II. CES LIMITES ONT FAIT NAÎTRE UN RISQUE DE CONTENTIEUX

Les obstacles à l'indemnisation des survivants ou des ayants-cause, principalement la condition de nationalité prévue par le code des pensions militaire d'invalidité et des victimes de la guerre (CPMIVG), ont fait naître un risque contentieux outre-Atlantique.

Les ayants cause (conjoints survivants ou orphelins) ne peuvent obtenir une pension que si la victime remplissait la condition de nationalité requise, la même condition de nationalité étant en principe requise de l'ayant cause. Sur ce seul point, la jurisprudence a connu une évolution récente tendant à l'ouverture du droit à réversion pour les ayants cause de nationalité étrangère, lorsque l'ouvrant droit était pensionné et donc remplissait lui-même nécessairement la condition de nationalité requise.

Aussi, à partir des années 2000, des déportés survivants, non-couverts par le régime en vigueur en France, ont tenté d'obtenir des réparations devant les juridictions américaines. Devant les obstacles juridiques, liés à l'immunité reconnue aux Etats étrangers et à leurs démembrements, des tentatives ont été menées pour faire évoluer la législation américaine pour les lever.

A. LA MONTÉE D'UN GRAVE RISQUE CONTENTIEUX IMPLIQUANT LA SNCF

Des actions ont été engagés en 2000 contre la SNCF par des survivants et des ayants droit appuyés par des avocats, pour complicité de crime contre l'Humanité, pour avoir collaboré activement à la déportation des Juifs de France, et en avoir tiré bénéfice ( procès Abrams c. SNCF ), puis en 2006 ( procès Freund c. SNCF ), contre la SNCF (ainsi que contre la Caisse des dépôts et consignations et contre l'Etat) sur l'un des griefs pour lesquels l'immunité de juridiction n'est pas opposable : la spoliation. Ces recours n'ont pas abouti (voir annexe n° 6).

En avril 2015, trois plaignants ont attaqués la SNCF devant une cour fédérale de Chicago sur la base d'un recours très proche de celui de 2006 ( Scalin c. SNCF ).

Il existe donc un risque que d'autres plaintes soient déposées contre la SNCF (et tous les démembrements de l'État).

B. DES INITIATIVES LÉGISLATIVES INTRODUITES AU CONGRÈS ET DANS CERTAINS ÉTATS AMÉRICAINS

1. Devant le Congrès

Depuis 2005 et tous les deux ans (à chaque nouveau Congrès), un projet de loi bipartisan est déposé systématiquement par des membres du Sénat et de la Chambre des Représentants en vue de retirer le bénéfice de l'immunité de juridiction des États à la SNCF et de permettre à un recours d'aboutir devant une juridiction américaine (voir annexe n° 7).

Les attendus de ces projets de loi contenaient beaucoup d'approximations historiques et d'inexactitudes sur le rôle de la SNCF pendant la Seconde Guerre mondiale. Des auditions ont été menées mais ces projets n'ont jamais été soumis en commission ni soumis à l'adoption. Ils ont toutefois été déposés par des parlementaires influents (le sénateur Schumer, D-NY, notamment).

Un risque existait donc d'une adoption de ces dispositions sous forme d'un cavalier législatif dans une autre législation.

2. Devant les législatures des États

Depuis 2010, les avocats à l'origine des recours cherchent à faire adopter par les législatures d'État des dispositions visant à contraindre la SNCF à des actions en termes de transparence et d'archives, et même à avoir indemnisé les victimes de la déportation afin de pouvoir répondre à des appels d'offres, voire à l'en exclure.

En 2010, en Californie, une loi sur la transparence a été votée avant de faire l'objet d'un veto du Gouverneur. En Floride, un projet de loi similaire a été déposé puis abandonné. En 2014, dans l'État du Maryland, un projet de loi sur la transparence et les archives a été déposé, puis rejeté en commission. En 2014, à New-York, l'intention a été affichée de déposer un projet de législation, malgré l'opposition déclarée du Département d'État.

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