PREMIÈRE PARTIE - LES GRANDES TENDANCES DE L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONALE ET FRANÇAISE

Aux termes de la loi de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale 1 ( * ) , « la politique de développement et de solidarité internationale de la France a pour ambition une mondialisation mieux maîtrisée et porteuse de valeurs humanistes ». Sa vocation première est de « lutter contre la pauvreté et les inégalités pour aider le sixième de l'humanité, dont une majorité de femmes, qui vit encore dans l'extrême pauvreté, à en sortir et éviter que ceux qui en sont sortis y tombent à nouveau ».

Elle s'inscrit dans le cadre défini par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui fixe la liste des pays bénéficiaires et comptabilise les dépenses pouvant être prises en compte au titre de cette politique.

I. LES GRANDES TENDANCES DE L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONALE

A. DES RENDEZ-VOUS STRATÉGIQUES POUR L'AVENIR DES POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT

L'année 2015 est marquée par la tenue de plusieurs conférences concernant l'aide publique au développement.

1. La conférence internationale d'Addis-Abeba sur le financement du développement a essentiellement rappelé les objectifs passés

Tout d'abord, du 13 au 16 juillet, s'est tenue à Addis-Abeba , sous l'égide de l'ONU, la troisième conférence internationale sur le financement du développement , après celles de Monterrey (2002) et de Doha (2008).

Force est de constater que le programme d'action adopté à l'issue de la conférence ne présente pas d'ambition particulière . Il insiste sur la mobilisation des ressources intérieures des pays en développement ainsi que sur le rôle central des financements privés, des investissements directs à l'étranger et du développement du commerce international. L'engagement des pays en développement de consacrer 0,7 % de leur revenu national brut (RNB) est renouvelé (point 51), sans donner d'horizon temporel, le programme se contentant de préciser que les chefs d'États et de gouvernement « exhortent [les pays n'ayant pas atteint cet objectif] à redoubler d'efforts en vue d'accroître leur APD et de faire des efforts concrets supplémentaires en vue d'atteindre les objectifs ». Il mentionne également le développement des financements innovants.

En revanche, une des principales revendications des pays en développement, la mise en place d'un organisme fiscal intergouvernemental au sein de l'ONU destiné à lutter contre la fraude fiscale, n'a pas abouti. Pourtant, celle-ci leur coûte chaque année 100 milliards de dollars, d'après la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED). Le programme d'action se limite à un engagement à intensifier la coopération internationale (point 27).

S'agissant de la lutte contre le changement climatique, le document final renvoie pour l'essentiel à la conférence de Paris (cf. infra ) et rappelle l'engagement des pays développés de « mobiliser collectivement auprès de diverses sources 100 milliards de dollars par an d'ici à 2020 » (point 60).

2. Le sommet de New York sur le développement durable définit un nouveau programme de développement pour les années 2016-2030

Au Sommet sur le développement durable, en septembre dernier, les États membres de l'ONU ont adopté un nouveau programme de développement, destiné à se substituer à partir du 1 er janvier prochain aux objectifs du millénaire pour le développement (OMD) adoptés en 2000. Ces 17 objectifs de développement durable (ODD) ont pour échéance 2030.

Les objectifs de développement durable

1. Éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde

2. Éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l'agriculture durable

3. Permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge

4. Permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge

5. Parvenir à l'égalité entre les sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles

6. Garantir l'accès de tous à l'eau, l'assainissement et assurer une gestion durable des ressources en eau

7. Garantir l'accès de tous à des services énergétiques fiables, durables, modernes et abordables

8. Promouvoir croissance économique soutenue, plein emploi productif et travail décent pour tous

9. Bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable et encourager l'innovation

10. Réduire les inégalités dans les pays et d'un pays à l'autre

11. Faire en sorte que les villes et les établissements humains soient ouverts à tous, sûrs, résilients et durables

12. Établir des modes de consommation et de production durables

13. Prendre d'urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions

14. Conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines

15. Préserver et restaurer les écosystèmes terrestres, en veillant à les exploiter de façon durable

16. Promouvoir l'avènement de sociétés pacifiques, l'accès de tous à la justice et des institutions efficaces

17. Renforcer les moyens du partenariat mondial pour le développement durable et le revitaliser

Source : Programme des Nations unies pour le développement

3. La nécessité de prendre en compte la situation des pays en développement lors de la COP 21

Enfin, Paris accueillera du 30 novembre au 11 décembre prochains la vingt-et-unième Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, la « COP 21 » . Ce sujet est rarement abordé sous l'angle des pays en développement. Leur soutien sera pourtant essentiel, qu'il s'agisse des pays émergents, dont il faudrait que les émissions de gaz à effet de serre diminuent, ou des pays les moins avancés (PMA), pour lesquels il est fondamental qu'ils adoptent dès aujourd'hui une stratégie de croissance bas carbone.

Vos rapporteurs spéciaux ont récemment étudié la question spécifique des PMA et formulé plusieurs propositions 2 ( * ) :

- mieux prendre en compte la situation particulière des PMA dans la politique climat de la France , en prévoyant, d'une part, de consacrer au minimum 20 % des financements climats à des actions d'adaptation au changement climatique et, d'autre part, de consacrer au minimum 20 % des financements climats aux PMA ;

- soutenir activement le Fonds vert pour le climat , en exhortant, notamment dans le cadre de la COP 21, nos partenaires des pays industrialisés à contribuer à ce fonds et que, à terme, l'objectif de consacrer 100 milliards de dollars par an à la lutte contre le changement climatique dans les pays en développement soit atteint ;

- surmonter la contrainte budgétaire actuelle grâce aux « financements innovants » et notamment en profitant de la tenue de la conférence de Paris pour discuter de la mise en place, au niveau international, d'une taxe sur les carburants des navires et des avions.


* 1 Loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale.

* 2 Fabienne Keller et Yvon Collin, Financements climat : n'oublions pas les pays les plus pauvres , rapport d'information n° 713 (2014-2015), 30 septembre 2015.

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