CHAPITRE III - DISPOSITIONS RELATIVES AUX TRANSPORTS

Article 39 - (art. 13 de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique pour les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement) - Dérogation à la procédure d'autorisation administrative unique pour certaines infrastructures linéaires de transport

Une autorisation préfectorale unique est expérimentée pour simplifier les procédures relatives aux installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) représentant un enjeu environnemental.

Ce dispositif semble toutefois soulever des difficultés pour les projets linéaires de transport, comme les lignes de train ou de métro, et le présent article propose d'y déroger dans ces cas précis.

1. L'expérimentation de l'autorisation unique, un effort de simplification

Les installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) susceptibles de perturber le milieu aquatique sont soumis à une procédure d'autorisation administrative en vertu de l'article L. 214-3 du code de l'environnement. Tel est par exemple le cas des éoliennes ou des infrastructures de transport affectant des milieux lacustres.

Dans les faits, ces mêmes IOTA font l'objet de plusieurs procédures complémentaires d'autorisation portant notamment sur :

- le défrichement (article L. 214-13 du code forestier) ;

- la protection des sites classés (article L. 341-10 du code de l'environnement) ;

- la protection de certaines espèces animales (articles L. 411-2 du même code).

L'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 216 ( * ) a créé un dispositif de simplification qui doit être expérimenté pendant trois ans : une procédure unique d'instruction est mise en oeuvre par le préfet pour les installations, ouvrages, travaux et activités concernés par l'autorisation « milieu aquatique » de l'article L. 214-3 du code de l'environnement. Concrètement, les responsables de projet ne remplissent qu' un seul dossier , ensuite instruit par la préfecture, ce qui leur évite de multiplier les demandes d'autorisation administrative.

Lors de la ratification de l'ordonnance précitée 217 ( * ) , la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat s'est félicitée de ce dispositif qui « offre une lisibilité et une stabilité juridique accrues (et ne se traduit) pas par une diminution des exigences en matière de protection de l'environnement. Au contraire, l'intégration de ces nombreux régimes administratifs en une seule décision permet une meilleure intégration de tous les enjeux environnementaux » 218 ( * ) .

2. Une disposition dérogatoire, prévue notamment pour le Grand Paris Express

2.1. Une disposition dérogatoire...

Le présent article vise à exclure du dispositif d'autorisation unique les opérations qui remplissent les deux critères cumulatifs suivants :

- concerner un projet d'infrastructures linéaires de transport (lignes de train, de métro, etc .) ;

- faire l'objet d'une enquête publique , préalable à une déclaration d'utilité publique (DUP) 219 ( * ) , lancée avant le 1 er juillet 2016 , y compris lorsqu'une DUP modificative a été déposée postérieurement.

Dès lors, les différentes autorisations administratives précitées (procédure « protection du milieu aquatique » , défrichement, protection des sites classés, etc. ) devraient être accordées séparément , sauf si le demandeur émet le souhait de bénéficier du système expérimental de l'autorisation unique.

En d'autres termes, l'article 39, qui aurait un effet rétroactif pour les enquêtes publiques lancées entre le 1 er juillet 2016 et la publication de la présente loi, offre un droit d'option pour ces opérations, le responsable de projet pouvant choisir entre le système d'autorisations multiples et l'expérimentation de l'autorisation unique .

2.2. ...notamment prévue pour le Grand Paris Express

D'après les informations recueillies par votre rapporteur, l'article 39 tend à répondre à des difficultés concrètes , rencontrées dans le cadre des projets ferroviaires en général et du Grand Paris Express en particulier.

Le Grand Paris Express

Ce projet vise à créer 200 kilomètres de nouvelles lignes de métro et soixante-huit gares interconnectées . Sept tronçons sont prévus, pour un nombre quotidien de voyageurs estimé à 2 millions :

- la ligne 15 Sud, Pont de Sèvres - Noisy-Champs (mise en service prévue fin 2022, 5,7 milliards d'euros d'investissement) ;

- la ligne 15 Ouest, Pont de Sèvres - Saint-Denis-Pleyel (2025-2027, 3 milliards d'euros) ;

- la ligne 15 Est, Champigny Centre - Saint-Denis-Pleyel (2025-2030, 3,5 milliards d'euros) ;

- la ligne 14, Sud, Olympiades - Aéroport d'Orly (2024, 2,1 milliards d'euros) ;

- la ligne 16, Noisy-Champs - Saint-Denis Pleyel via le Bourget (2023, 3,5 milliards d'euros) 220 ( * ) ;

- la ligne 17, Nord-Bourget RER - Le Mesnil-Amelot (2024-2030, 1,8 milliard d'euros) ;

- la ligne 18, Aéroport d'Orly - Versailles Chantiers (2024-2030, 2,7 milliards d'euros).

Grand Paris Express est financé à titre principal par des ressources fiscales affectées telles que la taxe annuelle sur les bureaux ou l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux.

Source : Société du Grand Paris

Conformément à l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 précitée, la Société du Grand Paris, établissement public qui réalise le Grand Paris Express 221 ( * ) , devrait solliciter une autorisation unique à la préfecture pour chacun des sept tronçons de l'opération. Le délai d'instruction de ces dossiers serait compris entre un an et dix-huit mois , le temps pour la préfecture d'analyser les différentes caractéristiques du projet (milieux aquatiques affectés, défrichements nécessaires, etc .).

La société du Grand Paris craint toutefois que ce délai soit incompatible avec le calendrier du Grand Paris Express . Il lui semble préférable de demander toutes les autorisations administratives précitées et non l'autorisation unique.

À titre d'exemple, l'autorisation de défrichement (article L. 214-13 du code forestier) pourrait être traitée en quelques semaines par la préfecture et la Société du Grand Paris pourrait lancer ses opérations de déboisement et d'archéologie préventive dans les meilleurs délais.

Bien que complexe, l'article 39 permet donc de répondre à des difficultés concrètes et s'inscrit dans une logique d'efficacité de l'action publique. Il permet également d'enrichir la réflexion relative au bilan de l'autorisation unique, dont l'expérimentation expirera en 2017.

Votre commission a adopté l'article 39 sans modification .

Article 40 - (art. 7 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris) - Extension des missions de la Société du Grand Paris à des activités d'exploitation de réseaux de chaleur

La Société du Grand Paris est un établissement public créé par la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 222 ( * ) pour construire les lignes et les gares du Grand Paris Express 223 ( * ) .

La création de cette structure a été motivée par « l'importance fonctionnelle et politique du futur schéma de transport pour la région capitale » et par « l'ampleur des investissements et des financements à mobiliser » 224 ( * ) .

La Société du Grand Paris est régie par le principe de spécialité , applicable à tout établissement public : ses interventions se limitent aux missions qui lui sont conférées par la loi et par ses statuts 225 ( * ) .

Conformément à l'article 7 de la loi n° 2010-597 précitée, la mission principale de cet établissement est de « concevoir et d'élaborer le schéma d'ensemble des projets d'infrastructures composant le réseau de transport public du Grand Paris et d'en assurer la réalisation » . La Société du Grand Paris peut également conduire les opérations d'aménagement et de construction immobilière nécessaires à la réalisation de ses projets.

À l'initiative du Gouvernement et de notre collègue François Zocchetto, la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 226 ( * ) a permis à la Société du Grand Paris de créer des réseaux de communications électroniques à très haut débit . L'établissement peut, en effet, créer ce type de réseaux à moindre coût - et donc améliorer la couverture numérique du territoire - en s'appuyant sur les travaux de génie civil nécessaires à la construction des voies ferroviaires.

Dans la même logique, l'article 40 propose de permettre à la Société du Grand Paris d'assurer la production d'énergies renouvelables ou de récupération .

Il s'inspire d'une expérimentation menée par la Régie autonome des transports parisiens (RATP) dans les stations Mairie de Saint-Ouen et Porte de Clichy. Concrètement, des forages géothermiques pourraient être creusés lors de la création des gares, ce qui permettrait de récupérer l'eau chaude des nappes phréatiques et d'alimenter un réseau de chauffage. L'énergie ainsi produite servirait à chauffer les gares, voire, en cas d'excédents de production, les quartiers environnants.

À moyen terme, la Société du Grand Paris pourrait créer des dispositifs géothermiques dans trois gares pour un chiffre d'affaires évalué à 1,5 million d'euros . À long terme, trente-huit des soixante-huit gares du Grand Paris Express pourraient être équipées de tels dispositifs.

Votre commission a adopté l'article 40 sans modification .


* 216 Ordonnance relative à l'expérimentation d'une autorisation unique pour les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement. Pour mémoire, cette ordonnance est issue de l'habilitation donnée par l'article 13 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et à sécuriser la vie des entreprises.

* 217 Ordonnance ratifiée par l'article 145 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

* 218 Avis n° 244 (2014-2015) fait par M. Louis Nègre sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, p. 346 ( http://www.senat.fr/rap/a14-244/a14-2441.pdf ).

* 219 Cf. le commentaire de l'article 33 pour plus de précisions sur les enquêtes publiques et les déclarations d'utilité publique (DUP).

* 220 Les chiffres de la ligne 16 intègrent également le coût des lignes 14 Nord (entre Mairie de Saint-Ouen et Saint-Denis Pleyel) et 17 Sud (entre Saint-Denis Pleyel et Le Bourget RER), lignes traitées dans le même tronçon sur le plan administratif et comptable.

* 221 Cf. l'article 40 pour plus de précisions sur la société du Grand Paris.

* 222 Loi relative au Grand Paris.

* 223 Cf. le commentaire de l'article 39 pour plus de précisions sur le Grand Paris Express.

* 224 Rapport n° 366 (2009-2010) fait par M. Jean-Pierre Fourcade, au nom de la commission spéciale sur le projet de loi relatif au Grand Paris, p. 29 ( http://www.senat.fr/rap/l09-366/l09-3661.pdf ).

* 225 Cf., notamment, sur le principe de spécialité, l'avis n° 356089 du Conseil d'État du 7 juillet 1994 relatif à EdF-GdF.

* 226 Loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite « loi Macron » (article 11).

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