecter chaque mois 60 milliards d'euros dans l'économie, en rachetant aux banques des emprunts d'État, notamment. Mais à quoi bon acheter des obligations assimilables du Trésor (OAT) qui ne produisent rien ! Il vaudrait mieux injecter cet argent dans l'économie réelle, en finançant directement la BEI. Ce serait un signal très positif adressé aux citoyens européens.

M. Bernard Lalande . - Je note que l'exposé des motifs indique que le Fonds pourrait servir à financer « le développement d'infrastructures, en particulier dans le domaine des transports, de l'énergie et du numérique ». Mais il est aussi écrit que le « plan Juncker » présenterait peu d'intérêt pour développer le haut débit en France. N'y a-t-il pas là une contradiction ?

M. Albéric de Montgolfier . - Il s'agit uniquement de l'exposé des motifs de la proposition de résolution européenne.

M. André Gattolin . - Je soutiens globalement les propositions du rapporteur général, à l'exception du premier amendement. Il me semble, en effet, nécessaire de rappeler que l'insuffisance des crédits du « plan Juncker » résulte directement de la faiblesse du budget européen.

Par ailleurs, une interrogation demeure sur le « plan Juncker » concernant l'effet multiplicateur. Si la Banque européenne d'investissement a pu obtenir des effets de levier supérieurs, il s'agissait de projets présentant une très forte rentabilité. Or, le plan d'investissement doit aussi financer des projets sociaux et éducatifs, pour lesquels les investissements privés seront nécessairement plus faibles.

Enfin, je n'ai pas particulièrement confiance dans les capacités d'expertise de la Banque européenne d'investissement. Il faut rappeler la nécessité d'une expertise contradictoire dans tous les domaines.

M. Marc Laménie . - Je m'interroge sur l'impossibilité d'allouer des subventions pour des projets qui sont portés par les collectivités territoriales. Par ailleurs, l'articulation du comité d'expert et du comité d'investissement semble particulièrement complexe.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - La logique du « plan Juncker » ne consiste pas à mobiliser des crédits budgétaires ou à accroître la masse monétaire. Ma véritable interrogation ne concerne pas l'effet de levier mais la capacité de mobiliser ces fonds en trois ans, compte tenu de la nature des investissements qui peuvent être soumis et des procédures applicables sur ces domaines. Je suis particulièrement sceptique sur ce point, sauf à recycler des projets existants.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Dans cette logique, l'amendement n° 1 propose de supprimer l'alinéa dénonçant la modestie du budget de l'Union européenne. Il s'agit d'un sujet déconnecté du « plan Juncker », dont l'objectif est précisément de mobiliser des investissements privés à partir d'un montant limité de crédits publics, compte tenu de la situation budgétaire des États.

M. François Marc . - Je suis plutôt favorable à la philosophie du « plan Juncker ». En effet, ce plan et l'action de la Banque centrale européenne sont complémentaires, même si les deux acteurs sont indépendants. L'assouplissement quantitatif vise à libérer des liquidités afin de permettre aux établissements financiers d'investir. Ces investissements seront facilités par les garanties apportées dans le cadre du « plan Juncker », qui devraient permettre de réduire le risque associé à certains projets.

M. Francis Delattre . - Ce que vient de dire François Marc est totalement complémentaire avec mes propos. Les banques françaises vont disposer de liquidités nouvelles grâce à l'action de la Banque centrale européenne. Il faudrait profiter de cette possibilité pour demander au système bancaire de s'associer véritablement au « plan Juncker » en affectant la moitié des 60 milliards au financement de la Banque européenne d'investissement.

M. Jean Germain . - Le financement des entreprises européennes est trop dépendant des banques, en comparaison avec la situation américaine. Or, les banques européennes refusent désormais de prendre des risques, ce qui conduit à un excès de liquidité et à une baisse de la rentabilité du capital.

L'amendement n° 1 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 2 précise que les dotations du budget de l'Union européenne reversées au fonds de garantie étaient elles-mêmes susceptibles d'être à l'origine d'un effet de levier significatif, ce qui doit conduire à s'interroger sur la capacité du plan d'investissement à susciter le surcroît d'investissements annoncé.

M. François Marc . - Il ne me semble pas opportun de porter un jugement de valeur sur l'effet de levier. La formulation du rapporteur général est néanmoins meilleure que celle du texte initial.

L'amendement n° 2 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 3 apporte une précision concernant l'effet de levier en soulignant la nécessité que les crédits du budget général de l'Union européenne réalloués dans le cadre de la mise en oeuvre du plan d'investissement soient ceux présentant le plus faible effet multiplicateur.

L'amendement n° 3 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 4 vise à exprimer le souhait qu'un projet nécessitant des subventions puisse être sélectionné par le Fonds européen pour les investissements stratégiques.

L'amendement n° 4 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 5 supprime la mention précisant que les experts du comité d'investissement doivent disposer d'une expérience des collectivités territoriales et des politiques sociales.

L'amendement n° 5 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 6 supprime l'alinéa 29, car la position de négociation arrêtée dans le cadre du Conseil de l'Union européenne du 10 mars dernier exclut du comité de pilotage tout autre membre que la Commission européenne et la Banque européenne d'investissement.

L'amendement n° 6 est adopté.

La proposition de résolution européenne a alors été adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

TABLEAU COMPARATIF

Proposition de résolution n° 298 (2014-2015) en application de l'article 73 quater du Règlement, sur le Plan d'investissement pour l'Europe

___

Proposition de résolution de la commission

___

Le Sénat,

Alinéa sans modification.

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Alinéa sans modification.

Vu la communication de la Commission européenne du 26 novembre 2014 intitulée Un plan d'investissement pour l'Europe (COM (2014) 903 final),

Alinéa sans modification.

Vu les conclusions du Conseil européen du 18 décembre 2014, en particulier les paragraphes 1 et 2,

Alinéa sans modification.

Vu la proposition de règlement de la Commission européenne du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques (COM (2015) 10 final),

Alinéa sans modification.

Vu le projet de budget rectificatif n° 1 au budget général 2015 du 13 janvier 2015 (COM (2015) 11 final),

Alinéa sans modification.

Vu la communication de la Commission européenne du 13 janvier 2015 intitulée Utiliser au mieux la flexibilité offerte par les règles existantes du Pacte de stabilité et de croissance (COM (2015) 12 final),

Alinéa sans modification.

Dès lors que l'investissement constitue l'une des priorités majeures de l'Union européenne, affirme son soutien de principe au plan d'investissement pour l'Europe, dont les grandes lignes ont été présentées par la Commission européenne le 26 novembre 2014, qui devrait permettre de mobiliser 315 milliards d'euros sur les années 2015 à 2017 ;

Alinéa sans modification.

Estime néanmoins que des incertitudes subsistent sur plusieurs aspects de ce plan ;

Alinéa sans modification.

Sur les modalités de financement du plan d'investissement

Alinéa sans modification.

Demande que le plan d'investissement mobilise des ressources additionnelles de manière à ce que les modalités de son financement ne compromettent pas la mise en oeuvre des programmes européens déjà approuvés ;

Alinéa sans modification.

Déplore l'insuffisance des crédits publics consacrés au financement du plan d'investissement, qui résulte directement de la modestie du budget de l'Union européenne ;

Alinéa supprimé.

Se montre réservé sur la crédibilité du ratio de 1 à 15 retenu pour calculer l'effet de levier susceptible de mobiliser 315 milliards d'euros auprès d'investisseurs privés à partir de 21 milliards d'euros de crédits publics ;

Constate que les dotations issues du budget général de l'Union européenne reversées au fonds de garantie de l'Union européenne, initialement dédiées, pour l'essentiel, au Mécanisme pour l'interconnexion en Europe et au programme-cadre de recherche « Horizon 2020 », étaient elles-mêmes susceptibles d'être à l'origine d'un effet de levier significatif ; s'interroge, pour cette raison, sur la capacité du plan d'investissement à susciter un surcroît d'investissements d'au moins 315 milliards d'euros à partir de 21 milliards d'euros de crédits publics, correspondant à un effet multiplicateur de 1:15 ;

Souhaite qu'une attention toute particulière soit portée à ce que les crédits du budget général de l'Union européenne réalloués dans le cadre de la mise en oeuvre du plan d'investissement au fonds de garantie soient ceux présentant le plus faible effet multiplicateur ;

Regrette que le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) dont l'institution est proposée exclue a priori tout recours aux subventions pour financer les projets des petites et moyennes entreprises et entreprises de taille intermédiaire (PME-ETI) et du secteur public, certains d'entre eux, notamment les projets d'infrastructures dont le retour sur investissement n'est pas immédiat, pouvant requérir ce type de financement ; regrette que le secteur public n'ait pas accès aux garanties du FEIS et s'inquiète dès lors de ce que les modalités de financement du FEIS risquent de restreindre le nombre de projets éligibles et empêchent ainsi le plan d'investissement d'atteindre ses objectifs ;

Souhaite que le fait, pour un projet, de nécessiter des subventions n'interdise pas sa sélection par le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) ;

Considère que le FEIS doit prendre en compte de manière significative le financement de projets bénéficiant aux PME-ETI et souhaite dès lors connaître la façon dont il s'articulera avec les dispositifs existants, en particulier avec le fonds européen d'investissement de la Banque européenne d'investissement, afin d'éviter tout effet d'aubaine ;

Alinéa sans modification.

Constatant que des interrogations demeurent sur l'impact des modalités de financement proposées sur l'utilisation des fonds structurels déjà alloués à la politique de cohésion, en particulier sur l'articulation entre le FEIS et les fonds structurels et d'investissement européens, demande que des engagements fermes soient pris sur la préservation de ces crédits dans un contexte marqué par la réduction drastique des dotations financières nationales aux collectivités territoriales ;

Alinéa sans modification.

Est favorable à ce que les contributions nationales éventuelles au FEIS ne soient pas prises en compte dans le calcul du déficit public et de la dette publique au titre de l'application du Pacte de stabilité et de croissance et souhaite que l'engagement de la Commission européenne en ce sens soit fermement confirmé ;

Alinéa sans modification.

Demande que les relations entre la Banque européenne d'investissement et les banques nationales de développement en vue de la mise en oeuvre du plan d'investissement soient précisées et considère que celle-ci sera favorisée par la constitution d'un réseau européen des banques nationales de développement ;

Alinéa sans modification.

Sur les secteurs et projets financés par le plan d'investissement

Alinéa sans modification.

Faisant observer que la task force constituée sous la direction de la Commission européenne et de la Banque européenne d'investissement a identifié environ 2 000 projets représentant 1 300 milliards d'euros au titre de la réserve de projets d'investissement, considère que le FEIS doit financer en priorité des projets présentant un profil de risque élevé et qui n'auraient pas vu le jour sans ce plan d'investissement ;

Alinéa sans modification.

Est d'avis que ces projets, dont le financement doit être précédé d'une évaluation préalable approfondie, doivent répondre à trois critères cumulatifs pour être mis en oeuvre : une dimension européenne véritable, une perspective raisonnable de bonne viabilité économique et un impact à court terme sur l'activité économique ;

Alinéa sans modification.

Dès lors que le plan d'investissement prévoit de financer des projets dans des secteurs pour lesquels le retour sur investissement est plus aléatoire et plus long et donc a priori moins attractifs pour des investisseurs privés, par exemple l'éducation et la formation, la santé, la recherche et le développement ou encore le domaine social, demande que soient précisés les critères de sélection de projets dans ces secteurs, susceptibles de les rendre éligibles au FEIS ;

Alinéa sans modification.

Défend avec intérêt la possibilité pour les collectivités territoriales de bénéficier du plan d'investissement et considère que l'éligibilité au FEIS de projets qu'elles soutiennent apporterait une contribution significative à la réalisation des objectifs du plan d'investissement ;

Alinéa sans modification.

Souhaite que soient établis des critères de sélection des projets aboutissant à une couverture équilibrée du territoire européen, la cohésion économique, sociale et territoriale restant l'un des objectifs majeurs de l'Union européenne ;

Alinéa sans modification.

Est favorable à ce que le plan d'investissement puisse financer des projets identifiés et mis en oeuvre sur une base bilatérale ;

Alinéa sans modification.

Sur la gouvernance du Fonds européen pour les investissements stratégiques

Alinéa sans modification.

Pour que le plan d'investissement atteigne ses objectifs et respecte des critères prédéfinis de sélection des projets, estime que l'éligibilité de ces derniers au FEIS doit être préservée de toute interférence de nature à favoriser un « saupoudrage » des crédits et la tentation d'une répartition nationale ou par secteur ; partage donc la proposition d'une sélection des projets réalisée par le comité d'investissement comprenant des experts indépendants dont certains devront aussi disposer d'une solide expérience des collectivités territoriales et des politiques sociales ;

Pour que le plan d'investissement atteigne ses objectifs et respecte des critères prédéfinis de sélection des projets, estime que l'éligibilité de ces derniers au FEIS doit être préservée de toute interférence de nature à favoriser un « saupoudrage » des crédits et la tentation d'une répartition nationale ou par secteur ; partage donc la proposition d'une sélection des projets réalisée par le comité d'investissement comprenant des experts indépendants.

Pour autant, considère que la mise en oeuvre du plan d'investissement et le fonctionnement du FEIS ne sauraient être soustraits à toute responsabilité de nature démocratique et demande donc que soit précisée l'obligation de rendre compte au niveau du comité de pilotage de manière à la rendre effective ; dans le même objectif, réclame également qu'un bilan régulier en termes coûts/bénéfices du plan d'investissement et du fonctionnement du FEIS soit effectué et que le Parlement européen et les parlements nationaux puissent exercer un contrôle véritable à leur endroit ;

Alinéa sans modification.

Souhaite que soient apportées des précisions sur la possibilité pour des investisseurs non ressortissants d'États membres de l'Union européenne de contribuer au FEIS et donc sur les conditions de leur participation au comité de pilotage ;

Alinéa supprimé.

Demande des informations complémentaires sur le fonctionnement de la plateforme européenne de conseil en investissement chargée d'apporter une assistance technique aux autorités compétentes des États membres et aux investisseurs publics et privés, en particulier sur son articulation avec les guichets uniques existants et sur son rôle envers les collectivités territoriales et dans l'accompagnement des PME-ETI ;

Alinéa sans modification.

Sur le volet réglementaire du plan d'investissement

Alinéa sans modification.

Insiste sur la nécessité de parvenir à un environnement plus favorable aux investissements grâce à un allégement et à une harmonisation des réglementations européennes et nationales et souhaite à ce titre que le volet réglementaire du plan d'investissement soit mieux documenté, en particulier pour ce qui concerne la contribution de l'union de l'énergie et du marché unique du numérique à la levée des obstacles réglementaires à l'investissement dans l'Union européenne dans le respect des normes sociales et environnementales ;

Alinéa sans modification.

Se montrera très vigilant sur la mise en oeuvre du plan d'investissement et plus particulièrement sur le rôle des collectivités territoriales ;

Alinéa sans modification.

Invite le Gouvernement à soutenir ces orientations et à les faire valoir dans les négociations en cours.

Alinéa sans modification.


* 1 Cela ne signifie en rien que le recul de l'investissement découle principalement de la diminution des dépenses de construction au lendemain du déclenchement de la crise économique et financière ; en effet, les données de la base AMECO de la Commission européenne font apparaître une diminution de la formation brute de capital fixe (FBCF), hors construction, de plus de 130 milliards d'euros, à prix courants, entre 2008 et 2013 dans l'Union européenne et de près de 112 milliards d'euros dans la zone euro. Ceci indique que la baisse des investissements en Europe a également concerné, et ce de manière significative, les investissements productifs et, en particulier, les équipements du secteur manufacturier et des services.

* 2 Rapport d'information n° 717 (2013-2014) préparatoire au débat d'orientation des finances publiques (DOFP) pour 2015 fait par François Marc au nom de la commission des finances du Sénat, p. 34.

* 3 Communiqué de presse d'Eurostat 1/2015 du 7 janvier 2015.

* 4 Ernst & Young, EY's attractiveness survey - Europe 2014. Back in the game , 2014.

* 5 Selon les données les plus récentes publiées par Eurostat, la formation brute de capital fixe (FBCF) a progressé de 3,2 % entre 2013 et 2014 dans l'Union européenne et de 1,4 % dans la zone euro.

* 6 La croissance potentielle correspond à l'évolution du niveau de production « soutenable », soit du PIB potentiel, qui désigne le produit intérieur brut pouvant être obtenu durablement, c'est-à-dire sans produire de déséquilibre sur les marchés des biens et du travail. Les notions de croissance potentielle et de PIB potentiel font l'objet d'une analyse approfondie dans le rapport n° 55 (2014-2015) sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 fait par Albéric de Montgolfier au nom de la commission des finances du Sénat (p. 9-28).

* 7 La productivité globale des facteurs (PGF) désigne le « résidu » de croissance qui ne peut être expliqué par la quantité de travail et de capital disponible. Elle représente, en quelque sorte, l'efficacité de la combinaison du capital et du travail.

* 8 V. Chouard, D. Fuentes Castro, D. Irac et M. Lemoine, « Assessing the Losses in Euro Potential Productivity Due to the Financial Crisis », Document de travail de la Banque de France n° 468 , décembre 2013.

* 9 D. Comin et M. Gertler, « Medium-term business cycles », American Economic Review , vol. 96, n° 3, p. 523-551.

* 10 Communiqué de presse IP/14/320 de la Commission européenne du 27 mars 2014.

* 11 D. Aschauer, « Is Public Expenditure Productive? », Journal of Monetary Economics , vol. 23, n° 2, 1989, p. 177-200, et A. Munnell, « How Does Public Infrastructure Affect Regional Economic Performance? » in A. Munnell (éd.), Is There a Shortfall in Public Capital Investment? , 1990.

* 12 Cf. J. Albala-Bertrand et E. Mamatzakis, « The Impact of Public Infrastructure on the Productivity of the Chilean Economy », Review of Development Economics , vol. 8, n° 2 2004, p. 266-278.

* 13 Cf. S. Scandizzo et P. Sanguinetti, « Infrastructure in Latin America: Achieving High Impact Management », Discussion Draft 2009 Latin America Emerging Markets Forum , 2009.

* 14 Fonds monétaire international, World Economic Outlook. Legacies, Clouds, Uncertainties , octobre 2014.

* 15 Commission européenne, « European Economic Forecast. Winter 2015 », European Economy , 1/2015, février 2015.

* 16 Communication de la Commission européenne au Parlement européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne, au Comité économique et social européen, au Comité des régions et à la Banque européenne d'investissement du 26 novembre 2014, « Un plan d'investissement pour l'Europe », COM(2014) 903 final.

* 17 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013, COM(2015) 10 final.

* 18 Cf. article 294 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

* 19 Communiqué de presse du Conseil de l'Union européenne du 10 mars 2015 (103/15).

* 20 Projet de budget rectificatif n° 1 au budget général du 13 janvier 2015 accompagnant la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013, COM(2015) 11 final.

* 21 Cf. articles 1 er et 2 de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013.

* 22 Le groupe Banque européenne d'investissement (BEI) est composé de la Banque européenne d'investissement (BEI) et du Fonds européen d'investissement (FEI).

* 23 Cf. articles 5 et 7 de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013.

* 24 Cf. article 8 de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013.

* 25 Ainsi que l'a indiqué Benjamin Angel, chef d'unité à la direction générale des affaires économiques et financières de la Commission européenne, lors de l'audition conjointe organisée par la commission des finances du Sénat du 11 mars 2015 sur le principe et les modalités de mise en oeuvre du plan d'investissement pour l'Europe, le risque inhérent aux investissements supportés par le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) a été estimé à 6,5 milliards d'euros à moyen terme ; par suite, le « coussin de sécurité » prévu, de 8 milliards d'euros, est supérieur aux risques estimés.

* 26 Conformément à l'article 312 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), le cadre financier pluriannuel fixe, notamment, « les montants des plafonds annuels des crédits pour engagements par catégories de dépenses et du plafond annuel des crédits pour paiements » ; ce cadre financier s'impose au budget pluriannuel. Comme l'a rappelé Antoine Quero-Mussot, expert confirmé en instruments financiers innovants auprès de la direction générale du budget de la Commission européenne, lors de l'audition conjointe organisée par la commission des finances du Sénat du 11 mars 2015, le cadre financier pluriannuel a été institué afin de résoudre les crises institutionnelles et politiques relatives à l'adoption du budget de l'Union européenne au cours de la décennie 1980 ; ce rappel historique permet de mieux comprendre le souhait des acteurs européens d'éviter, dans le cadre du plan pour l'investissement, de remettre en question le cadre financier pluriannuel 2014-2020.

* 27 Le projet ITER, qui associe trente-cinq pays, dont l'ensemble des États membres de l'Union européenne, vise à « démontrer la faisabilité scientifique et technologique de l'énergie de fusion, et ouvrir ainsi la voie à son exploitation industrielle et commerciale ». La construction d'un réacteur thermonucléaire a débuté en 2010 à Saint-Paul-lès-Durance, près de Cadarache en France.

* 28 L'abondement progressif du fonds de garantie se justifie par le fait que les risques associés aux projets d'investissement ne se réaliseront, le cas échéant, qu'à moyen ou long termes eu égard à la durée des projets concernés.

* 29 Communication de la Commission du 26 novembre 2014, op. cit. , p. 7.

* 30 Communication de la Commission européenne au Parlement européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne, au Comité économique et social européen, au Comité des régions et à la Banque européenne d'investissement du 13 janvier 2015, « Un plan d'investissement pour l'Europe », COM(2015) 12 final.

* 31 Une dette est dite subordonnée lorsque son remboursement dépend du remboursement initial des autres créanciers.

* 32 Lors d'une conférence de presse en date du 23 février 2015, Werner Hoyer, président de la Banque européenne d'investissement, a déclaré : « Nous atteindrons notre objectif de 180 milliards d'euros supplémentaires investis dans toute l'Europe en mars 2015, soit environ neuf mois plus tôt que prévu ».

* 33 Audition conjointe sur le principe et les modalités de mise en oeuvre du plan d'investissement pour l'Europe de Philippe de Fontaine Vive, vice-président honoraire de la Banque européenne d'investissement, Benjamin Angel, chef d'unité à la direction général des affaires économiques et financières de la Commission européenne, et Antoine Quero-Mussot, expert confirmé en instruments financiers innovants auprès de la direction générale du budget de la Commission européenne, le 11 mars 2015 par la commission des finances du Sénat.

* 34 Cf. article 5 de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013.

* 35 À cet égard, alors que dans le cadre du plan d'investissement pour l'Europe la Commission appelle à « une utilisation plus efficace des Fonds structurels », la proposition de résolution, « constatant que des interrogations demeurent sur l'impact des modalités de financement proposées sur l'utilisation des fonds structurels et d'investissement européens, demande que des engagements fermes soient pris sur la préservation de ces crédits dans un contexte marqué par la réduction drastique des dotations financières nationales aux collectivités territoriales » ( alinéa 16 ).

* 36 Créé en 1994, le Fonds européen d'investissement (FEI) a pour finalité d'apporter une aide financière aux petites et moyennes entreprises (PME) ; à ce titre, il fournit à ces dernières du capital-risque, en particulier aux jeunes sociétés et aux entreprises à orientation technologique, ainsi que des garanties aux institutions financières afin de couvrir leurs prêts aux PME. Toutefois, le FEI n'octroie ni prêts, ni subventions et n'investit pas directement dans les entreprises.

* 37 Cf. article 3 de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013.

* 38 Cf. projet de rapport des commissions des affaires économiques et monétaires et des budgets du Parlement européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013, 2015/0009(COD), publié le 10 mars 2015.

* 39 Cf. article 11 de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013.

* 40 Communication de la Commission du 26 novembre 2014, op. cit. , p. 12.

* 41 Cf. article 9 de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013.

* 42 Communication de la Commission du 26 novembre 2014, op. cit. , p. 13.

* 43 Communication de la Commission du 26 novembre 2014, op. cit. , p. 13.

* 44 Il convient de relever qu'une démarche de labélisation a déjà été engagée dans le cadre des réseaux transeuropéens d'énergie (RTE-E), par l'identification, à la fin de l'année 2013, de 248 « projets d'intérêt commun ».

* 45 Cf. article 2 de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 janvier 2015 sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013.

* 46 Communication de la Commission du 26 novembre 2014, op. cit. , p. 14.

* 47 Id.

* 48 Différents travaux économiques ont montré que l'incertitude, en particulier fiscale et réglementaire, contribuait à décourager l'investissement des entreprises (e.g. N. Bloom, S. Bond et J. Van Reenen, « Uncertainty and Investment Dynamics », Review of Economic Studies , vol. 74, n° 2, 2007, p. 391-415).

* 49 Communication de la Commission européenne au Parlement européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 24 janvier 2007, « Action Programme for Reducing Administrative Burdens in the European Union », COM(2007) 23 final.

* 50 Communiqué de presse de la Commission européenne du 16 décembre 2014 (IP/14/2703).

* 51 Livre vert de la Commission européenne du 18 février 2015, « Construire l'union des marchés de capitaux », COM(2015) 63 final.

* 52 À la suite de l'adoption, le 10 mars 2015, par le Parlement européen, de l'accord négocié en trilogue sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux fonds européen d'investissement à long terme - qui vise à créer un nouvel instrument juridique répondant aux besoins des investisseurs institutionnels et privés désireux de mobiliser leur capital dans des actifs à long terme -, la création des FEILT devrait être effective dans un délai proche.

* 53 Communication de la Commission du 26 novembre 2014, op. cit. , p. 17.

* 54 Id.

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