Rapport n° 8 (2017-2018) de M. Alain FOUCHÉ , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 5 octobre 2017

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N° 8

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 octobre 2017

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE , ratifiant les ordonnances n° 2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l' évaluation environnementale des projets , plans et programmes et n° 2016-1060 du 3 août 2016 portant réforme des procédures destinées à assurer l' information et la participation du public à l' élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l' environnement ,

Par M. Alain FOUCHÉ,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Hervé Maurey , président ; MM. Claude Bérit-Débat, Patrick Chaize, Gérard Cornu, Ronan Dantec, Alain Fouché, Guillaume Gontard, Didier Mandelli, Frédéric Marchand, Mme Nelly Tocqueville, M. Michel Vaspart , vice-présidents ; Mmes Nicole Bonnefoy, Pascale Bories, MM. Jean-François Longeot, Cyril Pellevat , secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Jérôme Bignon, Joël Bigot, Jean Bizet, Jean-Marc Boyer, Mme Françoise Cartron, M. Guillaume Chevrollier, Mme Marta de Cidrac, MM. Jean-Pierre Corbisez, Michel Dagbert, Michel Dennemont, Mme Martine Filleul, MM. Jordi Ginesta, Éric Gold, Mmes Jacqueline Gourault, Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Benoît Huré, Olivier Jacquin, Mmes Christine Lanfranchi Dorgal, Nadège Lefebvre, MM. Olivier Léonhardt, Jean-Claude Luche, Philippe Madrelle, Pierre Médevielle, Louis-Jean de Nicolaÿ, Jean-Jacques Panunzi, Philippe Pemezec, Rémy Pointereau, Mme Angèle Préville, MM. Christophe Priou, Charles Revet, Mmes Nadia Sollogoub, Michèle Vullien .

Voir les numéros :

Sénat :

537 (2016-2017) et 9 (2017-2018)

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

11 , 91 et T.A. 4

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Les États généraux de la modernisation du droit de l'environnement , qui se sont tenus en juillet 2013 ont conduit à l'adoption d'une feuille de route dont l'objectif principal était de simplifier le droit de l'environnement tout en maintenant un niveau de protection constant.

Dans le droit fil de cet engagement, quatre groupes de travail thématiques ont été mis en place et ont constitué le socle des réformes mises en oeuvre depuis.

Ainsi, la commission consacrée à la démocratie environnementale , présidée par Alain Richard, a remis en juin 2015 un rapport dont les propositions ont abouti à l'ordonnance n°2016-488 du 21 avril 2016 relative à la consultation locale sur les projets susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement ainsi qu'à l'ordonnance n°2016-1060 du 3 août 2016 portant réforme des procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement .

Le groupe de travail consacré à l'évaluation environnementale , présidé par Jacques Vernier, a remis un rapport en avril 2015, dont les recommandations ont inspiré le décret n°2016-519 du 28 avril 2016 portant réforme de l'autorité environnementale et l'ordonnance n°2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes .

Le rapport du groupe de travail relatif à la séquence « éviter-réduire-compenser » (ERC) présidé par Romain Dubois, remis en janvier 2015, formulait quant à lui des propositions d'amélioration à droit constant de la mise en oeuvre de cette séquence.

Enfin, le groupe de travail consacré au suivi des expérimentations sur l'autorisation unique pour les installations classées, l'autorisation unique « loi sur l'eau » et le certificat de projet, présidé par Jean-Pierre Duport, a remis en février 2016 un rapport qui a abouti à l'ordonnance n°2017-80 relative à l'autorisation environnementale .

Le présent projet de loi ratifie deux de ces quatre ordonnances : l'ordonnance n°2016-1058 réformant l'évaluation environnementale et l'ordonnance n°2016-1060 relative à la participation du public, toutes deux prises sur le fondement de l'habilitation prévue par l'article 106 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite « loi Macron ».

Dans le cadre de ses travaux, votre rapporteur a entendu de nombreux acteurs, tous associés et consultés en amont de la rédaction des ordonnances, notamment dans le cadre des groupes de travail et du Conseil national de la transition écologique (CNTE) et qui sont aujourd'hui déjà confrontés à la mise en oeuvre de ces deux réformes sur le terrain. Il a été sensible à leur souhait d'une ratification rapide de ces textes afin de stabiliser le droit en vigueur, ainsi que d'une préservation des équilibres qui avaient été atteints au terme de plusieurs mois de travaux préparatoires et de consultations.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. L'ORDONNANCE N°2016-1058 DU 3 AOÛT 2016 RELATIVE À LA MODIFICATION DES RÈGLES APPLICABLES À L'ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE DES PROJETS, PLANS ET PROGRAMMES

A. LA « LOI MACRON » A AUTORISÉ LE GOUVERNEMENT À RÉFORMER LE RÉGIME DE L'ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE PAR VOIE D'ORDONNANCE

La loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (dite « loi Macron ») a autorisé le Gouvernement à réformer le régime de l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes par voie d'ordonnances dans un triple but :

- simplifier et clarifier les règles existantes en matière d'évaluation environnementale ;

- améliorer l'articulation entre les évaluations environnementales de projets différents, d'une part, entre les évaluations environnementales des projets et des plans et programmes, d'autre part ;

- assurer la conformité de ces règles au droit de l'Union européenne et donc transposer la directive 2014/52/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 , qui modifie la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011, concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ; cette directive devait être transposée avant le 16 mai 2017 .

Dans ce cadre, le 2° de l'article 106 de la « loi Macron » a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi visant à « modifier les règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes » .

Le champ de cette habilitation avait été rigoureusement encadré au cours des débats parlementaires. Il était ainsi restreint à des modifications :

- simplifiant et clarifiant les règles de l'évaluation environnementale « pour remédier aux difficultés et inconvénients résultant des dispositions et pratiques existantes ;

- améliorant l'articulation entre les évaluations environnementales de projets différents , d'une part, et entre l'évaluation environnementale des projets et celle des plans et programmes , d'autre part, notamment en définissant les cas et les conditions dans lesquels l'évaluation environnementale d'un projet, d'une opération, d'un plan ou d'un programme peut tenir lieu des évaluations environnementales de projets, d'opérations, de plans et de programmes liés au même aménagement ;

- modifiant les règles de désignation et les attributions des autorités environnementales en vue de les adapter à l'évolution des règles applicables en la matière ;

- assurant leur conformité au droit de l'Union européenne et transposant les deux directives 2011/92/CE et 2014/52/UE.

C'est sur ce fondement qu'a été prise l'ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes , que le 1° de l'article 1 er du présent projet de loi propose de ratifier.

L'élaboration de cette ordonnance a donné lieu à des concertations avec l'association des maires de France (AMF) sous la forme d'échanges techniques ainsi que dans le cadre du Conseil national de la transition écologique (CNTE) et de sa commission spécialisée consacrée à la modernisation du droit de l'environnement.

Des concertations ont également eu lieu avec les entreprises et organisations professionnelles représentatives dans le cadre du CNTE ainsi que dans le cadre du groupe de travail « Moderniser l'évaluation environnementale » , présidé par Jacques Vernier, et qui a remis un rapport public en mars 2015.

Le CNTE a émis, le 16 février 2016, un avis favorable avec des recommandations sur le projet de texte modifié suite aux réunions préalables de sa commission spécialisée.

Enfin, une consultation du public a été ouverte sur Internet du 14 juin au 15 juillet 2016 sur le projet d'ordonnance.

Les mesures réglementaires d'application de cette ordonnance ont été prévues par le décret d'application n° 2016-1110 du 11 août 2016 relatif à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes.

B. L'ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE : DE QUOI PARLE-T-ON ?

1. Le cadre de l'évaluation environnementale avant l'ordonnance du 3 août 2016
a) L'évaluation environnementale des projets
(1) Au niveau européen : le principe de l'évaluation environnementale des projets posé par la directive du 27 juin 1985

C'est la directive n°85/337 du 27 juin 1985 modifiée par la directive n° 97/11 du 3 mars 1997 et la directive n°2003/35/CE du 26 mai 2003 qui définit l'évaluation environnementale des projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements publics et privés.

L'article 2 de la directive de 1985 fixe le principe de cette évaluation : « les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que, avant l'octroi de l'autorisation, les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences » .

Dès 1985 donc, le droit européen pose le principe d'une démarche visant à évaluer les effets et incidences sur l'environnement d'un acte autorisant un projet de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements. Cette démarche prend sa place au sein du processus décisionnel, en amont de la décision et a pour but d'éclairer les différents acteurs concernés.

La directive prévoit que cette évaluation des incidences peut être intégrée dans les procédures existantes d'autorisation des projets des États membres ou, à défaut, dans d'autres procédures. En outre, « les États membres peuvent prévoir une procédure unique et peuvent exempter en totalité ou partie un projet spécifique des dispositions de la directive » , dans des conditions strictement encadrées par l'article 3 de la directive n° 2003/35/CE du 26 mai 2003.

L'article 6 de la directive de 1985 impose aux États membres de prendre des mesures pour que « les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation » . Ces autorités à consulter systématiquement ou au cas par cas doivent recevoir un certain nombre d'informations listées par l'article 5 (descriptif du projet, description des mesures envisagées pour éviter et réduire les incidences négatives importantes et si possible y remédier, les données nécessaires pour identifier et évaluer les effets principaux que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement).

La jurisprudence européenne a jugé que cette obligation d'évaluation environnementale concernait principalement les projets susceptibles d'avoir des « incidences notables » sur l'environnement .

Enfin, la directive distingue deux cas de figure :

- les projets soumis à une évaluation environnementale systématique ;

- les projets faisant l'objet d'un examen au cas par cas .

La liste des projets systématiquement soumis à évaluation environnementale (exemple : les raffineries de pétrole brut, les centrales nucléaires, etc.) figure dans les annexes de la directive.

La directive du 27 juin 1985 a été abrogée par la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011, elle-même modifiée par la directive 2014/52/UE du 16 avril 2014.

(2) En droit interne : le Grenelle de l'environnement a introduit le principe de l'« examen au cas par cas »

Avant l'ordonnance du 3 août 2016, le régime juridique de l'évaluation environnementale se caractérisait par la distinction de trois situations :

- étude d'impact systématique ;

- examen au cas par cas de la nécessité ou non d'une étude d'impact ;

- pas d'étude d'impact en dessous de certains seuils.

Aux origines du régime juridique de l'évaluation environnementale en France, on trouve deux lois fondatrices de 1976 :

- la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ;

- la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement .

Ces deux textes législatifs ont posé les premières règles applicables à l'étude d'impact et ont fait de la France un pays précurseur en matière d'évaluation environnementale préalable à l'autorisation d'un projet susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant même les premières directives européennes sur le sujet.

À la suite de la publication de la directive européenne de 1985, la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 dite « Grenelle II » (article 230) et le décret n° 2011-2019 du 29 décembre 2011 portant réforme des études d'impact des projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagement ont remanié et enrichi les règles applicables en :

- introduisant, en droit national, pour certains projets, un examen « au cas par cas » ;

- introduisant une liste des projets relevant du champ de l'évaluation environnementale : le tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement distingue les projets soumis à étude d'impact de façon systématique de ceux qui y sont soumis « au cas par cas » : ainsi par exemple, sont soumises de façon systématique à une étude d'impact les installations destinées à la production d'énergie hydroélectrique d'une puissance maximale brute totale supérieure à 500 kW (les autres sont soumises à un examen au cas par cas), ou encore les constructions de lignes aériennes d'une tension égale à 63 kilovolts et d'une longueur de plus de 15 kilomètres (les autres sont soumises à un examen au cas par cas) ;

- établissant un lien entre « évaluation environnementale » et « enquête publique » en prévoyant que l'enquête publique est la procédure de participation du public de droit commun pour les projets faisant l'objet d'une étude d'impact.

Toutes ces dispositions sont codifiées au sein du chapitre II « Évaluation environnementale » du titre II du livre I er du code de l'environnement ( articles L. 122-1 et suivants ) ainsi qu'aux articles R. 122-1 et suivants de la partie réglementaire du code.

En outre, depuis la loi Grenelle, l'article L. 122-1-1 du code de l'environnement prévoit qu'un « cadrage préalable » peut être rendu à la demande du maître d'ouvrage avant la demande d'autorisation.

b) L'évaluation environnementale des plans et programmes
(1) Au niveau européen : le principe de l'évaluation environnementale pour certains plans et programmes posé par la directive du 27 juin 2001

La directive n° 2001/42/CE du 27 juin 2001 fixe le principe de l'évaluation environnementale pour certains plans et programmes susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement (article 3).

Lorsqu'une évaluation environnementale est requise, un « rapport sur les incidences environnementales » doit ainsi être élaboré (article 5) « dans lequel les incidences notables probables de la mise en oeuvre du plan ou du programme, ainsi que les solutions de substitution raisonnables tenant compte des objectifs et du champ d'application géographique du plan ou du programme, sont identifiées, décrites et évaluées. » La liste de ces informations figure dans l'annexe I de la directive. Un résumé non technique de ces informations doit être également fourni.

Ce rapport doit être mis à disposition des autorités responsables de l'environnement et du public pour avis.

L'article 9 prévoit également une obligation d'information sur la décision des autorités consultées sur le fondement de l'article 6, et du public.

(2) En droit interne : l'ordonnance du 3 juin 2004

La directive du 27 juin 2001 a été transposée en droit français par l'ordonnance n° 2004-489 du 3 juin 2004 .

L'article L. 122-4 du code de l'environnement prévoit que font l'objet d'une évaluation environnementale au regard des critères de la directive de 2001, « les plans, schémas, programmes et autres documents de planification susceptibles d'avoir des incidences sur l'environnement qui, sans autoriser par eux-mêmes la réalisation de travaux ou prescrire des projets d'aménagement, sont applicables à la réalisation de tels travaux ou projets » .

Le tableau annexé à l'article R. 122-7 du code de l'environnement liste les plans, schémas, programmes et autres documents de planification devant faire l'objet d'une évaluation environnementale et ceux devant faire l'objet d'une évaluation environnementale au cas par cas (dont la procédure est définie à l'article R. 122-18), comme par exemple le plan de prévention des risques technologiques et le plan de prévention des risques naturels prévisibles. Dans le cas où une évaluation est décidée par l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement, la personne publique chargée de l'élaboration du plan, schéma, programme ou document de planification peut consulter cette autorité administrative sur l'ampleur et le degré de précision des informations à fournir dans le rapport environnemental.

Enfin, l'article R. 122-20 du code de l'environnement fixe le contenu de l'évaluation environnementale .

2. La volonté de moderniser l'évaluation environnementale et de l'adapter au droit européen

En mars 2015, la Commission européenne a engagé une procédure précontentieuse contre la France en lui faisant grief de n'avoir pas achevé la transposition de la directive 2011/92/CE du 13 décembre 2011 (« directive projets ») concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement. La Commission estimait alors que la liste de plans et programmes soumis à évaluation environnementale, incomplète et fermée, n'était pas conforme au droit de l'Union européenne.

En outre, la feuille de route pour la modernisation du droit de l'environnement 1 ( * ) , issue des États généraux de 2013, a abouti à la mise en place de plusieurs groupes de travail thématiques ciblés sur certains sujets sensibles.

Dans ce cadre, un groupe de travail , présidé par Jacques Vernier, a été dédié à l'évaluation environnementale . Il a rendu un rapport public en mars 2015, qui se fonde notamment sur des retours d'expérience.

L'un des reproches les plus fréquemment formulés à l'encontre du régime de l'étude d'impact antérieur à l'entrée en vigueur de l'ordonnance concernait la complexité du tableau de l'article R. 122-2 du code de l'environnement, qui consacre un type d'approche « par projet », alors même que la directive européenne privilégie une approche « par procédure ». Or, comme le relève le rapport Vernier, « cette entrée n'est guère logique car un projet doit nécessiter une étude d'impact en raison de ses caractéristiques et de son impact potentiel sur le milieu naturel et non pas seulement au regard de son régime administratif » . En effet, une zone d'aménagement concerté (ZAC) par exemple, n'a pas en soi un impact sur l'environnement en tant que procédure administrative. C'est l'impact potentiel sur l'environnement de tel ou tel projet envisagé dans son périmètre qu'il convient d'évaluer.

La complexité de ce régime, l'empilement des procédures et la redondance de certaines démarches administratives sont également pointés du doigt comme des facteurs d'allongement des délais, d'incertitude et d'absence de visibilité donc d'insécurité pour les porteurs de projets, voire de blocage des projets.

Au titre des conclusions du rapport, on retrouve donc l'idée que l'approche par projet, et non plus par procédure , permet de mieux évaluer l'ensemble des incidences sur l'environnement et d'éviter des études d'impact redondantes. Dans le cas d'un projet assujetti à plusieurs autorisations, le rapport préconise d'évaluer les impacts dès la première autorisation et au plus tard lors de la dernière autorisation. Il recommande également la possibilité de réaliser des procédures d'évaluation communes ou coordonnées entre plan/programme et projet.

En outre, le rapport Vernier montre que les critiques généralement formulées à l'encontre du régime d'examen au cas par cas (longueur des procédures, risque de contentieux) ne se vérifient pas à l'épreuve des faits.

Les principales propositions du rapport Vernier

1. Privilégier une entrée par « projet » et non plus par « procédure ».

2. Reprendre les définitions de la directive européenne et supprimer la notion de « programme de travaux ».

3. Créer une « clause-filet » permettant de déclencher une étude d'impact, même en-dessous des seuils, lorsque le milieu naturel est sensible.

4. Mettre en place, en l'absence de procédure adéquate, une procédure d'autorisation dite « supplétive » à même de porter les mesures destinées à éviter, réduire ou compenser les effets négatifs notables et à être précédée d'une participation du public.

5. Actualiser l'étude d'impact.

C. LE CONTENU DE L'ORDONNANCE : LA RÉFORME DE L'ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE

1. Les objectifs et la structure de l'ordonnance

Le rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n°2016-1058 rappelle les trois objectifs poursuivis , déjà mis en avant par le projet de loi « Macron » :

- simplification et clarification des règles applicables ;

- amélioration de l'articulation entre évaluations environnementales ;

- conformité au droit de l'Union européenne .

Cette réforme de l'évaluation environnementale s'inscrit dans la continuité des travaux du Conseil national de la transition écologique (CNTE), qui a d'ailleurs été associé tout au long du processus d'élaboration de l'ordonnance.

Elle vise à apporter des simplifications sans réduire l'exigence de protection de l'environnement . L'approche par projet, et non plus par procédure, au coeur de cette réforme, doit permettre de mieux évaluer les incidences sur l'environnement et d'éviter des études d'impact redondantes. Il en est de même des procédures communes ou coordonnées entre plusieurs évaluations.

En outre, il est attendu une réduction du nombre d'études d'impact grâce au développement des examens au cas par cas effectués par les autorités environnementales et à un ciblage de l'évaluation environnementale sur les projets les plus « impactants », au travers d'une nomenclature rénovée (cette nomenclature rénovée a été fixée par le décret en Conseil d'État du 11 août 2016).

Un gain financier net de 11,6 millions d'euros par an est évalué par la fiche d'impact de l'ordonnance (cumulé entreprises et collectivités).

Cette fiche liste également les allègements et les simplifications principaux attendus par cette réforme :

- pour les entreprises (notamment PME et TPE) : moins d'études d'impact systématiques, remplacées par des examens au cas par cas et des études d'incidences ciblées sur des thèmes environnementaux ;

- pour la société : une étude d'impact mieux justifiée ;

- pour les collectivités territoriales (notamment les petites) : moins d'études d'impact systématiques.

L'ordonnance comporte 7 articles qui reprennent en grande partie les conclusions du rapport Vernier de 2015. Ils sont complétés par le décret n° 2016-1110 du 11 août 2016 relatif à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes, qui en prévoit les mesures réglementaires d'application.

Trois champs de modifications principales résultent de cette ordonnance :

1/ Le premier concerne l'évaluation environnementale des projets :

- l'inscription dans le droit national de plusieurs définitions : « projet », « maître d'ouvrage », « autorisation », « autorité compétente », « évaluation environnementale » ; ces définitions sont issues de la directive de 2011 modifiée par celle de 2014 ;

- l'introduction d'une consultation des collectivités territoriales, en plus de celle de l'autorité environnementale ;

- l'introduction d'une obligation pour le maître d'ouvrage de mettre à disposition par voie électronique son étude d'impact ;

- des précisions concernant la décision d'autorisation des projets soumis à évaluation environnementale : cette décision doit être motivée et comprendre des mesures visant à éviter, réduire ou compenser les impacts du projet sur l'environnement ; tout refus doit être motivé ;

- la mise en place de procédures pour trois cas « dérogatoires » ;

- une actualisation des dispositions relatives à l'étude d'impact et des modalités simplifiées de concertation du public lors des actualisations de l'étude d'impact : introduction d'une consultation des collectivités territoriales ; possibilité d'exemptions relatives à la défense nationale et aux urgences à caractère civil ; modalités de retrait des dossiers de participation du public ou de consultation de certaines informations (le décret du 11 août précise le nouveau contenu de l'étude d'impact et introduit notamment l'obligation de contenir un « scénario de référence » et de décrire la vulnérabilité au changement climatique).

2/ Le deuxième champ de modifications concerne l'évaluation environnementale des plans et programmes :

- l'introduction des définitions des plans et programmes et de l'évaluation environnementale issues de la directive de 2001 ;

- la clarification des dispositions relatives à la détermination du champ de l'évaluation environnementale ;

- des exemptions relatives à la défense et à la protection civile ;

- l'évaluation environnementale des documents d'urbanisme ;

- la mise en place d'une « clause de rattrapage » permettant de compléter la liste des plans et programmes soumis à évaluation environnementale (compétence du ministre chargé de l'environnement).

3/ Le dernier champ concerne les procédures communes et coordonnées d'évaluation environnementale :

- l'évaluation environnementale du plan/programme peut valoir évaluation environnementale d'un projet réalisé dans son périmètre ;

- une procédure unique pour l'évaluation environnementale d'un projet et l'évaluation environnementale de la modification d'un plan programme ou de la mise en compatibilité du document d'urbanisme induite par le projet.

2. L'évaluation environnementale des projets (articles L. 122-1 à L 122-3-4 du code de l'environnement)
a) Article L. 122-1 (1° de l'article 1 de l'ordonnance) : une nouvelle vision de l'évaluation environnementale comme un « processus » intégrant l'étude d'impact

Le de l'article 1 er de l'ordonnance réécrit l'article L. 122-1 du code de l'environnement 2 ( * ) .

LES PRINCIPAUX APPORTS DE L'ORDONNANCE À L'ARTICLE L. 122-1 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT

- 4 définitions nouvelles issues de la directive de 2011 sont introduites : les notions de « projet », « maître d'ouvrage », « autorisation » et « autorité compétente ». La notion de « programme de travaux » est supprimée car elle ne trouve pas fondement dans le droit de l'Union européenne, mais l'esprit de ce droit qui empêche le fractionnement des projets est conservé grâce au principe d'une évaluation globale des incidences sur l'environnement ;

- le principe d'une évaluation environnementale pour tous les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine est maintenu, en vertu de critères et seuils fixés par voie réglementaire et, pour certains projets, d'un examen au cas par cas effectué par l'autorité environnementale ;

- la notion d' « étude d'impact » d'un projet désigne le « rapport d'évaluation des incidences sur l'environnement » et constitue un des éléments du processus global d'évaluation environnementale des projets ;

- la définition de l'évaluation environnementale reprend celle de la directive de 2014 (étude d'impact, consultations, critères permettant d'évaluer les incidences notables sur l'environnement et la santé humaine, principe d'une évaluation globale) ;

- l'obligation de transmission pour avis par l'autorité compétente pour prendre la décision de l'étude d'impact et de la demande d'autorisation est prévue non seulement à l'autorité environnementale mais aussi aux collectivités territoriales (avis mis à la disposition du public sur Internet).

Un nouveau I introduit 4 définitions , issues de la directive « projet » de 2011 :

- la notion de « projet » est définie comme « la réalisation de travaux de construction, d'installations ou d'ouvrages, ou d'autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, y compris celles destinées à l'exploitation des ressources du sol » ;

- la notion de « maître d'ouvrage » est définie comme « l'auteur d'une demande d'autorisation concernant un projet privé ou l'autorité publique qui prend l'initiative d'un projet » ;

- la notion « d'autorisation » est définie comme « la décision de l'autorité ou des autorités compétentes qui ouvre le droit au maître d'ouvrage de réaliser le projet » ;

- la notion « d'autorité compétente » est définie comme « la ou les autorités compétentes pour délivrer l'autorisation du projet » .

Le II reprend l'ancien I, qui fixe le principe d'une évaluation environnementale pour tous les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine. Cette évaluation dépend de critères et de seuils fixés par voie réglementaire et, pour certains projets, d'un examen au cas par cas effectué par l'autorité environnementale .

Il est à noter que l'ancien article L. 122-1 prévoyait seulement une soumission de ces projets à une « étude d'impact ». Un des grands apports de l'ordonnance du 3 août 2016 est d'envisager l'évaluation environnementale comme un « processus » englobant toutes les étapes - dont l'étude d'impact - aboutissant à la décision d'autorisation de la réalisation du projet.

Le III introduit d'ailleurs la définition de l'évaluation environnementale , qui reprend celle de « l'évaluation des incidences sur l'environnement » issue de la directive de 2014. Elle est ainsi définie comme « un processus constitué de l'élaboration, par le maître d'ouvrage, d'un rapport d'évaluation des incidences sur l'environnement, dénommé ci-après « étude d'impact », de la réalisation des consultations prévues à la présente section, ainsi que de l'examen, par l'autorité compétente pour autoriser le projet, de l'ensemble des informations présentées dans l'étude d'impact et reçues dans le cadre des consultations effectuées et du maître d'ouvrage » . L'obligation pour l'autorité compétente de motiver la décision a disparu de cette définition dans la mesure où elle est déjà prévue au I de l'article L. 122-1-1.

Il est en outre précisé que l'évaluation environnementale permet de décrire et d'apprécier de manière appropriée, en fonction de chaque cas particulier, les incidences notables directes et indirectes d'un projet sur les facteurs suivants :

- la population et la santé humaine ;

- la biodiversité, en accordant une attention particulière aux espèces et aux habitats protégés ;

- les terres, le sol, l'eau, l'air et le climat ;

- les biens matériels, le patrimoine culturel et le paysage ;

- l'interaction entre tous ces différents facteurs.

En outre, sont englobées les incidences susceptibles de résulter de la vulnérabilité du projet aux risques d'accidents majeurs et aux catastrophes pertinents pour le projet concerné.

Cette définition reprend mot pour mot celle de la directive de 2014.

Le III comprend enfin le principe d'une évaluation globale des incidences sur l'environnement dans le cas d'un projet constitué de plusieurs travaux, installations, ouvrages ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, y compris en cas de fractionnement dans le temps ou l'espace ou en cas de multiplicité de maîtres d'ouvrages.

Il est à noter que la notion de « programme de travaux » , critiquée, comme l'indique le rapport Vernier, car considérée comme une « surtransposition » du droit européen, est supprimée . Cette notion était, d'une part, rarement retenue par le Conseil d'État en cas de contentieux ; elle est, d'autre part, recoupée par la notion de « projet » nouvellement définie. Le rapport Vernier précise que « afin que la simplification ne soit pas synonyme de régression, il est proposé, en contrepartie de la suppression du « programme de travaux » que la définition du « projet » issue de la directive soit reprise en droit français et complétée afin de respecter l'esprit du droit de l'Union européenne qui empêche le saucissonnage ou le fractionnement des projets » .

Ainsi, reprenant la jurisprudence européenne, la nouvelle définition de la notion de « projet » implique que l'appréciation des incidences sur l'environnement doit être globale . Un projet doit être appréhendé comme l'ensemble des opérations ou travaux nécessaires pour le réaliser et atteindre l'objectif poursuivi, même s'il doit être réalisé en plusieurs phases ou relève de plusieurs maîtres d'ouvrages. Cette définition a pour but d'empêcher un « fractionnement » des projets, que ce soit dans l'espace ou dans le temps. Le président du groupe de travail Jacques Vernier, que votre rapporteur a entendu, a souligné l'importance de cette approche.

Votre rapporteur a néanmoins été alerté par un certain nombre de personnes qu'il a entendues sur les difficultés et l'insécurité juridique que risquait de faire peser sur les maîtres d'ouvrage cette nouvelle définition.

Le syndicat des énergies renouvelables (SER) a ainsi fait part de son inquiétude quant à l'interprétation qui sera faite par l'administration de cette définition d'un projet global : par exemple, dans quelle mesure un ouvrage de renforcement du réseau public de transport et une installation de production distants d'une vingtaine de kilomètres relèveront-ils d'un même projet ? Les liaisons électriques souterraines seront-elles comprises dans le projet d'un ouvrage de production alors même que ces dernières ne sont pas incluses dans la nomenclature de la directive sur l'évaluation environnementale ? Une telle interprétation risquerait selon eux de fragiliser les autorisations des porteurs de projets et d'accroître les contentieux, d'autant que les ouvrages de raccordement ne sont pas toujours connus avant la réalisation de l'installation de production.

Le commissariat général au développement durable (CGDD) a publié, en août 2017, un guide d'interprétation de la réforme du 3 août 2016 qui apporte déjà un certain nombre de réponses. Il précise en effet que pour déterminer le périmètre d'un « projet », le maître d'ouvrage peut recourir à un « faisceau d'indices » (proximité géographique ou temporelle, similitudes et interactions entre les différentes composantes du projet, objet et nature des opérations) lui permettant de traiter dans l'étude d'impact toutes les incidences négatives notables sur l'environnement de toutes les composantes du projet ou, le cas échéant, d'actualiser ou compléter l'étude d'impact . Les services du CGDD, entendus par votre rapporteur, ont par ailleurs indiqué que des échanges techniques constants avaient lieu entre eux et les représentants des maîtres d'ouvrage concernés, afin de leur permettre de cerner au mieux cette nouvelle définition et de l'adapter à leurs spécificités.

Malgré ces précisions apportées par l'administration, votre rapporteur souhaite rappeler au Gouvernement l'importance de la prise en compte de cette problématique spécifique de l'interprétation de la notion de « projet » dans le cas des gestionnaires de réseaux et des producteurs d'énergies renouvelables.

Le IV prévoit que pour un projet qui relève d'un examen au cas par cas , l'autorité environnementale est saisie par le maître d'ouvrage d'un dossier présentant le projet afin de déterminer si ce dernier doit être soumis à évaluation environnementale. La distinction, purement sémantique, qui existait auparavant entre pétitionnaire et maître d'ouvrage est supprimée : il s'agit bien du même acteur.

Le V prévoit qu'en cas de soumission du projet à évaluation environnementale, le dossier comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation déposée est transmis pour avis à l'autorité environnementale ainsi qu'aux collectivités territoriales et à leurs groupements intéressés par le projet. L'article 2 de l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 a supprimé la précision de la transmission du dossier « par le maître d'ouvrage ». En effet, contrairement à la procédure au cas par cas où c'est bien le maître d'ouvrage qui saisit l'autorité environnementale, ici c'est l'autorité compétente pour prendre la décision d'autorisation qui saisit l'autorité environnementale pour avis .

La consultation des collectivités territoriales est un des grands apports de l'ordonnance . Les avis rendus par ces dernières, ou l'information relative à l'absence d'observations de ces dernières sont mis à la disposition du public sur internet .

Votre rapporteur a par ailleurs été sensible aux conclusions du rapport du groupe de travail présidé par Jacques Vernier concernant l'autorité environnementale. La question de savoir si les préfets pouvaient exercer le rôle d'autorité environnementale , et donc évaluer l'étude d'impact de projets qu'ils seront par ailleurs amenés à autoriser 3 ( * ) ou non, posait une vraie difficulté. Le préfet décideur d'octroi ou non de l'autorisation environnementale est en effet un préfet « intégrateur », c'est-à-dire qu'il fonde sa décision sur des considérations environnementales mais également économiques pour un l'équilibre d'un territoire, alors que le préfet en tant qu'autorité environnementale n'a qu'une vision environnementale.

La préconisation du rapport Vernier plaidant pour que les préfets ne soient plus autorité environnementale n'a été suivie que pour les plans et programmes 4 ( * ) . Votre rapporteur estime que cette dissymétrie pourra être amenée à évoluer.

Le VI prévoit que les maîtres d'ouvrage tenus de produire une étude d'impact doivent la mettre à disposition du public par voie électronique au plus tard au moment de l'ouverture de l'enquête publique ou de la participation du public par voie électronique.

Enfin, le décret d'application de l'ordonnance, décret n° 2016-1110 du 11 août 2016 relatif à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes modifie l'article R. 122-1 du code de l'environnement afin de prévoir que l'étude d'impact préalable à la réalisation du projet (et non plus « les études d'impact ») est réalisée sous la responsabilité du ou des maîtres d'ouvrage.

b) Article L. 122-1-1 (2° de l'article 1 de l'ordonnance) : une décision d'autorisation ou de refus d'autorisation qui doit être motivée et prendre en compte la démarche « ERC »

LES PRINCIPAUX APPORTS DE L'ORDONNANCE À L'ARTICLE L. 122-1-1 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT

- l'article liste les obligations qui incombent à l'autorité compétente afin de prendre sa décision d'autoriser ou non un projet soumis à évaluation environnementale : il doit prendre en considération l'étude d'impact, les différents avis et la consultation du public, motiver sa décision, préciser les prescriptions qui incombent au maître d'ouvrage afin de réduire, éviter et compenser les effets négatifs notables ainsi que les modalités de suivi ;

- trois cas « dérogatoires » au régime de droit commun pour les projets relevant du champ de l'évaluation environnementale mais ne relevant d'aucun régime d'autorisation répondant aux exigences de l'article 8 bis de la directive ;

- dans le cas d'un projet subordonné à la délivrance de plusieurs autorisations , l'évaluation des incidences sur l'environnement doit être faite lors de la délivrance de la première autorisation ;

- l'autorité compétente informe le public de la décision d'octroi ou de refus d'autorisation du projet soumis à évaluation environnementale.

Le de l'article 1 er de l'ordonnance réécrit l'article L. 122-1-1 du code de l'environnement .

Il y ajoute tout d'abord un I relatif à la décision d'autorisation des projets soumis à évaluation environnementale , transposant ainsi les nouvelles exigences posées par la directive 2014/52/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 modifiant la directive 2011/92/UE, notamment à son article 8 bis , relatif à l'obligation de motiver cette décision d'autorisation.

ARTICLE 8 BIS DE LA DIRECTIVE 2014/52/UE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL DU 16 AVRIL 2014

1. La décision d'accorder l'autorisation comprend au moins les informations suivantes :

a) la conclusion motivée visée à l'article 1er, paragraphe 2, point g) iv);

b) les éventuelles conditions environnementales jointes à la décision, une description de toutes les caractéristiques du projet et/ou mesures envisagées pour éviter, prévenir ou réduire et, si possible, compenser des incidences négatives notables sur l'environnement, ainsi que, le cas échéant, des mesures de suivi.

2. La décision de refuser l'autorisation expose les principales raisons du refus.

3. Si les États membres font usage des procédures visées à l'article 2, paragraphe 2, autres que les procédures d'autorisation, les exigences des paragraphes 1 et 2 du présent article, le cas échéant, sont réputées respectées dès lors qu'une décision prise dans le cadre de ces procédures comprend les informations visées auxdits paragraphes et que des mécanismes permettant de respecter les exigences du paragraphe 6 du présent article sont en place.

4. Conformément aux exigences visées au paragraphe 1, point b), les États membres veillent à ce que les caractéristiques du projet et/ou mesures envisagées pour éviter, prévenir ou réduire et, si possible, compenser les incidences négatives notables sur l'environnement soient mises en oeuvre par le maître d'ouvrage et déterminent les procédures de suivi des incidences négatives notables sur l'environnement.

Les types de paramètres devant faire l'objet d'un suivi et la durée du suivi sont proportionnés à la nature, à la localisation et à la dimension du projet et à l'importance de ses incidences sur l'environnement.

Les modalités de suivi existantes découlant d'actes législatifs de l'Union autres que la présente directive et de la législation nationale peuvent, le cas échéant, être utilisées en vue d'éviter tout double emploi dans le suivi.

5. Les États membres veillent à ce que l'autorité compétente prenne toute décision visée aux paragraphes 1 à 3 dans un délai raisonnable.

6. L'autorité compétente s'assure que la conclusion motivée visée à l'article 1er, paragraphe 2, point g) iv), ou toute décision visée au paragraphe 3 du présent article est toujours d'actualité lorsqu'elle prend la décision d'accorder une autorisation. Les États membres peuvent fixer à cet effet des délais de validité de la conclusion motivée visée à l'article 1 er , paragraphe 2, point g) iv), ou de toute décision visée au paragraphe 3 du présent article.

En vertu de ce nouveau I , l'autorité compétente doit donc, pour prendre sa décision d'autoriser ou non un projet soumis à évaluation environnementale :

- prendre en considération l'étude d'impact , l' avis des autorités mentionnées à l'article L. 122-1 ainsi que le résultat de la consultation du public et, le cas échéant, des consultations transfrontières 5 ( * ) ;

- motiver sa décision au regard des incidences notables du projet sur l'environnement ;

- préciser les prescriptions que devra respecter le maître d'ouvrage ainsi que les mesures et caractéristiques du projet destinées à éviter ou réduire et, si possible, compenser les effets négatifs notables ;

- préciser les modalités de suivi des incidences du projet sur l'environnement ou la santé humaine ;

- motiver sa décision de refus d'autorisation , au regard notamment des incidences notables potentielles du projet sur l'environnement.

Alors que le I fixe un régime de droit commun pour les décisions d'autorisation ou de refus d'autorisation, le II prévoit des procédures spécifiques de décision d'autorisation par l'autorité compétente dans trois cas particuliers .

1/ Le premier de ces cas particuliers concerne les projets soumis à évaluation environnementale relevant d'un régime d'autorisation préalable qui ne répond pas aux conditions fixées par le I . Certaines autorisations en effet, ne sont pas motivées au regard des incidences environnementales du projet, ne comportent pas de prescriptions liées aux mesures d'évitement, de réduction ou de compensation de l'impact du projet sur l'environnement ou alors ne prévoient pas de suivi des incidences du projet.

C'est le cas par exemple des autorisations de déroger à la protection des espèces qui ne prévoient ni mesures ERC, ni mesures de suivi.

L'ordonnance prévoit ainsi que cette décision d'autorisation devra être complétée par l'autorité compétente afin d'être conforme aux prescriptions du I. La décision est motivée et une participation du public d'au moins un mois est organisée.

2/ Le deuxième de ces cas concerne les projets soumis à évaluation environnementale relevant d'un régime déclaratif , comme par exemple un projet qui ne relève que d'une déclaration dite « loi sur l'eau » ou d'une déclaration « ICPE » .

Dans ce cas, le projet est autorisé par une décision de l'autorité compétente pour délivrer le récépissé de déclaration, qui devra contenir lui-même les éléments mentionnés au I. Selon le guide d'interprétation de la réforme publié par le CGDD, ce cas devrait être très rare.

3/ Le dernier cas concerne tous les projets soumis à évaluation environnementale mais ne relevant d'aucun régime particulier d'autorisation ou de déclaration , comme par exemple un premier boisement ou un déboisement non soumis à autorisation de défrichement , ou alors un aménagement routier sur un terrain qui appartient au maître d'ouvrage qui ne requiert ni déclaration d'utilité publique, ni déclaration de projet au sens de l'article L. 126-1.

Dans ces cas, le projet est autorisé par le préfet par une décision qui doit contenir les éléments mentionnés au I.

Le III concerne l'évaluation des incidences sur l'environnement des projets dont la réalisation est subordonnée à la délivrance de plusieurs autorisations successives . On peut citer par exemple les infrastructures de transport, qui font l'objet d'une déclaration d'utilité publique ou d'une déclaration de projet puis d'une ou plusieurs autorisations environnementales. Dans ce cas :

- les incidences sur l'environnement sont appréciées lors de la délivrance de la première autorisation ;

- lorsque ces incidences n'ont pu être complètement identifiées ni appréciées avant l'octroi de cette première autorisation, le maître d'ouvrage doit actualiser l'étude d'impact - au plus tard lors de la dernière autorisation - en procédant à une évaluation de ces incidences, dans le périmètre de l'opération pour laquelle l'autorisation a été sollicitée et en appréciant leurs conséquences à l'échelle globale du projet ; il peut, en cas de doute quant à la nécessité d'actualiser l'étude d'impact, consulter pour avis l'autorité environnementale ;

- cette étude d'impact actualisée est soumise de nouveau à l'avis des collectivités territoriales et de leurs groupements ;

- cette étude d'impact accompagnée de ces avis est soumise à la participation du public par voie électronique lorsque le projet a déjà fait l'objet d'une enquête publique ;

- l'autorité compétente peut, pour délivrer l'autorisation sollicitée, fixer par une nouvelle décision, les mesures à la charge du ou des maîtres d'ouvrage destinées à éviter, réduire et le cas échéant compenser les incidences notables et les mesures de suivi.

Sur cette question de l'actualisation de l'étude d'impact, l'ordonnance reprend le principe issu de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne 6 ( * ) , selon lequel l'appréciation des impacts d'un projet sur l'environnement doit se faire le plus en amont possible. Il convient en effet d'avoir une appréciation globale des incidences sur l'environnement des projets ou de leur modification. Ainsi, l'incidence sur l'environnement est non seulement celle des travaux envisagés mais aussi celle du projet à réaliser.

Le IV prévoit les modalités selon lesquelles l'autorité compétente informe le public et les collectivités territoriales d'une décision d'octroi ou de refus d'autorisation d'un projet soumis à évaluation environnementale . Sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires particulières et du secret de la défense nationale, elle rend publiques :

- la décision ;

- les informations relatives au processus de participation du public ;

- la synthèse des observations du public et des autres consultations ;

- les lieux où peut être consultée l'étude d'impact.

PROJETS SOUMIS À ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE

PROCÉDURE D'EXAMEN AU CAS PAR CAS

c) Article L. 122-1-2 (3° de l'article 1 de l'ordonnance) : un cadrage préalable précisé

L'article L. 122-1-2 est relatif au « cadrage préalable » que peut demander le maître d'ouvrage à l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation. Ce cadrage a pour objet de l'aider à mieux définir le champ et le degré de précision des informations à fournir dans l'étude d'impact.

Le de l'article 1 er de l'ordonnance modifie les deux premiers alinéas de l'article L. 122-1-2 :

- ce cadrage préalable que le maître d'ouvrage peut demander avant de présenter une demande d'autorisation contient des informations non plus seulement sur le degré de précision mais également sur le champ de l'étude d'impact , c'est-à-dire sur les incidences qu'elle devra plus spécifiquement analyser compte tenu de la zone impactée par exemple ;

- dans ce cadre, l'autorité compétente consulte l'autorité environnementale et les collectivités territoriales et leurs groupements ;

- à la demande du maître d'ouvrage, l'autorité compétente organise une réunion d'échange d'informations avec les parties prenantes locales intéressées par le projet afin que chacune puisse faire part de ses observations sur les incidences potentielles du projet.

Ces précisions répondent aux nouvelles exigences de la directive 2011/92/UE telle qu'elle a été modifiée par la directive 2014/52/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.

d) Article L. 122-3 (4° de l'article 1 de l'ordonnance) : le contenu du décret d'application de la section

LES PRINCIPAUX APPORTS DE L'ORDONNANCE À L'ARTICLE L. 122-3 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT

- l'article encadre le décret en Conseil d'État qui doit être pris en application de la section et qui consacre notamment le passage d'une approche « par procédure » à une approche « par projet » dans la nouvelle nomenclature des études d'impact annexée à l'article R. 122-2 ;

- le contenu de l'étude d'impact est actualisé avec l'introduction notamment d'une description des mesures prises en application de la démarche « ERC » ainsi que de scénarios alternatifs non retenus ; elle doit permettre de décrire de manière appropriée, en fonction de chaque cas particulier, les incidences notables directes et indirectes d'un projet sur un certain nombre de facteurs (population et santé humaine, biodiversité, terres, sol, air, eau, climat, biens matériels, patrimoine culturel et paysage) et de décrire et d'apprécier l'interaction entre ces facteurs ; en outre, une description plus exhaustive du projet est prévue, une étude d'impact davantage ciblée sur les enjeux identifiés a priori, ou encore la prise en compte des incidences du projet sur le climat et de sa vulnérabilité au changement climatique ; le maître d'ouvrage doit s'assurer que l'étude d'impact doit être assurée par des « experts compétents ».

Le de l'article 1 er de l'ordonnance réécrit entièrement l'article L. 122-3 du code de l'environnement , relatif au décret en Conseil d'État précisant les modalités d'application des articles précédents , afin de tenir compte des modifications apportées par l'ordonnance.

Ce décret - qui a été pris le 11 août 2016 7 ( * ) - fixe ainsi notamment :

- les catégories de projets qui, en fonction des critères et des seuils déterminés en application de l'article L. 122-1 et, le cas échéant après un examen au cas par cas, font l'objet d'une évaluation environnementale (article R. 122-2 du code de l'environnement et son tableau annexé) ;

- le contenu de l'étude d'impact (article R. 122-5) ;

- les conditions dans lesquelles le ministre chargé de l'environnement peut se saisir ou être saisi, pour avis , de toute étude d'impact (article R. 122-6) ;

- les modalités de saisine de l'autorité environnementale et des collectivités territoriales et le délai et les conditions dans lesquels ces avis sont émis et rendus publics (articles R. 122-6 et R. 122-7) ;

- le contenu de l' avis de cadrage préalable (article R. 122-4) ;

- les modalités de publication par voie électronique de l'étude d'impact par le maître d'ouvrage (article R. 122-9) ;

- les modalités et le contenu de la décision d'examen au cas par cas (article R. 122-3) ;

- les modalités des procédures d'autorisation des trois cas particuliers mentionnés au II de l'article L. 122-1-1 (article R. 122-8) ;

- les modalités d'application des exemptions prévues par l'article L. 122-3-4 (article R. 122-14).

Votre rapporteur souligne que c'est ainsi en réalité le décret du 11 août 2016 qui comprend la simplification la plus importante de la réforme de l'évaluation environnementale , avec la nouvelle nomenclature qui fait passer un très grand nombre de projets de la colonne « étude d'impact systématique » à la colonne « étude d'impact après examen au cas par cas ».

D'après les informations fournies à votre rapporteur par le Commissariat général au développement durable (CGDD), sur dix projets soumis à la procédure d'un examen au cas par cas, seul un fait l'objet d'une étude d'impact .

La portée de cette modification de la nomenclature devrait donc être très importante en termes de diminution du nombre de projets soumis à étude d'impact, notamment pour des petits projets agricoles par exemple.

LA NOUVELLE NOMENCLATURE DES ÉTUDES D'IMPACT - D'UNE APPROCHE « PAR PROCÉDURE » À UNE APPROCHE « PAR PROJET »

La nomenclature des études d'impact évolue dans le cadre de la transposition des annexes I et II de la directive « projets » , d'une part, en simplifiant et clarifiant leur rédaction, d'autre part, en passant à l'examen au cas par cas d'un certain nombre de projets auparavant soumis à étude d'impact systématique .

Un guide de lecture de la nomenclature des études d'impact (article R. 122-2) a été publié en février 2017 par le Commissariat général au développement durable (CGDD).

Objectif : réduction du nombre de dossiers soumis à étude d'impact de façon systématique en concentrant les évaluations sur les projets potentiellement les plus impactants.

Ce qui change pour les ICPE

Avant le décret du 11 août 2016 , on distinguait trois cas de figure :

- toutes les installations soumises au régime d'autorisation étaient soumises à évaluation environnementale systématique ;

- les installations relevant du régime de l'enregistrement pouvaient être soumises à évaluation si l'autorité compétente le décide dans le cadre de la procédure d'enregistrement ;

- les installations soumises à déclaration n'impliquaient ni examen au cas par cas ni évaluation environnementale systématique.

Depuis la publication du décret du 11 août 2016 , parmi les installations soumises au régime d'autorisation, seuls les projets importants sont soumis à évaluation systématique, tandis que les autres seront désormais soumis à un examen au cas par cas. Les dispositions restent inchangées pour les autres types d'ICPE (enregistrement ou déclaration).

Exemples de projets ICPE auparavant soumis à évaluation systématique et désormais soumis à la procédure du « cas par cas » : les installations de transit, de regroupement ou de tri de déchets d'équipements électriques et électroniques dont le volume susceptible d'être entreposé est supérieur à 1000 m 3 , les installations de compostage de déchets non dangereux ou de matière végétales (+ de 50 t/j de matières traitées), les silos et installations de stockage en vrac de céréales, grains, produits alimentaires (plus de 15 000 m 3 ), les tanneries...

Ces projets feront désormais l'objet d'un examen au cas par cas au terme duquel l'autorité environnementale déterminera si une étude d'impact est nécessaire ou pas. Si elle ne demande pas une étude d'impact, le projet d'ICPE devra néanmoins faire l'objet d'une procédure d'autorisation avec enquête publique sur la base d'un document d'incidence sur l'environnement et, selon les cas, d'une étude de dangers .

La nouvelle nomenclature concentre ainsi les études d'impacts sur les projets les plus sensibles (IED, carrières, projets éoliens, élevages bovins et porcins les plus importants, stockage de pétrole, stockage géologique de CO 2 ), c'est-à-dire sur la moitié des demandes d'autorisations annuelles actuelles.

Au total, d'après Jacques Vernier, entendu par votre rapporteur, environ 50 000 ICPE sont soumises à autorisation et relevaient donc avant le décret du régime de l'évaluation environnementale systématique. Aujourd'hui, 10 000 seulement de ces ICPE soumises à autorisation demeurent dans cette catégorie. 80% des ICPE soumises à autorisation ne requièrent plus d'étude d'impact systématique.

Ce qui change pour les infrastructures de transport

Dans le domaine des transports, le nombre de projets soumis à évaluation environnementale systématique est réduit également avec l'entrée en vigueur de l'ordonnance et du décret. Par exemple les gares sont désormais soumises à un examen au cas par cas , de même que la plupart des routes . En revanche, la construction de lignes à grande vitesse (LGV) reste soumise à étude d'impact systématique.

Cette réforme devrait permettre, selon la fiche d'impact de l'ordonnance, de passer une trentaine de projets « transports » par an de l'évaluation systématique à l'examen au cas par cas (essentiellement des projets routiers).

Ce qui change pour les projets « milieux aquatiques, littoraux et maritimes »

Avant l'ordonnance et le décret, les projets soumis à autorisation « loi sur l'eau » donnaient systématiquement lieu à une étude d'impact. Aujourd'hui, un certain nombre de ces projets basculent dans la procédure au cas par cas .

Ainsi, les ports, les travaux, ouvrages et aménagements sur le domaine public maritime et les cours d'eau, et les ports de commerce restent soumis à évaluation systématique, seuls les ports de plaisance basculant au cas par cas. Concernant les plans d'eau ou barrages, sont désormais soumis au cas par cas les projets les plus « impactants » (1 million de m 3 ou d'une hauteur d'eau supérieure de 20 mètres au terrain naturel).

Pour les stations d'épuration, celles d'une capacité supérieure ou égale à 150 000 EH (soit 7 dossiers en 2015) restent soumises à étude d'impact systématique tandis que celles d'une capacité comprise entre 150 000 et 10 000 EH et celles situées dans la bande littorale de 100 mètres (4 dossiers en 2015) sont soumises à l'examen au cas par cas.

Autre exemple, l'épandage de boues est une rubrique qui bascule en totalité au cas par cas.

Les IOTA exemptés d'étude d'impact après un examen au cas par cas devront néanmoins faire l'objet d'une procédure d'autorisation avec enquête publique sur la base d'un document d'incidence sur l'environnement.

Ce qui change pour les projets « énergie »

Dans la catégorie des ouvrages de transport et de distribution de l'énergie électrique, les postes de transformation dont la tension est supérieure à 63kV passent de l'évaluation systématique au cas par cas.

Les plus grandes installations photovoltaïques restent soumises à évaluation environnementale tandis que les plus grandes installations sur serres passent au cas par cas et les autres installations, sur toitures notamment, ne sont plus concernées.

Au total, une centaine de projets par an passerait d'une évaluation systématique à un examen au cas par cas .

Source : Fiche d'impact de l'ordonnance

De manière plus précise, pour le contenu de l'étude d'impact , l'ordonnance a modifié la liste des informations que celle-ci doit contenir au minimum, afin de la calquer quasi-parfaitement avec la liste prévue par l'article 5 de la directive 2011/92/UE telle que modifiée par la directive 2014/52/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.

Elle doit ainsi au moins comprendre :

- une description du projet comportant des informations relatives à la localisation, à la conception, aux dimensions et aux autres caractéristiques pertinentes du projet ;

- une description des incidences notables du projet sur l'environnement ;

- une description des caractéristiques du projet et des mesures envisagées pour éviter, réduire et, si possible, compenser les incidences négatives notables probables sur l'environnement ;

- une description des solutions de substitution raisonnables qui ont été examinées par le maître d'ouvrage, en fonction du projet et de ses caractéristiques spécifiques, et une indication des principales raisons du choix effectué, eu égard aux incidences du projet sur l'environnement ;

- un résumé non technique de toutes les informations mentionnées plus haut ;

- toute information supplémentaire, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et des éléments de l'environnement sur lesquels une incidence pourrait se produire.

Le décret du 11 août 2016 est néanmoins allé plus loin que cette liste minimale d'éléments obligatoires en fixant de manière plus exhaustive et détaillée le contenu de l'étude d'impact, qui doit être « proportionné » 8 ( * ) . On retrouve cette liste à l'article R. 122-5 du code de l'environnement .

ARTICLE R. 122-5 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT - LE CONTENU DE L'ÉTUDE D'IMPACT

I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine .

II. - En application du 2° du II de l'article L. 122-3, l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire :

1° Un résumé non technique des informations prévues ci-dessous. Ce résumé peut faire l'objet d'un document indépendant ;

2° Une description du projet , y compris en particulier :

- une description de la localisation du projet ;

- une description des caractéristiques physiques de l'ensemble du projet , y compris, le cas échéant, des travaux de démolition nécessaires, et des exigences en matière d'utilisation des terres lors des phases de construction et de fonctionnement ;

- une description des principales caractéristiques de la phase opérationnelle du projet , relatives au procédé de fabrication, à la demande et l'utilisation d'énergie, la nature et les quantités des matériaux et des ressources naturelles utilisés ;

- une estimation des types et des quantités de résidus et d'émissions attendus , tels que la pollution de l'eau, de l'air, du sol et du sous-sol, le bruit, la vibration, la lumière, la chaleur, la radiation, et des types et des quantités de déchets produits durant les phases de construction et de fonctionnement.

Pour les installations relevant du titre I er du livre V du présent code et les installations nucléaires de base mentionnées à l'article L. 593-1, cette description pourra être complétée dans le dossier de demande d'autorisation en application des articles R. 181-13 et suivants et de l'article 8 du décret n° 2007-1557 du 2 novembre 2007 modifié relatif aux installations nucléaires de base et au contrôle, en matière de sûreté nucléaire, du transport de substances radioactives ;

3° Une description des aspects pertinents de l'état actuel de l'environnement , dénommée « scénario de référence » , et de leur évolution en cas de mise en oeuvre du projet ainsi qu'un aperçu de l'évolution probable de l'environnement en l'absence de mise en oeuvre du projet, dans la mesure où les changements naturels par rapport au scénario de référence peuvent être évalués moyennant un effort raisonnable sur la base des informations environnementales et des connaissances scientifiques disponibles ;

4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : la population , la santé humaine , la biodiversité , les terres , le sol , l'eau , l'air , le climat , les biens matériels , le patrimoine culturel , y compris les aspects architecturaux et archéologiques, et le paysage ;

5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres :

a) De la construction et de l'existence du projet, y compris, le cas échéant, des travaux de démolition ;

b) De l'utilisation des ressources naturelles, en particulier les terres, le sol, l'eau et la biodiversité, en tenant compte, dans la mesure du possible, de la disponibilité durable de ces ressources ;

c) De l'émission de polluants, du bruit, de la vibration, de la lumière, la chaleur et la radiation, de la création de nuisances et de l'élimination et la valorisation des déchets ;

d) Des risques pour la santé humaine, pour le patrimoine culturel ou pour l'environnement ;

e) Du cumul des incidences avec d'autres projets existants ou approuvés , en tenant compte le cas échéant des problèmes environnementaux relatifs à l'utilisation des ressources naturelles et des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement susceptibles d'être touchées. Ces projets sont ceux qui, lors du dépôt de l'étude d'impact :

- ont fait l'objet d'une étude d'incidence environnementale au titre de l'article R. 181-14 et d'une enquête publique ;

- ont fait l'objet d'une évaluation environnementale au titre du présent code et pour lesquels un avis de l'autorité environnementale a été rendu public.

Sont exclus les projets ayant fait l'objet d'un arrêté mentionnant un délai et devenu caduc, ceux dont la décision d'autorisation est devenue caduque, dont l'enquête publique n'est plus valable ainsi que ceux qui ont été officiellement abandonnés par le maître d'ouvrage ;

f) Des incidences du projet sur le climat et de la vulnérabilité du projet au changement climatique ;

g) Des technologies et des substances utilisées.

La description des éventuelles incidences notables sur les facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 porte sur les effets directs et, le cas échéant, sur les effets indirects secondaires, cumulatifs, transfrontaliers, à court, moyen et long termes, permanents et temporaires, positifs et négatifs du projet ;

6° Une description des incidences négatives notables attendues du projet sur l'environnement qui résultent de la vulnérabilité du projet à des risques d'accidents ou de catastrophes majeurs en rapport avec le projet concerné. Cette description comprend le cas échéant les mesures envisagées pour éviter ou réduire les incidences négatives notables de ces événements sur l'environnement et le détail de la préparation et de la réponse envisagée à ces situations d'urgence ;

7° Une description des solutions de substitution raisonnables qui ont été examinées par le maître d'ouvrage, en fonction du projet proposé et de ses caractéristiques spécifiques, et une indication des principales raisons du choix effectué, notamment une comparaison des incidences sur l'environnement et la santé humaine ;

8° Les mesures prévues par le maître de l'ouvrage pour :

- éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ;

- compenser , lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité.

La description de ces mesures doit être accompagnée de l'estimation des dépenses correspondantes, de l'exposé des effets attendus de ces mesures à l'égard des impacts du projet sur les éléments mentionnés au 5° ;

9° Le cas échéant, les modalités de suivi des mesures d'évitement, de réduction et de compensation proposées ;

10° Une description des méthodes de prévision ou des éléments probants utilisés pour identifier et évaluer les incidences notables sur l'environnement ;

11° Les noms, qualités et qualifications du ou des experts qui ont préparé l'étude d'impact et les études ayant contribué à sa réalisation ;

12° Lorsque certains des éléments requis ci-dessus figurent dans l'étude de maîtrise des risques pour les installations nucléaires de base ou dans l'étude des dangers pour les installations classées pour la protection de l'environnement, il en est fait état dans l'étude d'impact.

III. - Pour les infrastructures de transport visées aux 5° à 9° du tableau annexé à l'article R. 122-2, l'étude d'impact comprend, en outre :

- une analyse des conséquences prévisibles du projet sur le développement éventuel de l'urbanisation ;

- une analyse des enjeux écologiques et des risques potentiels liés aux aménagements fonciers, agricoles et forestiers portant notamment sur la consommation des espaces agricoles, naturels ou forestiers induits par le projet, en fonction de l'ampleur des travaux prévisibles et de la sensibilité des milieux concernés ;

- une analyse des coûts collectifs des pollutions et nuisances et des avantages induits pour la collectivité. Cette analyse comprendra les principaux résultats commentés de l'analyse socio-économique lorsqu'elle est requise par l'article L. 1511-2 du code des transports ;

- une évaluation des consommations énergétiques résultant de l'exploitation du projet, notamment du fait des déplacements qu'elle entraîne ou permet d'éviter ;

- une description des hypothèses de trafic, des conditions de circulation et des méthodes de calcul utilisées pour les évaluer et en étudier les conséquences.

Elle indique également les principes des mesures de protection contre les nuisances sonores qui seront mis en oeuvre en application des dispositions des articles R. 571-44 à R. 571-52.

IV. - Pour les projets soumis à autorisation en application du titre Ier du livre II, l'étude d'impact vaut étude d'incidence si elle contient les éléments exigés pour ce document par l'article R. 181-14.

V. - Pour les projets soumis à une étude d'incidences en application des dispositions du chapitre IV du titre Ier du livre IV, le formulaire d'examen au cas par cas tient lieu d'évaluation des incidences Natura 2000 lorsqu'il permet d'établir l'absence d'incidence sur tout site Natura 2000. S'il apparaît après examen au cas par cas que le projet est susceptible d'avoir des incidences significatives sur un ou plusieurs sites Natura 2000 ou si le projet est soumis à évaluation des incidences systématique en application des dispositions précitées, le maître d'ouvrage fournit les éléments exigés par l'article R. 414-23. L'étude d'impact tient lieu d'évaluation des incidences Natura 2000 si elle contient les éléments exigés par l'article R. 414-23.

VI. - Pour les installations classées pour la protection de l'environnement relevant du titre Ier du livre V du présent code et les installations nucléaires de base relevant du titre IX du livre V du code de l'environnement susmentionnée, le contenu de l'étude d'impact est précisé et complété en tant que de besoin conformément au II de l'article D. 181-15-2 du présent code et à l'article 9 du décret du 2 novembre 2007 susmentionné.

VII. - Afin de veiller à l'exhaustivité et à la qualité de l'étude d'impact :

a) Le maître d'ouvrage s'assure que celle-ci est préparée par des experts compétents ;

b) L'autorité compétente veille à disposer d'une expertise suffisante pour examiner l'étude d'impact ou recourt si besoin à une telle expertise ;

c) Si nécessaire, l'autorité compétente demande au maître d'ouvrage des informations supplémentaires à celles fournies dans l'étude d'impact, mentionnées au II et directement utiles à l'élaboration et à la motivation de sa décision sur les incidences notables du projet sur l'environnement prévue au I de l'article L. 122-1-1.

Votre rapporteur constate que l'on retrouve, à la lecture combinée de ces deux articles - article L. 122-3 et article R. 122-5, l'ensemble des éléments que la nouvelle rédaction de l'article L. 122-3 semblait avoir fait disparaître : les incidences notables sur la santé humaine, l'état initial de la zone grâce à la mention du « scénario de référence », le suivi des mesures d'évitement, de réduction et de compensation, le cumul des incidences avec d'autres projets.

Pour les infrastructures de transport, l'article L. 122-3 prévoit que l'étude d'impact expose également une analyse des coûts collectifs des pollutions et nuisances et des avantages induits pour la collectivité ainsi qu'une évaluation des consommations énergétiques résultant de l'exploitation du projet, notamment du fait des déplacements qu'elle entraîne ou permet d'éviter.

En revanche, l'ordonnance fait disparaître le II bis de l'article L. 122-3, relatif aux zones d'aménagement concerté, dans la mesure où l'article L. 122-1-1 a déjà posé le principe d'une appréciation des incidences par une étude d'impact dès la première autorisation avec une actualisation lors des autorisations ultérieures.

e) Articles L. 122-3-1 à L. 122-3-4 (5°, 6° et 7° de l'article 1er de l'ordonnance) : contrôle du respect des prescriptions du maître d'ouvrage et sanctions

Le de l'article 1 er de l'ordonnance modifie l'article L. 122-3-1 afin de prévoir que l'autorité compétente peut saisir le représentant de l'État dans le département pour qu'il exerce les pouvoirs prévus par l'article L. 171-8 du code de l'environnement en cas de non-respect par le maître d'ouvrage des prescriptions, caractéristiques et mesures prises relatives à l'évitement, la réduction et la compensation (mise en demeure, fixation de mesures urgentes, sanctions administratives).

Le de l'article 1 er de l'ordonnance modifie légèrement l'article L. 122-3-2 du code de l'environnement afin de prévoir que les dépenses réalisées pour procéder aux contrôles, expertises ou analyses prescrits par l'autorité administrative pour assurer le respect de ses obligations par le maître d'ouvrage sont à la charge du pétitionnaire ou du maître d'ouvrage .

Le de l'article 1 er de l'ordonnance modifie à la marge l'article L. 122-3-3 , qui prévoit que dès lors qu'un manquement est révélé, la personne qui exerce le contrôle (autorité compétente pour autoriser le projet et qui exerce le contrôle des mesures ERC) établit un rapport transmis à l'autorité administrative. Une copie de ce rapport est transmise à l'intéressé qui peut faire part de ses observations dans un délai d'un mois.

f) Article L. 122-3-4 (8° de l'article 1er de l'ordonnance) : exceptions et dérogations

Le de l'article 1 er de l'ordonnance introduit un nouvel article L. 122-3-4 au sein du code de l'environnement.

Le I de ce nouvel article transpose l'article 1 er de la directive 2011/92/UE telle que modifiée par la directive 2014/52/UE afin de prendre en compte les intérêts de la défense nationale et les situations d'urgence à caractère civil . Pour des projets qui se trouvent dans l'un ou l'autre cas, des dérogations peuvent être accordées à l'application des dispositions relatives à l'évaluation environnementale. Cette compétence appartient au ministre de la défense et au ministre de l'intérieur.

Le II prévoit les modalités selon lesquelles les informations susceptibles de porter atteinte aux intérêts mentionnés aux articles L. 124-4 et L. 124-5 du code de l'environnement sont retirées des dossiers de participation du public ou de consultation.

3. L'évaluation environnementale des plans et programmes (articles L. 122-4 à L. 122-11 du code de l'environnement)

LES PRINCIPAUX APPORTS DE L'ORDONNANCE AU RÉGIME DE L'ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE DES PLANS ET PROGRAMMES

Concernant les plans et programmes , l'ordonnance et son décret d'application achèvent de transposer la directive 2001/42/CE par :

- une extension du nombre de plans et programmes relevant du champ de l'évaluation environnementale : le décret du 11 août a complété la liste par les documents d'urbanisme figurant dans le code de l'urbanisme (même s'ils demeurent soumis aux règles d'évaluation environnementale du code de l'urbanisme) ; l'article R. 122-17 du code de l'environnement liste ainsi les 54 plans et programmes faisant aujourd'hui l'objet d'une évaluation environnementale systématique et les 12 relevant d'un examen au cas par cas ;

- l'introduction d'une disposition permettant au ministre chargé de l'environnement, de sa propre initiative ou sur demande de l'autorité responsable de l'élaboration du plan ou programme, de déterminer si un plan ne figurant pas sur la liste de l'article R. 122-17 relève du champ de l'évaluation environnementale obligatoire ou d'un examen au cas par cas (« clause de rattrapage »).

- les définitions des « plans et programmes » et de « l'évaluation environnementale » harmonisées avec celles de la directive de 2001 ;

- le maintien du principe d'une distinction entre les plans et programmes soumis à évaluation systématique et ceux pouvant faire l'objet d'un examen au cas par cas ;

- une précision des exemptions et exceptions à l'évaluation environnementale des plans et programmes sont précisées.

a) Article L. 122-4 (9° de l'article 1er de l'ordonnance) : évaluation environnementale systématique et procédure d'examen au cas par cas

Le de l'article 1 er de l'ordonnance réécrit l'article L. 122-4 du code de l'environnement , relatif à l'évaluation environnementale de certains plans et documents ayant une incidence sur l'environnement.

Le I introduit deux définitions issues de la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement :

- les « plans et programmes » sont définis comme les « plans, schémas, programmes et autres documents de planification élaborés ou adoptés par l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements et les établissements publics en dépendant, ainsi que leur modification, dès lors qu'ils sont prévus par des dispositions législatives ou réglementaires, y compris ceux cofinancés par l'Union européenne » ; il est à noter que seront désormais désignés sous ce vocable de « plans et programmes » dans toute la section les plans, schémas, programmes et autres documents de planification figurant initialement dans le code ;

- l' « évaluation environnementale » est définie comme « un processus constitué de l'élaboration d'un rapport sur les incidences environnementales, la réalisation de consultations, la prise en compte de ce rapport et de ces consultations lors de la prise de décision de l'autorité qui adopte ou approuve le plan ou programme, ainsi que la publication d'informations sur la décision, conformément aux articles L. 122-6 et suivants » .

Il est ainsi mis fin à la distinction française entre « étude d'impact » des projets et « évaluation environnementale » des plans et programmes . L'évaluation environnementale, tant pour les projets que pour les plans et programmes, est définie comme un processus au sens large comprenant plusieurs étapes dont l'élaboration d'une étude d'impact pour les projets et d'un rapport sur les incidences environnementales pour les plans et programmes , et aboutissant à la décision d'autorisation ou de refus d'autorisation d'un projet ou d'un plan ou programme.

Les II et III clarifient le champ de l'évaluation environnementale , en distinguant, comme pour les projets, les plans et programmes faisant l'objet d'une évaluation systématique et ceux qui peuvent faire l'objet soit d'une évaluation systématique, soit d'une évaluation après un examen au cas par cas par l'autorité environnementale. C'est le pouvoir réglementaire qui fixe, par décret, la liste des plans et programmes devant être soumis à évaluation environnementale et la liste de ceux pouvant y être soumis.

Sont soumis à une évaluation environnementale systématique ( II ) :

- les plans et programmes qui sont élaborés dans les domaines de l'agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l'énergie, de l'industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l'eau, des télécommunications, du tourisme ou de l'aménagement du territoire et qui définissent le cadre dans lequel les projets mentionnés à l'article L. 122-1 pourront être autorisés ;

- les plans et programmes pour lesquels une évaluation des incidences Natura 2000 est requise en application de l'article L. 414-4.

Peuvent être soumis à une évaluation environnementale systématique ou à une évaluation seulement après un examen au cas par cas par l'autorité environnementale ( III ) :

- les plans et programmes mentionnés au II qui portent sur des territoires de faible superficie s'ils sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ;

- les autres plans et programmes qui définissent le cadre dans lequel la mise en oeuvre de projets pourra être autorisée si ces plans sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ;

- les modifications des plans et programmes si elles sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement.

L'article R. 122-17 liste précisément les 54 plans et programmes devant obligatoirement faire l'objet d'une évaluation environnementale (I) et les 12 relevant d'un examen au cas par cas (II).

LISTE DES PLANS ET PROGRAMMES SOUMIS À ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE SYSTÉMATIQUE ET DES PLANS ET PROGRAMMES SOUMIS À ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE APRÈS UN EXAMEN AU CAS PAR CAS PAR L'AUTORITÉ ENVIRONNEMENTALE

Article R. 122-17 du code de l'environnement

I. - Les plans et programmes devant faire l'objet d'une évaluation environnementale sont énumérés ci-dessous :

1° Programmes opérationnels élaborés par les autorités de gestion établies pour le Fonds européen de développement régional, le Fonds européen agricole et de développement rural et le Fonds de l'Union européenne pour les affaires maritimes et la pêche ;

2° Schéma décennal de développement du réseau prévu par l'article L. 321-6 du code de l'énergie ;

3° Schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables prévu par l'article L. 321-7 du code de l'énergie ;

4° Schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux prévu par les articles L. 212-1 et L. 212-2 du code de l'environnement ;

5° Schéma d'aménagement et de gestion des eaux prévu par les articles L. 212-3 à L. 212-6 du code de l'environnement ;

6° Le document stratégique de façade prévu par l'article L. 219-3, y compris son chapitre relatif au plan d'action pour le milieu marin ;

7° Le document stratégique de bassin maritime prévu par les articles L. 219-3 et L. 219-6 ;

8° Programmation pluriannuelle de l'énergie prévue aux articles L. 141-1 et L. 141-5 du code de l'énergie ;

bis Stratégie nationale de mobilisation de la biomasse prévue à l'article L. 211-8 du code de l'énergie ;

ter Schéma régional de biomasse prévu par l'article L. 222-3-1 du code de l'environnement ;

9° Schéma régional du climat, de l'air et de l'énergie prévu par l'article L. 222-1 du code de l'environnement ;

10° Plan climat air énergie territorial prévu par l'article R. 229-51 du code de l'environnement ;

11° Charte de parc naturel régional prévue au II de l'article L. 333-1 du code de l'environnement ;

12° Charte de parc national prévue par l'article L. 331-3 du code de l'environnement ;

13° Plan départemental des itinéraires de randonnée motorisée prévu par l'article L. 361-2 du code de l'environnement ;

14° Orientations nationales pour la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques prévues à l'article L. 371-2 du code de l'environnement ;

15° Schéma régional de cohérence écologique prévu par l'article L. 371-3 du code de l'environnement ;

16° Plans, schémas, programmes et autres documents de planification soumis à évaluation des incidences Natura 2000 au titre de l'article L. 414-4 du code de l'environnement, à l'exception de ceux mentionnés au II de l'article L. 122-4 du même code ;

17° Schéma mentionné à l'article L. 515-3 du code de l'environnement ;

18° Plan national de prévention des déchets prévu par l'article L. 541-11 du code de l'environnement ;

19° Plan national de prévention et de gestion de certaines catégories de déchets prévu par l'article L. 541-11-1 du code de l'environnement ;

20° Plan régional de prévention et de gestion des déchets prévu par l'article L. 541-13 du code de l'environnement ;

21° Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs prévu par l'article L. 542-1-2 du code de l'environnement ;

22° Plan de gestion des risques d'inondation prévu par l'article L. 566-7 du code de l'environnement ;

23° Programme d'actions national pour la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d'origine agricole prévu par le IV de l'article R. 211-80 du code de l'environnement ;

24° Programme d'actions régional pour la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d'origine agricole prévu par le IV de l'article R. 211-80 du code de l'environnement ;

25° Programme national de la forêt et du bois prévu par l'article L. 121-2-2 du code forestier ;

26° Programme régional de la forêt et du bois prévu par l'article L. 122-1 du code forestier ;

27° Directives d'aménagement mentionnées au 1° de l'article L. 122-2 du code forestier ;

28° Schéma régional mentionné au 2° de l'article L. 122-2 du code forestier ;

29° Schéma régional de gestion sylvicole mentionné au 3° de l'article L. 122-2 du code forestier ;

30° Schéma départemental d'orientation minière prévu par l'article L. 621-1 du code minier ;

31° Les 4° et 5° du projet stratégique des grands ports maritimes, prévus à l'article R. 5312-63 du code des transports ;

32° Réglementation des boisements prévue par l'article L. 126-1 du code rural et de la pêche maritime ;

33° Schéma régional de développement de l'aquaculture marine prévu par l'article L. 923-1-1 du code rural et de la pêche maritime ;

34° Schéma national des infrastructures de transport prévu par l'article L. 1212-1 du code des transports ;

35° Schéma régional des infrastructures de transport prévu par l'article L. 1213-1 du code des transports ;

36° Plan de déplacements urbains prévu par les articles L. 1214-1 et L. 1214-9 du code des transports ;

37° Contrat de plan État-région prévu par l'article 11 de la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification ;

38° Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires prévu par l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales ;

39° Schéma de mise en valeur de la mer élaboré selon les modalités définies à l'article 57 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements et les régions ;

40° Schéma d'ensemble du réseau de transport public du Grand Paris et contrats de développement territorial prévus par les articles 2,3 et 21 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris ;

41° Schéma des structures des exploitations de cultures marines prévu par à l'article D. 923-6 du code rural et de la pêche maritime ;

42° Schéma directeur territorial d'aménagement numérique mentionné à l'article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales ;

43° Directive territoriale d'aménagement et de développement durable prévue à l'article L. 102-4 du code de l'urbanisme ;

44° Schéma directeur de la région d'Ile-de-France prévu à l'article L. 122-5 ;

45° Schéma d'aménagement régional prévu à l'article L. 4433-7 du code général des collectivités territoriales ;

46° Plan d'aménagement et de développement durable de Corse prévu à l'article L. 4424-9 du code général des collectivités territoriales ;

47° Schéma de cohérence territoriale et plans locaux d'urbanisme intercommunaux comprenant les dispositions d'un schéma de cohérence territoriale dans les conditions prévues à l'article L. 144-2 du code de l'urbanisme ;

48° Plan local d'urbanisme intercommunal qui tient lieu de plan de déplacements urbains mentionnés à l'article L. 1214-1 du code des transports ;

49° Prescriptions particulières de massif prévues à l'article L. 122-24 du code de l'urbanisme ;

50° Schéma d'aménagement prévu à l'article L. 121-28 du code de l'urbanisme ;

51° Carte communale dont le territoire comprend en tout ou partie un site Natura 2000 ;

52° Plan local d'urbanisme dont le territoire comprend en tout ou partie un site Natura 2000 ;

53° Plan local d'urbanisme couvrant le territoire d'au moins une commune littorale au sens de l'article L. 321-2 du code de l'environnement ;

54° Plan local d'urbanisme situé en zone de montagne qui prévoit une unité touristique nouvelle au sens de l'article L. 122-16 du code de l'urbanisme.

II. - Les plans et programmes susceptibles de faire l'objet d'une évaluation environnementale après un examen au cas par cas sont énumérés ci-dessous :

1° Directive de protection et de mise en valeur des paysages prévue par l'article L. 350-1 du code de l'environnement ;

2° Plan de prévention des risques technologiques prévu par l'article L. 515-15 du code de l'environnement et plan de prévention des risques naturels prévisibles prévu par l'article L. 562-1 du même code ;

3° Stratégie locale de développement forestier prévue par l'article L. 123-1 du code forestier ;

4° Zones mentionnées aux 1° à 4° de l'article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales ;

5° Plan de prévention des risques miniers prévu par l'article L. 174-5 du code minier ;

6° Zone spéciale de carrière prévue par l'article L. 321-1 du code minier ;

7° Zone d'exploitation coordonnée des carrières prévue par l'article L. 334-1 du code minier ;

8° Plan de sauvegarde et de mise en valeur prévu par l'article L. 631-3 du code du patrimoine ;

8 bis Plan de valorisation de l'architecture et du patrimoine prévu par l'article L. 631-4 du code du patrimoine ;

9° Plan local de déplacement prévu par l'article L. 1214-30 du code des transports ;

10° Plan de sauvegarde et de mise en valeur prévu par l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme ;

11° Plan local d'urbanisme ne relevant pas du I du présent article ;

12° Carte communale ne relevant pas du I du présent article.

III. - Lorsqu'un plan ou un programme relevant du champ du II ou du III de l'article L. 122-4 ne figure pas dans les listes établies en application du présent article, le ministre chargé de l'environnement, de sa propre initiative ou sur demande de l'autorité responsable de l'élaboration du projet de plan ou de programme, conduit un examen afin de déterminer si ce plan ou ce programme relève du champ de l'évaluation environnementale systématique ou d'un examen au cas par cas, en application des dispositions du IV de l'article L. 122-4.

L'arrêté du ministre chargé de l'environnement soumettant un plan ou un programme à évaluation environnementale systématique ou après examen au cas par cas est publié au Journal officiel de la République française et mis en ligne sur le site internet du ministère chargé de l'environnement.

Ses effets cessent au plus tard un an après son entrée en vigueur ou à l'entrée en vigueur de la révision des listes figurant au I et II du présent article, si elle est antérieure.

IV. - Pour les plans et programmes soumis à évaluation environnementale en application du I, du II ou du III, l'autorité environnementale est :

1° La formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable pour les plans et programmes dont le périmètre excède les limites territoriales d'une région ou qui donnent lieu à une approbation par décret ou à une décision ministérielle, ainsi que pour les plans et programmes mentionnés aux 4°, 8°, 8° ter , 9°, 11°, 15°, 17°, 22°, 24°, 30°, 37° et 38° du I et aux 2° et 5° du II ;

2° La mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable pour les autres plans et programmes mentionnés au I et au II.

La formation d'autorité environnementale peut, de sa propre initiative et par décision motivée au regard de la complexité et des enjeux environnementaux du dossier, exercer les compétences dévolues à la mission régionale d'autorité environnementale. Dans ce cas, la mission régionale d'autorité environnementale transmet sans délai le dossier à la formation d'autorité environnementale. Les délais prévus aux articles R. 122-18 et R. 122-21 courent à compter de la date de saisine de la mission régionale d'autorité environnementale.

V. - Lorsqu'elle est prévue par la législation ou la réglementation applicable, la révision d'un plan, schéma, programme ou document de planification mentionné au I fait l'objet d'une nouvelle évaluation.

Lorsqu'elle est prévue par la législation ou la réglementation applicable, la révision d'un plan, schéma, programme ou document de planification mentionné au II fait l'objet d'une nouvelle évaluation après un examen au cas par cas.

VI. - Sauf disposition particulière, les autres modifications d'un plan, schéma, programme ou document de planification mentionné au I ou au II ne font l'objet d'une évaluation environnementale qu'après un examen au cas par cas qui détermine, le cas échéant, si l'évaluation environnementale initiale doit être actualisée ou si une nouvelle évaluation environnementale est requise.

VII. - Par dérogation aux dispositions de la présente section, les règles relatives à l'évaluation environnementale des plans et programmes mentionnés aux rubriques 43° à 54° du I et 11° et 12° du II sont régies par les dispositions du chapitre IV du titre préliminaire du code de l'urbanisme.

Le IV précise que les incidences notables sur l'environnement d'un plan ou d'un programme sont appréciées en tenant compte des critères mentionnés à l'annexe II 9 ( * ) de la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001.

Le V :

- fixe des exemptions à l'obligation de réaliser une évaluation environnementale : plans et programmes établis uniquement à des fins de défense nationale ou de protection civile, plans et programmes financiers ou budgétaires ;

- prévoit les modalités selon lesquelles les informations susceptibles de porter atteinte à un certain nombre d'intérêts mentionnés aux articles L. 124-4 et L. 124-5 sont retirées des dossiers de participation du public ou de consultation.

Le VI prévoit que les documents d'urbanisme énumérés aux articles L. 104-1 et L. 104-2 du code de l'urbanisme (et repris à l'article R. 122-17 du code de l'environnement) font l'objet d'une évaluation environnementale dans les conditions prévues au code de l'urbanisme . Le chapitre IV du titre préliminaire du livre I er du code de l'urbanisme est en effet consacré à l'évaluation environnementale des documents d'urbanisme. Il regroupe des dispositions relatives au champ d'application de l'évaluation, au contenu et à la procédure mais qui diffèrent peu de celles du code de l'environnement. Le choix de maintenir ces dispositions dans le code de l'urbanisme repose, d'après les informations transmises par les services du ministère à votre rapporteur, sur trois objectifs :

- adapter ces dispositions aux spécificités des documents d'urbanisme : le code de l'environnement se limite à prévoir par exemple que les « modifications » des plans et programmes soumis à évaluation environnementale font l'objet d'un examen au cas par cas, tandis que le code de l'urbanisme précise le régime pour chaque type d'évolution (révision, modification ou mise en compatibilité) ; en outre, certains documents d'urbanisme comprennent déjà un rapport de présentation (reprenant notamment une analyse de l'état initial de l'environnement), qui est donc complété lorsque la procédure est soumise à évaluation environnementale et qui vaut alors « rapport environnemental » ;

- promouvoir l'intégration des préoccupations environnementales dans la démarche de planification ;

- centraliser les dispositions relatives à la planification urbaine permettant aux acteurs de l'urbanisme, notamment les collectivités territoriales, de ne pas avoir à se référer à plusieurs codes lors de l'élaboration des documents d'urbanisme.

Toutefois, pour des raisons de lisibilité, les documents d'urbanisme relevant de la démarche d'évaluation environnementale sont listés à l'article R. 122-17 du code de l'environnement, ce qui permet également de les inclure dans le dispositif de « clause balai » prévu au III du même article.

b) Article L. 122-5 (10° de l'article 1er de l'ordonnance) : la « clause de rattrapage » ou « clause balai »

Le 10° de l'article 1 er de l'ordonnance réécrit entièrement l'article L. 122-5 , relatif au décret en Conseil d'État devant être pris pour l'application de la section sur l'évaluation environnementale des plans et programmes.

Avant d'être modifié par l'ordonnance, cet article prévoyait une nouvelle évaluation environnementale ou son actualisation dans le cas de modifications apportées aux plans et programmes concernés, sauf dans le cas de modifications mineures. Mais cette disposition se retrouve aujourd'hui notamment à l'article L. 122-4 (III, 3°).

Le décret en Conseil d'État doit notamment préciser :

- la liste des plans et programmes soumis à évaluation environnementale de manière systématique ou à un examen au cas par cas et les conditions de son actualisation annuelle ;

- les conditions dans lesquelles un plan ou un programme, relevant du champ du périmètre d'application prévu pour l'évaluation environnementale systématique ou l'évaluation environnementale au cas par cas, mais ne figurant pas sur la liste fixée par le décret , peut être tout de même soumis à évaluation - de manière systématique ou au cas par cas - pour une durée n'excédant pas un an, sur décision du ministre chargé de l'environnement ; c'est ce qu'on appelle la « clause de rattrapage » ou « clause balai » , qui doit permettre une complète transposition de la directive 2001/42/CE ;

- les modalités des exemptions prévues par le V de l'article L. 122-4 ;

- le contenu du rapport sur les incidences environnementales mentionné à l'article suivant L. 122-6 ;

- les cas dans lesquels les modifications des plans et programmes soumis à évaluation environnementale peuvent faire l'objet d'une évaluation environnementale après un examen au cas par cas effectué par l'autorité environnementale.

Le décret d'application de l'ordonnance, le décret n° 2016-110 du 11 août 2016 relatif à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes prévoit l'ensemble de ces dispositions et les codifie à l'article R. 122-17 du code de l'environnement .

Votre rapporteur relève que la « clause de rattrapage » préconisée par le rapport Vernier a ainsi été introduite dans notre droit uniquement pour les plans et programmes et non pour les projets.

D'après les échanges que votre rapporteur a eus avec les services du ministère en charge de l'environnement, la question de l'application de la « clause de rattrapage » aux projets a fait l'objet de nombreuses discussions , notamment dans le cadre du Conseil national de la transition écologique (CNTE). Si la quasi-majorité des acteurs étaient prêts à accepter l'introduction d'une telle clause dans le régime des projets, il a néanmoins été considéré que l'impact pourrait être lourd pour certains petits projets, notamment agricoles (petits élevages par exemple). Le choix a ainsi été fait de prévoir des seuils plutôt bas pour la catégorie du « cas par cas » mais sans introduction de la clause de rattrapage. En outre, un précontentieux européen avancé était en cours , avec un avis motivé adressé à la France, mais uniquement pour les plans et programmes . Votre rapporteur rejoint les motivations de cet arbitrage, tout en ayant conscience que la jurisprudence européenne pourrait être amenée à faire évoluer ce point, qui a pour objet de permettre de « rattraper » des projets petits en ampleur mais pas en termes d'impact sur l'environnement.

c) Article L. 122-6 (11° de l'article 1er de l'ordonnance) : harmonisations avec la directive et la loi biodiversité

L'article L. 122-6 est modifié à la marge par l'ordonnance afin d' harmoniser les dénominations retenues par la directive 2001/42/CE, à savoir « plans et programmes » et « rapport sur les incidences environnementales » et de reprendre les trois éléments du triptyque ERC « éviter-réduire-compenser » précisé par la récente loi pour la reconquête de la biodiversité du 3 août 2016.

d) Article L. 122-7 (12° de l'article 1er de l'ordonnance) : l'avis de l'autorité environnementale

L'article L. 122-7 est modifié afin de prévoir que la personne responsable de l'élaboration d'un plan ou d'un programme soumis à évaluation environnementale (l'État, un établissement public, une collectivité territoriale) transmet le projet de plan ou de programme pour avis à l'autorité environnementale accompagné d'un rapport sur les incidences environnementales.

L'avis rendu par l'autorité environnementale porte sur la qualité du rapport et analyse la façon dont l'environnement a été pris en compte par le plan ou programme. C'est pourquoi la mention selon laquelle dans un délai de trois mois l'avis était réputé favorable, qui figurait auparavant à l'article L. 122-7, n'est pas reprise dans la version modifiée par l'ordonnance. En revanche, l'article R. 122-21 précise qu'à défaut de s'être prononcée dans un délai de trois mois, l'autorité environnementale est réputée n'avoir « aucune observation à formuler ».

En outre, cet avis ou l'information relative à l'absence d'observations émises dans le délai, est mis en ligne sur le site internet de l'autorité environnementale .

e) Articles L. 122-8 à L. 122-11 (13° à 18° de l'article 1er de l'ordonnance) : coordinations

Les 13° à 18° de l'article 1 er de l'ordonnance procèdent à des coordinations rendues nécessaires par l'abrogation de l'article L. 122-8, relatif aux procédures de mise à disposition du public de l'évaluation environnementale des plans et programmes. En effet, ces dispositions sont supprimées du chapitre relatif à l'évaluation environnementale puisqu'elles sont désormais regroupées au sein du chapitre relatif à la participation du public. Cette mise à disposition est assurée soit par l'enquête publique, soit par la participation du public par voie électronique (article L. 123-19), les deux procédures imposant une durée de participation minimale de 30 jours lorsque le projet, plan ou programme est soumis à évaluation environnementale.

(1) Consultations transfrontalières

Le nouvel article L. 122-8 (qui était l'ancien article L. 122-9) prévoit ainsi, conformément à la directive de 2001, la transmission d'une copie des projets de plans ou de programmes dont la mise en oeuvre est susceptible de produire des effets notables sur l'environnement d'un autre État membre de l'Union européenne . L'État concerné est ainsi invité à donner son avis.

Votre rapporteur relève que dans ce cadre, l'article 7 de la directive prévoit également une transmission du rapport sur les incidences environnementales du plan ou programme concerné, et proposera donc à votre commission de compléter l'article L. 122-8 sur ce point .

(2) Information du public une fois le plan ou le programme adopté

Le nouvel article L. 122-9 (qui était l'ancien article L. 122-10) prévoit l' information du public par l'autorité environnementale une fois le plan ou le programme adopté. Cette dernière doit mettre à disposition du public : le plan ou le programme proprement dit, une déclaration résumant la manière dont le rapport sur les incidences environnementales et les consultations ont été prises en compte, les motifs qui ont fondé les solutions retenues par le plan ou programme et les mesures destinées à évaluer les incidences sur l'environnement de la mise en oeuvre du plan ou du programme.

L'article prévoit aussi que le public doit être informé de la décision motivée de l'autorité environnementale de ne pas soumettre tel projet de plan ou de programme à évaluation environnementale dans le cas d'un examen au cas par cas.

(3) Référé suspension

L'article L. 122-11 prévoit que le juge des référés fait droit à toute demande de suspension d'une décision d'approbation d'un plan ou d'un programme devant faire l'objet d'une évaluation environnementale dès que l'absence de cette dernière est constatée.

4. Les procédures communes et coordonnées d'évaluation environnementale

Le 19° de l'article 1 er de l'ordonnance crée une nouvelle section 3 au sein du chapitre II du titre II du livre I er du code de l'environnement consacré à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes. Cette section est intitulée « Procédures communes et coordonnées d'évaluation environnementale » . Cette nouvelle section comprend deux nouveaux articles . Les dispositions réglementaires correspondantes ont été codifiées (articles R. 122-26 à R. 122-28) par le décret d'application de l'ordonnance du 11 août 2016.

La création de ces nouvelles procédures répond à un objectif de rationalisation des procédures, de simplification et de réduction des délais . L'article 2 de la directive 2011/92/UE telle que modifiée par la directive 2014/52/UE prévoit explicitement que les États membres ont la possibilité de prévoir de telles procédures coordonnées et/ou communes.

(1) Procédure unique portant sur un plan ou programme et un projet

Le nouvel article L. 122-13 crée des procédures communes et coordonnées d'évaluation environnementale entre les plans/programmes et les projets (par exemple : le projet stratégique d'un grand port maritime et un projet d'aménagement qu'il prévoit).

Ces procédures permettent que l'évaluation environnementale du plan ou du programme puisse valoir évaluation environnementale d'un projet réalisé dans son périmètre.

Cette procédure unique est à l'initiative conjointe de l'autorité responsable du plan ou du programme (par exemple le directoire d'un grand port maritime dans le cas cité plus haut) et du ou des maîtres d'ouvrage concernés (par exemple le maître d'ouvrage responsable de l'aménagement prévu par le projet stratégique). Elle ne sera néanmoins possible qu'à condition que le rapport sur les incidences environnementales réalisé dans le cadre de l'élaboration du plan ou du programme contienne les éléments exigés au titre de l'étude d'impact du projet et à condition que les consultations requises par les deux procédures aient été réalisées.

Grâce à cette procédure, il y aura un rapport d'évaluation environnementale unique et une enquête publique unique .

Deux types de procédure unique sont prévus et détaillés à l'article R. 122-25.

Le premier cas de figure est la procédure d'évaluation environnementale dite « commune » , c'est-à-dire lorsque des procédures uniques de consultation et de participation du public portent à la fois sur le plan ou programme et sur le projet . Dans ce cas, l'autorité environnementale unique pour la procédure est celle compétente pour le plan ou le programme, sauf si l'autorité environnementale compétente au titre du projet est la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, auquel cas c'est cette dernière qui est l'autorité environnementale unique. Le rapport d'évaluation environnementale est alors commun au plan ou programme et au projet.

Le deuxième cas de figure est la procédure d'évaluation environnementale dite « coordonnée » , c'est-à-dire lorsque le maître d'ouvrage d'un projet prévu par un plan ou programme est dispensé de demander un nouvel avis de l'autorité environnementale et de conduire une nouvelle procédure de participation du public . L'évaluation environnementale réalisée au titre du plan ou programme peut être réutilisée pour le projet. Dans ce cas, avant le dépôt de la demande d'autorisation, le maître d'ouvrage saisit l'autorité environnementale compétente au titre du projet qui a un mois pour déterminer si le rapport sur les incidences environnementales du plan ou programme peut valoir étude d'impact du projet. Dans ce cadre, l'autorité environnementale peut demander le cas échéant des compléments au maître d'ouvrage, qui a 15 jours pour lui transmettre. Cette procédure permet un gain de temps quant au délai de réponse de l'autorité environnementale : un mois au lieu de deux ou trois mois.

À titre d'exemple, pour un projet d'aménagement portuaire prévu dans le cadre du projet stratégique d'un grand port maritime, une procédure unique d'évaluation environnementale sera désormais possible. De même pour un projet de digue prévu dans le cadre d'un plan de prévention des risques naturels (PPRN). L'élément qui détermine si la procédure unique sera de type « commune » ou « coordonnée » n'est pas le type de plan/programme ou de projet mais le stade d'avancement respectif de leur élaboration et de leur évaluation environnementale . Pour pouvoir faire l'objet d'une procédure « commune », il faut que le niveau d'étude des impacts du projet soit suffisamment précis pour figurer dans un rapport commun.

(2) Procédure d'évaluation environnementale commune à un projet et à la modification d'un plan ou programme ou à la mise en compatibilité du document d'urbanisme induite par le projet

L e nouvel article L. 122-14 crée une procédure commune entre l'évaluation environnementale d'un projet et l'évaluation environnementale de la modification d'un plan/programme (comme par exemple un projet de ZAC et une révision du plan local d'urbanisme) ou de la mise en compatibilité du document d'urbanisme induite par le projet (comme par exemple un projet de ZAC et la mise en compatibilité du document d'urbanisme).

Elle permet de faire une procédure unique avec un rapport d'évaluation unique, une autorité environnementale unique et une procédure de participation du public unique.

L'autorité environnementale unique est celle compétente pour le projet, sauf si celle au titre du plan ou programme est la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable.

Cette autorité environnementale unique est consultée sur l'étude d'impact du projet qui tient donc lieu de rapport sur les incidences environnementales de la mise en compatibilité du document d'urbanisme ou de la modification du plan ou programme.

(3) Évaluation environnementale commune à plusieurs projets faisant l'objet d'une autorisation concomitante

Lorsque plusieurs projets font l'objet d'une autorisation concomitante , l'article R. 122-26 du code de l'environnement prévoit que les maîtres d'ouvrage concernés peuvent mettre en oeuvre une évaluation environnementale commune si l'étude d'impact contient les éléments nécessités au titre de l'ensemble des projets.

Lorsque la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable est compétente pour un des projets, c'est elle qui fait figure d'autorité environnementale unique, sinon c'est le préfet de région qui est compétent.

5. Coordinations nécessitées par la réforme des règles de l'évaluation environnementale

Les 20° à 22° de l'article 1 er de l'ordonnance contiennent des dispositions de coordination au sein du code de l'environnement , afin de le mettre en cohérence avec les modifications apportées aux règles de l'évaluation environnementale.

L'article L. 126-1 relatif à la déclaration de projet est complété afin de tenir compte de la consultation des collectivités territoriales et de leurs groupements.

Les articles L. 123-10 et L. 123-14 sont complétés afin de mentionner les avis des collectivités territoriales et de leurs groupements consultés en application du V de l'article L. 122-1-12 issu de l'ordonnance.

6. Les articles 2 à 5 de l'ordonnance : mises en cohérence

L' article 2 comporte deux dispositions relatives à des mises en cohérence du vocabulaire de plusieurs codes. La notion d'autorité environnementale se substitue à celle d'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement dans l'ensemble des dispositions législatives et le terme d'étude d'impact est remplacé par celui d'évaluation environnementale dans un certain nombre d'articles du code de l'environnement et du code de l'urbanisme. Le terme « étude d'impact » désigne désormais le rapport environnemental pour les projets et le terme « évaluation environnementale » désigne le processus complet d'autorisation du projet.

L' article 3 met en cohérence des références du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique avec le code de l'environnement tel que modifié par l'ordonnance.

L' article 4 met en cohérence un article du code minier sur le sujet de l'autorité environnementale.

L' article 5 , relatif à l'article L. 424-2 du code de l'urbanisme, précise que les mesures d'évitement, de réduction et de compensation figurent dans un document en annexe de la décision d'urbanisme.

7. Une entrée en vigueur échelonnée dans le temps

L'article 6 de l'ordonnance prévoit les dates d'entrée en vigueur des dispositions de l'ordonnance qui varient selon les cas de figure. On en distingue trois.

(1) Pour les projets soumis à évaluation environnementale

Pour les projets relevant d'un examen au cas par cas , les nouvelles dispositions prévues par l'ordonnance s'appliquent lorsque la demande d'examen au cas par cas a été déposée depuis le 1 er janvier 2017 .

Pour les projets faisant l'objet d'une évaluation environnementale systématique , les dispositions de l'ordonnance s'appliquent lorsque la première demande d'autorisation a été déposée depuis le 16 mai 2017 , date « butoir » pour la transposition de la directive « projets » de 2014. Pour les projets pour lesquels l'autorité compétente est le maître d'ouvrage, et donc pour lesquels il n'y a pas de demande d'autorisation, les dispositions de l'ordonnance s'appliquent à ceux dont l'enquête publique est ouverte à compter du premier jour du sixième mois suivant la publication de l'ordonnance, c'est-à-dire du 1 er février 2017.

Comme l'indique la synthèse de la consultation du public sur les projets d'ordonnance et de décret relatifs à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes, plusieurs contributeurs ont demandé à ce que leur date d'entrée en vigueur soit décalée de 6 mois.

(2) Pour les plans et programmes

Pour les plans et programmes, les dispositions de l'ordonnance ont commencé à s'appliquer à ceux pour lesquels l'arrêté d'ouverture de l'enquête publique ou l'avis sur la mise à disposition du public a été publiée après le 1 er septembre 2016. Un contentieux européen était en cours pour les plans et programmes, ce qui explique une entrée en vigueur plus précoce.

D. LE TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

La commission a adopté l'article unique du projet de loi initial ratifiant les deux ordonnances qui n'a fait l'objet d'aucun amendement.

Elle a en outre adopté 12 amendements , tous déposés par le rapporteur et les membres du groupe LREM, et regroupés au sein d'un nouvel article 2 du projet de loi.

Parmi ces amendements adoptés en commission, certains apportent des modifications aux dispositions du code de l'environnement introduites par l'ordonnance n°2016-1058 relative à l'évaluation environnementale.

La commission a ainsi introduit, à l'article L. 122-1-1 , ainsi que par coordination aux articles L. 122-3 et L. 122-6 , la nouvelle définition de la séquence ERC issue de la loi relative à la reconquête de la biodiversité du 8 août 2016, au sein de l'alinéa décrivant les prescriptions devant être contenues par la décision d'autorisation d'un projet soumis à évaluation environnementale ( a et b du 4° et 5° du I de l'article 2).

En séance publique, un amendement du rapporteur a supprimé, par harmonisation avec l'ensemble du texte, la mention du « pétitionnaire » à l'article L. 122-3-2 , pour ne garder que celle de « maître d'ouvrage ».

E. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur n'a pas proposé de modification substantielle sur cette ordonnance réformant l'évaluation environnementale. Il a néanmoins fait part à votre commission d'un certain nombre d'observations .

Il a tout d'abord relayé les inquiétudes exprimées par certains maîtres d'ouvrage concernant la nouvelle définition, englobante, de la notion de « projet » . Si les réponses d'ores et déjà apportées par le commissariat général au développement durable (CGDD) et le dialogue engagé entre l'administration et les différents acteurs ont rassuré votre rapporteur, il souhaite néanmoins que puissent rapidement être précisés les contours de cette nouvelle définition à tous les cas particuliers, comme celui des ouvrages de production d'énergie par exemple.

Il a ensuite souligné que la réforme permise par l'ordonnance permet en effet une réelle simplification de la procédure d'évaluation environnementale , et surtout un allègement des contraintes pesant sur les petits projets et les petites collectivités , qui, dans un grand nombre de cas, n'auront plus à réaliser d'étude d'impact systématique. Il a cependant insisté sur le fait que le problème du coût et des délais des études d'impact , qui pèsent sur les maîtres d'ouvrage, n'était toujours pas résolu, et qu'il pourrait être opportun de réfléchir, comme l'a suggéré Alain Richard lors de son audition, à une « normalisation » de ces études via une mise en données communes . En effet, un grand nombre de données nécessaires (comme par exemple des descriptions et caractéristiques de sites) pour l'étude d'impact d'un projet situé sur le territoire d'une commune pourraient être à nouveau utilisées pour un autre projet situé sur le territoire de cette même commune. Des économies pourraient utilement être faites à cette échelle.

Il a également regretté que l'on ne dispose sur l'évaluation environnementale d'aucune comparaison européenne complète et détaillée. Il serait pourtant utile de savoir comment les autres États membres mettent en oeuvre les dispositions des directives européennes sur ce sujet.

Enfin, votre rapporteur a indiqué que l'absence de « clause de rattrapage » pour les projets pouvait poser question, même s'il considère que l'équilibre atteint permet de garantir un niveau élevé d'exigence environnementale.

Votre commission a adopté deux amendements de coordination à l'initiative du rapporteur (amendements COM-4 et COM-14 ).

II. L'ORDONNANCE N° 2016-1060 DU 3 AOÛT 2016 PORTANT RÉFORME DES PROCÉDURES DESTINÉES À ASSURER L'INFORMATION ET LA PARTICIPATION DU PUBLIC À L'ÉLABORATION DE CERTAINES DÉCISIONS SUSCEPTIBLES D'AVOIR UNE INCIDENCE SUR L'ENVIRONNEMENT

A. LA LOI DU 6 AOÛT 2015 A ÉGALEMENT HABILITÉ LE GOUVERNEMENT À RÉFORMER LES PROCÉDURES DE PARTICIPATION DU PUBLIC PAR VOIE D'ORDONNANCE

L'ordonnance n° 2016-1060 a été prise sur le fondement de l'habilitation prévue au 3° du I de l'article 106 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques .

Article 106 de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques

« I. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi, sans porter atteinte aux principes fondamentaux et aux objectifs généraux du code de l'environnement, visant à :

[...]

Réformer les procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de projets, plans et programmes et de certaines décisions , afin de les moderniser et de les simplifier , de mieux garantir leur conformité aux exigences constitutionnelles ainsi que leur adaptabilité aux différents projets, de faire en sorte que le processus d'élaboration des projets soit plus transparent et l'effectivité de la participation du public à cette élaboration mieux assurée :

a) En simplifiant et en harmonisant les dispositions des articles L. 120-1 à L. 120-3 du code de l'environnement, notamment leur champ d'application et les dérogations qu'elles prévoient, en tirant les conséquences de l'expérimentation prévue par la loi n° 2012-1460 du 27 décembre 2012 relative à la mise en oeuvre du principe de participation du public défini à l'article 7 de la Charte de l'environnement et en supprimant ou en réformant les procédures particulières de participation du public à l'élaboration des décisions ayant une incidence sur l'environnement lorsqu'elles ne sont pas conformes au même article 7 ;

b) En précisant les principes de mise en oeuvre de l'information et de la participation du public ;

c) En prévoyant de nouvelles modalités d'information et de participation du public, notamment des concertations préalables aux procédures de participation existantes, susceptibles d'être mises en oeuvre par un droit d'initiative pouvant être ouvert notamment au public, à des associations et fédérations de protection de l'environnement, à des collectivités territoriales, à l'autorité compétente pour prendre la décision et au maître d'ouvrage, ainsi qu'une procédure de consultation locale des électeurs d'une aire territoriale déterminée sur les décisions qu'une autorité de l'État envisage de prendre sur une demande relevant de sa compétence et tendant à l'autorisation d'un projet susceptible d'avoir une incidence sur l'environnement ;

d) En tirant, s'il y a lieu, les conséquences sur les procédures existantes de ces nouvelles modalités d'information et de participation du public ;

e) En permettant que les modalités d'information et de participation du public puissent être fixées en fonction des caractéristiques du plan, de l'opération, du programme ou du projet, de l'avancement de son élaboration, des concertations déjà conduites ainsi que des circonstances particulières propres à ce plan, à cette opération, à ce programme ou à ce projet et en promouvant le recours aux nouvelles technologies de l'information et de la communication pour garantir la participation du plus grand nombre ;

f) En simplifiant, en clarifiant et en adaptant les modalités des enquêtes publiques, en étendant la possibilité de recourir à une procédure unique de participation du public pour plusieurs projets, plans ou programmes ou pour plusieurs décisions et en promouvant le recours aux nouvelles technologies de l'information et de la communication pour garantir la participation du plus grand nombre ; »

Soucieux de définir un champ précis d'habilitation lors de l'examen du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, le Sénat avait rappelé l'importance des sujets visés en matière de participation du public. De tels enjeux dépassaient largement la technicité justifiant habituellement le recours aux ordonnances. Tout en ayant obtenu une formulation plus précise de cette habilitation, le Sénat avait également souligné que la ratification de cette ordonnance devrait être un véritable moment de débat , afin d'examiner les choix retenus par le Gouvernement pour procéder à cette réforme 10 ( * ) .

Le projet d'ordonnance sur la participation du public a été présenté au CNTE , qui a rendu un avis non consensuel mais globalement favorable le 16 février 2016. Il a par ailleurs fait l'objet d'une consultation sur internet en juin 2016.

Les modalités d'application de ces nouvelles dispositions ont été fixées par le décret n° 2017-626 du 25 avril 2017 relatif aux procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement et modifiant diverses dispositions relatives à l'évaluation environnementale de certains projets, plans et programmes.

B. LA PARTICIPATION DU PUBLIC : DE QUOI PARLE-T-ON ?

1. Le cadre général de la participation du public avant l'ordonnance n° 2016-1060 du 3 août 2016

L'adoption de la loi n° 83-630 relative à la démocratisation des enquêtes publiques , dite « loi Bouchardeau » a été la première étape majeure en matière de participation du public aux décisions ayant un impact sur l'environnement. En modernisant la procédure d'enquête publique, précédemment centrée sur la protection de la propriété privée, cette loi a étendu son périmètre aux « aménagements, d'ouvrages ou de travaux, exécutés par des personnes publiques ou privées [...] lorsqu'en raison de leur nature, de leur consistance ou du caractère des zones concernées, ces opérations sont susceptibles d'affecter l'environnement ».

Une seconde étape significative a été la création de la procédure de débat public par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, dite « loi Barnier », qui a par ailleurs créé la Commission nationale du débat public (CNDP).

Cette procédure a été profondément modifiée par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité. La CNDP est alors devenue une autorité administrative indépendante 11 ( * ) , « chargée de veiller au respect de la participation du public au processus d'élaboration des projets d'aménagement ou d'équipement d'intérêt national [...] dès lors qu'ils présentent de forts enjeux socio-économiques ou ont des impacts significatifs sur l'environnement ou l'aménagement du territoire » (art. L. 121-1 du code de l'environnement).

Le développement de la participation du public aux décisions dans le domaine de l'environnement s'appuie également sur le droit international et européen .

La convention internationale d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement, signée le 25 juin 1998 et ratifiée par la France en 2002, a guidé les évolutions législatives en France, en particulier son article 6. Le droit européen prévoit également une participation du public aux décisions ayant un impact sur l'environnement, notamment la directive 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 mai 2003 prévoyant la participation du public lors de l'élaboration de certains plans et programmes relatifs à l'environnement.

Le droit de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement dispose par ailleurs d'un fondement constitutionnel, depuis l'adoption de la Charte de l'environnement et son intégration au bloc de constitutionnalité en 2005 12 ( * ) .

CHARTE DE L'ENVIRONNEMENT

Article 7

« Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement. »

La loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, dite « loi Grenelle 2 », a renforcé les dispositions relatives à la consultation du public, sans en changer la structure générale. Elle confirme une pratique existante, en prévoyant la désignation d' un garant chargé de veiller à ce que la concertation recommandée par la CNDP - lorsqu'elle estime qu'un débat public n'est pas nécessaire - permette au public de présenter ses observations et contre-propositions (art. L. 121-9). Au stade de la participation en aval, la loi a également créé une procédure de mise à disposition du public pour les projets, plans et programmes soumis à évaluation environnementale mais exemptés d'enquête publique.

Par ailleurs, la loi n° 2012-1460 du 27 décembre 2012 et l'ordonnance n° 2013-714 du 5 août 2013 relatives à la mise en oeuvre du principe de participation du public défini à l'article 7 de la Charte de l'environnement ont créé une procédure de mise à disposition du public pour les décisions ayant une incidence sur l'environnement, et non soumises à une procédure particulière de participation du public.

a) La participation du public à l'élaboration des projets d'aménagement ou d'équipement ayant une incidence importante sur l'environnement ou l'aménagement du territoire

La participation du public à l'élaboration d'un projet peut prendre deux formes principales : le débat public ou la concertation préalable . L'objectif est alors de permettre au public de s'exprimer sur l'opportunité du projet, lors des phases d'étude, et en amont de toutes les décisions majeures pour le projet.

Le périmètre des projets concernés correspond aux projets d'aménagement ou d'équipement qui, par leur nature, leurs caractéristiques techniques ou leur coût prévisionnel répondent à des critères ou excèdent des seuils fixés par décret en Conseil d'État (art. L. 121-8). Défini par le tableau annexé à l'article R. 121-2, ce champ comprend notamment les projets d'autoroutes et de lignes ferroviaires, de pistes d'aérodromes et d'infrastructures portuaires, de lignes électriques et de canalisations de gaz naturel, d'installations nucléaires de base, de barrages hydroélectriques et de grands équipements.

Dès lors qu'un projet relève d'une de ces catégories et répond aux seuils et critères prévus, il doit faire l'objet d' une saisine de la CNDP , chargée de veiller à la participation du public pour de tels projets.

Un débat public est une procédure qui dure de 4 à 6 mois, organisée par la CNDP qui crée pour cela une commission particulière. La concertation préalable est une procédure alternative au débat public. Le choix du format incombe à la CNDP, en fonction des enjeux du projet (art. L. 121-9) 13 ( * ) . Lorsqu'elle recommande une concertation préalable, elle peut désigner un garant , chargé de veiller à l'information et à la participation effectives du public.

Pour les projets relevant des catégories visées par l'article R. 121-2 mais d'importance moindre, le maître d'ouvrage décide de saisir ou non la CNDP . Dans le second cas, il lui incombe de rendre public son projet et de préciser les modalités de concertation préalable qu'il souhaite retenir. Pour ces projets, la CNDP peut également être saisie par dix parlementaires, une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités, ou une association de protection de l'environnement agréée au niveau national (art. L. 121-8).

L'article L. 121-16 prévoit par ailleurs la possibilité pour le porteur du projet , le cas échéant à la demande de l'autorité administrative, d'organiser une concertation préalable, sans toutefois que le contenu de cette initiative soit particulièrement précisé par le code de l'environnement. En pratique, cette procédure a été peu utilisée.

b) La participation du public aux décisions publiques susceptibles d'avoir un impact sur l'environnement

La participation du public lors de la demande d'autorisation d'un projet , ou d'approbation d'un plan ou programme, s'appuie principalement sur la procédure d' enquête publique 14 ( * ) .

Conduite par un commissaire-enquêteur, ou une commission d'enquête pour les dossiers importants, désigné par le président du tribunal administratif, elle s'appuie sur un dossier mis à disposition du public, composé notamment de l'étude d'impact pour un projet ou d'une évaluation environnementale  pour un plan ou programme. L'enquête publique se conclut par un rapport d'enquête, qui vise à éclairer l'autorité compétente lors de la prise de décision.

Pour tous les projets, plans ou programmes faisant l'objet d'une évaluation environnementale mais n'étant pas soumis à enquête publique, une procédure de mise à disposition du public est prévue, afin d'assurer l'information et la participation du public prévues par la Charte de l'environnement (art. L. 122-1-1 et L. 122-8). Une procédure analogue est prévue pour les décisions ayant une incidence sur l'environnement mais non assujetties à une procédure particulière de participation du public (art. L. 120-1 à L. 120-3).

À un stade avancé d'élaboration des projets, une procédure de consultation locale a été créée par l'ordonnance n° 2016-488 du 21 avril 2016 relative à la consultation locale sur les projets susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement. Prévue aux articles L. 123-20 à L. 123-33 du code de l'environnement, cette consultation est déclenchée à l'initiative de l'Etat sur « un projet d'infrastructure ou d'équipement susceptible d'avoir une incidence sur l'environnement dont la réalisation est subordonnée à la délivrance d'une autorisation relevant de sa compétence, y compris après une déclaration d'utilité publique » (art. L. 123-20). Ces dispositions visaient en particulier à permettre l'organisation d'une consultation sur le projet de déplacement de l'aéroport de Nantes à Notre-Dame-des-Landes .

2. Une volonté de renforcer et de moderniser la démocratie environnementale

Face aux blocages, tensions et incidents, parfois tragiques, observés sur certains projets d'aménagement ou d'équipement emblématiques, résultant de désaccords profonds en matière de protection de l'environnement, le président de la République a annoncé des travaux de modernisation et de renforcement du dialogue environnemental , lors de l'ouverture de la troisième conférence environnementale le 27 novembre 2014.

En matière de participation du public, une commission spécialisée sur la démocratisation du dialogue environnemental a été créée au sein du Conseil national de la transition écologique (CNTE), présidée par notre collègue Alain Richard, et composée de représentants de l'État, des collectivités territoriales, des salariés et des employeurs, d'ONG, de parlementaires et d'experts. Comme le rappelle la lettre de mission, le fil directeur de cette commission était « de renforcer les procédures existantes, d'assurer la transparence du débat public, sans en allonger les délais » 15 ( * ) .

Ces travaux ont été menés parallèlement à ceux dirigés par Jacques Vernier sur l'évaluation environnementale et par Jean-Pierre Duport sur l'autorisation environnementale unique. Ils se sont par ailleurs appuyés sur les travaux du groupe de travail dirigé par Gérard Monédiaire sur la participation du public. La commission a remis son rapport à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie le 3 juin 2015, intitulé « Démocratie environnementale : débattre et décider ».

PRINCIPALES RECOMMANDATIONS DU RAPPORT DE LA COMMISSION SUR LA DÉMOCRATISATION DU DIALOGUE ENVIRONNEMENTAL

Au préalable, le rapport propose un bilan nuancé des modalités existantes de la participation du public , soulignant en particulier : « la très grande majorité des projets d'initiative privée ou publique va à son terme normal dans de bonnes conditions [...] cependant, l'émergence d'oppositions vives et persistantes à des projets d'importance et d'enjeux divers témoigne aussi des difficultés que peut rencontrer le dialogue environnemental dans des cas certes limités mais très souvent symboliques ».

Tout en reconnaissant l'utilité de l'enquête publique et de la mise à disposition du public, au stade de l'autorisation ou de l'approbation des projets, plans et programmes, le rapport recommande d' accroître dans son ensemble la participation du public en amont , au stade de leur élaboration.

Il relève notamment que la participation préalable pour les plans et programmes est d'autant plus indispensable que ceux-ci constituent « les motivations fondatrices des grands équipements d'énergie ou de transports, par exemple », qui font souvent l'objet de conflits au stade du projet ; conflits accrus par un sentiment d'irréversibilité lorsque la discussion préalable a été absente ou insuffisante.

Afin de proportionner la participation préalable aux enjeux , le rapport propose de systématiser la concertation amont pour les plus grands projets, plans et programmes, sous l'égide de la CNDP, et de soumettre à plusieurs options l'engagement de la concertation sur les projets « moyens » ou « locaux », en évitant de mettre en place une procédure préliminaire généralisée.

Pour cela, le rapport préconise en particulier :

- de généraliser la saisine de la CNDP pour les plans et programmes d'importance nationale et régionale, sans nécessité de changer significativement le régime applicable aux grands projets, déjà soumis à cette procédure ;

- de diversifier les possibilités d'engagement d'une concertation préalable pour les projets, plans et programmes de moindre ampleur (par le maître d'ouvrage, l'autorité compétente ou le public par un droit d'initiative), sans la systématiser ;

- de créer à ce titre un droit d'initiative au profit des citoyens, collectivités ou associations , en fixant des conditions de représentativité et en soumettant cette demande de concertation à la validation d'une autorité publique ;

- d'exiger des maîtres d'ouvrage de projets d'initiative publique l'élaboration d' une « déclaration d'annonce de projet » pour informer le public de l'existence du projet et permettre l'exercice du droit d'initiative ;

- d'établir un socle commun d'objectifs et de garanties associées au principe de participation du public ;

- de renforcer le rôle de tiers-garant dans la participation préalable, assuré par la CNDP ou par une personnalité présentant une qualification adaptée.

Attachée à proposer des évolutions équilibrées en matière de démocratie environnementale, afin de permettre aux divergences de s'exprimer dans le droit, la commission conclut ainsi son rapport : « Un débat, même mené en temps utile et entouré de garanties de loyauté, n'efface pas les divergences d'appréciation et d'intérêts, pas plus que la concertation ne supprime toute contestation . Elle croit seulement que la clarté et la largeur de la concertation menée suffisamment tôt réduisent les incompréhensions et écartent les causes de conflit liées au déficit d'information et à l'apparition de solutions déjà tranchées devant un problème aux enjeux complexes . »

C. LE CONTENU DE L'ORDONNANCE : UN RENFORCEMENT ET UNE MODERNISATION DE LA PARTICIPATION DU PUBLIC AUX DÉCISIONS AYANT DES INCIDENCES SUR L'ENVIRONNEMENT

En renforçant la participation du public en amont des processus d'autorisation , le principal objectif de l'ordonnance n° 2016-1060 est de développer le dialogue environnemental à un stade auquel les projets peuvent aisément évoluer. Ces dispositions doivent ainsi permettre d' améliorer la qualité des projets, d' accroître leur acceptabilité sociale et de faciliter leur mise en oeuvre. L'ordonnance vise également à moderniser et à faciliter la participation du public au stade des décisions ayant des incidences sur l'environnement.

Pour cela, l'ordonnance intervient à trois niveaux :

- elle fixe les objectifs de la participation du public et les droits associés pour assurer sa mise en oeuvre ;

- elle renforce la concertation en amont des processus d'autorisation , notamment par l'élargissement du champ du débat public, le renforcement de la procédure de concertation préalable hors débat public, la création d'un droit d'initiative et le renforcement de la CNDP ;

- elle modernise la concertation en aval, au stade des processus d'autorisation , notamment par une dématérialisation accrue de l'enquête publique, une simplification des procédures et un renforcement du rôle du commissaire-enquêteur.

QUELS SONT LES IMPACTS FINANCIERS DE LA RÉFORME DE LA PARTICIPATION DU PUBLIC ?

La fiche d'impact de l'ordonnance et du décret évalue les impacts financiers des nouvelles dispositions à 10,4 M€ de coûts supplémentaires (15,4 M€ de charges nouvelles - 5 M€ de gains et économies) ainsi répartis :

- 1,3 M€ pour les entreprises ;

- 1,2 M€ pour les collectivités territoriales ;

- 5,3 M€ pour l'État ;

- 2,6 M€ pour la CNDP.

- Pour les porteurs de projets, plans et programmes, les charges nouvelles résultent essentiellement des dépenses liées à l'ingénierie de la participation . Ces dépenses concernent principalement les entreprises et les collectivités territoriales.

L 'échelon communal et intercommunal concentre la quasi-totalité des coûts pour les collectivités (1,2 M€ sur 1,3 M€). Par ailleurs, sur les 5 M€ de gains et économies attendus de cette réforme, 4 M€ bénéficieront aux collectivités selon les calculs du Gouvernement, au titre des allègements en aval et de la dématérialisation accrue des procédures.

Les coûts pour l'État résultent essentiellement du renforcement des missions d'information préalable, de conseil et d'instruction. L'impact sur l'État en tant que porteur de projet, plan et programme devrait être faible. Quant à la CNDP, ses nouvelles missions entraînent mécaniquement un accroissement des moyens nécessaires.

En matière de ressources humaines supplémentaires , l'impact global de la réforme est estimé à 8 ETP pour les entreprises, 11 ETP pour les collectivités territoriales et 16 ETP pour les administrations centrales, déconcentrées et indépendantes (dont la CNDP).

Source : fiche d'impact de l'ordonnance n° 2016-1060 et du décret n° 2017-626.

L'ordonnance soumise à la ratification du Parlement comprend neuf articles .

1. Objectifs et droits de la participation du public - article L. 120-1 du code de l'environnement (article 1er de l'ordonnance)

L' article 1 er de l'ordonnance insère un chapitre préliminaire intitulé « Principes et dispositions générales » au sein du titre II « Information et participation du public » du livre Ier du code de l'environnement. Il est constitué d'un article unique L. 120-1 16 ( * ) . Ses dispositions visent à préciser le contenu du principe de participation du public prévu par l'article 7 de la Charte de l'environnement et l'article L. 110-1 du code de l'environnement.

Le I de l'article fixe les objectifs de la participation du public à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement :

- améliorer la qualité de la décision publique et contribuer à sa légitimité démocratique ;

- assurer la préservation d'un environnement sain pour les générations actuelles et futures ;

- sensibiliser et éduquer le public à la protection de l'environnement ;

- améliorer et diversifier l'information environnementale.

Le II fixe les droits que le principe de participation confère au public, pour assurer sa mise en oeuvre :

- accéder aux informations pertinentes permettant sa participation effective ;

- demander la mise en oeuvre d'une procédure de participation, dans les conditions prévues au chapitre I er du titre II du présent code ;

- disposer de délais raisonnables pour formuler des observations et des propositions ;

- être informé de la manière dont il a été tenu compte de ses observations et propositions dans la décision d'autorisation ou d'approbation.

Le III précise que les procédures de concertation préalable organisées en application du code de l'urbanisme 17 ( * ) doivent respecter ces droits, à l'exception du deuxième, compte tenu des règles spécifiques qui régissent ces concertations.

Le IV renvoie aux dispositions du titre II pour l'application de l'article.

Enfin, l'article L. 120-1 prévoit que l'application de ces dispositions respecte les intérêts de la défense nationale et de la sécurité publique , le secret industriel et commercial , et tout secret protégé par la loi . Le déroulement et les modalités de la participation du public peuvent être adaptés en conséquence.

2. Participation du public à l'élaboration des plans, programmes et projets ayant une incidence sur l'environnement - articles L. 121-1-A à L. 121-23 du code de l'environnement (article 2 de l'ordonnance)

L' article 2 de l'ordonnance modifie et complète les dispositions du chapitre I er du titre II, relatif à la participation du public à l'élaboration des plans, programmes et projets ayant une incidence sur l'environnement.

SYNTHÈSE DE L'ARTICLE 2 DE L'ORDONNANCE

Parmi les modifications apportées par l'article 2 de l'ordonnance, peuvent être relevés les points suivants :

§ le renforcement de la participation pour les plans et programmes soumis à évaluation environnementale, par une saisine obligatoire de la CNDP pour ceux d'échelle nationale, ou par l'exercice du droit d'initiative pour ceux d'échelle locale ;

§ la possibilité de saisine de la CNDP sur les projets qui lui sont soumis à titre facultatif par le maître d'ouvrage ouverte désormais à 10 000 ressortissants de l'Union européenne résidant en France ;

§ de nouvelles responsabilités confiées à la CNDP : exercer une mission de conciliation en cas de désaccord entre parties prenantes à la concertation préalable ; constituer une liste nationale de garants et désigner un garant pour chaque concertation qui l'exige ; financer la réalisation d'études complémentaires ;

§ la possibilité de saisine de la CNDP pour organiser un débat national sur un projet de réforme est désormais ouverte à 60 députés ou 60 sénateurs , ou à 500 000 ressortissants de l'Union européenne résidant en France ;

§ une dispense de participation préalable bénéficie à un projet s'inscrivant dans un plan ou programme ayant fait l'objet d'un débat public dans les cinq années précédentes, sauf décision contraire et motivée de la CNDP ;

§ pour les projets, plans ou programmes soumis à évaluation environnementale mais ne faisant pas l'objet d'une saisine de la CNDP, les moyens d'engagement d'une concertation préalable sont élargies avec la création d'un droit d'initiative pour demander une concertation préalable, exercé par les citoyens, les collectivités territoriales ou les associations de protection de l'environnement ;

§ les modalités des concertations préalables avec ou sans garant sont précisées, et il incombe notamment au maître d'ouvrage d'indiquer les mesures qu'il juge nécessaires pour répondre aux enseignements tirés de la concertation.

PROJETS SOUMIS À LA CNDP

PROJETS NON SOUMIS À LA CNDP

Le 1° procède à un déplacement d'articles.

Le 2° modifie l'intitulé du chapitre I er , en cohérence avec son nouveau contenu.

Le 3° insère un article préliminaire L. 121-1-A.

L'article L. 121-1-A nouveau précise l'objet des dispositions du chapitre 1 er : la participation du public préalable au dépôt des demandes d'autorisation pour les projets ou concomitantes avec la phase d'élaboration pour les plans et programmes, en amont de l'ouverture de l'enquête publique ou de toute autre procédure de participation « aval ».

La participation préalable regroupe les procédures suivantes :

- un débat public ou une concertation préalable relevant de la compétence de la CNDP (art. L. 121-8 ) ;

- une concertation préalable volontaire, mise en oeuvre par le maître d'ouvrage du projet ou la personne publique responsable du plan ou programme ( I de l'art. L. 121-17 ) ;

- une concertation préalable mise en oeuvre à la demande de l'autorité compétente pour autoriser le projet ou pour approuver le plan ou programme ( II de l'art. L. 121-17 ) ;

- une concertation préalable décidée par le représentant de l'État suite à l'exercice du nouveau droit d'initiative ( III de l'art. L. 121-17 ).

a) Commission nationale du débat public (CNDP)
(1) Article L. 121-1 (5° de l'article 2 de l'ordonnance) : missions de la CNDP

Le 4° modifie l'intitulé de la section 1 du chapitre I er , en cohérence avec son nouveau contenu.

Le 5° modifie l'article L. 121-1 afin d'étendre les missions de la CNDP, en prévoyant qu'elle veille également au respect de la participation du public pour les plans et programmes de niveau national et faisant l'objet d'une évaluation environnementale 18 ( * ) . Pour les projets, le champ de compétence de la CNDP, fixé à l'article L. 121-8, reste inchangé.

Une nouvelle rédaction des dispositions donnant à la CNDP le pouvoir d'organiser un débat public ou une concertation préalable pour un projet, plan ou programme, précise le contenu de cette participation en visant les enjeux socio-économiques, les impacts significatifs sur l'environnement et l'aménagement du territoire ainsi qu' une discussion des solutions alternatives , y compris l'absence de mise en oeuvre du projet.

Si la CNDP pouvait déjà demander la réalisation d'expertises complémentaires , cette initiative peut désormais s'appuyer sur une saisine du président d'une commission particulière du débat public ou d'un garant. Il est également précisé que sa décision est rendue publique.

Enfin, le 5° procède à des coordinations et harmonisations rédactionnelles.

(2) Article L. 121-1-1 (6° de l'article 2 de l'ordonnance) : liste nationale de garants

Afin de veiller au respect des règles de participation du public, le rapport de la commission Richard soulignait l'importance d'un tiers garant . Lorsqu'un débat public est organisé, ce rôle revient à la CNDP. Lorsqu'il s'agit d'une concertation préalable, ce rôle incombe à une personnalité désignée garant 19 ( * ) .

Le 6° insère un article L. 121-1-1 nouveau qui confie à la CNDP l'établissement d'une liste nationale de garants , rendue publique, avec la possibilité de radier toute personne ayant manqué à ses obligations.

Pour un projet, le garant de la concertation préalable est nommé parmi les membres de cette liste, et bénéficie d'une indemnisation par la CNDP dans des conditions fixées par voie réglementaire.

L'article L. 121-1-1 précise que le garant est tenu à une obligation de neutralité et d'impartialité . Il est chargé de veiller notamment à la qualité, à la sincérité et à l'intelligibilité des informations diffusées au public, au bon déroulement de la concertation préalable et à la possibilité pour le public de formuler des questions et de présenter des observations et propositions.

Les personnes intéressées à titre personnel ou en raison de leurs fonctions , notamment au sein de la collectivité, de l'organisme ou du service chargé de la maîtrise d'ouvrage, de la maîtrise d'oeuvre ou du contrôle de l'opération concernée par la concertation, ne peuvent être nommées garants .

L'article précise enfin qu'en cas d'empêchement, la CNDP nomme un garant remplaçant.

(3) Article L. 121-2 (7° de l'article 2 de l'ordonnance) : procédure de conciliation

Le 7° réécrit l'article L. 121-2 , relatif aux documents d'urbanisme 20 ( * ) , afin de créer une procédure de conciliation menée par la CNDP.

Il permet aux parties concernées par un projet de saisir la CNDP par une demande commune et motivée, afin qu'elle mène une procédure de conciliation , en cas de risque de conflits ou de différends. L'objectif est de permettre la reprise du dialogue entre ces parties et d'aboutir à un accord sur les modalités de participation du public.

Il est précisé que les parties comprennent au moins le maître d'ouvrage, et une association agréée au titre de la protection de l'environnement au niveau national, ou deux associations ou une fédération d'associations agréées au niveau local, dans le cadre de la région ou du département concerné.

Visant tout projet au sens de l'article L. 122-1, cette compétence couvre un champ plus large que celui des projets soumis à la saisine de la CNDP.

L'article L. 121-2 précise qu'une telle demande de conciliation n'a pas de caractère suspensif pour la procédure en cours.

(4) Articles L. 121-4 et L. 121-5 (8° et 9° de l'article 2 de l'ordonnance) : organisation interne de la CNDP

Le 8° complète l'article L. 121-4 , en permettant à la CNDP de bénéficier de fonctionnaires en détachement. Il permet également à la CNDP de nommer des délégués dans chaque région , pour l'exercice de ses missions, ces délégués bénéficiant d'une indemnisation.

Le 9° insère une mention de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, à l'article L. 121-5 , portant sur la prévention des conflits d'intérêts pour les membres de la CNDP et de ses commissions particulières.

(5) Article L. 121-6 (10° de l'article 2 de l'ordonnance) : financement de la CNDP

Le 10° complète l'article L. 121-6 , relatif au financement de la CNDP, en créant un fonds de concours, au sens du II de l'article 17 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), destiné à recevoir des contributions financières afin de participer aux dépenses liées au débat public .

Lorsque le maître d'ouvrage n'est pas connu au moment du débat public, un préfinancement est assuré, selon les cas, par l'État, par un de ses établissements publics ou par plusieurs collectivités territoriales. Une fois connu, le maître d'ouvrage doit rembourser le préfinanceur. Lorsque le préfinanceur est l'État, le remboursement s'opère par voie d'attribution de produit, au sens du III de l'article 17 de la LOLF.

Il est précisé que l'indemnisation des garants désignés par la CNDP pour une concertation préalable et le coût des expertises complémentaires sont à sa charge.

(6) Article L. 121-8 (12° de l'article 2 de l'ordonnance) : débat public et concertation préalable relevant de la CNDP

Le 11° modifie l'intitulé de la section 3 du chapitre I er , en cohérence avec son nouveau contenu.

Le 12° modifie les dispositions de l'article L. 121-8 , relatif à la procédure de saisine de la CNDP pour les projets, plans et programmes relevant de sa compétence.

Pour un projet dont l'importance implique une saisine systématique de la CNDP par le maître d'ouvrage, les dispositions relatives au contenu du dossier déposé auprès de la commission sont réécrites, et prévoient désormais une description des équipements créés ou aménagés pour la desserte du projet, ainsi que des différentes solutions alternatives, y compris l'absence de mise en oeuvre du projet. Il est également précisé qu'en présence d'un projet relevant de plusieurs maîtres d'ouvrage, ces derniers doivent saisir conjointement la CNDP.

Pour un projet dont l'importance est moindre mais qui justifie néanmoins une publication par le maître d'ouvrage de ses caractéristiques et des modalités de la concertation préalable qu'il doit organiser si la CNDP n'est pas saisie, il est précisé que cette concertation suit les exigences applicables à toute concertation en application de l'article L. 121-16, avec la désignation d'un garant en application de l'article L. 121-16-1.

SAISINE OBLIGATOIRE OU FACULTATIVE DE LA CNDP

Si la CNDP est désormais obligatoirement saisie des plans et programmes de niveau national faisant l'objet d'une évaluation environnementale, le caractère obligatoire ou facultatif de la saisine pour un projet dépend de sa nature, de ses caractéristiques et de son coût prévisionnel (I et II de l'article L. 121-8).

L'article R. 121-1 fixe les catégories d'opérations qui relèvent de l'article L. 121-8 et les seuils et critères techniques sont fixés par le tableau annexé à l'article R. 121-2. Ainsi, à titre d'exemple :

- la création ou l'extension d'infrastructures de pistes d'aérodromes est soumise à saisine obligatoire lorsqu'il s'agit d'un aérodrome de catégorie A et que le coût du projet est supérieur à 100 M€, et à saisine facultative lorsqu'il s'agit d'un aérodrome de catégorie A et que le coût du projet est supérieur à 35 M€ ;

- la création de lignes électriques est soumise à saisine obligatoire lorsque les lignes ont une tension supérieure à 400 kV et sont d'une longueur supérieure à 10 km, et à saisine facultative lorsque les lignes ont une tension supérieure à 200 kV et sont d'une longueur aérienne supérieure à 15 km ;

- la création d'équipements culturels, sportifs, scientifiques ou touristiques est soumise à saisine obligatoire si le coût des bâtiments et infrastructures est supérieur à 300 M€, et à saisine facultative lorsque le coût est supérieur à 150 M€.

Pour ces projets, l'article L. 121-8 prévoyait déjà une possibilité de saisine de la CNDP alternativement par le maître d'ouvrage, dix parlementaires, une collectivité territoriale ou une association de protection de l'environnement agréée au niveau national. L'ordonnance ouvre cette possibilité à 10 000 ressortissants majeurs de l'Union européenne résidant en France 21 ( * ) . Le délai de deux mois pour effectuer cette saisine à compter de la publication du projet reste inchangé.

Au plus tard au moment de l'ouverture de l'enquête publique, un mécanisme de rattrapage est prévu dans l'hypothèse où un projet présenterait finalement des caractéristiques techniques ou un coût prévisionnel excédant les seuils et critères de la saisine obligatoire. Le maître d'ouvrage doit alors saisir la CNDP.

En cohérence avec la modification effectuée à l'article L. 121-1, l'article L. 121-8 est complété, en prévoyant la saisine systématique de la CNDP pour les plans et programmes de niveau national faisant l'objet d'une évaluation environnementale.

Pour ces plans et programmes, la personne publique chargée de son élaboration doit transmettre à la CNDP un dossier analogue à celui exigé pour les projets, comprenant notamment les différentes solutions alternatives.

L'article L. 121-8 est également complété afin de préciser l'articulation de ces dispositions avec le code de l'urbanisme , en vue d'éviter tout doublon dans les obligations de concertation pour un même plan ou projet.

Ainsi, les dispositions relatives aux débats publics et aux concertations préalables relevant de la CNDP ne s'appliquent pas aux documents d'urbanisme et aux projets soumis à la procédure de concertation obligatoire prévue à l'article L. 103-2 du code de l'urbanisme 22 ( * ) , ni au schéma d'ensemble du réseau de transport public du Grand Paris, qui est soumis à une procédure spécifique en application de l'article 3 de la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris.

De même, les projets relevant du champ de compétence de la CNDP sont soustraits aux dispositions de l'article L. 103-2 du code de l'urbanisme.

(7) Article L. 121-9 (13° de l'article 2 de l'ordonnance) : suites données à la saisine de la CNDP

Le 13° réécrit l'article L. 121-9 en vue de préciser les suites que la CNDP peut donner à sa saisine .

Elle apprécie pour chaque projet, plan ou programme l'opportunité d'organiser un débat public , en fonction de son incidence territoriale, de ses enjeux socio-économiques et de ses impacts sur l'environnement ou l'aménagement du territoire.

Si la CNDP décide qu'un débat public est nécessaire, elle l'organise et en confie l'animation à une commission particulière qu'elle constitue 23 ( * ) .

Si la CNDP décide qu'un débat public n'est pas nécessaire, elle peut décider l'organisation d'une concertation préalable , dont elle définit les modalités et dont elle confie l'organisation au maître d'ouvrage du projet ou à la personne responsable du plan ou programme. Cette concertation respecte les exigences fixées en matière de concertations préalables, en particulier les articles L. 121-16 et L. 121-16-1 24 ( * ) .

Une dispense de débat public ou de concertation préalable est prévue au bénéfice d'un projet discuté lors du débat public organisé pour un plan ou programme approuvé depuis moins de cinq ans et définissant le cadre dans lequel ce projet peut être autorisé et mis en oeuvre. Par décision motivée, la CNDP peut toutefois déroger à cette dispense en décidant d'organiser un débat public ou une concertation préalable pour un tel projet.

La CNDP doit se prononcer dans un délai de deux mois suite à sa saisine, par une décision motivée . Elle peut décider de n'avoir recours ni à un débat public, ni à une concertation préalable. L'absence de décision expresse dans le délai imparti vaut renoncement à organiser un débat public ou une concertation préalable.

(8) Article L. 121-10 (14° de l'article 2 de l'ordonnance) : organisation d'un débat public national

Le 14° réécrit l'article L. 121-10 , afin de préciser les modalités d'organisation des débats publics nationaux .

Il permet au Gouvernement de saisir la CNDP lorsqu'il souhaite organiser un débat public national sur « un projet de réforme ayant un effet important sur l'environnement ou l'aménagement du territoire ». Cette nouvelle rédaction se substitue à la précédente, jugée peu claire, qui visait « des options générales d'intérêt national en matière d'environnement, de développement durable ou d'aménagement » et faisait référence de manière non exhaustive à des plans et programmes identifiés par décret en Conseil d'État 25 ( * ) .

Un tel débat peut désormais être également organisé à la demande de 60 députés ou sénateurs , ou de 500 000 ressortissants majeurs de l'Union européenne résidant en France 26 ( * ) .

La CNDP doit alors indiquer sur son site internet qu'elle a été saisie, et procéder à l'organisation de ce débat public.

Les enseignements du débat et les suites qui en sont tirées doivent ensuite être publiés par le ou les ministres principalement intéressés, le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat ou la personne publique responsable de la politique concernée.

(9) Articles L. 121-11 à L. 121-13 (15° à 17° de l'article 2 de l'ordonnance) : modalités d'organisation des débats publics

Le 15° modifie l'article L. 121-11 , afin de différencier la durée maximale du débat public : elle demeure fixée à 4 mois pour les projets, mais s'élève à 6 mois pour les plans et programmes. La faculté donnée à la CNDP de prolonger cette durée de 2 mois par décision motivée demeure.

Il est également précisé que le débat public ne peut commencer qu'à partir du moment où la CNDP a considéré le dossier complet.

Le 16° modifie l'article L. 121-12 , afin de préciser l'articulation dans le temps de la procédure du débat public avec les procédures de participation au stade de l'autorisation .

Ainsi, l'ouverture de l'enquête publique 27 ( * ) ou de la participation du public 28 ( * ) ne peut intervenir qu'à compter de la date à laquelle un débat public ou une concertation préalable ne peut plus être organisée, ou de la date de publication du bilan du débat ou de la concertation, ou à l'expiration du délai imparti au président de la CNDP pour procéder à cette publication. Cette ouverture doit intervenir au plus tard dans un délai de huit ans , contre cinq ans précédemment, à compter de ces dates.

Le 17° modifie l'article L. 121-13 , relatif à la publication par le maître d'ouvrage d'un projet soumis à débat public des conditions de poursuite de ce projet et des modifications éventuellement apportées ou des mesures jugées nécessaires pour répondre aux enseignements du débat. Ces modifications se limitent à des coordinations afin d'intégrer les plans et programmes.

(10) Articles L. 121-13-1 à L. 121-15 (18° à 20° de l'article 2 de l'ordonnance) : phase postérieure à un débat public ou à une concertation préalable relevant de la CNDP

Le 18° abroge l'article L. 121-13-1 , relatif à l'obligation pour le maître d'ouvrage d'informer la CNDP des modalités d'information et de participation du public mises en oeuvre pendant la phase postérieure au débat public jusqu'à l'enquête publique, ces dispositions étant remplacées par l'article L. 121-14.

Le 19° réécrit l'article L. 121-14 , en prévoyant la nomination par la CNDP d'un garant à l'issue d'un débat public ou d'une concertation préalable décidée par elle , chargé de veiller à la bonne information et à la participation du public jusqu'à l'ouverture de l'enquête publique. Le garant doit rendre un rapport final, la CNDP pouvant publier des rapports intermédiaires.

La CNDP détermine les conditions dans lesquelles le garant et le maître d'ouvrage la tiennent informée.

Le 20° renumérote l'article L. 121-14 en L. 121-15 , prévoyant qu'aucune irrégularité au regard des dispositions du chapitre I er ne peut être invoquée lorsque l'acte par lequel la Commission nationale du débat public a renoncé à organiser un débat public ou une concertation préalable, ou l'acte publié par le maître d'ouvrage en application de l'article L. 121-13, est devenu définitif.

b) Concertation préalable

Le 21° remplace la section 4 29 ( * ) du chapitre I er par deux sections 4 et 5 respectivement intitulées « Concertation préalable » et « Dispositions finales ».

La section 4 comprend les articles L. 121-15-1 à L. 121-19.

La section 5 comprend les articles L. 121-20 et L. 121-21.

(1) Article L. 121-15-1 : champ de la concertation préalable

L'article L. 121-15-1 définit le champ de la concertation préalable , qui peut être mise en oeuvre pour :

- un projet, plan ou programme soumis à saisine de la CNDP , lorsque celle-ci a demandé l'organisation d'une concertation préalable ;

- un projet, plan ou programme soumis à évaluation environnementale mais ne donnant pas lieu à saisine de la CNDP.

Pour cette seconde catégorie, les règles d'engagement de la concertation préalable sont définies à l'article L. 121-17 ( cf. infra ).

Afin d'éviter de multiplier les procédures, sont toutefois exclus de ce champ les projets et documents d'urbanisme soumis à la procédure de concertation obligatoire prévue à l'article L. 103-2 du code de l'urbanisme susmentionné 30 ( * ) , ainsi qu'une liste de plans et programmes soumis à des modalités particulières de concertation :

- le plan de prévention des risques technologiques ;

- le plan de gestion des risques inondations ;

- le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux ;

- le plan d'action pour le milieu marin ;

- le schéma d'ensemble du réseau de transport public du Grand Paris.

(2) Articles L. 121-16 et L. 121-16-1 : modalités de la concertation préalable avec ou sans garant

L'article L. 121-16 définit un socle commun d'exigences que doit respecter toute concertation préalable.

Son objet est d' associer le public à l'élaboration d'un projet, plan ou programme.

La durée minimale d'une concertation est de 15 jours , et sa durée maximale est de 3 mois .

Pour assurer l'information du public, les modalités et la durée de la concertation sont publiées 15 jours avant le début de la concertation , par voie dématérialisée et par voie d'affichage sur les lieux concernés par la concertation.

Un bilan de la concertation doit être publié, et il incombe au maître d'ouvrage d'indiquer les mesures qu'il juge nécessaires pour répondre aux enseignements tirés de la concertation.

Enfin, l'article L. 121-16 précise que la prise en charge des coûts de l'organisation matérielle de la concertation incombe au maître d'ouvrage ou à la personne publique responsable du projet, plan ou programme.

L'article L. 121-16-1 fixe les exigences spécifiques qui doivent être respectées lorsque la concertation préalable est organisée sous l'égide d'un garant 31 ( * ) . Ce garant est désigné par la CNDP à la demande du maître d'ouvrage, au sein de la liste nationale mentionnée à l'article L. 121-1-1.

Au cours de la concertation, le garant peut demander à la CNDP la réalisation d'une étude technique ou d'une expertise complémentaire , à la charge de la commission comme le prévoit l'article L. 121-6. Le public est informé de la décision de la CNDP sur le site internet de la concertation.

Il incombe au garant de statuer en opportunité sur les demandes de communication adressées au maître d'ouvrage ou à l'autorité compétente pour autoriser le projet ou approuver le plan ou programme. Il peut par ailleurs adresser toute demande au maître d'ouvrage pour assurer une bonne information et participation du public.

Ces dispositions s'appliquent sans préjudice des règles prévues par le code des relations entre le public et l'administration, fixant le périmètre et les modalités du droit à communication des documents administratifs, notamment l'article L. 311-5 qui encadre les documents communicables.

ARTICLE L. 311-5 DU CODE DES RELATIONS ENTRE LE PUBLIC ET L'ADMINISTRATION

Ne sont pas communicables :

1° Les avis du Conseil d'État et des juridictions administratives, les documents de la Cour des comptes mentionnés à l'article L. 141-3 du code des juridictions financières et les documents des chambres régionales des comptes mentionnés aux articles L. 241-1 et L. 241-4 du même code, les documents élaborés ou détenus par l'Autorité de la concurrence dans le cadre de l'exercice de ses pouvoirs d'enquête, d'instruction et de décision, les documents élaborés ou détenus par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique dans le cadre des missions prévues à l'article 20 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, les documents préalables à l'élaboration du rapport d'accréditation des établissements de santé prévu à l'article L. 6113-6 du code de la santé publique, les documents préalables à l'accréditation des personnels de santé prévue à l'article L. 1414-3-3 du code de la santé publique, les rapports d'audit des établissements de santé mentionnés à l'article 40 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001 et les documents réalisés en exécution d'un contrat de prestation de services exécuté pour le compte d'une ou de plusieurs personnes déterminées ;

2° Les autres documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte :

a) Au secret des délibérations du Gouvernement et des autorités responsables relevant du pouvoir exécutif ;

b) Au secret de la défense nationale ;

c) A la conduite de la politique extérieure de la France ;

d) A la sûreté de l'Etat, à la sécurité publique, à la sécurité des personnes ou à la sécurité des systèmes d'information des administrations ;

e) A la monnaie et au crédit public ;

f) Au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou d'opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l'autorité compétente ;

g) A la recherche et à la prévention, par les services compétents, d'infractions de toute nature ;

h) Ou sous réserve de l'article L. 124-4 du code de l'environnement, aux autres secrets protégés par la loi.

Le public peut adresser au garant ses observations et propositions par voie électronique ou postale , pour publication sur un site internet. La transmission d'une synthèse de ces observations et propositions à un organisme consultatif ayant à rendre un avis sur la décision précédée par la concertation préalable est également prévue.

Enfin, le garant est chargé de réaliser le bilan de la concertation préalable 32 ( * ) , dans un délai d'un mois suivant sa clôture. Ce bilan comporte une synthèse des observations et propositions présentées et, le cas échéant, les évolutions du projet résultant de la concertation. Le garant doit informer le maître d'ouvrage, la CNDP et le représentant de l'État du déroulement et du bilan de la concertation. Il doit également publier ce bilan.

(3) Articles L. 121-17-1 à L. 121-19 : engagement de la concertation préalable

L'article L. 121-17-1 définit les conditions d'engagement d'une concertation préalable sur un projet, plan ou programme.

(a) À l'initiative du porteur du projet, plan ou programme

Le I de l'article L. 121-17 reprend et modifie certaines dispositions antérieurement prévues à l'article L. 121-16, relatives à la concertation préalable organisée à l'initiative du porteur de projet .

Cette concertation préalable « volontaire » vise les projets, plans et programmes soumis à évaluation environnementale et ne donnant pas lieu à saisine de la CNDP 33 ( * ) . L'article prévoit la possibilité de lancer une concertation préalable selon deux formats :

- selon des modalités fixées librement par la personne responsable ou le porteur ;

- selon les modalités prévues à l'article L. 121-16-1, c'est-à-dire en ayant recours à un garant, désigné par la CNDP.

Dans les deux cas, cette concertation préalable volontaire doit respecter les exigences fixées à l'article L. 121-16, communes à toute concertation préalable.

(b) À l'initiative de l'autorité administrative compétente

Le II de l'article L. 121-17 permet à l'autorité compétente pour autoriser un projet de demander par décision motivée au maître d'ouvrage l'organisation d'une concertation préalable, dans les conditions prévues aux articles L. 121-16 et L. 121-16-1, lorsque ce projet ne fait pas déjà l'objet d'une concertation « volontaire ».

Cette décision doit intervenir dans un délai de deux mois après la publication de la déclaration d'intention, lorsque le projet y est soumis en application de l'article L. 121-18, ou à défaut dans un délai de quinze jours après le dépôt de la demande d'autorisation du projet, auquel cas l'autorité compétente peut proroger le délai d'instruction pour une durée ne pouvant excéder celle nécessaire à la concertation préalable alors demandée. Lorsque le projet fait l'objet de plusieurs autorisations successives, l'autorité compétente ne peut prendre l'initiative d'une concertation préalable qu'à l'occasion de la première procédure d'autorisation .

L'autorité compétente peut également demander à la personne publique responsable d'un plan ou programme d'organiser une concertation préalable, dans un délai de deux mois à compter de l'acte prescrivant son élaboration.

(c) Par exercice du droit d'initiative

Le III de l'article L. 121-17 mentionne un droit d'initiative ouvert au public , afin de demander au représentant de l'État l'organisation d'une concertation préalable .

Il fait l'objet d'une sous-section 4 intitulée « Droit d'initiative », composée des articles L. 121-17-1 à L. 121-19.

L'article L. 121-17-1 prévoit que le droit d'initiative est ouvert pour les projets, plans et programmes soumis à évaluation environnementale , ne donnant pas lieu à une saisine de la CNDP et n'ayant pas déjà fait l'objet d'une concertation préalable avec garant.

Pour les projets, une condition financière additionnelle est prévue : le montant des dépenses publiques , pour un projet sous maîtrise d'ouvrage publique, ou des subventions publiques , pour un projet privé, doit excéder un seuil fixé par décret en Conseil d'État 34 ( * ) .

Reprenant une préconisation du rapport Richard, l'établissement de ces différentes conditions vise à éviter une procédure préliminaire généralisée pour tout projet.

L'article L. 121-18 prévoit que, préalablement à l'exercice du droit d'initiative, le projet, plan ou programme doit faire l'objet d' une déclaration d'intention , publiée sur un site internet par le maître d'ouvrage. L'objectif de cette formalité est d'informer le public d'une possible participation dès l'apparition des projets.

Pour un projet , les différents éléments de la déclaration d'intention sont :

1° les motivations et raisons d'être du projet ;

2° le cas échéant, le plan ou le programme dont il découle ;

3° la liste des communes correspondant au territoire susceptible d'être affecté par le projet ;

4° un aperçu des incidences potentielles sur l'environnement ;

5° une mention, le cas échéant, des solutions alternatives envisagées ;

6° les modalités déjà envisagées, s'il y a lieu, de concertation préalable du public.

Pour un plan ou programme , l'acte prescrivant son élaboration constitue la déclaration d'intention, dès lors qu'il est publié sur un site internet. Il comprend, s'il y a lieu, les modalités envisagées de concertation préalable du public.

Il est prévu qu'une décision de cas par cas , imposant une étude d'impact pour un projet, ou une évaluation environnementale pour un plan ou programme, vaut déclaration d'intention dès lors qu'elle est publiée sur un site internet et comporte les modalités envisagées de concertation préalable du public.

Le maître d'ouvrage d'un projet doit transmettre la déclaration d'intention à l'autorité administrative compétente pour autoriser le projet, qui peut, si besoin, demander des éléments complémentaires dans un délai d'un mois.

L'article L. 121-19 définit les titulaires du droit d'initiative :

- un nombre de ressortissants majeurs de l'Union européenne résidant dans le périmètre de la déclaration d'intention au moins égal à 20 % de la population recensée des communes de ce périmètre, ou à 10 % de la population recensée dans le ou les départements, dans la ou les régions compris en tout ou partie dans ce périmètre ;

- un conseil régional, départemental ou municipal, ou l'organe délibérant d'un EPCI , dont le territoire est compris en tout ou partie dans le périmètre de la déclaration d'intention 35 ( * ) ;

- une association de protection de l'environnement agréée au niveau national, ou deux associations ou une fédération d'associations agréée(s) au niveau régional ou départemental, lorsque tout ou partie de la région ou du département est compris dans le périmètre de la déclaration d'intention.

Le droit d'initiative doit être exercé dans un délai de deux mois suivant la publication de la déclaration d'intention pour un projet, ou de l'acte prescrivant l'élaboration pour un plan ou programme.

Il est précisé qu'aucune concertation préalable organisée selon des modalités librement fixées ne peut être mise en oeuvre pendant ce délai. Seule une concertation avec garant peut être organisée, par le maître d'ouvrage.

Le représentant de l'État est chargé d' informer le maître d'ouvrage du projet ou la personne publique responsable de l'élaboration du plan ou programme, de la réception de cette demande. Il en apprécie la recevabilité , notamment au regard du territoire susceptible d'être affecté, compte tenu de ses principaux impacts environnementaux et de ses retombées économiques. Enfin, il décide de l'opportunité d'organiser une concertation préalable, selon les modalités prévues aux articles L. 121-16 et L. 121-16-1, et fixe, le cas échéant, la durée et l'échelle territoriale de cette participation.

Cette décision est motivée et rendue publique , dans un délai d'un mois à compter de la réception de la demande. L'absence de décision explicite dans ce délai vaut rejet.

Le droit d'initiative est ainsi soumis à validation par le préfet, la demande n'étant pas de droit lorsque les critères de représentativité sont respectés.

(4) Articles L. 121-20 et L. 121-21 : articulation avec les procédures d'autorisation ou d'approbation

L'article L. 121-20 fixe les conditions d'articulation entre la phase de concertation préalable et la procédure d'autorisation d'un projet ou d'approbation d'un plan ou programme.

Pour les projets faisant l'objet d'une déclaration d'intention , la demande d'autorisation n'est recevable que si la déclaration d'intention a été faite ; que les délais d'exercice du droit d'initiative, et le cas échéant, de réponse du représentant de l'État, sont expirés ; et que les modalités de concertation préalable éventuellement envisagées dans la déclaration d'intention ou, le cas échéant, définies aux articles L. 121-16 et L. 121-16-1 ont été respectées.

Pour les plans ou programmes , la demande d'approbation doit respecter les mêmes conditions, à l'exception de la déclaration d'intention, qui n'existe pas en tant que telle.

L'article L. 121-21 précise qu'aucune irrégularité au regard des dispositions relatives à la concertation préalable ne peut être invoquée lorsque la décision par laquelle le représentant de l'État n'a pas jugé opportun d'organiser une concertation après exercice du droit d'initiative, est devenue définitive.

c) Contentieux et application

L'article L. 121-22 précise que les illégalités pour vice de forme ou de procédure des décisions prises en application du chapitre I er doivent être invoquées par voie d'exception à l'encontre de la décision d'autorisation de projet dans un délai de quatre mois à compter de leur prise d'effet.

L'article L. 121-23 prévoit que les conditions d'application des dispositions du chapitre I er sont précisées par un décret en Conseil d'État.

3. Participation du public aux décisions ayant une incidence sur l'environnement - articles L. 123-1-A à L. 123-19-7 du code de l'environnement (article 3 de l'ordonnance)

L' article 3 de l'ordonnance modifie les dispositions du chapitre III du titre II du livre I er , relatives à la participation du public aux décisions ayant une incidence sur l'environnement. Contrairement aux dispositions du chapitre I er , modifié par l'article 2, l'article 3 porte sur la participation du public au stade des procédures d'autorisation des projets ou d'approbation des plans et programmes, essentiellement par la procédure de l' enquête publique .

SYNTHÈSE DE L'ARTICLE 3 DE L'ORDONNANCE

Parmi les modifications apportées par l'article 3 de l'ordonnance, on peut relever en particulier les points suivants.

1. L' enquête publique fait l'objet de plusieurs modifications, visant à moderniser cette procédure.

La dématérialisation de l'enquête publique est accrue : annonce de l'enquête publique, consultation en ligne du dossier, transmission d'observations et de propositions, publication du rapport et des conclusions du commissaire enquêteur.

Toutefois, l'affichage sur les lieux et les publications locales demeurent pour informer le public de la procédure. Par ailleurs, l'accessibilité de la voie électronique est assurée par la mise à disposition de postes informatiques . La consultation sur support papier demeure.

Une réunion de restitution pourra être organisée, lorsque les conclusions du commissaire enquêteur sont défavorables au projet, en présence du maître d'ouvrage.

Le recours à une enquête publique unique est facilité, lorsqu'un projet requiert l'organisation de plusieurs enquêtes publiques, ou lorsque les enquêtes organisées pour plusieurs projets peuvent être regroupées.

Enfin, la durée minimale d'une enquête est abaissée de 30 à 15 jours pour un projet, plan ou programme non soumis à évaluation environnementale.

2. Les dispositions relatives à la participation du public aux projets, plans et programmes soumis à évaluation environnementale mais exemptés d'enquête publique sont regroupées, avec une dématérialisation accrue , en remplacement de l'ancienne procédure de mise à disposition.

3. Les dispositions relatives à la participation du public hors procédure particulière , issues de la loi n° 2012-1460 du 27 décembre 2012 relative à la mise en oeuvre du principe de participation du public font l'objet d'ajustements essentiellement techniques.

Le 1° de l'article 3 modifie l'intitulé du chapitre III en cohérence avec son nouveau contenu.

Le 2° insère un article L. 123-1-A précisant le périmètre du chapitre III, qui porte sur la participation du public :

- aux projets soumis à évaluation environnementale, après le dépôt de la demande d'autorisation ;

- aux plans et programmes soumis à évaluation environnementale, avant la phase finale de leur adoption ou de leur approbation ;

- à d'autres décisions ayant une incidence sur l'environnement.

Il précise également les différentes formes que prend cette participation du public :

- une enquête publique , en application des articles L. 123-1 et suivants ;

- une participation du public par voie électronique , en application de l'article L. 123-19 ;

- une participation du public hors procédure particulière , en application des articles L. 123-19-1 et suivants.

a) Articles L. 123-1 à L. 123-18 (3° à 19° de l'article 3 de l'ordonnance) : participation du public pour les plans, programmes et projets soumis à enquête publique.

Le 3° modifie l'intitulé de la section 1 du chapitre III en cohérence avec son nouveau contenu.

Le 4° insère une sous-section 1, intitulée « Champ d'application et objet de l'enquête publique », composée des articles L. 123-1 à L. 123-2.

Le 5° procède à une harmonisation rédactionnelle à l'article L. 123-1.

Le 6° procède à des modifications rédactionnelles et à des coordinations à l'article L. 123-2.

Le 7° transforme en sous-section 2 la section 2, intitulée « Procédure et déroulement de l'enquête publique », composée des articles L. 123-3 à L. 123-18.

Le 8° modifie l'article L. 123-4 relatif à l'établissement dans chaque département d'une liste d'aptitude des commissaires-enquêteurs, chargés de conduire les enquêtes publiques.

Il permet au président du tribunal administratif de nommer commissaire-enquêteur le garant qui aurait dirigé en amont une concertation préalable, s'il est inscrit sur une liste d'aptitude. Il supprime par ailleurs la désignation systématique de suppléants au commissaire-enquêteur, en prévoyant désormais la désignation d'un remplaçant en cas d'empêchement du commissaire-enquêteur initial. Dans ce cas, le président du tribunal administratif ordonne la suspension de l'enquête publique et fixe sa date de reprise. Le public est informé de ces décisions.

Le 9° modifie l'article L. 123-6 relatif à la possibilité de mener une enquête publique unique lorsque la réalisation d'un projet, plan ou programme nécessite plusieurs enquêtes publiques, dont l'une environnementale au titre de l'article L. 123-2.

Cette possibilité étant subordonnée à l'accord des différentes autorités compétentes pour autoriser le projet sur celle chargée d'organiser l'enquête unique, un dispositif est ajouté en cas de désaccord entre ces autorités : à la demande du maître d'ouvrage, le représentant de l'État peut ouvrir et organiser l'enquête unique, dès lors qu'il est compétent pour prendre une des décisions d'autorisation ou d'approbation nécessaires.

La possibilité d'organiser une enquête publique unique est également étendue, lorsque plusieurs projets, plans ou programmes nécessitent des enquêtes pouvant être organisées simultanément et qu'une seule enquête contribuerait à améliorer l'information et la participation du public.

Enfin, la durée minimale de l'enquête unique est encadrée : elle ne peut être inférieure à la durée minimale de l'enquête publique la plus longue prévue par l'une des législations concernées.

Le 10° procède à une modification rédactionnelle et à une coordination à l'article L. 123-7.

Le 11° réécrit les articles L. 123-9 et L. 123-10 , respectivement relatifs à la durée de l'enquête publique et à l'information du public en amont de l'organisation de l'enquête.

À l'article L. 123-9 , si la durée minimale de l'enquête reste fixée à 30 jours pour les projets, plans et programmes soumis à évaluation environnementale, elle peut être abaissée à 15 jours lorsqu'ils ne sont pas soumis à évaluation environnementale. Il est par ailleurs précisé que la durée de l'enquête est fixée par l'autorité chargée de l'ouvrir et de l'organiser.

La possibilité donnée au commissaire-enquêteur ou au président de la commission d'enquête de prolonger la durée de l'enquête est encadrée : la prolongation ne peut excéder 15 jours , contre 30 jours antérieurement. Le public doit désormais être informé de cette décision, par voie dématérialisée et par voie d'affichage sur le ou les lieux concernés par l'enquête, et si nécessaire par voie de publication locale.

À l'article L. 123-10 , l'information du public par le commissaire-enquêteur avant l'ouverture puis durant l'enquête publique doit désormais se faire systématiquement par voie dématérialisée et par voie d'affichage sur le ou les lieux concernés par l'enquête, et, si cela est nécessaire compte tenu de l'importance du projet, plan ou programme, par voie de publication locale 36 ( * ) .

Le contenu de l'avis préalable à l'ouverture de l'enquête publique est complété, en cohérence avec la généralisation du recours à la voie électronique. Il doit désormais comporter : l'adresse du site internet sur lequel le dossier d'enquête peut être consulté ; le lieu ainsi que les horaires où le dossier de l'enquête peut être consulté sur support papier ; le point et les horaires d'accès où le dossier de l'enquête publique peut être consulté sur un poste informatique ; l'adresse à laquelle le public peut transmettre ses observations et propositions pendant le délai de l'enquête. S'il existe un registre dématérialisé, cet avis précise l'adresse du site internet à laquelle il est accessible.

Le recours systématique à la voie électronique est ainsi équilibré par l'obligation de mise à disposition d'un poste informatique pour consulter le dossier de l'enquête publique, et le maintien de la possibilité de consulter ce dossier sur support papier .

L'information sur l'existence d'un rapport d'incidences environnementales, d'une étude d'impact ou d'un document contenant les informations environnementales, et d'un avis de l'autorité environnementale 37 ( * ) doit désormais être complétée par l'adresse du site internet sur lequel ces documents peuvent être consultés.

Le 12° modifie une référence à l'article L. 123-11, par coordination avec la création en 2015 du code des relations entre le public et l'administration.

Le 13° réécrit l'article L. 123-12 , relatif au contenu du dossier d'enquête publique 38 ( * ) , en précisant les conditions de sa mise à disposition.

La nouvelle rédaction précise que le dossier est consultable pendant toute la durée de l'enquête sous plusieurs formes : en ligne, sur support papier disponible en un ou plusieurs lieux déterminés dès l'ouverture de l'enquête publique, et par un ou plusieurs postes informatiques dans un lieu ouvert au public.

Lorsque le projet, plan ou programme a fait l'objet d'un débat public, d'une concertation préalable ou de toute autre procédure prévue pour permettre au public de participer effectivement au processus de décision, le dossier doit comporter le bilan de cette procédure et la synthèse des observations et propositions formulées par le public. En l'absence de toute concertation préalable, le dossier doit en faire état.

Le 14° modifie l'article L. 123-13 , relatif au rôle du commissaire-enquêteur ou de la commission d'enquête.

Il ou elle doit ainsi permettre au public de faire parvenir ses observations et propositions systématiquement par voie électronique , ainsi que par toute autre voie fixée par l'arrêté d'ouverture de l'enquête 39 ( * ) . Les observations et propositions du public doivent par ailleurs être accessibles sur un site internet désigné par voie réglementaire.

Le 15° procède à des modifications rédactionnelles et à des coordinations à l'article L. 123-14 40 ( * ) , relatif à la procédure d'actualisation du projet et/ou du dossier d'enquête au cours de l'enquête publique. Il permet également une suspension de l'enquête publique lorsque le maître d'ouvrage souhaite apporter des modifications substantielles à l'étude d'impact ou au rapport sur les incidences environnementales.

Le 16° modifie l'article L. 123-15 , relatif au rapport et aux conclusions motivées du commissaire-enquêteur, en prévoyant que ceux-ci doivent être rendus publics par voie dématérialisée sur le site internet de l'enquête publique et en support papier.

Il permet également à l'autorité compétente d' organiser une réunion publique afin de répondre aux éventuelles réserves, recommandations ou conclusions défavorables du commissaire-enquêteur, en présence du maître d'ouvrage, dans un délai de deux mois suivant la clôture de l'enquête. Le commissaire-enquêteur est informé de l'organisation de cette réunion.

Le 17° modifie l'article L. 123-16 , relatif aux décisions prises après des conclusions défavorables du commissaire-enquêteur et créant un régime particulier de référé-suspension, en prévoyant que le juge des référés fait droit à toute demande de suspension d'une décision prise en l'absence de participation du public par voie électronique pour les documents visés à l'article L. 123-19.

Le 18° modifie l'article L. 123-18 , relatif à la prise en charge des coûts liés à l'enquête, en vue de ne plus exiger systématiquement le versement d'une provision par le responsable du projet mais de le subordonner à une décision du président du tribunal administratif, sur demande motivée du commissaire-enquêteur.

Le 19° supprime l'article L. 123-19, renvoyant à un décret en Conseil d'État et remplacé par l'article L. 123-19-8, inséré par le 26°.

b) Article L. 123-19 (20° de l'article 3 de l'ordonnance) : participation du public pour les plans, programmes et projets non soumis à enquête publique.

Le 20° insère une section 2 intitulée « Participation du public pour les plans, programmes et projets non soumis à enquête publique », composée d'un article L. 123-19 unique. Cette procédure dématérialisée se substitue à celle de mise à disposition du public , antérieurement prévue aux articles L. 122-1-1 et L. 122-8 41 ( * ) .

Le I de l'article L. 123-19 prévoit que cette participation du public s'effectue par voie électronique , et s'applique :

- aux projets faisant l'objet d'une évaluation environnementale mais exemptés d'une enquête publique en application de l'article L. 123-2 42 ( * ) ;

- aux plans et programmes faisant l'objet d'une évaluation environnementale mais pour lesquels une enquête publique n'est pas requise en application des dispositions particulières qui les régissent.

Relevant a priori de cette seconde catégorie, il est précisé que les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), les plans de gestion des risques d'inondation (PGRI) et les plans d'action pour le milieu marin (PAMM) restent soumis à des dispositions spécifiques de participation du public.

Cette participation du public est ouverte et organisée par l'autorité compétente pour autoriser le projet ou pour approuver le plan ou programme.

Le II prévoit que le dossier soumis à cette procédure comprend les mêmes éléments que ceux exigés dans le cas d'une enquête publique , en application de l'article L. 123-12. Ce dossier est mis à disposition du public par voie électronique et, sur demande présentée dans des conditions fixées par décret, sur support papier dans les préfectures et sous-préfectures concernant les décisions des autorités de l'État, y compris des AAI et des établissements publics de l'État, ou au siège de l'autorité, pour les décisions des autres autorités.

Lorsque le volume ou les caractéristiques du projet de décision ou du dossier de demande ne permettent pas sa mise à disposition par voie électronique, la note de présentation doit préciser l'objet de la procédure de participation, et les lieux et horaires où le document peut être consulté dans son intégralité.

Tout comme pour une enquête publique, le public est informé quinze jours avant l'ouverture de la participation électronique, par un avis mis en ligne ainsi que par un affichage en mairie ou sur les lieux concernés.

Le contenu de cet avis est proche de celui prévu pour une enquête publique, en application de l'article L. 123-10. Il doit par ailleurs comporter les coordonnées des autorités auprès desquelles peuvent être obtenus des renseignements pertinents , et celles auxquelles des observations ou questions peuvent être adressées.

Les observations et propositions du public, déposées par voie électronique, doivent être transmises à l'autorité concernée dans un délai qui ne peut être inférieure à 30 jours à compter de la date d'ouverture de la participation électronique du public.

Le III précise que sont applicables à la procédure de participation par voie électronique les dispositions suivantes :

- les trois derniers alinéas du II de l'article L. 123-19-1, relatifs aux suites données à la participation du public par l'autorité administrative compétente, notamment le délai minimal de quatre jours entre la clôture de cette participation et la décision définitive, la publication par voie électronique d'une synthèse des observations et propositions du public avec l'indication de celles dont il a été tenu compte et la transmission de cette synthèse aux organismes ayant à être consultés sur cette décision, lorsque cette consultation intervient après la participation du public ;

- les articles L. 123-19-3 à L. 123-19-5, relatifs aux limitations pouvant être apportées à la participation du public , en raison d'une situation d'urgence ou pour protéger les intérêts mentionnés au I de l'article L. 124-4.

c) Articles L. 123-19-1 à L. 123-19-7 (21° à 25° de l'article 3 de l'ordonnance) : participation du public hors procédures particulières.

Le 21° insère une section 3 intitulée « Participation du public hors procédures particulières », composée des articles L. 123-19-1 à L. 123-19-7, anciennement L. 120-1 à L. 120-3 43 ( * ) . Cette procédure correspond aux décisions précédemment soumises à mise à disposition, destinée à assurer le respect du principe de participation du public prévue par la Charte de l'environnement lorsqu'aucune procédure spécifique n'est applicable.

Le 22° modifie l'article L. 123-19-1 , relatif à la participation du public hors procédure particulière, pour les décisions administratives hors décisions individuelles .

Il prévoit ainsi que cette participation n'est pas applicable aux décisions qui modifient, prorogent, retirent ou abrogent des décisions ayant une incidence sur l'environnement et soumises à une procédure particulière. Il prévoit également que ne sont pas regardées comme ayant une incidence sur l'environnement les décisions qui ont sur ce dernier un effet indirect ou non significatif 44 ( * ) .

Il précise que l'autorité administrative doit publier les observations et propositions déposées par voie électronique, en complément de sa décision.

Il étend l'allègement des conditions de participation du public bénéficiant aux autorités des communes de moins de 10 000 habitants aux décisions des autorités de la collectivité de Saint-Martin et de celles de la collectivité territoriale de Saint-Pierre et-Miquelon.

Il précise enfin, lorsque la participation du public est adaptée pour les autorités des communes de moins de 2 000 habitants, qu'en l'absence d'observations, le délai entre la clôture de la consultation et la décision ne peut être inférieur à quatre jours.

Le 23° procède à des modifications rédactionnelles et à des coordinations à l'article L. 123-19-2 , relatif à la participation du public hors procédure particulière, pour les décisions administratives individuelles .

De la même façon qu'à l'article L. 123-19-1, l'adaptation des conditions de participation du public bénéficiant aux autorités des communes de moins de 10 000 habitants est étendue aux décisions des autorités de la collectivité de Saint-Martin et de celles de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Le 24° procède à des coordinations aux articles L. 123-19-3 à L. 123-19-6.

Le 25° procède à une coordination à l'article L. 123-19-7.

d) Article L. 123-19-8 (26° de l'article 3 de l'ordonnance) : application.

Le 26° insère une section 4 intitulée « Dispositions finales », composée d'un article L. 123-19-8 unique, qui prévoit un décret en Conseil d'État en vue de préciser les conditions d'application du chapitre III.

4. Participation du public dans la gestion de l'eau (articles 4, 5, 6 et 7)
a) Participation du public à la définition de la liste des cours d'eau le long desquels s'applique l'obligation de maintien d'une couverture végétale permanente (1° de l'article 4)

L'article L. 211-14 du code de l'environnement prévoit une obligation pour les exploitants ou, à défaut, les occupants ou propriétaires de parcelles riveraines de certains cours d'eau, sections de cours d'eau ou plans d'eau, de mettre en place et de maintenir une couverture végétale permanente composée d'espèces adaptées à l'écosystème naturel environnant sur le sol, d'une largeur d'au moins 5 mètres à partir de la rive.

Le II de cet article prévoit que la liste des cours d'eau, sections de cours d'eau et plans d'eau auxquels s'applique cette obligation est arrêtée par l'autorité administrative . Au sein de ce II, le 1° de l'article 4 de l'ordonnance a supprimé la procédure de consultation du public qui était prévue en amont de la fixation de cette liste, dans la mesure où elle ne fixait ni les conditions ni les limites de la participation du public. Selon les informations communiquées par le ministère, ce sont désormais les procédures de participation du public prévues par le livre I du code de l'environnement (et notamment la procédure dite « supplétive » de participation du public prévue à l'article L. 123-19-1) qui s'appliqueront.

b) Participation du public à l'élaboration des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) (2° de l'article 4)

Le de l'article 4 de l'ordonnance réécrit le II de l'article L. 212-2 du code de l'environnement , relatif aux schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux , les SDAGE, élaborés et mis à jour par les comités de bassin, et plus spécifiquement à l'organisation par ces derniers de la participation du public à l'élaboration de ce schéma.

LES SDAGE, DOCUMENTS DE PLANIFICATION INSTRUMENTS DE LA MISE EN oeUVRE DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE L'EAU

La directive européenne 2000/60/CE du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, dite directive cadre sur l'eau, a introduit le principe de continuité écologique des cours d'eau . Elle donne la priorité à la protection de l'environnement et à une utilisation durable de l'eau, en demandant de veiller à la non dégradation de la qualité des eaux.

L'objectif était d'atteindre en 2015 un bon état général tant pour les eaux souterraines que pour les eaux superficielles, y compris les eaux estuariennes et côtières.

Les objectifs de la directive cadre sur l'eau et le principe de continuité écologique des cours d'eau ont été transposés en droit français par la loi n° 2004-338 du 21 avril 2004 portant transposition de la directive cadre et par la loi sur l'eau du 30 décembre 2006 .

Chacun des 12 bassins hydrographiques français a dû élaborer un document de planification permettant d'atteindre les objectifs attendus en matière de « bon état des eaux » : les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), régis par les dispositions de l'article L. 212-1 et suivants du code de l'environnement.

Applicable pour six ans, chaque SDAGE est complété par un programme de mesures (PDM appelé aussi plan d'actions). La troisième génération de SDAGE approuvés en 2015 est entrée en vigueur pour la période 2016-2021 . Documents de planification pour l'eau et les milieux aquatiques élaborés à l'échelle de chacun des bassins hydrographiques, ils fixent pour 6 ans les grandes priorités de gestion équilibrée de la ressource en eau.

Cette réécriture apporte un certain nombre de modifications à la procédure de participation du public à l'élaboration du SDAGE organisée par le comité de bassin :

- le nombre de documents mis à la disposition du public est plus important : alors qu'auparavant, le comité de bassin ne mettait à sa disposition que le projet de schéma, il doit désormais également présenter l'évaluation environnementale menée pour son élaboration (un an au moins avant la date prévue de son entrée en vigueur), ainsi qu'une synthèse provisoire des questions importantes qui se posent dans le bassin en matière de gestion de l'eau (deux ans au moins avant la date prévue d'entrée en vigueur du schéma) et le calendrier et le programme de travail indiquant les modalités d'élaboration ou de mise à jour du schéma (trois ans au moins avant la date prévue) ;

- la dématérialisation de la procédure , qui était auparavant une simple faculté, devient la règle : néanmoins, un exemplaire du dossier demeure consultable sur un support papier dans un lieu déterminé à compter de l'ouverture de la mise à disposition et un poste informatique est gratuitement mis à disposition du public pour consulter la version électronique ;

- le dossier est toujours mis à la disposition du public pendant une durée minimale de 6 mois ; cette procédure peut également toujours conduire le comité de bassin à modifier le projet de schéma pour tenir compte des avis et observations formulées ; en revanche, il est désormais tenu de publier, à l'issue des six mois et au plus tard à la date d'adoption du schéma, une synthèse des avis et observations recueillis et la manière dont il en a tenu compte , afin d'assurer un meilleur suivi de la participation du public ;

- enfin, la nouvelle version de l'article issue de l'ordonnance supprime la mention d'un certain nombre de consultations : celles du Comité national de l'eau, du Conseil supérieur de l'énergie, des conseils régionaux, des conseils départementaux, des établissements publics territoriaux de bassin, des chambres consulaires, des organismes de gestion des parcs naturels régionaux et des établissements publics des parcs nationaux concernés 45 ( * ) .

En réalité, l'article 1 er du projet de décret relatif aux schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux et schémas d'aménagement et de gestion des eaux modifiant le code de l'environnement et le code général des collectivités territoriales (qui a été mis à la disposition du public par voie électronique en janvier 2017) reprend cette obligation pour le comité de bassin de soumettre tous les documents prévus par l'article L. 212-2 tel que modifié par l'ordonnance à l'avis de toutes ces personnes publiques (sauf le Conseil supérieur de l'énergie) auxquelles sont ajoutés les conseils maritimes de façade, les commissions locales de l'eau et les conseils économiques, sociaux et environnementaux concernés.

Votre rapporteur souligne qu'à ce jour, le décret n'a toujours pas été publié mais que, selon les informations qui lui ont été transmises par le Gouvernement, le projet a été transmis au Conseil d'État à la fin de la dernière mandature, et est actuellement dans l'attente d'être examiné par ce dernier. La mise à jour des SDAGE étant réalisée tous les six ans, et la dernière ayant été réalisée pour le cycle 2016-2021, la prochaine mise à jour aura donc lieu dans quatre ans. En conséquence, le projet de décret en Conseil d'État prévoyant ces consultations devrait avoir été adopté d'ici cette échéance, afin qu'il n'y ait pas de vide juridique.

c) Participation du public à l'élaboration des schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) (3° à 6° de l'article 4)

Les à de l'article 4 de l'ordonnance modifient les règles relatives à l'élaboration ou à la révision des schémas d'aménagement et de gestion des eaux , les SAGE, notamment en matière de participation du public.

Les SAGE sont des outils de planification créés par la loi sur l'eau de 1992 qui ont pour but de permettre une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau. Ils sont élaborés, modifiés, révisés et suivis par des commissions locales de l'eau (créées par le préfet et regroupant les acteurs locaux) à l'échelle du sous-bassin. Leur mise en oeuvre est assurée par les établissements publics territoriaux de bassin.

Le de l'article 4 modifie l'article L. 212-4 du code de l'environnement afin de prévoir que les commissions locales de l'eau créées par le préfet sont non seulement en charge de l'élaboration et de la révision des SAGE, mais également de leur modification .

Le supprime la mention de la soumission pour avis du projet de SAGE aux conseils départementaux, conseils régionaux, chambres consulaires, communes et leurs groupements compétents, et éventuellement à l'établissement public territorial de bassin et au comité de bassin intéressés. L'ancienne version de l'article L. 212-6 prévoyait en outre que ces avis étaient réputés favorables s'ils n'étaient pas rendus dans un délai de 4 mois.

En effet, le projet de décret relatif aux schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux et schémas d'aménagement et de gestion des eaux précédemment cité prévoit deux cas de figure à son article 10 qui crée un nouvel article R. 212-39 du code de l'environnement :

- l'ensemble des consultations prévues par l'ancien article L. 212-6 sont reprises pour l'élaboration et la révision du SAGE , en ajoutant celles des conseils maritimes de façade ainsi que des établissements publics d'aménagement et de gestion de l'eau s'ils existent ; ces avis sont réputés favorables si non rendus dans un délai de 4 mois, à l'exception de celui du comité de bassin ;

- la consultation du seul comité de bassin pour une modification du SAGE , dont l'avis est réputé favorable s'il n'est pas rendu dans un délai de 4 mois.

Il à noter que ce décret n'est toujours pas paru et qu'à ce stade donc, aucune de ces consultations n'est prévue par le droit en vigueur.

Le supprime aussi la mention « éventuellement modifié pour tenir compte des avis recueillis » pour la soumission du schéma à enquête publique, dans la mesure où le processus de consultation figure désormais dans la partie réglementaire du code.

Le modifie l'article L. 212-7, qui prévoit que le SAGE peut être modifié par le préfet après avis ou sur proposition de la commission locale de l'eau. Alors qu'il était auparavant précisé que cette modification ne devait pas porter atteinte aux objectifs du schéma, cette procédure de modification est désormais « réservée aux cas de mise en compatibilité à un document de rang supérieur, à la correction d'erreurs matérielles, ou à l'ajustement des documents du schéma qui n'entraîne pas de conséquences pour les tiers et ne remet pas en cause son économie générale » .

En outre, tout projet de modification du SAGE de cette nature devra être soumis à une procédure de participation du public par voie électronique, comme prévu à l'article L. 123-19 et l'arrêté préfectoral d'approbation du projet de modification doit être publié.

Le réécrit l'article L. 212-9 relatif à la révision des SAGE . Désormais, le SAGE peut être révisé par le préfet après avis ou sur proposition de la commission locale de l'eau et le projet de révision est soumis à la procédure de participation du public par voie électronique définie à l'article L. 123-19 , au lieu de la procédure d'enquête publique prévue par l'article L. 212-6.

Cette dernière modification a vocation, d'après les éléments transmis à votre rapporteur par les services du ministère en charge de l'environnement, à simplifier la procédure de participation du public applicable à la révision du SAGE , en substituant à la procédure d'enquête publique celle de la participation du public dématérialisée prévue par l'article L. 123-19 qui apporte des garanties suffisantes (le dossier soumis à la consultation est le même que pour l'enquête publique et les délais de cette consultation sont identiques). L'objectif de l'ordonnance était d'introduire une « gradation » dans les modalités de participation du public, afin que ces modalités soient les mieux adaptées possibles aux enjeux des procédures auxquelles elles s'appliquent.

d) Participation du public à l'élaboration du SDAGE et des SAGE de Corse (article 5)

L'article 5 de l'ordonnance modifie l'article L. 4424-36 du code général des collectivités territoriales , qui prévoit les règles spécifiques de la gestion de l'eau dans la collectivité territoriale de Corse .

La collectivité territoriale de Corse, qui constitue un bassin hydrographique, dispose en effet de la compétence de mise en oeuvre d'une gestion équilibrée des ressources en eau.

(1) Le SDAGE de Corse

Le SDAGE y est élaboré à son initiative ou à celle du représentant de l'État par le comité de bassin de Corse, qui associe le représentant de l'État, les conseils départementaux, le conseil économique, social et culturel de Corse et les chambres consulaires « qui lui communiquent toutes informations utiles relevant de leur compétence » .

Le projet de schéma arrêté par le comité de bassin de Corse est soumis pour avis, au plus tard un an avant le délai fixé par la loi pour son approbation ou sa mise à jour, au représentant de l'État, aux conseils départementaux, au conseil économique, social et culturel de Corse et aux chambres consulaires. Dans un délai de 4 mois, l'absence d'avis émis vaut avis favorable et le schéma peut être adopté par le comité de bassin et approuvé par l'Assemblée de Corse. Cette disposition n'est pas supprimée, contrairement au cas des SDAGE du régime général ; en revanche, la possibilité pour le préfet, lorsqu'il se substitue au comité de bassin en cas d'absence de transmission du projet de schéma, de le leur soumettre pour avis est supprimée (3° de l'article 5 de l'ordonnance). Elle figurera en revanche dans le projet de décret cité plus haut.

Le de l'article 5 de l'ordonnance ajoute une disposition prévoyant que le comité de bassin de Corse organise la participation du public à l'élaboration du SDAGE , conformément à la procédure prévue au II de l'article L. 212-2 du code de l'environnement c'est-à-dire celle prévue pour le régime de droit commun des SDAGE (documents mis à disposition du public, dématérialisation de la procédure et synthèse des avis recueillis et de la manière dont ils ont été pris en compte).

Le du même article supprime la précision du lieu de mise à disposition du public du schéma adopté : l'article prévoyait initialement qu'il était mis à disposition au siège de l'Assemblée de Corse, dans les préfectures et les sous-préfectures.

(2) Les SAGE de Corse

Le III de l'article L. 4424-36 du code général des collectivités territoriales prévoit qu'un schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) peut être établi dans chaque sous-bassin ou groupement de sous-bassins présentant des caractères de cohérence hydrographique, écologique et socio-économique.

Ce projet de schéma, élaboré par une commission locale de l'eau, est soumis à enquête publique, est éventuellement modifié pour tenir compte des observations, puis approuvé par l'Assemblée de Corse et tenu à la disposition du public.

Le schéma peut ensuite être modifié par la collectivité territoriale de Corse après avis ou sur proposition de la commission locale de l'eau ou du représentant de l'État, seulement si cette modification ne porte pas atteinte aux objectifs de ce schéma.

Le de l'article 5 de l'ordonnance complète l'article par des dispositions relatives à la modification ou à la révision de ce schéma .

Dans le premier cas, le projet de SAGE peut être modifié par la collectivité territoriale de Corse après avis ou sur proposition de la commission locale de l'eau ou du représentant de l'État, seulement si cette modification ne porte pas atteinte aux objectifs de ce schéma. La procédure de modification du SAGE de Corse entraîne alors une procédure de participation du public , comme pour les SAGE de droit commun, avant l'approbation par l'Assemblée de Corse.

Dans le second cas, l'ordonnance prévoit que le SAGE peut également être révisé, selon une procédure identique à la révision des SAGE de droit commun, avec une procédure de participation du public prévue par l'article L. 123-19 du code de l'environnement.

e) Dispositions relatives aux plans d'action pour le milieu marin (7° à 10° de l'article 4)

Les et de l'article 4 de l'ordonnance modifient l'article L. 219-9 du code de l'environnement , relatif aux plans d'action pour le milieu marin afin de déplacer les règles relatives à la mise à jour des documents qui les constituent au II de l'article L. 219-10.

Le réécrit l'article L. 219-11 , relatif à l'information du public sur les plans d'action pour le milieu marin.

Avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance, l'article prévoyait simplement que des résumés des éléments du plan ainsi que ses mises à jour étaient mises à disposition du public par voie électronique avant leur élaboration.

L'ordonnance précise que ces résumés doivent :

- être accompagnés de l'indication des modalités d'accès à l'intégralité des projets d'éléments ;

- être mis à disposition du public cinq mois au moins avant la mise en oeuvre ou l'achèvement de chacun de ces éléments, par voie électronique et pour une durée de trois mois en vue de recueillir ses observations.

En outre, les modalités de ces consultations sont portées à la connaissance du public quinze jours au moins avant le début de la mise à disposition.

Enfin, l'autorité administrative établit une synthèse des observations du public ainsi que les motifs de la décision, qui sont rendus publics par voie électronique au plus tard à la date de publication de la décision approuvant chacun des éléments du plan pour une durée minimale de trois mois.

Le 10° supprime le dernier alinéa de l'article L. 219-18, qui prévoyait que les conditions de la mise à disposition du public étaient fixées par décret en Conseil d'État.

f) Participation du public lors de l'octroi de concessions d'utilisation du domaine public maritime (article 6)

L'article 6 de l'ordonnance réécrit l'article L. 2124-3 du code général de la propriété des personnes publiques. Il est désormais prévu que toutes les concessions d'utilisation du domaine public maritime en dehors des ports font l'objet, avant leur approbation, d'une enquête publique .

Toutefois, cette disposition ne s'applique pas aux concessions de plage, aux autorisations d'exploitation de cultures marines ni aux ouvrages et installations soumis à l'octroi d'un titre minier, pour lesquels la participation du public est d'ores et déjà prévue par des dispositions en vigueur.

g) Autres coordinations

Le 11° de l'article 4 supprime la mention de la mise à disposition du public des orientations nationales pour la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques à l'article L. 371-2 du code de l'environnement.

Le 12° vise l'article L. 414-9 du code de l'environnement, afin de supprimer la mention de la consultation du public pour l'élaboration des plans nationaux d'action de conservation des espèces protégées, dans la mesure où cette procédure est prévue en vertu de l'article L. 123-19-1. Cet article a été transféré par la loi du 8 août 2016 à l'article L. 411-3 du code de l'environnement.

Le 13° prévoit que l'autorisation des installations nucléaires de base destinées à fonctionner pendant une durée inférieure à six mois fait l'objet d'une procédure de consultation du public prévue à l'article L. 123-9-2, avec une dérogation sur la durée de consultation, qui est fixée à un mois. Le dossier accompagné des résultats de la consultation du public est ensuite soumis à l'Autorité de sûreté nucléaire.

Le 14° complète l'article L. 566-11 du code de l'environnement afin de prévoir une procédure dématérialisée de participation du public à l'élaboration et la mise à jour du plan de gestion des risques d'inondation avec mise à disposition d'un certain nombre de documents pendant au moins six mois afin de recueillir ses observations. L'autorité administrative peut ensuite modifier le projet de plan pour tenir compte des observations et avis formulés et publie une synthèse de ce travail.

Le 15° modifie l'article L. 640-1 du code de l'environnement pour étendre aux Terres australes et antarctiques françaises l'application des articles L. 123-19-1 à L. 123-19-7 créés par l'article 2 de l'ordonnance.

L'article 7 de l'ordonnance procède à une coordination rédactionnelle à l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme.

5. Dispositions diverses et finales (articles 8 et 9 de l'ordonnance)

L' article 8 de l'ordonnance fixe les conditions d'entrée en vigueur des dispositions de l'ordonnance. Il renvoie la fixation de la date d'entrée en vigueur à un décret, en prévoyant qu'il s'agit au plus tard du 1 er janvier 2017 . Il prévoit toutefois que ces dispositions ne s'appliquent qu' aux décisions pour lesquelles une participation du public a été engagée postérieurement à cette date.

Cette entrée en vigueur a été précisée tardivement, par le décret n° 2017-626 du 25 avril 2017 relatif aux procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement et modifiant diverses dispositions relatives à l'évaluation environnementale de certains projets, plans et programmes.

L' article 9 de l'ordonnance confie l'application des dispositions de l'ordonnance, chacun en ce qui le concerne, au Premier ministre et au ministre de l'environnement.

D. LE TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

1. En commission

Sur les 12 amendements adoptés en commission, à l'initiative du rapporteur et des membres du groupe LREM, 9 modifient des dispositions de l'ordonnance n° 2016-1060 , dont un amendement rédactionnel.

Ces amendements procèdent aux modifications suivantes :

- le garant est chargé de veiller à la diffusion des expertises présentées par les parties prenantes (art. L. 121-1-1) ;

- le seuil de dépenses publiques au-delà duquel le droit d'initiative peut être exercé pour un projet a été plafonné à 5 millions d'euros 46 ( * ) (art. L. 121-17-1), avec un avis de sagesse du Gouvernement ;

- les dispositions relatives aux objectifs des débats publics et concertations préalables relevant de la CNDP ont été étendues à l'ensemble des concertations préalables (art. L. 121-15-1) ;

- il a été précisé que la responsabilité d'une demande de désignation d'un garant auprès de la CNDP incombe à la personne publique responsable ou au maître d'ouvrage (art. L. 121-16-1) ;

- le refus par un garant de transmettre à la CNDP une demande d'étude technique ou d'expertise complémentaire formulée lors de la concertation doit être motivé (art. L. 121-16-1), avec un avis de sagesse du Gouvernement ;

- le délai permettant au droit d'initiative d'être exercé a été allongé de 2 à 4 mois lorsqu'il s'agit de citoyens (art. L. 121-19), avec un avis de sagesse du Gouvernement ;

- le délai pendant lequel les vices de forme ou de procédure en matière de concertation peuvent être invoqués par voie d'exception à l'encontre d'une décision d'autorisation a été allongé de 4 à 6 mois (art. L. 121-22), avec un avis de sagesse du Gouvernement ;

- l'obligation de mise en ligne des observations et propositions du public a été limitée aux observations et propositions transmises par voie électronique (art. L. 123-13).

2. En séance publique

Sur les 26 amendements adoptés en séance publique, à l'initiative du rapporteur, 18 modifient des dispositions de l'ordonnance n° 2016-1060 .

Outre des modifications rédactionnelles, des précisions et des coordinations, les modifications de fond sont les suivantes :

- il est rappelé au niveau législatif que les dépenses relatives à l'organisation matérielle d'un débat public incombent au maître d'ouvrage ou à la personne publique responsable (art. L. 121-6) ;

- la possibilité pour la CNDP d'organiser un débat public ou une concertation préalable pour un projet soumis à une concertation obligatoire au titre de l'article L. 102-3 du code de l'urbanisme , alors dispensé de cette dernière, est rétablie (art. L. 121-9 et L. 121-15-1) ;

- il est précisé qu'un débat public national porte sur « l'élaboration » d'un projet de réforme, en vue de renforcer le caractère préparatoire de la saisine de la CNDP (art. L. 121-10) ;

- l'entrée en vigueur du changement du seuil de dépenses publiques déclenchant l'obligation de déclaration d'intention et permettant l'exercice du droit d'initiative a été reportée à deux mois après la promulgation de la présente loi de ratification.

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté en outre trois amendements du rapporteur portant articles additionnels :

- le nouvel article 3 procède à des coordinations aux articles L. 341-1-2 et L. 341-13 du code de l'environnement ;

- le nouvel article 4 apporte une modification rédactionnelle à l'article L. 2124-3 du code général de la propriété des personnes publiques, déjà modifié par l'article 6 de l'ordonnance ;

- le nouvel article 5 modifie l'article L. 4424-36 du code général des collectivités territoriales, relatif à la gestion de l'eau par la collectivité territoriale de Corse, déjà modifié par l'article 4 de l'ordonnance, afin de rappeler plus explicitement la compétence de la collectivité territoriale de Corse en matière de révision d'un schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE).

E. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur considère que le champ de l'habilitation accordée par le Parlement au 3° du I de l'article 106 de la loi du 6 août 2015 a été respecté par l'ordonnance n° 2016-1060 . Les modifications qu'elle apporte au code de l'environnement répondent à l'ensemble des sous-objectifs fixés par la loi de 2015, sans dépasser ce périmètre 47 ( * ) .

Il se félicite à cet égard des précisions qui ont été apportées à cette habilitation au cours de l'examen de la loi d'août 2015, et qui ont permis de préciser et de clarifier l'objet de la présente ordonnance, comme le souhaitait le Sénat.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission a donc adopté sans modification l'article 1 er du projet de loi , ratifiant les ordonnances n° 2016-1058 et 2016-1060.

Lors des travaux préparatoires, votre rapporteur a par ailleurs constaté que l'ordonnance est le fruit d'une concertation préalable substantielle, qui a permis d'atteindre des points d'équilibre que les différentes parties prenantes ne remettent pas en cause. Certaines modifications apportées à l'Assemblée nationale infléchissent ce consensus.

Votre commission a adopté plusieurs propositions d'amendements de votre rapporteur, visant à préserver ces équilibres.

L'amendement COM-9 a été adopté afin de supprimer la fixation dans la loi d'un plafonnement du seuil de dépenses publiques à partir duquel un projet est soumis à déclaration d'intention et à droit d'initiative a été supprimée, afin de ne pas empiéter sur le domaine réglementaire et de ne pas compromettre des adaptations futures de ce nouvel outil. L'amendement COM-15 d'Alain Richard, visant le même objectif, a été pleinement satisfait par celui de votre rapporteur.

L'amendement COM-11 a été adopté afin de généraliser à 4 mois le délai durant lequel le droit d'initiative peut être exercé après la déclaration d'intention, à des fins de cohérence et d'harmonisation.

L'amendement COM-12 a été adopté afin de ramener à 4 mois le délai durant lequel les vices de forme ou de procédure au titre d'une concertation peuvent être invoqués par voie d'exception lors d'un recours, afin de ne pas créer des risques contentieux supplémentaires.

À l'initiative de votre rapporteur, votre commission a également adopté plusieurs amendements rédactionnels, de précision ou de coordination ( COM-5, COM-6, COM-7, COM-8, COM-10 et COM-13 ).

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 5 octobre 2017, la commission a examiné le rapport et le texte sur le projet de loi ratifiant les ordonnances n° 2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes et n° 2016-1060 du 3 août 2016 portant réforme des procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement

M. Hervé Maurey , président . - L'ordre du jour appelle l'examen du rapport et l'établissement du texte de la commission sur le projet de loi n° 666 (2016-2017), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant les ordonnances n° 2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes et n° 2016-1060 du 3 août 2016 portant réforme des procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement.

Il s'agit là d'un texte très complexe, dont le rapporteur a été désigné avant l'été, pour pouvoir faire des auditions. Nous allons, après une discussion générale sur le rapport que va nous présenter Alain Fouché, établir le texte de la commission, qui sera examiné en séance mardi prochain. Nous nous réunirons auparavant, à 14 heures, pour l'examen des amendements de séance.

EXAMEN DU RAPPORT

M. Alain Fouché , rapporteur . - Je suis très honoré d'inaugurer ce matin les travaux de notre commission en vous présentant mon rapport sur le premier projet de loi dont notre commission renouvelée est saisie. Il s'agit du projet de loi de ratification de deux ordonnances, toutes deux publiées il y a un peu plus d'un an, le 3 août 2016.

La première, l'ordonnance n°2016-1058, modifie les règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes et la seconde, l'ordonnance n°2016-1060, réforme les procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement.

Certains d'entre vous s'en souviennent peut-être, c'est l'article 106 de la loi « Macron » de 2015 qui avait habilité le Gouvernement à prendre ces ordonnances.

Il s'agit là de deux ordonnances riches et techniques qui visent, d'une part, pour l'ordonnance sur l'évaluation environnementale, à achever de transposer dans notre droit celui de l'Union européenne, en particulier les directives de 2011 et de 2014, qu'il fallait transposer avant le 16 mai 2017, d'autre part, à simplifier et à clarifier le droit applicable dans ces deux domaines, tout en conservant un niveau élevé d'exigence environnementale.

Malgré leur longueur, ces deux textes techniques n'apportent pas de complexité supplémentaire, au contraire. Ils s'inscrivent dans le prolongement du chantier de modernisation du droit de l'environnement, engagé depuis plusieurs années déjà.

Ces deux textes ont fait l'objet de travaux préliminaires importants, associant l'ensemble des parties prenantes, que ce soit dans le cadre du groupe de travail présidé par Jacques Vernier pour l'évaluation environnementale, ou de la commission spécialisée du Conseil national de la transition écologique, présidée par notre collègue Alain Richard, pour la participation du public.

C'est pourquoi l'ensemble des acteurs que j'ai pu entendre en audition nous ont bien précisé qu'ils attendaient désormais une ratification rapide de ces deux ordonnances, afin de stabiliser le régime juridique applicable. J'ajoute enfin que ces ordonnances ont fait l'objet de deux décrets d'application, publiés le 11 août 2016 et le 25 avril 2017.

J'en viens maintenant au contenu des ordonnances. La première réforme le droit de l'évaluation environnementale. À titre de rappel, l'évaluation environnementale implique de soumettre tout projet susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement à une évaluation de ces incidences, avant de l'autoriser. Les premiers jalons de ce régime ont été fixés en France par deux lois de 1976 sur la protection de la nature et sur les installations classées pour la protection de l'environnement, puis ont évolué avec le Grenelle de l'environnement en 2009-2010, afin de s'adapter aux exigences européennes. Le Grenelle a notamment fixé une liste de projets et de plans et programmes soumis à évaluation environnementale systématique, c'est-à-dire obligatoire, et une liste de projets soumis à ce qu'on appelle un examen « au cas par cas », impliquant que l'autorité environnementale examine, pour des projets remplissant certaines conditions de seuils et de critères, la nécessité ou non d'une évaluation environnementale.

Par souci de clarté, je vais vous énumérer les principaux apports de cette ordonnance sur le régime de l'évaluation environnementale.

En premier lieu, l'évaluation environnementale est définie. Il s'agit, sur le modèle de la directive européenne d'un processus comprenant la réalisation d'une étude d'impact par le maître d'ouvrage ; son examen par l'autorité compétente - bien souvent le préfet de région - pour prendre la décision après consultation de l'autorité environnementale, des collectivités territoriales et du public ; les mesures d'évitement, de réduction et de compensation proposées par le maître d'ouvrage ; enfin la décision d'autorisation.

Deuxième apport, il est prévu que l'analyse des incidences sur l'environnement intervienne le plus en amont possible, ce qui doit mettre fin aux pertes de temps considérables du passé.

En troisième lieu, la nomenclature des projets soumis à étude d'impact a été refondue pour privilégier, d'une part, une approche par « projet » et non plus par « procédure » ou « type d'autorisation », et réduire, d'autre part, le nombre de projets soumis systématiquement à évaluation environnementale. Ne devront plus désormais faire l'objet d'une étude d'impact que les projets considérés comme ayant le plus d'impact.

Quelques exemples : dans la catégorie des infrastructures de transport, la construction de gares ferroviaires, qui faisait systématiquement l'objet d'études d'impact, bascule désormais dans la catégorie du cas par cas ; les projets d'hydraulique agricole comme les projets d'irrigation ou par exemple de remblaiement de zones humides, basculent également dans la catégorie du cas par cas, et pour les projets de barrage et autres installations de stockage des eaux, désormais seuls les plus importants resteront soumis à étude d'impact systématique ; de la même manière, pour les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), seuls les projets les plus sensibles, comme les carrières, les projets éoliens, les élevages bovins ou porcins importants, le stockage de pétrole, etc, nécessiteront une étude d'impact obligatoire.

Parmi les installations classées pour la protection de l'environnement soumises à autorisation, 80 % ne feront plus l'objet d'une étude d'impact systématique.

Quatrième grand apport, en contrepartie de cette évolution vers moins de projets soumis de manière systématique à étude d'impact, l'ordonnance garantit des études d'impact au contenu de plus grande qualité, un renforcement de l'association des collectivités territoriales et de la participation du public ainsi que des procédures communes ou coordonnées afin d'éviter les redondances.

Enfin, pour les plans et programmes, une « clause de rattrapage » a été introduite, conformément à la directive, permettant au ministre de déterminer si un plan ou programme ne figurant pas dans la nomenclature doit néanmoins faire l'objet d'une évaluation environnementale.

Les principales conséquences attendues de cette réforme sont donc de deux ordres : quantitatives d'abord, avec une très nette réduction du nombre de projets soumis à étude d'impact (le gouvernement estime à 11,6 millions d'euros par an le gain financier net pour les entreprises et les collectivités territoriales) ; et qualitatives, avec une étude d'impact mieux justifiée.

Au cours de mes auditions, quelques difficultés ont été soulevées par plusieurs acteurs. Elles ne justifient pas une intervention au niveau législatif, mais j'interpellerai le ministre à leur sujet en séance publique.

La première inquiétude concerne le champ d'application de la nouvelle définition de la notion de « projet » qui doit désormais être perçue de manière globale afin d'éviter tout fractionnement, qu'il soit temporel ou géographique, qui pourrait empêcher d'évaluer l'ensemble de ses incidences sur l'environnement. J'ai notamment été alerté par le syndicat des énergies renouvelables, au sujet des ouvrages de production nécessitant des ouvrages de raccordement au réseau, pas forcément connus au moment de la première autorisation. Un certain nombre de réponses sont déjà apportées par le commissariat général au développement durable qui a publié un guide d'interprétation de la réforme en août dernier. Il m'a par ailleurs indiqué que des échanges techniques réguliers avaient lieu avec le syndicat afin de leur permettre d'appréhender au mieux cette nouvelle définition.

Ma deuxième remarque tend à souligner que cette ordonnance ne fait pas disparaître le problème du coût des études d'impact, ni celui des délais qu'elles impliquent. Sur ce point, il pourra être utile à l'avenir, je le crois, comme le suggère notre collègue Alain Richard, de réfléchir à une « normalisation » des études grâce à un travail de mise en données communes.

Enfin, nous ne disposons pas aujourd'hui de comparaison au niveau européen sur l'évaluation environnementale. Or, il serait utile de savoir comment les autres Etats membres s'acquittent des obligations imposées par les directives européennes.

J'en viens à la seconde ordonnance ratifiée par le présent projet de loi, qui porte sur la participation du public.

Pour rappel, la participation du public aux décisions environnementales est déjà bien ancrée dans notre droit. Outre les lois successives qui ont mis en oeuvre ce principe, comme la loi Barnier de 1995 et la loi Grenelle de 2010, la participation du public est prévue par la Convention internationale d'Aarhus de 1998 et elle est dotée d'un fondement constitutionnel depuis l'adoption de la Charte de l'environnement en 2005.

Schématiquement, la participation du public intervient, pour plus de transparence, à deux étapes du cycle de vie des projets : d'abord au stade de leur élaboration, afin de permettre au public de discuter de l'opportunité même du projet et de ses grandes caractéristiques, grâce aux procédures de débat public ou de concertation préalable (on parle alors de participation « en amont ») ; puis au stade de leur autorisation, afin d'éclairer la décision finale par l'avis du public, grâce aux procédures d'enquête publique ou de mise à disposition (on parle alors de participation « en aval »).

La participation en amont pour les projets les plus importants fait l'objet d'une saisine de la Commission nationale du débat public ou CNDP. Cette autorité administrative totalement indépendante est alors chargée de déterminer la procédure de participation la mieux adaptée.

Comme je l'ai évoqué en introduction, cette réforme de la participation du public s'appuie largement sur les travaux de la commission présidée par Alain Richard, mise en place à la suite des blocages, tensions et incidents, parfois même tragiques, observés lors de quelques projets emblématiques.

L'ordonnance comporte trois volets, que je vais vous présenter successivement.

Le premier volet définit les objectifs de la participation du public, principalement l'amélioration de la qualité de la décision publique, et la sensibilisation du public aux enjeux environnementaux. On vise là une parfaite transparence.

Il fixe également les droits associés pour assurer sa mise en oeuvre, comme l'accès aux informations pertinentes et la définition de délais raisonnables pour formuler des observations.

Le deuxième volet renforce la participation en amont, au stade de l'élaboration des projets, plans et programmes. Il s'agit du volet le plus important en termes de nouvelles mesures.

Tout d'abord, il étend la participation du public aux plans et programmes. Ceux d'importance nationale seront systématiquement soumis à la CNDP, tandis que les plans et programmes territoriaux pourront faire l'objet d'une concertation à l'initiative de l'autorité chargée de les élaborer ou par l'exercice d'un droit d'initiative sur lequel je reviendrai dans un instant.

La réforme renforce également les modalités d'engagement d'une concertation pour les projets non soumis à la CNDP, en permettant une concertation à l'initiative du maître d'ouvrage, à la demande de l'autorité compétente pour l'autoriser, ou par le nouveau droit d'initiative.

Les exigences minimales des concertations sont précisées par l'ordonnance, en privilégiant les concertations animées par un garant - notion nouvelle -, chargé de veiller à leur bon déroulement.

Pour les projets, plans et programmes non soumis à la CNDP, la réforme crée un droit d'initiative permettant de demander au préfet l'organisation d'une concertation avec garant. Je précise que pour les projets, il s'agit de ceux qui représentent un montant de dépenses publiques ou de subventions publiques supérieur à un seuil fixé par décret. Ce seuil a été fixé à 10 millions d'euros par le décret de 2017.

Précédé par la publication d'une déclaration d'intention, ce droit d'initiative peut être exercé par une partie de la population locale, par une collectivité territoriale ou un EPCI, ou par des associations environnementales agréées. Le préfet doit alors valider cette initiative en appréciant l'opportunité d'une telle concertation préalable.

Toujours en matière de participation du public, la réforme démocratise deux outils. Elle permet à 500 000 citoyens ou à 60 députés ou 60 sénateurs de saisir la CNDP pour organiser un débat public national sur un projet de réforme ; elle permet également à 10 000 citoyens de saisir la CNDP sur un projet qui lui est soumis de manière facultative par le maître d'ouvrage.

Enfin, l'ordonnance renforce le rôle de la CNDP, en lui confiant plusieurs missions nouvelles. La Commission nationale est ainsi chargée d'établir une liste nationale de garants, mobilisables pour toute concertation préalable avec garant ; elle peut financer la réalisation d'études complémentaires lors d'une concertation ; elle peut être saisie d'une demande de conciliation sur un projet faisant l'objet de désaccords précoces.

Le troisième et dernier volet de l'ordonnance permet de moderniser et de simplifier la participation en aval, au stade des décisions d'autorisation des projets, ou d'approbation des plans et programmes.

Le premier apport est la dématérialisation accrue de la procédure d'enquête publique, en particulier pour la consultation du dossier d'enquête et la transmission d'observations et de propositions. Des modalités présentielles sont toutefois maintenues par la mise à disposition d'un dossier papier et de postes informatiques.

Afin de simplifier les procédures, la durée minimale de l'enquête est abaissée de 30 à 15 jours pour les projets, plans et programmes non soumis à évaluation environnementale.

Le recours à une enquête publique est également facilité, pour un même projet soumis à plusieurs enquêtes distinctes, ou pour plusieurs projets pour lesquels le regroupement des enquêtes est pertinent.

Enfin, l'ordonnance réforme les procédures de mise à disposition, en particulier en créant une procédure de participation par voie électronique pour les projets, plans et programmes non soumis à enquête publique.

Dans l'ensemble, compte tenu des discussions menées et des débats à l'Assemblée nationale, le contenu de l'ordonnance convient aux différents acteurs que j'ai consultés. Outre des précisions techniques, je vous proposerai dans un instant d'apporter, par mes amendements, quelques ajustements au texte adopté par l'Assemblée nationale.

Je vous proposerai, tout d'abord, de revenir sur l'allongement de 4 à 6 mois du délai dans lequel les vices de forme ou de procédure peuvent être invoqués lors d'un contentieux, afin de ne pas multiplier les risques de contentieux ; de supprimer, ensuite, le plafonnement dans la loi du seuil de dépenses publiques au-delà duquel les projets sont soumis au droit d'initiative - 10 millions dans le projet du gouvernement, ramenés à 5 millions par l'Assemblée nationale - car cela empiète sur le domaine réglementaire et compromet une adaptation ultérieure de ce nouvel outil ; d'aligner, enfin, dans un souci d'harmonisation, le délai d'exercice du droit d'initiative pour les collectivités et pour les associations sur celui bénéficiant aux citoyens, que l'Assemblée nationale a opportunément porté à 4 mois.

Ces modifications visent à préserver les équilibres de la réforme, pour faciliter sa mise en oeuvre par toutes les parties prenantes. Plus de souplesse, donc, mais assortie d'une évaluation beaucoup plus protectrice et plus de transparence dans le débat public.

M. Hervé Maurey , président . - Merci à notre rapporteur pour son effort de clarté et de pédagogie.

Mme Nelly Tocqueville . - Je m'associe à cet éloge. L'article 121-16 précise les modalités de la concertation préalable, et fait notamment obligation de choisir le garant dans une liste nationale. Quels sont les critères pour figurer sur cette liste ?

M. Ronan Dantec . - Je félicite à mon tour M. Fouché pour son rapport sur un texte technique, et notre président pour sa réélection. Cette commission, ainsi que vous l'avez souligné, fonctionne très largement dans le consensus. Je crois, là encore, qu'il y aura consensus entre nous pour considérer que ces dispositions améliorent les choses, en raccourcissant les délais - je rappelle que pour l'éolien notamment, ils sont encore le double de ce qu'ils sont en Allemagne.

Une question : quel est le délai limite pour le dépôt des amendements de séance ?

M. Hervé Maurey , président . - Ce délai sera fixé ce soir en conférence des présidents, en principe lundi prochain. Cette période de mise en route des instances du Sénat nous met dans une situation particulière. Je rappelle que nous nous réunirons mardi prochain, à 14 heures, pour l'examen de ces amendements. Cela vous laisse le temps de mener un travail en amont, si vous le souhaitez, avec le rapporteur.

M. Ronan Dantec . - Le fait est que le rapport de notre commission d'enquête sur la compensation des atteintes à la biodiversité, Construire le consensus , contenait un certain nombre de propositions qui ont emporté l'unanimité. Nous aimerions les intégrer parmi les apports du Sénat au présent texte, en particulier sur deux points. Nous avions, tout d'abord, beaucoup insisté sur le foncier agricole, en préconisant qu'il soit pris en compte, de même que l'économie agricole, dans l'évaluation et les mesures compensatoires. Un amendement à l'article 1 er serait de nature à y pourvoir. L'autre élément que nous souhaiterions voir pris en compte - bien dans l'esprit des ordonnances puisqu'elles visent à raccourcir les délais - tient au fait que les difficultés interviennent le plus souvent, sous forme de contentieux, après l'enquête publique. C'est pourquoi nous proposions d'intégrer, dans l'enquête publique, la réponse du maître d'ouvrage à l'avis de l'autorité environnementale. C'est le moyen de traiter les questions délicates durant l'enquête publique, et non pas en aval.

M. Gérard Cornu . - À mon tour de féliciter le président pour sa brillante élection, ainsi que notre rapporteur, qui a travaillé dans des conditions difficiles sur ce sujet très technique. On peut saluer l'objectif de simplification que poursuivent ces ordonnances. Nous avons beaucoup oeuvré, au Sénat, en faveur de la simplification des normes. Mais il faut la mesurer, aussi, au regard des autres pays européens. Il ne s'agit pas seulement d'éviter de surtransposer les directives, mais aussi d'être vigilants sur cette comparaison. Qu'en est-il dans le cas présent ?

M. Rémy Pointereau . - Je m'associe aux félicitations de mes collègues. Ce texte, très technique, va dans le bon sens, même si j'estime que l'on aurait pu aller plus loin encore dans la simplification qui est, je crois, notre volonté à tous. Ma question porte sur les études d'impact, qui n'auront plus cours pour un certain nombre de projets, comme les retenues collinaires, pour être réservés aux projets d'une certaine dimension, comme les barrages « les plus importants ». Mais quelle est la définition d'un barrage « important » ? Car il est de nombreux cours d'eau où l'on trouve de petits barrages hydroélectriques.

M. Jérôme Bignon . - Je m'associe également aux félicitations adressées à notre président et à notre rapporteur, qui a travaillé sur un texte ardu, mais essentiel. Ardu, parce qu'il vise à prendre en compte une évolution sociétale : on ne mènera plus de projets à bien si l'on ne fait pas des progrès considérables et dans l'évaluation et dans l'information du public. Ce rapport, qu'il faudra lire, sera fort utile pour dialoguer sur le terrain avec les maîtres d'ouvrage et nos collègues élus qui s'interrogent sur la complexité des normes. Cependant, simplification n'est pas simplisme. Ce texte sait faire la part des choses, en assortissant la souplesse qu'il introduit d'un approfondissement de l'évaluation et de plus de transparence dans le débat public. Je partage le souci de Ronan Dantec. Il serait dommageable de ne pas profiter de ce texte pour introduire certaines des propositions de notre commission d'enquête sur la compensation. Nous avons élaboré des solutions consensuelles pour remédier aux manques et aux blocages constatés ; elles mériteraient de figurer dans ce texte.

M. Jean-Michel Houllegatte . - Vous pardonnerez au néophyte que je suis de se jeter dès à présent à l'eau, pour insister sur un point de sémantique. L'évaluation environnementale dont on parle est, en réalité, une évaluation ex ante . On ne peut que se féliciter de l'existence d'une concertation préalable, et de notre capacité à mesurer les incidences d'un projet sur l'environnement, ainsi qu'en matière sociale, sociétale et économique. Mais une fois le projet réalisé, quelle restitution en est faite ? Il faudra un jour s'y pencher, d'autant que ces projets s'inscrivent dans le temps long. Je pense à l'éolien offshore , dont l'appel à projet a été lancé il y a maintenant six ans ou à l'EPR de Flamanville, qui a demandé plus de dix ans. Les conditions initiales ont souvent été modifiées depuis les études d'impact. Comment évalue-t-on, ex post , ce qu'il est advenu des prévisions ? Je pense qu'il y a là une carence.

Dans le cadre des barrages, la loi sur l'eau impose également des procédures. Quel sera l'impact des modifications ici introduites ? S'imposeront-elles ou les dispositions de la loi sur l'eau relatives à la modification des cours d'eau seront celles qui prévaudront ?

M. Claude Bérit-Débat . - Je félicite à mon tour notre président et notre rapporteur, qui a mené son travail dans des conditions un peu particulières. Ces deux ordonnances vont dans le bon sens ; elles sont le fruit de la concertation et ont l'une et l'autre pour objet de clarifier, de simplifier, de stabiliser, qu'il s'agisse de l'évaluation ou de la participation du public. Le groupe socialiste y est favorable. Nous nous déterminerons à mesure sur les amendements, dont certains emportent notre approbation quand d'autres nous laissent plus perplexes. Merci à M Houllegatte, qui a fait des observations de bon sens. Tel est l'état d'esprit du groupe socialiste sur ce texte.

M. Jean-Claude Luche . - Je m'associe aux félicitations de mes collègues et m'en tiendrai à une question. Lors de vos auditions, monsieur le rapporteur, avez-vous eu l'occasion d'aborder la question des recours abusifs, qui ne visent qu'à retarder les projets ?

M. Jean-François Longeot . - J'adresse moi aussi mes félicitations au président et au rapporteur. Je suis relativement satisfait du rapport qui nous est proposé, et de la visée de simplification administrative de ces textes, qui va dans le bon sens, même si, comme l'a souligné Rémy Pointereau, on pourrait aller plus loin. Comme président de la commission d'enquête sur la compensation, je partage pleinement l'avis de Ronan Dantec, qui en fut le rapporteur. Un travail important a été mené, qui a rencontré l'unanimité. Il serait bon que l'on s'en inspire, par voie d'amendements qui apporteraient une vraie contribution, monsieur le rapporteur, au travail que vous avez réalisé.

M. Didier Mandelli . - À mon tour de sacrifier au rituel des félicitations, avant de rappeler que le 17 mai dernier, notre mission d'information sur la démocratie a rendu son rapport, Décider en 2017 : le temps d'une démocratie coopérative , dans lequel figuraient un certain nombre de recommandations dont je souhaite qu'elles soient ici prises en compte.

M. Guillaume Chevrollier . - Sortant d'une campagne électorale, je puis ici témoigner de la volonté de simplification des élus locaux, exaspérés par une complexité qui est source, de surcroît, de bien des dépenses publiques. Ce texte, à l'issue du travail de notre rapporteur, semble parvenu à un point d'équilibre. Si l'on peut concilier les attentes légitimes de nos concitoyens en matière de préservation de l'environnement et la mise en oeuvre de projets nécessaires à nos territoires, on aura franchi un grand pas. Quelles incidences aura ce projet de loi pour les élus locaux ? Telle est ma question.

M. Guillaume Gontard . - Je ne peux manquer de souligner le peu de temps qui nous est donné pour l'examen de ce texte, de même que regretter le recours aux ordonnances sur un texte censé promouvoir la démocratie environnementale et la démocratie en général. Si ce texte, en ce qu'il améliore la concertation, va dans le bon sens, je m'inquiète néanmoins du dispositif d'évaluation au cas par cas, dans la mesure où certains des seuils retenus semblent très élevés.

M. Alain Fouché , rapporteur . - Les critères destinés à établir la liste des garants, madame Tocqueville, sont fixés par la CNDP : indépendance, formation et expérience en matière de participation. Les garants devront être ce que j'appellerai des hommes de l'art.

À MM. Dantec, Bignon et Longeot, j'indique que je suis tout à fait ouvert à travailler à des amendements de séance pour prendre en compte les recommandations de la commission d'enquête sur la compensation des atteintes à la biodiversité.

Nous demanderons au ministre, monsieur Cornu, une comparaison européenne, dont nous ne disposons pas pour l'heure.

M. Gérard Cornu . - Dommage !

M. Alain Fouché , rapporteur . - Pour répondre à M. Pointereau, je précise que les projets de barrage soumis à évaluation seront ceux dont le volume en eau à retenir ou à stocker est supérieur ou égal à un million de mètres cubes, ou dont la hauteur au-dessus du terrain naturel est supérieure ou égale à 20 mètres.

Les ordonnances n'évoquent pas, en effet, monsieur Houllegatte, l'évolution postérieure des projets, mais l'étude d'impact doit présenter les modalités de suivi que le maître d'ouvrage mettra en oeuvre. À quoi s'ajoute le suivi dans le temps des mesures de compensation par les services de l'État. Quant à vos interrogations relatives à la loi sur l'eau, j'indique que l'autorisation environnementale unique permet de simplifier les procédures mais fait l'objet d'une ordonnance spécifique.

Je remercie M. Bérit-Débat de ses propos sur l'état d'esprit de son groupe.

La question des recours abusifs n'a pas été abordée, monsieur Luche, par les acteurs que j'ai entendus, mais l'ordonnance rationalise les procédures afin de les éviter, tout en protégeant le droit de recours. Ainsi, par exemple, de la réduction de certains délais.

J'ai eu l'occasion, monsieur Mandelli, de travailler avec M. Bonnecarrère qui a fait un travail important dans le cadre de la mission d'information sur la démocratie. Je partage les objectifs de certaines propositions, mais plusieurs appellent des précisions et une concertation spécifique. Il faudra que nous en reparlions.

Quelles incidences pour les élus locaux, monsieur Chevrollier ? Moins d'études d'impact, donc des économies et une procédure rationalisée.

Je partage votre avis, monsieur Gontard, sur les délais d'examen de ce texte, mais nous étions contraints, sur ce dossier urgent, par le renouvellement des instances du Sénat.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article 1 er

L'article 1er est adopté sans modification.

Article 2 (nouveau)

M. Alain Fouché , rapporteur . - L'amendement COM-3 vise à revenir sur l'articulation, adoptée à l'Assemblée nationale, entre les obligations de concertation prévues respectivement par le code de l'environnement et par le code de l'urbanisme pour un même projet. Les députés ont choisi de faire prévaloir les dispositions du code de l'environnement, qui peuvent dès lors dispenser des obligations au titre du code de l'urbanisme. Cette solution me semble pertinente dans la mesure où les dispositions relatives aux concertations prévues par le code de l'environnement ont été précisées par l'ordonnance.

Par ailleurs, cette concertation ne concerne qu'un nombre limité de grands projets - une quinzaine par an - dont l'importance exige d'envisager une participation sous l'égide de la Commission nationale - grands équipements sportifs ou commerciaux, grands projets d'infrastructure linéaire, etc. J'ajoute que la Commission nationale se prononce dans un délai de deux mois à compter de sa saisine, ce qui semble raisonnable pour des projets d'une telle importance. Mon avis est donc défavorable.

L'amendement COM-3 n'est pas adopté.

Les amendements rédactionnels COM-5 , COM-6 , COM-7 et COM-8 sont successivement adoptés.

M. Alain Fouché , rapporteur . - Mon amendement COM-9 vise à revenir sur le plafonnement du seuil de dépense publique au-delà duquel un projet est soumis au nouveau droit d'initiative. L'ordonnance de 2016 renvoyait au pouvoir réglementaire la définition de ce seuil. Un décret d'avril 2017 l'a fixé à 10 millions d'euros. En plafonnant ce seuil à 5 millions d'euros, l'Assemblée nationale a manifestement souhaité contraindre le gouvernement dans son pouvoir d'application de cette disposition. Cet ajout, dans la loi, empiète sur le domaine du règlement. Le Sénat est attaché au respect de la séparation constitutionnelle dans les domaines respectifs de la loi et du règlement. Je rappelle, à ce titre, qu'une procédure spécifique d'irrecevabilité est appliquée dans notre assemblée.

Par ailleurs, cette précision législative compromet l'adaptabilité future du nouveau droit d'initiative, lorsqu'un premier retour d'expérience sera possible. Il revient donc au gouvernement de prendre ses responsabilités quant au seuil pertinent. Il me semble qu'il n'est pas hostile à une révision de ce seuil, pour l'abaisser au-dessous de 10 millions. J'interrogerai le ministre en séance afin de clarifier ses intentions sur ce point.

J'ajoute que cet amendement satisfait pleinement l'amendement COM-15 de M. Richard.

M. Ronan Dantec . - Le texte ne prévoit pas de clause filet, de rattrapage, alors que la directive européenne précise que l'on ne peut exclure certains projets. La suppression du seuil y répond.

M. Alain Fouché , rapporteur . - Mais il s'agit ici du débat public, pas de l'évaluation environnementale.

M. Gérard Cornu . - Nous suivrons le rapporteur pour une double raison : nous sommes attachés à la séparation constitutionnelle des domaines de la loi et du règlement, et nous sommes opposés à l'abaissement du seuil.

Mme Nelly Tocqueville . - Le groupe socialiste s'abstient.

L'amendement COM-9 est adopté et l'amendement COM-15 , satisfait, devient sans objet.

L'amendement rédactionnel COM-10 est adopté.

M. Alain Fouché , rapporteur . - Mon amendement COM-11 vise à harmoniser à quatre mois le délai dans lequel le nouveau droit d'initiative est exercé. L'Assemblée nationale a en effet augmenté ce délai de deux à quatre mois pour les populations locales, sans faire de même pour les collectivités et les associations. En tout état de cause, la demande d'autorisation ne sera recevable qu'à l'expiration du délai le plus long. Pour des raisons de cohérence, et afin d'éviter toute incompréhension au niveau local, je vous propose donc d'étendre ce délai à tous les titulaires du droit d'initiative.

L'amendement COM-11 est adopté.

M. Alain Fouché , rapporteur . - L'amendement COM-1 s'inspire des conclusions de la mission commune d'information sur la démocratie, dont M. Bonnecarrère a été le rapporteur. Je salue ce travail complexe, mené sur un champ très large. Les modifications ici proposées ont toutefois une portée dépassant l'objet des ordonnances. Supprimer un degré de juridiction, le tribunal administratif, pour aller directement devant la cour administrative d'appel, aurait un impact significatif sur le droit de recours. Cela impliquerait en outre de grands changements dans l'organisation de la juridiction administrative. Ces propositions appellent donc une concertation spécifique, notamment avec le Conseil d'État, pour trouver une solution équilibrée.

Dans l'exercice auquel nous procédons aujourd'hui, dans des délais assez contraints, je préfère maintenir les équilibres des ordonnances, qui modifient déjà largement le droit applicable et ont été élaborées dans un esprit de compromis auquel sont attachées les parties prenantes. Je partage le souci d'une fluidification des procédures, et les propositions de cet amendement peuvent être intéressantes à ce titre, mais nous devons prendre le temps d'en discuter et de consulter les différents acteurs. On ne saurait sortir les tribunaux administratifs de la procédure sans dialogue avec la juridiction administrative. D'où un avis, pour l'heure, défavorable.

M. Jean-Michel Houllegatte . - C'est une procédure déjà en vigueur pour les projets éoliens.

M. Alain Fouché , rapporteur . - Ce n'est pas une raison pour la généraliser.

M. Jérôme Bignon . - Cette démarche est tout de même intéressante car elle permet, sur des sujets très précis, d'avoir des tribunaux spécialisés. Sur de tels sujets, tous les tribunaux administratifs ne sauraient être compétents. Certes, il y faut une concertation avec le Conseil d'État, mais si l'échelon des cours administratives d'appel devait être retenu, il faudrait songer à un réseau de quelques cours spécialisées, comme pour l'éolien pour lequel c'est la cour de Nantes qui est compétente. Le défendeur y gagnerait en qualité des décisions rendues.

M. Hervé Maurey , président . - C'est un débat que nous pourrons avoir en séance.

L'amendement COM-1 n'est pas adopté.

M. Alain Fouché , rapporteur . - Mon amendement COM-12 vise à revenir sur l'allongement de quatre à six mois, décidé à l'Assemblée nationale, du délai dans lequel les vices de forme ou de procédure au titre de la participation du public peuvent être invoqués contre une décision d'autorisation. Les nouvelles dispositions de l'ordonnance ont déjà créé de nouveaux risques juridiques pour les porteurs de projets : il ne me semble pas souhaitable de créer de nouveaux risques de contentieux. Attendons de disposer d'un premier bilan avant de modifier les équilibres de l'ordonnance.

L'amendement COM-12 est adopté.

M. Alain Fouché , rapporteur . - Mon amendement COM-4 procède à deux coordinations sémantiques. Il remplace le mot « document » par le mot « programme », dans la mesure où « plans et programmes » désignent désormais dans toute la section les plans, schémas, programmes et autres documents de planification figurant initialement dans le code.

Il prévoit, en second lieu, dans le cadre d'une consultation transfrontalière, la transmission non seulement du plan ou du programme susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement dans un autre État membres aux autorités de ce pays, mais également du rapport sur les incidences environnementales de ce plan ou programme, comme le prévoit la directive.

L'amendement COM-4 est adopté.

L'amendement de coordination COM-13 est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article additionnel après l'article 2

M. Alain Fouché , rapporteur . - L'amendement COM-2 vise à créer, à titre expérimental, une procédure continue de consultation du public sur un même projet. Je partage le souci de prévenir les ruptures dans l'information et la participation du public, mais l'ordonnance d'août 2016 comporte déjà des dispositions nouvelles qui y contribuent. Les débats publics et les concertations relevant du champ de la Commission nationale du débat public portent aussi sur les modalités d'information et de participation du public ultérieures. Et l'Assemblée nationale a étendu cette disposition à toute concertation préalable. Après un débat public ou une concertation décidée par la CNDP, cette dernière désigne un garant chargé de veiller à l'information et à la participation du public jusqu'à l'ouverture de l'enquête publique. Le garant qui animait une concertation préalable peut être nommé commissaire enquêteur sur le même dossier. Tout cela devrait contribuer à la continuité de l'information et de la participation du public. Je note toutefois que la désignation d'un garant chargé de la concertation postérieure à la participation préalable est limitée aux dossiers relevant de la Commission nationale. Je ne suis pas hostile à une éventuelle extension de ces dispositions aux concertations hors Commission nationale, à titre facultatif ; cela permettrait de consolider la participation sur certains projets de taille intermédiaire. En revanche, je ne suis pas favorable à ce qu'un tel continuum du rôle du garant ait pour effet de supprimer la fonction de commissaire enquêteur. Les deux fonctions sont bien distinctes et ont leur utilité respective, à des stades différents d'élaboration des projets. À fusionner ces responsabilités, on accroîtrait les risques de confusion, au rebours de l'objectif de l'amendement. On risquerait de surcroît de vider de son sens l'enquête publique, puisque seul le commissaire enquêteur peut émettre un avis, ce que ne peut pas le garant.

L'objet de l'amendement étant partiellement satisfait, et dans l'attente d'une solution d'ici à la séance, j'émets donc un avis défavorable.

M. Ronan Dantec . - Je trouvais l'amendement intéressant, puisqu'il donne au garant mission de veiller à la qualité du débat, qui reste une pierre d'achoppement. Au vu du commentaire du rapporteur, je me demande si un travail de reformulation ne pourrait pas être conduit, sous sa responsabilité ?

M. Alain Fouché , rapporteur . - Tout à fait d'accord.

M. Olivier Jacquin . - J'irai dans le même sens. Pour avoir siégé à la CNDP, j'ai observé que la qualité du débat public s'étiole dès que la procédure est achevée : le maître d'ouvrage repart et modifie son projet, sans qu'il n'y ait alors plus de relation avec le public. L'idée est à creuser.

M. Claude Bérit-Débat . - Le groupe socialiste s'abstiendra, mais comme je l'ai dit, il serait bon qu'un tel dispositif fasse l'objet d'un texte à part entière.

M. Alain Fouché , rapporteur . - On en parlera d'ici à la séance.

M. Didier Mandelli . - L'amendement qui reprenait la proposition n° 7 du rapport de la mission d'information sur la démocratie va donc être repoussé. Cette proposition avait pourtant fait l'objet d'un consensus. Alors que l'occasion était ici donnée d'intégrer ces travaux, je regrette qu'ils ne soient pas pris en compte.

M. Hervé Maurey , président . - Je vous comprends, et vous n'êtes pas le seul à exprimer ce regret. Mais, je le redis, le texte peut encore être amendé d'ici à la séance publique, bien que le calendrier soit contraint.

L'amendement COM-2 n'est pas adopté.

Article 3

L'article 3 est adopté sans modification.

Article 4

L'article 4 est adopté sans modification.

Article 5 (nouveau)

L'amendement de coordination COM-14 est adopté.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mercredi 20 septembre 2017

- M. Philippe Bonnecarrère , sénateur du Tarn ;

- Commission nationale du débat public (CNDP) : M. Christian Leyrit , président ;

- M. Alain Richard , sénateur du Val d'Oise

- MEDEF : M. Olivier Viano , président du comité Droit de l'environnement, et Mmes Emilie Choux , chargée de mission à la direction Droit de l'environnement, et Marine Binckli , chargée de mission à la direction des Affaires publiques ;

- Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) : Mme Dominique Alibert , directrice du pôle Conservation ;

- Syndicat des énergies renouvelables (SER) : M. Jean-Louis Bal , président, Mme Delphine Lequatre , responsable du service juridique, M. Mathieu Gondolo , chargé de mission, et M. Alexandre de Montesquiou , consultant.

Mardi 26 septembre 2017 :

- Commissariat général au développement durable (CGDD) : Mme Laurence Monnoyer-Smith , commissaire général, M. Philippe Rogier , sous-directeur de l'intégration des démarches développement durable dans les politiques publiques, Mme Marie-Françoise Facon , chef de bureau de l'intégration environnementale et M. David Catot , chargé de mission au bureau de l'intégration environnementale ;

- M. Jacques Vernier , ancien président du groupe de travail relatif à la modernisation de l'évaluation environnementale.


* 1 La modernisation du droit de l'environnement engagée par cette feuille de route repose sur une double démarche : simplifier le droit de l'environnement tout en maintenant un niveau de protection élevé et constant.

* 2 Cet article est modifié à la marge par l'article 2 de l'ordonnance n°2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale.

* 3 Dans de nombreux cas de figure, le préfet de région et le préfet de département sont une seule et même personne.

* 4 Pour les projets , l'autorité environnementale peut être : 1. le ministre chargé de l'environnement, notamment lorsque le projet donne lieu à une autorisation, une approbation ou une exécution prise par décret ; 2. la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable AE CGEDD, notamment pour les projets réalisés sous maîtrise d'ouvrage du ministère ou d'un organisme sous sa tutelle ; 3. les missions régionales d'autorité environnementale du CGEDD pour les projets qui ont fait l'objet d'une saisine obligatoire de la CNDP et qui doivent être réalisés sur le territoire de la région concernée ; 4. les préfets de région dans tous les autres cas.

En revanche pour les plans et programmes , on ne distingue plus que 2 cas de figure : la formation d'AE CGEDD pour les plans et programmes dont le périmètre excède les limites territoriales d'une région ou qui donnent lieu à une approbation par décret ou à une décision ministérielle, ou les missions régionales d'autorité environnementale du CGEDD pour les autres plans et programmes.

* 5 Il s'agit des consultations réalisées pour des projets dont l'impact environnemental peut dépasser une frontière. Elles sont régies par la Convention d'Espoo, du 25 février 1991.

* 6 C-201/02 du 7 janvier 2004 Wells, C-290/03 du 4 mai 2006 Barker, C-392/96 commission c.Irlande 21 sept.1999.

* 7 Il s'agit du décret n°2016-1110 du 11 août 2016 relatif à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes.

* 8 Cette notion figurait auparavant à l'article L. 122-3 du code de l'environnement.

* 9 Cette annexe fixe deux types de caractéristiques constituant des critères permettant de déterminer l'ampleur probable des incidences : les caractéristiques des plans et programmes et les caractéristiques des incidences et de la zone susceptible d'être touchée (probabilité, durée, fréquence et caractère réversible des incidences, caractère cumulatif des incidences, nature transfrontière des incidences, risques pour la santé humaine ou pour l'environnement, etc).

* 10 Rapport n° 370, tome I (2014-2015) de Mmes Catherine DEROCHE, Dominique ESTROSI SASSONE et M. François PILLET, fait au nom de la commission spéciale, déposé le 25 mars 2015.

* 11 La CNDP est composée de 25 membres, nommés pour un mandat de 5 ans, renouvelable une fois. En 2017, elle est dotée d'un budget de 3,45 millions d'euros et de 9 ETPT.

* 12 Loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1 er mars 2005 relative à la Charte de l'environnement.

* 13 À titre d'illustration, en 2013 la CNDP a été saisie de 9 projets, dont 8 ont donné lieu à une forme de concertation : 4 débats publics et 4 concertations préalables.

* 14 D'après la fiche d'impact de l'ordonnance, le nombre annuel d'enquêtes publiques est estimé à 5 550 en moyenne, ainsi réparties entre les différentes catégories de maîtres d'ouvrage : 20 % pour les entreprises, 75 % pour les collectivités territoriales, 5 % pour l'État.

* 15 Lettre de mission de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie adressée à M. le sénateur Alain Richard, 4 février 2015.

* 16 Les articles L. 120-1 à L. 120-3 en vigueur étant déplacés à la fin du chapitre III dans une nouvelle section 3 et renumérotés L. 123-19-1 à L. 123-19-7, par l'article 2 de l'ordonnance.

* 17 Le code de l'urbanisme prévoit une concertation obligatoire (art. L. 103-2) ou facultative (art. L. 300-2) préalablement à certains projets de travaux ou d'aménagements.

* 18 Selon la fiche d'impact de l'ordonnance, en se basant sur les années précédentes, en moyenne 1 plan ou programme devrait être soumis chaque année à la CNDP.

* 19 La désignation d'un garant n'est toutefois pas systématique : lorsque la concertation préalable est organisée à l'initiative du maître d'ouvrage, l'article L. 121-17 n'impose pas d'avoir recours à un garant.

* 20 Les dispositions précisant l'application aux documents d'urbanisme des dispositions du code de l'environnement en matière de concertation préalable sont désormais fixées aux articles L. 121-8 et L. 121-15-1.

* 21 Selon la fiche d'impact de l'ordonnance, cette nouvelle possibilité pourrait conduire à 3 débats publics par an.

* 22 L'article L. 103-2 du code de l'urbanisme vise les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme, les zones d'aménagement concerté, les projets d'opérations et aménagements ayant pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie ou l'activité économique et les projets de renouvellement urbain.

* 23 La nouvelle rédaction supprime la faculté antérieure donnée à la CNDP de demander au maître d'ouvrage du projet de procéder lui-même à l'organisation du débat public. En pratique, cette possibilité n'était pas mise en oeuvre.

* 24 Les concertations préalables organisées à la demande de la CNDP sont ainsi nécessairement animées par un garant.

* 25 Selon la fiche d'impact de l'ordonnance, la CNDP a été saisie trois fois en dix ans par le Gouvernement en application de l'article L. 121-10.

* 26 La fiche d'impact estime, à titre d'hypothèse, que cette nouvelle faculté donnée aux parlementaires et aux citoyens pourrait conduire à l'organisation d'un débat public national tous les cinq ans.

* 27 Pour les projets, plans et programmes soumis à évaluation environnementale et à enquête publique, visés par l'article L. 123-1.

* 28 Pour les projets, plans et programme soumis à évaluation environnementale mais dispensés d'enquête publique, visés par l'article L. 123-19.

* 29 Cette section était constituée d'un article unique L. 121-16 qui prévoyait les modalités générales d'organisation des concertations préalables hors champ de la CNDP.

* 30 De manière analogue à l'articulation prévue à l'article L. 121-8 s'agissant du champ de compétence de la CNDP.

* 31 Suite à l'ordonnance, seule une concertation engagée de façon volontaire par le maître d'ouvrage en application du I de l'article L. 121-17 peut être dépourvue de garant et donc soustraite aux dispositions de l'article L. 121-16-1.

* 32 Lorsqu'une concertation préalable est organisée sans garant, le bilan est établi et publié par le maître d'ouvrage (art. R. 121-21).

* 33 Le critère de l'évaluation environnementale vise à circonscrire le périmètre des projets, plans et programmes pouvant faire l'objet d'une concertation préalable à l'initiative du porteur, ou par exercice du droit d'initiative, en ciblant les dossiers d'une importance suffisante, comme le recommandait le rapport Richard.

* 34 Ce seuil a été fixé à 10 M€ hors taxes par le décret n° 2017-626 (art. R. 121-15). Avec ce seuil, la fiche d'impact de l'ordonnance estimait à environ 140 le nombre de projets soumis par an à déclaration d'intention, et à 7 le nombre de projets soumis à concertation préalable à la demande de l'autorité compétente ou après exercice du droit d'initiative.

* 35 Cette solution diffère de la recommandation du rapport Richard, qui faisait référence uniquement aux conseils municipaux, en prévoyant un seuil de population pour assurer la représentativité de l'initiative (25 % de la population).

* 36 Dans sa rédaction antérieure, l'article L. 123-10 disposait : « L'information du public est assurée par tous moyens appropriés, selon l'importance et la nature du projet, plan ou programme, notamment par voie d'affichage sur les lieux concernés par l'enquête, par voie de publication locale ou par voie électronique ».

* 37 Modifié également par l'ordonnance n° 2016-1058, l'article exige désormais du maître d'ouvrage de faire état des avis rendus par les collectivités territoriales en application de l'article L. 122-1.

* 38 Les éléments relatifs au contenu du dossier d'enquête publique ont été repris à l'article R. 123-8.

* 39 Dans sa rédaction antérieure, l'article L. 123-13 faisait de la voie électronique une simple possibilité, précisée par décret en Conseil d'État.

* 40 L'article L. 123-14 est également modifié par l'ordonnance n° 2016-1058, afin de prévoir la transmission du projet modifié aux collectivités territoriales consultées en application de l'article L. 122-1.

* 41 Ces articles ont été réécrits par l'ordonnance n° 2016-1058.

* 42 L'article L. 123-2 exempte d'enquête publique certains projets soumis à évaluation environnementale.

* 43 Ces articles ont été déplacés par le 1° de l'article 2 de la présente ordonnance.

* 44 Ces deux modifications étendent aux décisions administratives à portée générale (art. L. 123-19-1) des exclusions déjà prévues pour les décisions administratives individuelles (art. L. 123-19-2).

* 45 L'ancienne version de l'article L. 212-2 prévoyait que les avis de ces personnes publiques étaient réputés favorables s'ils n'étaient pas rendus dans un délai de quatre mois suivant la transmission du projet.

* 46 L'article L. 121-17-1 prévoit que ce seuil est fixé par décret en Conseil d'État, et le décret n° 2017-626 l'a fixé à 10 millions d'euros (art. R. 121-25).

* 47 Il faut relever que la création d'une procédure de consultation locale à l'initiative de l'Etat, prévue au c) du 3° du I de l'article 103 de la loi du 6 août 2015, a fait l'objet d'un texte distinct : l'ordonnance n° 2016-488 du 21 avril 2016 relative à la consultation locale sur les projets susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement.

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