Rapport général n° 164 (2015-2016) de M. François MARC , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2015

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N° 164

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2015

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2016 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME II

Fascicule 2

AFFAIRES EUROPÉENNES

Rapporteur spécial : M. François MARC

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André, présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung, vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc, secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Bernard Delcros, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Eblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 3096, 3110 à 3117 et T.A. 602

Sénat : 163 et 165 à 170 (2015-2016)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

La contribution française au budget de l'Union européenne

1. L'article 22 du projet de loi de finances pour 2016 évalue le prélèvement sur recettes au profit du budget de l'Union européenne à 21,51 milliards d'euros , soit 767 millions d'euros de plus que le montant prévu par la loi de finances initiale pour 2015, ce qui représente une hausse de 3,7 %.

2. Votre rapporteur spécial relève la tendance continue à la hausse du prélèvement puisqu'entre 1982 et 2016, le montant en valeur de notre contribution a été multiplié par 5,5 passant ainsi de 4,1 à 21,51 milliards d'euros .

3. Les écarts considérables entre la prévision et l'exécution de cette participation au budget de l'Union sont récurrents et posent un véritable problème au regard de la sincérité du prélèvement voté chaque année. Votre rapporteur spécial juge nécessaire de fournir au Parlement une estimation plus précise et plus fiable de son montant .

4. Deuxième bénéficiaire des dépenses de l'UE, la France reste le deuxième État contributeur au budget communautaire derrière l'Allemagne et devant l'Italie, le Royaume-Uni et l'Espagne. Notre solde net s'améliore en apparence , uniquement pour des raisons conjoncturelles, et passe sous le seuil des 8 milliards d'euros.

Le budget de l'Union européenne

5. La négociation du budget communautaire 2016 entre les institutions communautaires suit le scénario des postures habituelles : l'avant-projet de budget de la Commission européenne, qui prévoit une baisse de 5 % des crédits d'engagement et une hausse de 1,6 % des crédits de paiement (CP) par rapport au budget 2015, a conduit le Conseil à opérer des coupes notables dans sa proposition du 4 septembre 2015, tandis que le Parlement européen a voté le 27 octobre 2015, un projet encore plus ambitieux que celui de la Commission, tant au regard des ouvertures de crédits d'engagement que de CP.

6. La crise de l'élevage a conduit la Commission européenne à proposer au Conseil le 15 septembre 2015 de mobiliser une enveloppe de 500 millions d'euros . Cette mesure d'urgence pour l'agriculture , tout particulièrement destinée à la filière lait et à la filière porcine, est mise en place, sans activation de la réserve de crise pour le secteur agricole, ce qui signifie sans réduire le budget disponible de la PAC , qui reste préservé.

7. Votre rapporteur spécial souligne à nouveau l'état préoccupant du stock de « restes à liquider » (RAL), qui devrait atteindre un niveau d'au moins 220 milliards d'euros à la fin 2016 . En 2016, comme en 2015 et 2014, plus de la moitié des crédits de paiement de l'exercice sera consacrée au paiement des RAL.

8. Votre rapporteur spécial se réjouit que le budget de l'Union européenne soit toujours davantage tourné vers l'investissement et la croissance ainsi qu'en témoigne la mise en place du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) en 2015. Le FEIS, en mobilisant les financements privés, vise à réaliser 315 milliards d'euros d'investissements , ce qui peut contribuer à répondre à l'objectif de soutien à la croissance en Europe.

9. La décision « ressources propres » du 7 juin 2007 (DRP) est en cours de remplacement par la DRP du 26 mai 2014 , qui sera applicable à compter du 1 er janvier 2014 avec un effet rétroactif. Cette dernière a fait l'objet d'un projet de loi en autorisant l'approbation sur lequel votre rapporteur spécial a rendu en septembre 2015 un rapport 1 ( * ) . Il estime qu' il s'agit d'une occasion de réforme ratée : la nouvelle décision maintient en effet l'essentiel du système en vigueur, voire renforce ses défauts dans la mesure où elle crée de nouveaux rabais.

Évolution 2012-2016 du prélèvement sur recettes

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

Montant du prélèvement voté

18 878

20 435

20 224

21 042

21 509

Montant du prélèvement exécuté

19 052

22 456

20 347

-

-

Écart

+ 174

+ 2 021

+ 123

-

-

Source : commission des finances d'après l'annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

I. LE BUDGET DE L'UNION EUROPÉENNE

1. La négociation du budget communautaire 2016 entre les institutions communautaires

La procédure de négociation pour le budget communautaire 2016 correspond à la sixième année de mise en oeuvre du traité de Lisbonne et à la troisième année des perspectives financières 2014-2020 .

Conformément à la procédure prévue par le traité de Lisbonne, notamment aux articles 313 et 314 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), le budget est examiné au cours d'une seule lecture par le Conseil et le Parlement européen suivie d'une phase de conciliation en raison de désaccord entre les deux institutions. Bien que le traité de Lisbonne ait mis un terme à la distinction entre dépenses obligatoires et dépenses non obligatoires 2 ( * ) , plaçant sous cet angle Parlement et Conseil sur un pied d'égalité, il a introduit des dispositions pouvant permettre au Parlement européen d'imposer, in fine , son point de vue.

En matière budgétaire comme dans les autres domaines, la Commission continue de disposer du monopole de l'initiative, qu'elle exerce par la présentation au Conseil et au Parlement d'un avant-projet de budget.

Au terme d'une seule lecture du projet de budget par le Conseil puis par le Parlement, plusieurs options sont possibles :

- si le Parlement approuve la position du Conseil, le budget est adopté ;

- s'il ne statue pas, le budget est réputé adopté ;

- si le Parlement adopte des amendements que le Conseil approuve, le budget est adopté ;

- si le Parlement adopte des amendements que le Conseil n'approuve pas, le projet est transmis au Conseil et à la Commission dans le cadre du comité de conciliation .

Cet organe a pour objectif d'aboutir, dans un délai de vingt-et-un jours à partir de sa convocation, comme le précise le TFUE, à un accord sur un projet commun à la majorité qualifiée des membres du Conseil ou de leurs représentants et à la majorité des membres représentant le Parlement. Durant cette procédure, la Commission cherche à rapprocher les positions des parties.

Compte tenu de ces règles, dont en particulier la suppression de la seconde lecture, le moment décisif de la procédure budgétaire est désormais, en pratique, ce comité de conciliation , qui de fait est systématiquement convoqué.

En cas d'accord du comité de conciliation, le Parlement et le Conseil disposent de quatorze jours pour approuver le projet afin qu'il soit définitivement adopté. Si le Conseil et le Parlement approuvent ce projet commun, le budget est adopté sur cette base.

Si le Conseil rejette le projet commun mais que le Parlement l'approuve, le Parlement peut décider de confirmer ses amendements - par un vote à la majorité des membres qui le composent et des trois cinquièmes des suffrages exprimés. Le budget est alors adopté sur la base du projet commun et des amendements du Parlement : Conseil et Parlement n'apparaissent donc pas sur un pied d'égalité, le Parlement étant en mesure d'imposer son point de vue au Conseil si ce dernier ne suit pas l'accord obtenu par ses représentants au sein du comité de conciliation, ce qui n'est pas le cas si c'est le Parlement qui rejette le projet commun. En effet, si le Conseil approuve le projet commun mais que le Parlement le rejette, une nouvelle procédure doit être entamée sur la base d'un nouveau projet de la Commission. Une nouvelle procédure s'engage également dans l'hypothèse où Conseil et Parlement rejettent le projet ou si l'un des deux rejette le projet commun tandis que l'autre ne statue pas. En bref, l'échec de la conciliation conduit la Commission à établir un nouveau projet de budget . Une telle procédure a ainsi été nécessaire lors de la préparation des budgets pour 2011, 2013 et 2015 puisque le comité de conciliation n'était pas parvenu, dans ces trois cas, à obtenir un accord .

En outre, le projet commun est réputé adopté si les deux institutions ne parviennent pas à statuer, ou si l'une des deux ne parvient pas à statuer tandis que l'autre approuve le projet commun.

Et en cas de conflit persistant conduisant à l'absence de budget voté en début d'exercice, les premiers mois de l'exercice budgétaire sont assurés par le système des douzièmes provisoires 3 ( * ) .

Le tableau de la page suivante résume les subtilités de cette procédure.

La procédure budgétaire issue du traité de Lisbonne

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

En crédits d'engagement , 153,83 milliards d'euros sont proposés par l'avant-projet de budget (APB) 2016 de la Commission, rendu public au printemps 2015 et rectifié le 26 juin 2015, soit une baisse de 5 % par rapport au budget 2015, ce qui représente 0,98 % du revenu national brut (RNB) de l'Union européenne. Cette baisse résulte pour l'essentiel de la contraction de 16 % des dépenses de la rubrique 1b « Cohésion ». À l'inverse, sont renforcées la rubrique 1a « Compétitivité » (+ 7,8 %), la rubrique 3 « Sécurité et citoyenneté » consacrée notamment à la gestion des flux migratoires (+ 9,7 %) et, enfin, la rubrique 4 « Europe dans le monde » (+ 5,6 %). Les autres rubriques restent relativement stables. Les dépenses administratives (rubrique 5), par exemple, sont en hausse de 2,9 %, et ce malgré l'objectif poursuivi de réduction de 5 % des effectifs entre 2014 et 2017.

Les crédits de paiement (CP) inscrits à l'APB 2016 affichent pour leur part une hausse de 1,6 % par rapport au budget 2015 et s'élèvent à 143,54 milliards d'euros , soit 1,05 % du RNB de l'Union européenne. Ils visent à couvrir en paiement les engagements au titre de toutes les rubriques, mais seules les trois rubriques dont les engagements sont en nette augmentation enregistrent des variations significatives (1a « Compétitivité » + 11,4 %, 3 « Sécurité et citoyenneté » + 17,1 % et, enfin, 4 « Europe dans le monde » + 28,5 %).

Adopté par le Conseil à la majorité qualifiée le 4 septembre 2015, le projet de budget proposé par la présidence luxembourgeoise se veut plus « réaliste » . Il propose ainsi de réduire l'APB 2016 de 564 millions d'euros en engagement et de 1,4 milliard d'euros en paiement. Le projet du Conseil exprime donc le choix d'une moindre budgétisation des CP , dont l'impact sur le montant des contributions nationales est plus direct. Pourtant, en pratique, le recours à des budgets rectificatifs en cours d'année vise souvent à ajuster les ouvertures de CP et ce sont donc les crédits d'engagement , tels qu'ils sont prévus par le projet de budget adopté par le Conseil, qui apparaissent les plus significatifs des priorités affichées par le budget communautaire , la répartition des CP étant toujours appelée à subir rapidement des modifications.

Répartition des crédits d'engagement entre rubriques
en 2016 selon le projet de budget du Conseil

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

Lors de son examen du projet de budget 2016, le Parlement européen a voté en séance plénière, le 27 octobre 2015, la plupart des recommandations de sa commission des budgets (COBU). Celle-ci a, en effet, estimé très insuffisant le projet du Conseil et a souhaité proposer un projet encore plus ambitieux que l'APB de la Commission , tant au regard des ouvertures de crédits d'engagement (3,6 milliards d'euros de plus que l'APB) que de CP (3 milliards d'euros de plus que l'APB).

Le tableau suivant permet de récapituler l'évolution du projet de budget au cours des négociations.

Tableau comparatif de l'avant-projet de budget pour 2016, du projet adopté par le Conseil et du projet adopté par le Parlement européen

(en millions d'euros)

Source : direction du budget

N.B. : Les sommes indiquées au titre du total diffèrent légèrement des montants présentés dans le corps du texte car les premières n'incluent pas les instruments spéciaux, à la différence des seconds.

* Il s'agit des chiffres votés par le Parlement européen suite aux propositions de sa commission des budgets. Ce tableau ne permet pas de préjuger de l'issue finale des négociations entre le Conseil et le Parlement européen dans la mesure où le comité de conciliation pourrait échouer à définir en novembre 2015 un projet de compromis. Suite à cette absence d'accord, le projet de budget ne serait pas soumis au vote du Parlement européen lors de sa session plénière de novembre et la Commission devrait proposer un nouveau projet.

Le comité de conciliation qui se réunira en novembre 2015 aura pour objectif de définir un projet consensuel . En amont des réunions formelles du comité, des réunions techniques devraient permettre de parvenir progressivement à un accord politique. En 2014, 2012 et en 2010, lors des procédures pour 2011, 2013 et 2015, il convient d'observer que le comité de conciliation n'était pas parvenu à un accord, ce qui avait conduit la Commission à préparer et à proposer un nouveau projet de budget.

Le budget 2016 est important car il servira de base à l'analyse des besoins de crédits ultérieurs pour la révision à mi-parcours du cadre pluriannuel . Il doit donc refléter les besoins réels en engagements et CP.

2. Des mesures d'urgence spécifiques pour l'agriculture

La crise de l'élevage a conduit la Commission européenne à proposer au Conseil le 15 septembre 2015 de mobiliser une enveloppe de 500 millions d'euros .

Cette mesure d'urgence pour aider le secteur de l'élevage, et tout particulièrement la filière lait et la filière porcine , est en cours de mise en place sur l'exercice 2015, sans activation de la réserve de crise pour le secteur agricole .

Cette dernière est destinée, pour mémoire, à soutenir le secteur agricole en cas de crises affectant la production ou la distribution : chaque année, si la réserve n'est pas utilisée, elle est versée aux agriculteurs et pour la période 2014-2020, la réserve est répartie en sept tranches annuelles égales de 400 millions d'euros, soit un montant total de 2,8 milliards d'euros. Il s'agit donc d'un dispositif financé par une réduction des paiements directs versés aux exploitants agricoles au titre de la PAC . Son utilisation réduit ainsi les crédits budgétaires de droit commun à due concurrence .

L'enveloppe annoncée de 500 millions d'euros ne sera donc pas prélevée sur le budget disponible de la PAC, qui reste préservé. Le Conseil a décidé d'utiliser l'argent disponible au titre des prélèvements dûs par les États membres au titre des dépassements constatés en 2014 de leurs quotas laitiers

Pour ce qui concerne l'utilisation de ces aides au niveau national, il devrait s'agir, selon une ventilation provisoire, d'environ 65 millions d'euros destinés à la France , ce dont votre rapporteur spécial se félicite. Il est également satisfait par la grande flexibilité laissée aux États membres quant à l'usage final de ces sommes, qui permettront de compléter le plan de soutien à l'élevage annoncé cet été par le Gouvernement.

3. La question persistante des restes à liquider dans le cadre pluriannuel 2014-2020

Les budgets communautaires adoptés annuellement s'inscrivent dans un cadre pluriannuel communément appelé « perspectives financières ». La vocation principale de ces perspectives est de garantir la discipline budgétaire de l'Union en encadrant les dépenses communautaires regroupées sous cinq rubriques 4 ( * ) .

Le cadre financier pluriannuel (CFP) 2014-2020 a remplacé, au 1 er janvier 2014, le CFP qui couvrait la période 2007-2013. Le Conseil européen des 7 et 8 février 2013 était en effet parvenu à un accord, au terme de longues négociations 5 ( * ) , qui fixait le nouveau CFP, en euros courants, à 1 082,55 milliards d'euros en CE (crédits d'engagement) et 1 023,95 milliards d'euros en CP (crédits de paiement), soit un écart de 58,6 milliards d'euros . D'un point de vue budgétaire, l'utilisation des euros courants rend compte avec précision de l'impact sur le budget national des versements à l'Union européenne. Par conséquent, afin d'évaluer les impacts budgétaires nationaux, l'utilisation des euros courants est retenue dans le présent rapport . La Commission européenne ayant proposé un projet de CFP en euros constants, il convient de noter que les négociations s'étaient tenues en euros dits « 2011 » 6 ( * ) . En euros constants « 2011 », le nouveau CFP représente 959,99 milliards d'euros en CE et 908,40 milliards d'euros en CP, soit un écart de 51,59 milliards d'euros.

L'écart entre les CE et les CP du CFP en vigueur, soit 58,6 milliards d'euros courants, contribue à l' aggravation de l'état déjà préoccupant du stock de « restes à liquider » (RAL). Ces derniers correspondent aux engagements pris par l'Union européenne non encore couverts par des paiements. À une date donnée, le stock de RAL mesure donc le besoin de CP pour les années à venir, indépendamment des nouveaux engagements qui pourraient être pris.

Ce stock de RAL, de l'ordre de 20 % au moins des CP du nouveau cadre, devrait atteindre un niveau d'au moins 220 milliards d'euros à la fin 2016 . En 2016, comme en 2015 et 2014, plus de la moitié des crédits de paiement de l'exercice sera consacrée au paiement des RAL.

La distinction entre les restes à liquider et les restes à payer
de l'Union européenne

Les RAL sont une conséquence de la structure et du fonctionnement du budget de l'Union européenne, composé en grande partie de crédits dissociés. La gestion des fonds européens étant en gestion partagée, leur mise en oeuvre est réalisée par les États membres sur leur territoire et ils servent à financer majoritairement des projets, souvent pluriannuels.

À une date donnée, le stock de RAL mesure le besoin de crédits de paiement pour les années à venir, indépendamment des nouveaux engagements qui pourraient être pris. Pour les crédits non dissociés, les paiements annuels sont égaux aux engagements annuels et, par conséquent, le RAL est nul. Ces crédits concernent l'essentiel des aides directes de la politique agricole commune (rubrique 2) et la quasi-totalité des dépenses administratives (rubrique 5). Pour les crédits dissociés, c'est-à-dire pour lesquels les paiements sont effectués bien après les engagements, l'évolution du RAL reflète la dynamique d'engagement et de paiement. La politique de cohésion fait appel à des crédits dissociés, c'est pourquoi elle représente environ 60 % du total des RAL. Les États membres ont, effet, à leur disposition une enveloppe de crédits européens à utiliser pendant les 7 années de programmation (par exemple 2014-2020). Cette enveloppe est partagée en tranche annuelle de crédits d'engagement. Les États membres ne justifient pas de l'engagement annuel de ces crédits, qui sont réputés engagés automatiquement dans leur intégralité, ce qui se traduit dans les documents budgétaires par une exécution des engagements à 100% chaque année. Les États membres doivent en revanche justifier de l'utilisation effective de ces crédits (service fait et paiement) via l'envoi des factures correspondantes à la Commission dans des délais fixés par les règlements. C'est sur la base de ces factures que l'UE remboursera les États membres. Ce décalage entre engagements et paiements, courant dans la gestion de projets pluriannuels, explique qu'un stock important d'engagements soit en attente de paiement. Les engagements qui ne font pas l'objet d'une justification de paiement à la date donnée sont dégagés d'office 7 ( * ) et donc retranchés des engagements donnant droit à paiement, ce qui réduit le stock de RAL. La part d'un État membre dans le RAL dépend de sa capacité à absorber les fonds. La France a tendance à être légèrement au-dessus de la moyenne de l'UE.

Les RAL doivent être distingués des restes à payer, qui correspondent à des factures reportées d'une année sur l'autre, phénomène frictionnel . Leur montant a tendance à augmenter en s'approchant des clôtures des programmations pluriannuelles. Les factures transmises à la Commission en fin d'année ne peuvent matériellement pas être acquittées dans la même année civile. Le délai de paiement figurant dans le règlement est de deux mois (sous réserve des fonds disponibles). De fait toute facture qui arrive après le 31 octobre n sera payée en début d'année n+1. Au cours des derniers exercices, une part croissante des demandes de paiement a été adressée dans les deux derniers mois de l'année, de 7% en 2010 cette part a atteint 38% en 2013. Cette augmentation très nette est le signe que les États membres ne cherchent pas tant à être remboursés rapidement qu'à éviter les dépenses.

Source : direction du budget

Selon votre rapporteur spécial, en vue de concilier le paiement des RAL et celui des nouveaux programmes, un pilotage fin des dépenses de l'UE serait pertinent, comme l'indique le paragraphe 8 des conclusions du Conseil européen des 7 et 8 février 2013 : « les niveaux des engagements sont fixés à un niveau approprié dans toutes les rubriques ; les règles de dégagement seront appliquées de manière stricte dans toutes les rubriques, en particulier les règles de dégagement d'office ; les taux de préfinancement sont réduits par rapport à la période 2007-2013 ». Lors des négociations, la France avait proposé une méthode de pilotage des RAL , dite RAL target , consistant à réduire les engagements restant à due concurrence des RAL excédant une certaine limite (la « cible »). Le paiement des RAL étant prioritaire puisqu'il s'agit d'une obligation légale, la solution proposée consistait à réduire les engagements pour limiter les paiements futurs, autrement dit à piloter les budgets annuels par les crédits d'engagement. Cette proposition n'a pas été retenue.

Par ailleurs, l'encadrement des dépenses communautaires s'opère au moyen de plafonds annuels de dépenses en crédits d'engagement fixés par rubrique et sous-rubrique budgétaire, de plafonds globaux annuels en crédits d'engagement et en crédits de paiement 8 ( * ) , ainsi que d'un plafond des ressources propres fixé annuellement à 1,23 % du revenu national brut (RNB) de l'Union européenne .

Le tableau de la page suivante rappelle, pour les différentes rubriques du budget communautaire, ce cadre pluriannuel.

Les perspectives financières 2014-2020

(en millions d'euros courants)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Total 2014-2020

1. Croissance intelligente et inclusive

1a Compétitivité pour la croissance et l'emploi

16 560

17 666

18 467

19 925

21 239

23 082

25 191

142 131

1b Cohésion économique, sociale et territoriale

47 413

49 147

50 837

52 417

54 032

55 670

57 275

366 791

2. Croissance durable : ressources naturelles

59 303

59 599

59 909

60 191

60 267

60 344

60 421

420 034

dont Paiements directs et dépenses de marché

44 130

44 368

44 628

44 863

44 889

44 916

44 941

312 736

3. Sécurité et citoyenneté

2 179

2 246

2 378

2 514

2 656

2 801

2 951

17 724

4. L'Europe dans le monde

8 335

8 749

9 143

9 432

9 825

10 268

10 510

66 261

5. Administration

8 721

9 076

9 483

9 918

10 346

10 786

11 254

69 585

dont Dépenses administratives des institutions

7 056

7 351

7 679

8 007

8 360

8 700

9 071

56 223

6. Compensations

29

-

-

-

-

-

-

29

Total crédits d'engagement (CE)

142 539

146 483

150 217

154 397

158 365

162 952

167 602

1 082 555

en % du RNB de l'UE

1,03 %

1,02 %

1,00 %

1,00 %

0,99 %

0,98 %

0,98 %

1,00 %

Total crédits de paiement (CP)

135 866

141 901

144 685

142 771

149 074

153 362

156 295

1 023 956

en % du RNB de l'UE

0,98 %

0,98 %

0,97 %

0,92 %

0,93 %

0,93 %

0,91 %

0,95 %

Plafond des ressources propres en % de RNB

1,23 %

1,23 %

1,23 %

1,23 %

1,23 %

1,23 %

1,23 %

1,23 %

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

4. Un budget toujours davantage tourné vers l'investissement et la croissance

Même si le cadre pluriannuel 2014-2020 s'inscrit dans une certaine continuité à l'égard du CFP 2007-2013, il peut être relevé que la rubrique 1a « Compétitivité pour la croissance et l'emploi » croît de 58 % et qu'il s'agit donc de la rubrique qui connait la hausse la plus forte. Seules deux autres rubriques connaissent des variations importantes : la rubrique 3 « Sécurité et citoyenneté », en augmentation de 45 % et la rubrique 5 « Administration » qui bénéficie d'une hausse de 25 %.

Comparaison entre le précédent cadre et celui en vigueur

(en milliards d'euros)

2007-2013

2014-2020

Écart

Écart
(en %)

Rubrique 1

439

509

70

16 %

dont Rubrique 1a

90

142

52

58 %

Rubrique 1b

348

367

18

5 %

Rubrique 2

413

420

7

2 %

Rubrique 3

12

18

6

45 %

Rubrique 4

56

66

10

18 %

Rubrique 5

56

70

14

25 %

Rubrique 6

1

0

- 1 %

- 97 %

Total CE

976

1 083

07

11 %

Total CP

926

1 024

98

11 %

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

Cette rubrique 1a « Compétitivité », dont l'objet est de stimuler une croissance intelligente, durable et inclusive, est au coeur de la mise en oeuvre de la stratégie Europe 2020, adoptée par le Conseil européen le 17 juin 2010. Elle est également l'un des supports de financement du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS), qui suite au Conseil européen du 18 décembre 2014, a fait l'objet du règlement (UE) 2015 / 1017 du 25 juin 2015. Le FEIS, qui constitue le volet principal du plan pour l'investissement en Europe proposé par la Commission européenne et parfois appelé « plan Juncker », vise à réaliser 315 milliards d'euros d'investissements , ce dont votre rapporteur spécial se félicite.

En vue d'apporter une protection contre les pertes susceptibles de découler de ces investissements, le FEIS est doté de 21 milliards d'euros dont 5 milliards d'euros fournis par la Banque européenne d'investissement (BEI) et 16 milliards d'euros de garanties accordées par l'Union européenne . De manière à pouvoir faire face aux appels en garantie susceptibles d'intervenir, il a été créé un fonds de garantie (distinct du FEIS), qui est abondé de la moitié du montant des garanties appelables , soit 8 milliards d'euros d'ici 2023 au plus tard 9 ( * ) .

Votre rapporteur spécial regrette que le financement de ce fonds de garantie par la rubrique 1a « Compétitivité » conduise à diminuer les crédits budgétaires du « mécanisme pour l'interconnexion en Europe » (MIE) de 2,8 milliards d'euros et du programme « Horizon 2020 » de 2,2 milliards d'euros. Il relève, en outre, qu'aucune répartition géographique ou sectorielle n'est prévue par le règlement du FEIS et que son comité de pilotage devra même éviter le risque d'une concentration géographique ou sectorielle excessive .

À l'heure où les finances publiques doivent être assainies, ce qui est de nature à fragiliser le financement de projets d'investissement ambitieux, cette initiative peut contribuer, en mobilisant les financements privés, à répondre à l'objectif de soutien à la croissance en Europe .

5. La réforme ratée des « ressources propres »

Le financement du budget communautaire, originellement fondé sur des contributions acquittées par chaque État membre, repose en principe sur des ressources propres depuis la décision du Conseil du 21 avril 1970, qui affecte à l'UE des recettes de nature fiscale exigibles de plein droit . Ces ressources propres se composent essentiellement 10 ( * ) :

- des trois ressources propres traditionnelles (RPT, 13 % du budget) : droits de douane, prélèvements agricoles et cotisations sucre et isoglucose ;

- de la ressource TVA (13 % du budget), perçue par application d'un taux d'appel uniforme à une assiette harmonisée et écrêtée à 50 % du revenu national brut (RNB) de chaque État membre 11 ( * ) ;

- de la ressource RNB 12 ( * ) (73 % du budget), créée pour équilibrer le budget européen face à l'insuffisance des produits tirés des ressources propres traditionnelles et de la TVA, et obtenue par application au revenu national brut de chaque État membre d'un taux fixé dans le cadre de la procédure budgétaire (0,75 % environ).

Les recettes de l'Union européenne en 2016
selon le projet de budget du Conseil du 8 juillet 2015.

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

La décision ressources propres du 7 juin 2007 est en cours de remplacement par la décision du 26 mai 2014. Cette dernière n' entrera en vigueur qu'à l'issue de son approbation par l'ensemble des États membres 13 ( * ) , mais elle sera applicable à compter du 1 er janvier 2014, avec un effet qui sera donc rétroactif.

Elle a fait l'objet d'un projet de loi en autorisant l'approbation sur lequel votre rapporteur spécial a rendu en septembre 2015 un rapport 14 ( * ) , qui estime qu'il s'agit d'une occasion de réforme ratée : la nouvelle décision maintient en effet l'essentiel du système en vigueur, voire renforce ses défauts dans la mesure où elle crée de nouveaux rabais.

La nouvelle décision n'est pas satisfaisante et il faudra donc poursuivre la réflexion . À cette fin, un groupe à haut niveau , présidé par Mario Monti, a été constitué en 2014. Il est chargé de procéder à un réexamen général du système des ressources propres en vue de rendre ce dernier plus simple, plus transparent et plus responsable .

Il remettra, en 2016, un rapport à la Commission européenne qui contiendra des recommandations sur les nouvelles ressources. Ces propositions seront examinées dans le cadre de la révision du CFP 2014-2020 qui doit, en théorie, avoir lieu en 2016.

II. LA CONTRIBUTION DE LA FRANCE AU BUDGET DE L'UNION EUROPÉENNE

1. Une prévision de 21,51 milliards d'euros en 2016 qui confirme la tendance continue à la hausse du prélèvement

La participation française au budget communautaire prend la forme d'un prélèvement annuel sur les recettes de l'État autorisé en loi de finances (PSR-UE) . Ce prélèvement est estimé , par l'article 22 du présent projet de loi de finances pour 2016, à 21,51 milliards d'euros en 2016, ce qui confirme un PSR-UE 2016 en augmentation par rapport à celui voté pour 2015 (767 millions d'euros de plus que le montant prévu par la loi de finances initiale pour 2015, soit + 3,7 %). En 2016, le PSR-UE selon l'ancien périmètre (incluant les droits de douane) représenterait 23,65 milliards d'euros selon l'annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016.

Pour la sixième année consécutive et à la différence des années antérieures, la prévision 2016 ne repose pas sur les hypothèses de la Commission européenne issues de son avant-projet de budget, mais sur le besoin de financement issu du projet du Conseil , tant en matière de dépenses qu'en ce qui concerne les recettes.

Décomposition de la contribution française en 2016

Ressource

Montant
(en milliards d'euros)

Ressource TVA

Dont correction britannique

4,45

1,50

Ressource RNB

17,06

Total

21,51

Source : commission des finances, d'après l'annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

Votre rapporteur spécial rappelle qu'au sein du PSR-UE, 1,5 milliard d'euros correspond au financement de la « correction des déséquilibres budgétaires » dont bénéficie le Royaume-Uni . Notre pays reste donc le premier financeur du « chèque » britannique.

Le calcul de la « correction britannique »

Depuis 1984, et en application de l'accord dit de Fontainebleau, le Royaume-Uni profite en effet d'un mécanisme de « correction », dont est susceptible de bénéficier tout État membre supportant une charge budgétaire excessive au regard de sa prospérité. Le calcul de la correction britannique repose sur la différence constatée entre la part du Royaume-Uni dans les dépenses réparties (c'est-à-dire les dépenses engagées par l'Union sur le sol britannique) et sa part dans le total des paiements au titre des ressources TVA et RNB. Cette différence, exprimée en pourcentage, est multipliée par le total des dépenses réparties. Le déséquilibre ainsi obtenu est remboursé à hauteur des deux tiers au Royaume-Uni.

La charge représentée par la « correction » britannique est répartie entre les autres États membres au prorata de leur part dans le RNB total de l'Union . Pays fortement contributeurs nets, l'Allemagne, l'Autriche, les Pays-Bas et la Suède bénéficient toutefois, depuis 2000, d'un « rabais sur le rabais » , et leur contribution réelle est réduite à 25 % du montant qu'ils devraient théoriquement acquitter . La charge de cette réduction est ensuite répartie entre les autres États membres au prorata de leur part dans le RNB de l'Union.

Source : commission des finances

À l'instar des ressources du budget communautaire elles-mêmes, la contribution française a connu des évolutions significatives affectant son montant et sa structure .

Entre 1982 et 2016, le montant en valeur de notre contribution a été multiplié par 5,5 puisqu'elle est passée de 4,1 à 21,51 milliards d'euros .

Cette augmentation a connu quatre phases principales :

1) de 1982 à 1994, la forte croissance des dépenses de la politique agricole commune et de la politique de cohésion a fait passer la contribution française de 4 % à environ 6,5 % des recettes fiscales nettes de l'État ;

2) de 1994 à 2007, la volonté de maîtrise des dépenses exprimée par les États fortement contributeurs nets au budget communautaire a abouti à la stabilisation du PSR-UE entre 5,5 % et 6,6 % des recettes fiscales nettes (6,6 % en 2003) ;

3) de 2007 à 2009, on a constaté à nouveau un mouvement de hausse , atteignant un pic exceptionnel en 2009 suite à l'entrée en vigueur de la DRP (année au cours de laquelle le PSR-UE a représenté 9 % de nos recettes fiscales nettes) ;

4) depuis 2010, une hausse plus modérée est constatée et la contribution française devrait ainsi représenter, en 2016, 8,2 % de nos recettes fiscales nettes.

Évolution de la part du PSR-UE dans les recettes fiscales nationales

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

L'importance respective des différentes ressources au sein du PSR-UE a fortement évolué, reflétant la part prépondérante prise par la ressource assise sur le revenu national brut des États parmi les différentes ressources du budget communautaire (ressource RNB). Les réaménagements successifs du système des ressources propres ont en effet contribué à modifier substantiellement la part relative de ces différentes ressources et, en 2016, 73 % des ressources propres du budget communautaire devraient correspondre à la seule ressource RNB .

La même évolution est constatée pour la composition du prélèvement sur recettes français . Alors que la ressource TVA constituait la principale composante du PSR-UE en 1995 (7,2 milliards d'euros et 60 % du total), c'est la contribution RNB qui en constitue l'essentiel en 2016, avec 17,2 milliards d'euros et 74 % du total, contre 13 % du total pour la ressource TVA.

Composition du PSR-UE de 1995 à 2016

(en pourcentage et en milliards d'euros)

N.B : les ressources propres traditionnelles (RPT) sont composées des droits de douane, des prélèvements agricoles et des cotisations sur le sucre.

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

2. Les incertitudes récurrentes sur l'exécution de cette participation au budget de l'Union

Pour 2013 , l'écart d'exécution par rapport à la loi de finances initiale représente plus de 2 milliards d'euros et en 2014 , l'exécution du PSR-UE est supérieure de 123 millions d'euros au montant inscrit en loi de finances initiale.

Il convient d'observer que d'importants aléas pèsent encore sur l'exécution du PSR-UE 2015 sous l'effet des corrections d'assiettes TVA et RNB sur les exercices antérieurs à 2015, dont l'ajustement sera effectué le 1 er décembre 2015. Le montant définitif de ces corrections devrait être communiqué par la Commission aux États membres dans la deuxième quinzaine de novembre.

Mais l'exécution 2015 du PSR-UE dépendra surtout des huit projets de budgets rectificatifs présentés en 2015. Seuls les sept premiers ont été adoptés au 30 octobre 2015 (dont le septième qui prévoit l'ouverture de 330,7 millions d'euros de nouveaux engagements en vue de répondre à la crise migratoire en Europe), le huitième faisant encore l'objet d'une discussion. Compte tenu de ce contexte, la prévision d'exécution du PSR-UE 2015 est particulièrement difficile. Il pourrait s'agir, au total, d'une exécution 2015 de l'ordre de 20,04 milliards d'euros, soit 700 millions d'euros de moins que le montant inscrit en loi de finances initiale pour 2015.

Ces écarts considérables entre la prévision et l'exécution du PSR-UE sont constatés de façon répétée, et peuvent être positifs ou négatifs selon les exercices.

Écarts entre la prévision et l'exécution du PSR-UE depuis 1982

(en millions d'euros)

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

Votre rapporteur spécial observe que ces écarts posent un véritable problème au regard de la sincérité du PSR-UE voté chaque année. Il juge nécessaire de fournir au Parlement une estimation plus précise et plus fiable de son montant .

L'estimation de la participation française au budget communautaire repose il est vrai sur un faisceau d'hypothèses qui rendent son anticipation complexe . Les principaux facteurs d'incertitude résident dans l'évolution des volets dépenses et recettes du budget communautaire, qui ont un impact direct sur les contributions des États membres :

- l'évaluation du PSR-UE suppose tout d'abord d'anticiper les dépenses qui seront effectivement budgétées pour l'année suivante 15 ( * ) ainsi que le niveau effectif d'exécution des crédits votés ;

- la prévision en recettes varie, quant à elle, en fonction des assiettes des ressources TVA et RNB, du niveau de recouvrement des ressources propres traditionnelles, du solde prévisible de l'exercice en cours et du montant de la correction britannique et des autres rabais .

3. Le maintien du statut de deuxième contributeur et deuxième bénéficiaire

Deuxième contributeur au budget communautaire et deuxième bénéficiaire des dépenses européennes , la France maintient son statut sur le dernier exercice disponible, soit 2014.

Votre rapporteur spécial souligne en effet que les développements qui suivent reposent principalement sur le rapport financier de la Commission pour 2014 , ce rapport étant rendu public à la fin de l'année qui suit l'année d'exécution considérée. Il présente l'intérêt de récapituler la répartition des dépenses dans les États membres et de mesurer les soldes nets.

Alors qu'entre 2006 et 2010 , la France avait remplacé l'Espagne au rang de premier pays « bénéficiaire » (en euros) des dépenses du budget communautaire, elle n'est que deuxième pays « bénéficiaire », derrière la Pologne depuis 2013 , après avoir été le troisième pays « bénéficiaire » en 2011 et 2012, derrière l'Espagne et la Pologne.

En 2014, il s'agit de 10,5 % de dépenses du budget de l'UE effectuées sur notre sol , soit 13,5 milliards d'euros . En 2011, ces données étaient respectivement de 11,2 % et 13,16 milliards d'euros ; en 2012 10,2 % et 12,89 milliards d'euros ; et en 2013 10,6 % et 14,24 milliards d'euros.

Ce statut de deuxième bénéficiaire tient essentiellement à l'importance des dépenses de la politique agricole commune en France, qui représentent cependant seulement 63 % du total des dépenses réparties sur notre territoire en 2014 (contre 68 % en 2013 et environ 75 % les années précédentes).

En 2014, la part de la France dans le total des dépenses agricoles de l'UE s'établit à 15,5 % , ce qui en fait le premier bénéficiaire en volume , maintenant une tendance établie depuis 2003. Cette part est cependant en baisse puisqu'elle représentait 16,6 % en 2013 et 19 % en 2009.

La même année, la France n'était que le vingtième bénéficiaire des dépenses de l'UE (dépenses administratives incluses) si l'on prend en compte les retours par habitant (205 euros par habitant), loin derrière le Luxembourg (3 118 euros par habitant). Votre rapporteur spécial souligne que nous étions le quinzième bénéficiaire par habitant en 2008, ce qui témoigne du rythme de la dégradation de nos retours. De même, la France n'était, en 2014, que le onzième bénéficiaire de la PAC par habitant (130 euros par habitant, et elle était encore cinquième bénéficiaire en 2009 ) , loin derrière l'Irlande, premier bénéficiaire (269 euros par habitant).

Une analyse des « retours » par rubrique budgétaire enseigne que l'entrée des nouveaux États membres dans l'Union a contribué à éroder la proportion des dépenses communautaires réparties sur notre territoire.

La France demeure également en 2014 le deuxième pays contributeur au budget communautaire derrière l'Allemagne, et devant l'Italie, le Royaume-Uni et l'Espagne. En 2014, la part de sa contribution représente ainsi 16,3 % du total des recettes de l'UE (21,7 % pour l'Allemagne). Cette part est stabilisée, après avoir rencontré une phase de croissance entre 2007 et 2009 16 ( * ) .

Votre rapporteur spécial souligne qu'il existe, à côté de ces contributions volontaires, des contributions « subies » au budget communautaire, sous la forme de sanctions et corrections financières prononcées en conséquence de violations du droit communautaire :

- les refus d'apurement des dépenses de la politique agricole commune (PAC), résultant principalement de défaillances dans nos systèmes d'octroi et de contrôle des aides. Ce thème a été au coeur d'un contrôle conduit par votre rapporteur spécial en 2015 sur les relations entre le budget communautaire et le budget national à travers la PAC, en commun avec nos collègues Yannick Botrel et Alain Houpert, rapporteurs spéciaux de la mission « Agriculture Alimentation Forêt et Affaires Rurales » ;

- les corrections financières au titre des fonds structurels , résultant de motifs similaires ;

- les sanctions financières dans le cadre de la gouvernance européenne des finances publiques . La France n'a pas, à ce jour, fait l'objet de telles sanctions ;

- les amendes et astreintes prononcées par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) en cas de violation persistante par les États membres du droit communautaire.

4. Un solde net de - 8 milliards d'euros en 2014 en amélioration apparente

La différence positive entre notre contribution au budget communautaire et les dépenses de ce budget sur notre sol classe la France parmi les États membres « contributeurs nets ». Ce statut s'accentue depuis quinze ans, années pendant lesquelles le solde net de la France s'est nettement dégradé . Alors qu'il représentait moins de 400 millions d'euros en 1999 , il a été multiplié par près de 20 depuis .

Selon le dernier exercice disponible (2014), notre situation ne se détériore plus au regard de notre solde net. Alors qu'il s'élevait à - 7,2 milliards d'euros en 2011, à - 9,1 milliards d'euros en 2012 et à - 9,4 milliards d'euros en 2013 , le solde net de notre pays représentait ainsi 7,9 milliards d'euros en 2014 .

Évolution du solde net français depuis 1998
(méthode « rabais britannique »)

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

Toutefois, cette amélioration de notre solde net n'est qu'apparente et ne révèle aucune tendance de fond. En effet, ainsi que l'affirme le Gouvernement, deux facteurs purement conjoncturels expliquent cette inflexion :

- les contributions des États membres ne prennent pas en compte, en 2014, les rabais et corrections , à l'exception du chèque britannique. En effet, ces corrections prévues par la DRP du 7 juin 2007 ne s'appliquent plus à compter de 2014 dans l'attente de l'entrée en vigueur de la nouvelle DRP, qui devrait entrer en vigueur en 2016 avec effet rétroactif au 1 er janvier 2014 comme indiqué précédemment. Les corrections et rabais instaurés par cette DRP et dus au titre de 2014 et 2015 n'auront un impact que sur les contributions nationales 2016 ;

- le budget 2014 est inférieur à celui de 2013 et la France bénéficiant d'un solde net négatif, toute diminution du niveau de dépenses améliore son solde net .

La baisse relative de la part de notre RNB national dans le RNB de l'Union , qui contribue à éroder la part de notre prélèvement assise sur la ressource RNB, constitue à l'évidence un troisième facteur qui mérite d'être mentionné.

Les soldes nets des 28 en 2014 (méthode « rabais britannique »)

(en milliards d'euros et en pourcentage du RNB)

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

En 2014, la France était le deuxième contributeur net au budget communautaire en volume et le sixième contributeur net en pourcentage du RNB , selon la méthode de calcul dite « rabais britannique » 17 ( * ) . Les autres contributeurs nets sont l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Italie, les Pays-Bas, la Suède, l'Autriche, le Danemark et la Finlande.

Malgré ces constatations, votre rapporteur spécial relève les limites inhérentes à la notion de solde net, qui ne retrace que très imparfaitement les gains économiques et en aucune façon les gains politiques que les États membres retirent de leur adhésion à l'Union européenne.

En effet, les analyses en termes de retour net tendent à ignorer les contributions sans prix attachées à la construction européenne : la libre circulation et l'ouverture des États les uns vers les autres , d'une part, la généralisation de valeurs , d'autre part, et, plus particulièrement, celles de la démocratie, de la paix et de la liberté .

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie mercredi 4 novembre 2015, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. François Marc, rapporteur spécial, sur la participation de la France au budget de l'Union européenne (article 22 du projet de loi de finances pour 2016).

M. François Marc , rapporteur spécial . - L'article 22 du projet de loi de finances pour 2016 évalue le prélèvement sur recettes au profit du budget de l'Union européenne à 21,51 milliards d'euros, soit 767 millions d'euros de plus que le montant prévu par la loi de finances initiale pour 2015, en hausse de 3,7 %. La contribution française au budget communautaire prend la forme d'un prélèvement sur les recettes de l'État, voté chaque année en loi de finances. Entre 1982 et 2016, le montant en valeur de notre contribution a été multiplié par 5,5, passant de 4,1 à 21,51 milliards d'euros. Les écarts considérables entre la prévision et l'exécution de cette participation au budget de l'Union sont récurrents et posent problème au regard de la sincérité du prélèvement voté chaque année. L'estimation du prélèvement soumise au vote du Parlement doit être aussi précise et fiable que possible.

Deuxième bénéficiaire des dépenses de l'Union européenne, la France reste le deuxième État contributeur au budget communautaire derrière l'Allemagne et devant l'Italie, le Royaume-Uni et l'Espagne. Notre solde net, qui représentait moins de 400 millions d'euros en 1999, a été multiplié par près de vingt depuis, mais 2014 marque un arrêt apparent de la dégradation : de 9,4 milliards d'euros en 2013, il est revenu à 7,9 milliards d'euros en 2014.

Mais cette amélioration n'est qu'apparente et ne révèle aucune tendance de fond. Elle s'explique, selon le Gouvernement, par deux facteurs conjoncturels. D'abord, les contributions des États membres ne prennent pas en compte, en 2014, les rabais et corrections, à l'exception du chèque britannique, dans l'attente de l'entrée en vigueur en 2016 de la nouvelle décision « ressources propres » (DRP), avec effet rétroactif au 1 er janvier 2014. Les corrections et rabais instaurés par cette DRP et dus au titre de 2014 et 2015 n'auront d'impact que sur les contributions nationales 2016. Ensuite, le budget 2014 est inférieur à celui de 2013 ; le solde de la France étant négatif, toute diminution du niveau de dépenses améliore son solde net. J'ajoute que la baisse relative de la part de notre RNB dans celui de l'Union contribue à éroder la part de notre prélèvement assise sur la ressource RNB.

Comme à l'accoutumée, l'avant-projet de budget a été présenté par la Commission européenne au printemps ; la négociation du budget communautaire 2016 donne lieu aux postures habituelles : cet avant-projet prévoit une baisse de 5 % des crédits d'engagement et une hausse de 1,6 % des crédits de paiement par rapport au budget 2015, le Conseil y a opéré des coupes notables dans sa proposition du 4 septembre 2015, tandis que le Parlement européen a voté, le 27 octobre 2015, un projet encore plus ambitieux que celui de la Commission, tant au regard des crédits d'engagement que des crédits de paiement. La proposition d'augmentation des crédits formulée par nos collègues députés européens rendra plus difficiles les négociations lors de la phase de conciliation qui devrait aboutir d'ici la fin novembre. À nouveau, l'état du stock de restes à liquider (RAL), qui devrait dépasser 220 milliards d'euros à la fin 2016, est préoccupant.

Une note positive toutefois : le budget de l'Union est toujours davantage tourné vers l'investissement et la croissance, ainsi qu'en témoigne la mise en place en 2015 du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) qui vise la réalisation de 315 milliards d'euros d'investissements et répond à l'objectif de soutien à la croissance en Europe.

La DRP du 7 juin 2007 est en cours de remplacement par la DRP du 26 mai 2014, applicable à compter du 1 er janvier 2016 avec un effet rétroactif sur 2014 et 2015. Cette nouvelle DRP a fait l'objet d'un projet de loi en autorisant l'approbation, sur lequel j'ai rendu un rapport. Je répète qu'il s'agit à mon sens d'une occasion de réforme manquée : la nouvelle décision maintient l'essentiel du système en vigueur, voire aggrave ses défauts en créant de nouveaux rabais.

Sous réserve de ces différentes observations, je recommande toutefois à la commission d'adopter sans modification l'article 22 du projet de loi de finances pour 2016. Je conserve ma foi dans la construction européenne et vous invite à faire de même.

M. André Gattolin . - Le budget doit être voté et contrôlé par le Parlement. Or pour ce qui est de ce prélèvement sur les recettes de l'État, nous sommes dans une situation étonnante : face à un débit correspondant au prélèvement de 21 milliards d'euros, nous n'avons aucune entrée puisque pour des raisons comptables, aucune précision n'est apportée sur ce qui revient à l'économie française. Dans ces conditions, il est difficile d'expliquer à nos concitoyens l'intérêt de l'Union européenne et d'un budget commun.

La présentation de la contribution française devrait comprendre un document consolidé faisant figurer les pénalités versées par la France dans le cadre de contentieux pour usage abusif des aides agricole - héritage des gouvernements précédents. Nous n'avons pas de vision cumulative de ce que nous payons réellement. Dans mon rapport sur la citoyenneté dans l'Union, je proposais que le secrétariat général aux affaires européennes (SGAE) présente un document annuel sur les actions de l'Union européenne en France. Comment expliquer, sinon, l'intérêt de l'Union avec les éléments fragmentaires dont nous disposons sur ce que versent et reçoivent l'État et les collectivités territoriales ?

M. Éric Bocquet . - Vous avez évoqué un budget davantage tourné vers l'investissement et la croissance, mais nous n'en voyons pas les effets concrets. Les principaux piliers en sont le plan Juncker qui devrait libérer 315 milliards d'euros sur trois ans et l'assouplissement quantitatif mis en place par la banque centrale européenne (BCE) depuis le mois d'avril. Quelle part de ces fonds a reçu la France ? Quelle est votre analyse sur l'absence d'effets, pour le moment, en termes de relance économique ?

M. Richard Yung . - Le plan Juncker est une avancée, mais 315 milliards pour vingt-huit pays et étalés sur trois ans, ce n'est pas non plus une relance à la Roosevelt ! Le budget sur la période 2014-2020 est en baisse par rapport à la période précédente. Il y a des efforts à faire. Concernant les financements et les ressources propres, où en est le projet de taxe sur les transactions financières, régulièrement évoqué ? Le dispositif actuel est à bout de souffle, fragilisé par les nombreux rabais et corrections. Fidèle à ses principes, la France ne demande pas de rabais, mais l'effort doit être collectif. Peut-on espérer une remise à plat du dispositif à une échéance de deux à trois ans ?

M. Jacques Chiron . - Notre récent rapport d'information sur le e-commerce évalue à 168 milliards d'euros le montant de TVA qui échappe aux pays européens. Or une part du produit de la TVA est perçue par le budget européen. La Commission européenne s'attaque-t-elle à cette question ?

M. Francis Delattre . - On parle des 315 milliards d'euros du plan Juncker, mais en réalité ce sont 23 à 25 milliards d'euros disponibles, dont on attend un effet levier. Cet effet est-il réellement à la hauteur des espérances ? Une première sélection de projets éligibles en France a-t-elle été effectuée ? Par ailleurs, à travers son plan d'assouplissement quantitatif, la BCE soulage la dette des États et injecte de l'argent frais : quelle est la part reçue par les banques françaises ?

M. Yvon Collin . - Environ 500 millions d'euros ont été débloqués au niveau européen pour répondre à la crise de l'élevage. Est-ce une aide dédiée la filière porcine française ou une enveloppe globale ?

M. François Marc , rapporteur spécial . - C'est une enveloppe globale.

M. Yvon Collin . - Je vous remercie. Les aides à la pomme sont presque entièrement allées à la Pologne, ce qui explique ma question.

M. Jean-Claude Requier . - La France est le deuxième contributeur du budget européen et participe au chèque britannique depuis 1984. L'Allemagne, l'Autriche, les Pays-Bas et la Suède obtiennent des rabais sur ce rabais. La France et l'Italie, pourtant des pays latins supposés tricheurs, sont les plus vertueux.

Votre note de présentation répond à la question que je me posais sur la différence entre les restes à liquider, qui s'élèvent à 220 milliards d'euros, les restes à payer, et les restes à réaliser de nos budgets communaux.

M. François Marc , rapporteur spécial . - Merci de vos questions qui témoignent de votre intérêt pour l'Europe.

Je conviens avec André Gattolin que les Français devraient être mieux informés des interventions européennes. Le jaune budgétaire annexé au projet de loi de finances relatif aux relations financières avec l'Union européenne détaille, rubrique par rubrique, les moyens budgétaires alloués par l'Union européenne à la France. En revanche nous n'avons pas, pour le moment, de bilan économique ni d'évaluation des conséquences et effets leviers de ces interventions sur la dynamique économique de notre pays.

Vous trouverez dans la note de présentation des éléments explicatifs sur la proportion du budget de l'Union européenne qui concerne la France. Ainsi, 10,5 % des dépenses, soit 13,5 milliards d'euros, sont réalisées sur notre sol. Nous sommes le deuxième bénéficiaire, principalement grâce à la PAC dont la part dans le total des aides est néanmoins en baisse : de 75 % les années précédentes, elle est passée à 68 % en 2013 puis à 63 % en 2014. En revanche, en se référant au retour par habitant, la France arrive en vingtième position avec 205 euros par an. En 2008, nous étions quinzième. Toujours à l'aune du retour par habitant, nous ne sommes que le onzième bénéficiaire de la PAC avec 205 euros par habitant, l'Irlande occupant la première place avec 269 euros par an. Ces chiffres nourrissent une inquiétude justifiée. Nous ne recevons aucun rabais ou surplus, et nous avons le sentiment de ne pas bénéficier d'un traitement de faveur.

Les contributions subies ou pénalités pour non-respect des règles figurent aussi dans le jaune budgétaire relatif à nos relations financières avec l'Union européenne. Nous y reviendrons, avec un point particulier sur la PAC.

Le comité de suivi du plan Juncker est en cours d'installation. Pour l'instant, la dotation de l'Union européenne au titre de ce plan s'élève à 16 milliards d'euros, celle de la Banque européenne d'investissement (BEI) à 5 milliards. Depuis le début de l'année, 28 opérations ont bénéficié du soutien du FEIS, dont deux concernent la France : un programme sur l'efficacité énergétique des bâtiments et un autre sur les énergies renouvelables. Toutefois, en phase de mise en place, les données n'ont pas encore été agrégées.

Il est vrai qu'une baisse des réalisations budgétaires européennes a été constatée entre 2013 et 2014 ; mais la programmation des dépenses est quant à elle en hausse de 2 % par an, même si, par la suite, les réalisations peuvent se révéler inférieures. Concernant la remise à plat que vous appelez de vos voeux, le groupe de haut niveau présidé par Mario Monti, formé il y a un an, réfléchit à une architecture pertinente des ressources de l'Union : le système en vigueur a mal vieilli. Enfin, l'affectation de la taxe sur les transactions financières a été annoncée ici et là, au profit de la transition énergétique, des ressources propres de l'Union... Nous n'avons pas d'éléments plus précis à ce sujet.

Pour répondre à Jacques Chiron, nous devons redoubler d'efforts pour lutter contre la fraude à la TVA, dont le montant estimé est supérieur au budget européen. À nous d'activer les dispositifs anti-fraude.

Les 500 millions d'euros d'aides agricoles sont attribués en plus du budget de la PAC : 64 millions reviendront à la France, principalement aux filières lait et porc. Elles seront financées grâce à des prélèvements sur les pays qui ont dépassé leurs quotas laitiers en 2014, notamment l'Irlande, l'Allemagne et le Danemark.

Le reste à payer, sur lequel m'interroge Jean-Claude Requier, est le total des factures en décalage d'un exercice à l'autre. Cet agrégat comptable est similaire aux restes à réaliser de nos budgets locaux. Alors que le reste à liquider est la somme des engagements sur plusieurs exercices qui ne sont pas encore couverts par des crédits de paiement.

Mme Michèle André , présidente . - La commission des affaires européennes examinera jeudi 5 novembre une proposition de résolution européenne sur le plan Juncker déposée par nos collègues Jean-Paul Emorine et Didier Marie, qui sera envoyée pour examen au fond à la commission des finances. Cette année, l'article 22 sera examiné jeudi 19 novembre à la suite de la discussion générale sur le projet de loi de finances.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter sans modification l'article 22.


* 1 Rapport n° 685, 2014-2015.

* 2 Trois innovations majeures peuvent être relevées dans le traité de Lisbonne : la suppression de la distinction entre dépenses obligatoires, sur lesquelles le Conseil avait le dernier mot, et non obligatoires, sur lesquelles le Parlement européen avait le dernier mot ; la suppression du principe de deux lectures du projet de budget par le Parlement et le Conseil au profit d'une seule lecture par chacune des institutions ; et, enfin, la création d'un comité de conciliation, chargé en cas de désaccord entre le Conseil et le Parlement d'élaborer un projet commun.

* 3 Chaque mois, sont ouverts des crédits correspondant à un douzième des montants prévus par le budget précédent. Cette situation s'est produite en 1985, 1986 et 1988.

* 4 La rubrique 1 « Croissance intelligente et inclusive », subdivisée entre les rubriques 1a « Compétitivité pour la croissance et l'emploi » et 1b « Cohésion économique, sociale et territoriale », la rubrique 2 « Croissance durable : ressources naturelles » ; la rubrique 3 « Sécurité et citoyenneté » ; la rubrique 4 « L'Europe dans le monde » ; la rubrique 5 « Administration » ; et la rubrique 6 « Compensations ». Elles prennent la place à partir de 2014 des rubriques : « Croissance durable », « Conservation et gestion des ressources naturelles », « Liberté, sécurité justice », « L'Union européenne, acteur mondial », « Administration » et « Compensations ».

* 5 Les points de divergence ont principalement concerné le montant global du CFP, le montant des dépenses structurelles et la répartition entre États et entre régions, le niveau des dépenses agricoles et leur répartition entre États membres, et, enfin, le système des ressources propres, notamment les différentes corrections.

* 6 Un déflateur annuel fixe de 2 % est utilisé pour convertir les prix courants en prix constants 2011. D'un point de vue économique, l'utilisation des euros constants permet de comparer le « pouvoir d'achat » des budgets annuels entre eux. Cependant, la méthodologie de la Commission, n'utilisant qu'un seul déflateur, 2 %, ne peut pas prendre en compte l'inflation anticipée ni celle qui sera effectivement constatée. Par conséquent, de telles données doivent être interprétées avec prudence.

* 7 Votre rapporteur spécial précise que ce mécanisme du « dégagement d'office » permet à la Commission européenne l'annulation de crédits, au motif qu'un engagement budgétaire n'aurait pas été utilisée pour un paiement au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de l'engagement budgétaire.

* 8 L'écart entre ce plafond annuel maximal de crédits et le montant voté chaque année par rubrique dans le budget est appelé « marge sous plafond ». Celle-ci ne correspond donc pas à une réserve de crédits mais à un montant de crédits théoriquement mobilisables dans le cadre de l'approbation du budget initial ou d'un budget rectificatif. La mobilisation de la marge sous plafond conduit à ouvrir de nouveaux crédits supplémentaires, ce qui augmente, mécaniquement, la contribution des États membres.

* 9 Ce montant devra être réévalué à concurrence de la moitié du montant des appels en garantie qui surviendront.

* 10 Ces ressources sont plafonnées à 1,23 % du revenu national brut (RNB) de l'Union en crédits de paiement, et à 1,29 % en crédits d'engagement. D'autres recettes les complètent, tirées des impôts et autres prélèvements opérés sur les rémunérations du personnel communautaire, des intérêts bancaires, des contributions d'États tiers à l'Union au titre de leur participation à certaines politiques, des amendes infligées aux entreprises qui enfreignent les règles de concurrence ou d'autres règles, du remboursement d'aides communautaires non consommées, d'intérêts de retard, et du report du solde de l'exercice précédent.

* 11 Cet écrêtement vise à éviter de faire peser une charge trop lourde sur les États membres les moins prospères, l'hypothèse étant faite que la part relative de la consommation - et donc de la TVA - dans le revenu national est d'autant plus élevée que l'État est moins riche.

* 12 Le revenu national brut (RNB) est la somme des revenus perçus en un an par les agents économiques résidants sur le territoire. Son calcul repose sur la somme du PIB et du solde des flux de revenus primaires avec le reste du monde.

* 13 Compte tenu des délais d'approbation propres à chaque État, la date d'entrée en vigueur envisagée par la Commission européenne est le 1 er janvier 2016.

* 14 Rapport n° 685, 2014-2015.

* 15 Sans préjudice de l'impact d'éventuels budgets rectificatifs.

* 16 Une baisse tendancielle avait, au contraire, été observée de 2002 à 2007.

* 17 Cette méthode, considérée comme la plus cohérente sur le plan économique et la plus largement utilisée par les États membres, consiste à calculer le solde net sans tenir compte du montant des ressources propres traditionnelles versées au budget communautaire, qui sont considérées comme des ressources propres de l'Union, mais en tenant compte des dépenses administratives. Une contribution théorique est calculée à partir du montant des dépenses réparties.

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