B. - Impositions et autres ressources affectées à des tiers

ARTICLE 19 - Mesures relatives à l'ajustement des ressources affectées à des organismes chargés de missions de service public

. Commentaire : le présent article prévoit l'ajustement des plafonds de taxes affectées fixés à l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012, l'intégration du fonds de prévention des risques naturels majeurs au dispositif de plafonnement et la rebudgétisation de deux taxes affectées à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) d'une part et au Centre national pour le développement du sport (CNDS) d'autre part. Il relève de 105 millions d'euros la contribution des bailleurs sociaux au fonds national des aides à la pierre (Fnap), fixée à 375 millions d'euros en 2018.

I. LE DROIT EXISTANT

A. UN VOLUME IMPORTANT DE RECETTES FISCALES AFFECTÉES À DES TIERS HORS SECTEURS LOCAL ET SOCIAL

1. 254 milliards d'euros affectés à des tiers, dont environ 10 % aux organismes d'administration centrale et à divers établissements sectoriels

D'après l'annexe « Voies et moyens » au projet de loi de finances pour 2018, les taxes affectées à des tiers (tous secteurs confondus) devraient s'élever à 254,0 milliards d'euros en 2017 - un montant en légère hausse par rapport à 2016 (+ 1,8 %).

La majeure part des taxes affectées le sont au secteur social (69,1 % du total en 2017 d'après l'estimation de l'annexe « Voies et moyens »). Le secteur local représente quant à lui 19 % de la fiscalité affectée.

Les taxes affectées à des organismes n'appartenant ni au secteur local ni au secteur social représentent un peu plus de 10 % du total , soit environ 26,1 milliards d'euros en 2017 (contre 25,0 milliards d'euros en 2016), et regroupe les organismes d'administration centrale (ODAC), qui bénéficient d'environ 5,6 % des impositions de toute nature affectées, et la catégorie « Divers » recouvrant diverses entités qui n'appartiennent pas à proprement parler au champ des organismes divers d'administration centrale mais qui concourent à des missions de service public (par exemple les centres de formation des apprentis, les établissements publics fonciers...).

Évolution des ressources fiscales affectées
à des personnes morales autres que l'État

(en millions d'euros)

N.B. : ces chiffres ne comprennent pas les impôts affectés aux comptes spéciaux et budgets annexes, ni les taxes locales qui transitent par le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales ».

Source : commission des finances du Sénat, d'après le tome I de l'annexe « Voies et moyens » jointe au projet de loi de finances pour 2018

2. Des taxes affectées qui représentent 17 % du total des ressources des opérateurs de l'État

L'importance du montant total de ressources affectées à des tiers hors secteurs local et social trouve sa traduction dans le poids de la fiscalité affectée au sein du total des ressources des opérateurs de l'État : hors ressources propres (financements européens, privés, produits de vente, redevance...), les taxes affectées représentent 17 % des recettes des opérateurs, contre 82 % de crédits budgétaires et, de façon marginale, 1 % de dotations en fonds propres 371 ( * ) .

Il n'existe pas de doctrine fixant précisément la répartition du financement des organismes entre crédit budgétaire et affectation fiscale.

La loi n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) dispose seulement que « les impositions de toute nature ne peuvent être directement affectées à un tiers qu'à raison des missions de service public confiées à lui 372 ( * ) » et que l'affectation à une autre personne morale d'une ressource établie au profit de l'État doit être autorisée dans la loi de finances 373 ( * ) .

Elle prévoit également une annexe explicative jointe au projet de loi de finances de l'année « comportant la liste et l'évaluation, par bénéficiaire ou catégorie de bénéficiaires, des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l'État 374 ( * ) ».

B. UN PLAFONNEMENT DES TAXES AFFECTÉES DE PLUS EN PLUS ÉTENDU MAIS TOUJOURS INCOMPLET

1. Le principe du plafonnement : un triple objectif

Le principe du plafonnement des taxes affectées a été posé par l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 375 ( * ) . Des plafonds de ressources ont été fixés ; en cas de dépassement de ces plafonds, il est procédé à un reversement de l'excédent du produit de la taxe au budget général de l'État.

Le tableau du I de l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 :
plafond, taxe et affectataire

Le plafonnement prévu à l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 prend la forme d'un tableau , dans lequel chaque ligne correspond à un couple taxe-affectataire, auquel est associé un montant limitatif de ressources : le plafond .

Il faut donc distinguer :

- les plafonds proprement dits , correspondant à la fois à une taxe et à son affectataire : par exemple, la fraction de taxe générale sur les activités polluantes affectée à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) est plafonnée à 448,7 millions d'euros en 2016. Une ligne du tableau correspond à un plafond ;

- les affectataires , qui peuvent bénéficier de plusieurs ressources fiscales plafonnées, qui n'évoluent pas forcément dans le même sens : par exemple, le Centre national de développement du sport (CNDS) dispose de quatre ressources fiscales plafonnées. Un affectataire peut donc figurer sur plusieurs lignes ;

- les taxes , une taxe pouvant financer plusieurs organismes : ainsi, les taxes spéciales d'équipement sont affectées à plusieurs établissements publics fonciers. Une même taxe peut donc figurer sur plusieurs lignes .

Source : commission des finances du Sénat

Ainsi, le dynamisme d'une taxe plafonnée ne bénéficie plus aux affectataires, au-delà du plafond défini initialement, mais permet de réduire le besoin de financement de l'État.

Il faut noter que le plafonnement des ressources affectées ne s'applique pas qu'aux opérateurs de l'État proprement dits 376 ( * ) : de façon plus large, les organismes d'administration centrale sont également susceptibles de voir plafonnées les ressources fiscales dont ils bénéficient, de même que les divers établissements sectoriels financés par des fonds publics.

Comme le souligne le Gouvernement dans la présentation des taxes affectées qui figure au tome I de l'annexe « Voies et moyens » 377 ( * ) , l'objectif est triple : renforcer le suivi et le contrôle du niveau d'ensemble des taxes affectées, ajuster chaque année les ressources des affectataires à leurs besoins réels et faire contribuer les opérateurs à la maîtrise de la dépense publique, puisque le fait de limiter leurs ressources contraint leurs dépenses.

2. L'extension du plafonnement et son intégration à la norme de dépenses

Le plafonnement des taxes affectées a connu un mouvement d'extension quasi-continu : le volume des taxes affectées plafonnées est passé de 3 milliards d'euros en 2012 à 9,6 milliards d'euros en 2017 378 ( * ) .

Au total, l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 intègre, en 2017, 89 lignes, qui correspondent à 62 affectataires et 75 taxes (un affectataire peut en effet bénéficier de plusieurs taxes et, à l'inverse, une taxe peut être affectée à plusieurs organismes différents).

Évolution du champ du plafonnement prévu à l'article 46
de la loi de finances initiale pour 2012

(en milliards d'euros et en nombre de taxes)

Note de lecture : la courbe se lit par rapport à l'axe de gauche, les segments par rapport à celui de droite.

Source : commission des finances du Sénat, d'après le tome I de l'annexe « Voies et moyens » jointe au projet de loi de finances pour 2018

En outre, à partir de la loi de programmation pour les années 2012 à 2017, a été pris en compte dans la norme de dépenses « zéro valeur » (cf. encadré ci-après) le stock (et non plus seulement le flux) des contributions et taxes affectées à des tiers et faisant l'objet d'un plafonnement limitatif à l'article 46 de la loi de finances pour 2012, pour un montant de 4,5 milliards d'euros en 2013. En d'autres termes, c'est, à partir de 2013, l'ensemble des taxes affectées plafonnées qui est intégré à la norme de dépenses - dans la situation antérieure, seules les taxes nouvellement plafonnées l'étaient.

La double norme de dépenses : zéro valeur et zéro volume

Si des normes d'évolution des dépenses de l'État ont été introduites dès le début des années 2000, c'est la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 qui a mis en place la double norme de dépenses aujourd'hui appliquée :

- d'une part, les dépenses du budget général de l'État et les prélèvements sur recettes, hors charge de la dette et hors contributions aux pensions des fonctionnaires de l'État, doivent être stabilisés en valeur à périmètre constant : c'est la norme « zéro valeur » ;

- d'autre part, la progression annuelle des crédits du budget général de l'État et des prélèvements sur recettes, y compris charge de la dette et dépenses de pension, doit être, à périmètre constant, au plus égale à l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation : c'est la norme « zéro volume ».

Source : commission des finances du Sénat

3. Plusieurs limites à la rationalisation de la fiscalité affectée par le biais du plafonnement

a) Une asymétrie de prise en compte dans la norme de dépense entre les plafonds fixés à l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 et ceux prévus par d'autres dispositions législatives

Les nouveaux plafonnements sont le plus souvent intégrés au tableau de l'article 46 de la loi de finances pour 2012, et l'ajustement à la hausse ou à la baisse de ces plafonds se fait par modification de ce même article.

Cependant, il est possible que le montant maximal de fiscalité affectée que peut percevoir l'opérateur soit limité par un plafond, mais que celui-ci ne figure pas au I de l'article 46 de la LFI 2012. Dans ce cas, la taxe affectée plafonnée n'est pas prise en compte dans le calcul de la norme de dépenses .

C'est par exemple le cas de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques affectée à France Télévisions ou de la taxe affectée aux établissements publics d'aménagement de Guyane et de Mayotte, qui n'étaient jusqu'en 2017 pas intégrées au champ de l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 mais dont le produit était néanmoins plafonné par des dispositions législatives 379 ( * ) .

La différence de traitement au regard de la norme de dépenses entre ces deux types de plafonnement paraît difficile à justifier , dans la mesure où les plafonds fixés sont identiques dans leur objet comme dans leurs effets.

b) La possibilité pour certains opérateurs de déterminer eux-mêmes, dans les limites du plafond défini par l'État, le montant de recettes fiscales à recouvrer

Il faut signaler un cas particulier de plafonnement, qu'il soit prévu à l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 ou par une autre disposition législative : le montant du produit de la taxe à recouvrer peut parfois être fixé par l'organisme qui en bénéficie dans la limite du plafond fixé par la loi .

En d'autres termes, bien qu'un plafond soit fixé, c'est l'opérateur qui détermine le niveau de ressources fiscales dont il a besoin pour assurer son fonctionnement . Cette possibilité ne permet pas au Parlement, contrairement à l'objectif du plafonnement des taxes affectées tel que présenté par le Gouvernement, de « décider du niveau des ressources des opérateurs de l'État et autres organismes affectataires, d'une façon comparable à celle qui serait mise en oeuvre dans le cas d'un financement par subvention budgétaire » 380 ( * ).

C'est par exemple le cas des taxes spéciales d'équipement affectées aux établissements publics fonciers .

c) Des plafonds parfois supérieurs au rendement attendu

Certains plafonds sont supérieurs au rendement attendu de la taxe , ce qui entraîne deux séries de conséquences qui peuvent entrer en contradiction avec les objectifs affichés du plafonnement des taxes affectées.

Par exemple, le plafond de la taxe pour frais de contrôle sur les activités de transport public routier, affectée à l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), est fixé à 1,1 million d'euros en 2017, alors même que le produit attendu s'élève à 100 000 euros, soit onze fois moins. De même, l'indemnité de défrichement affectée à l'Agence de services et de paiement (ASP) est plafonnée à 2 millions d'euros en 2017 contre un rendement attendu de 200 000 euros, soit dix fois moins.

Or une telle pratique fausse l'appréciation, par le Parlement, des moyens financiers réels dont dispose l'opérateur .

Au surplus, cela signifie que l'affectataire peut bénéficier de ressources supplémentaires en fonction de la dynamique de l'assiette , alors même que l'objet du plafonnement est justement d'éviter que les recettes de l'opérateur ne soient décorrélées de ses besoins réels et des dépenses prévues ex ante. Cette situation ne pourrait se justifier qu'à la condition que le lien entre le rendement de la taxe et les activités de l'opérateur soit direct, ce qui ne paraît pas toujours être le cas .

Enfin, un plafond bien supérieur au rendement de la taxe peut être diminué sans aucun effort d'économies réelles de la part de l'affectataire . Dans la mesure où les plafonds prévus à l'article 46 de la loi de finances initiale sont pris en compte dans la norme de dépenses , une réduction du plafond est assimilée à une baisse des dépenses alors même qu'il peut s'agir d'un simple jeu d'écriture sans aucune conséquence concrète ni sur les ressources dont dispose effectivement l'affectataire, ni sur ses dépenses.

C. DES RÈGLES PROGRAMMATIQUES EN MATIÈRE D'AFFECTATION DE RESSOURCES FISCALES, À LA PORTÉE POUR L'HEURE LIMITÉE

1. La loi de programmation pour les années 2014 à 2019

La loi de programmation pour les années 2014 à 2019 prévoyait plusieurs dispositions visant à limiter et encadrer le recours à l'affectation de recettes fiscales à des tiers . Ainsi, outre un montant minimal de baisse du plafond des taxes affectées incluses dans l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 (à périmètre constant) 381 ( * ) , le recours à une affectation de recettes fiscales était - en principe - restreint à trois cas alternatifs 382 ( * ) (quasi-redevance, prélèvement sectoriel ou contribution assurantielle). Au surplus, toute nouvelle affectation de taxe devait d'une part être plafonnée, d'autre part s'accompagner de la suppression d'une ou plusieurs impositions affectées d'un rendement équivalent à celui de la taxe dont l'affectation est prévue. Enfin, toutes les taxes affectées devaient être plafonnées à compter du 1 er janvier 2016. Celles qui ne l'auraient pas été pas au 1 er janvier 2017 se devaient faire l'objet d'une rebudgétisation.

Ces règles n'ont cependant pas été respectées , comme en témoigne la création de nouvelles taxes affectées au profit des centres techniques industriels en loi de finances initiale pour 2016 ou la persistance de nombreuses taxes affectées non plafonnées sans que cette dérogation ne soit justifiée par des éléments objectifs et factuels.

Le montant de taxes affectées non plafonnées s'élève à environ 1,7 milliard d'euros (hors secteurs local et social). Les ressources dont bénéficie le centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) représentent près de 40 % du total.

Taxes affectées non plafonnées

(en millions d'euros et en %; par ordre décroissant)

Opérateur et taxe

Produit de la taxe

En % du total

CNC - Centre national du cinéma et de l'image animée

654,68

38,9%

Cotisations (normale et supplémentaire) des entreprises cinématographiques

8,40

0,5%

Taxe et prélèvements spéciaux au titre des films pornographiques ou d'incitation à la violence

0,00

0,0%

Taxe sur les ventes et les locations de vidéogrammes destinés à l'usage privé du public (taxe vidéo et VOD)

17,97

1,1%

TSA - Taxe sur le prix des entrées aux séances organisées par les exploitants d'établissements de spectacles cinématographiques

134,84

8,0%

TST - Taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision - Fraction Distributeurs

218,93

13,0%

TST - Taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision - Fraction Éditeurs

274,54

16,3%

CGLLS - Caisse de garantie du logement locatif social

393,48

23,4%

Cotisation additionnelle versée par les organismes HLM et les SEM

159,13

9,5%

Cotisation versée par les organismes HLM et les SEM

234,35

13,9%

INPI - Institut national de la propriété industrielle

195,90

11,7%

Redevances perçues à l'occasion des procédures et formalités en matière de propriété industrielle ainsi que de registre du commerce et des sociétés, établies par divers textes

195,90

11,7%

ONEMA - Office national de l'eau et des milieux aquatiques
(hors part dédiée à Ecophyto)

139,00

8,3%

Redevances des agences de l'eau

139,00

8,3%

ANDRA - Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs

134,06

8,0%

Contribution spéciale pour la gestion des déchets radioactifs - Conception

134,06

8,0%

ANFr - Agence nationale des fréquences

95,30

5,7%

Affectation d'une partie du produit de cession de la bande des 700 Mhz

95,30

5,7%

ONEMA - Office national de l'eau et des milieux aquatiques

41,00

2,4%

Prélèvement sur la redevance pour pollutions diffuses (fraction Ecophyto)

41,00

2,4%

ANSéS - Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation,
de l'environnement et du travail

19,55

1,2%

Taxe annuelle portant sur les autorisations de médicaments vétérinaires et les autorisations d'établissements pharmaceutiques vétérinaires

3,30

0,2%

Taxe annuelle relative à l'évaluation et au contrôle de la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et à leurs adjuvants

9,50

0,6%

Taxe liée aux dossiers de demande concernant les médicaments vétérinaires ou les établissements pharmaceutiques vétérinaires

4,00

0,2%

Taxe sur les déclarations et notifications de produit du tabac

2,75

0,2%

Autres (divers opérateurs)

8,31

0,5%

Total général

1 681,28

100,0%

Source : commission des finances du Sénat (à partir des réponses du Gouvernement au questionnaire du rapporteur général)

2. Le projet de loi de programmation pour les années 2018 à 2022

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 présenté par le Gouvernement reprend pour partie, à son article 15, les dispositions de la précédente loi de programmation concernant l'affectation de ressources fiscales. Ainsi, il prévoit qu'à partir du 1er janvier 2018, une ressource fiscale ne pourrait être affectée à un tiers (hors secteurs local et social) que si elle répond à l'un des trois critères alternatifs suivants, proches des conditions fixées par l'article 16 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 :

- résulter d'un service rendu par l'affectataire à un usager. Son montant doit alors pouvoir s'apprécier « sur des bases objectives » ;

- financer, au sein d'un secteur d'activité ou d'une profession, des actions d'intérêt commun ;

- financer des fonds nécessitant la constitution régulière de réserves financières.

En outre, est affirmé le principe du plafonnement des recettes fiscales affectées à des opérateurs et à divers établissements sectoriels au sein de l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 - en théorie, le plafonnement est censé constituer la règle et son absence l'exception.

La commission des finances du Sénat a modifié le texte de projet de loi pour compléter le dispositif par un ajustement automatique du montant du plafond au produit attendu au titre de l'imposition considérée afin d'amélioration la sincérité des documents budgétaires.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. L'AJUSTEMENT DU PLAFOND DE CERTAINES TAXES AFFECTÉES

Le I de l'article ajuste le montant des plafonds des taxes affectées.

Doivent être distingués deux cas : les plafonds déjà intégrés au dispositif de l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 d'une part, éventuellement modifiés à la hausse, à la baisse ou supprimés, les nouveaux plafonds ajoutés par le présent article d'autre part.

1. À périmètre constant, une réduction prévisionnelle nette d'environ 300 millions d'euros des plafonds en 2018

En cumulant la hausse nette des plafonds, équivalente à 380 millions d'euros et la baisse nette des plafonds de 712 millions d'euros, le plafonnement à périmètre constant de la fiscalité affectée aux organismes chargés d'un service public diminue de 300 millions d'euros pour l'année 2018.

a) Une hausse des plafonds existants d'environ 350 millions d'euros, principalement portée par la fraction de TICPE affectée à l'Afitf

Les hausses de plafonds prévues par le présent article du projet de loi de finances sont relativement limitées, à l'exception du relèvement du plafonnement la fraction de taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE) affectée à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), qui progresse de 341,4 millions d'euros.

Six organismes chargés d'une mission de service public devraient connaître une augmentation du montant total des plafonds s'appliquant à la fiscalité affectée dont ils bénéficient entre 2017 et 2018. En parallèle, sept taxes liées à ces organismes sont également concernées par une hausse du plafond.

L'évolution la plus notable en montant concerne l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf). Cette agence bénéficie de fonds importants, et d'un plafond globalement en hausse depuis 2014. Entre 2017 et 2018, son plafond serait relevé de 18,9 %. Or, deux taxes lui sont affectées, la taxe due par les concessionnaires d'autoroute et une part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) Si le plafonnement de la taxe due par les concessionnaires d'autoroute décroit de 16,5 % pour atteindre 88 millions d'euros, celui de la TICPE augmente dans des propositions importantes entre 2017 et 2018, avec une hausse de 46,4 % (soit 341,4 millions d'euros). Cette hausse du plafonnement de la TICPE représente 96,4 % du total des hausses de plafond enregistrées dans le présent projet de loi de finances.

La hausse des taxes affectées à l'Afitf doit être replacée dans l'ensemble de ses ressources : au total, en 2018, le budget de l'Afitf progressera de 298 millions d'euros, soit une hausse de 13,8 %.

Les recettes de l'AFITF en 2017 et en 2018

(en millions d'euros et en %)

2017

2018

2018/2017

Taxe d'aménagement du territoire

565

472

-16,5 %

Redevance domaniale

350

355

+1,4 %

Amendes radars

400

450

+12,5 %

TICPE

735

1 076

+46,4 %

Plan de relance autoroutier

100

60

-40,0 %

Versement région Normandie

-

35

+100 %

Total

2 150

2 448

+ 13,8 %

Source : commission des finances du Sénat

Les recettes de l'AFITF devraient représenter 2,5 milliards d'euros et lui permettre de couvrir ses dépenses prévues pour 2018 .

Le Centre technique des industries de la fonderie bénéficie d'un relèvement de son plafond de 25 %, et la Société du Grand Paris bénéficie d'un relèvement du plafond de 1,9 %, permis par une hausse du plafond de deux des trois taxes la finançant, à savoir l'imposition forfaitaire sur le matériel roulant et la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux dans la région Île-de-France.

Certaines évolutions sont particulièrement importantes au regard du budget de l'affectataire, mais portent sur des montants moins significatifs en valeur absolue : le plafond de l'Établissement public foncier et d'aménagement de Mayotte est par exemple relevé de 220 %, mais cette hausse concerne une somme totale de 400 000 euros en 2018.

Plafonds relevés par le présent projet d'article

(en millions d'euros et en %)

Affectataire
Taxe affectée

2014

2015

2016

2017

2018

2018 Vs. 2017

2018 Vs. 2017 en %

En % de la hausse totale

Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf)

610,0

1 700,0

1 281,0

1 306,0

1 553,2

247,2

18,9%

s.o.

Taxe due par les concessionnaires d'autoroutes

610,0

561,0

566,0

571,0

476,8

-94,2

-16,5%

s.o.

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

1 139,0

715,0

735,0

1 076,4

341,4

46,4%

96,4%

Centre technique des industries de la fonderie

1,2

4,0

5,0

1,0

25,0%

0,3%

Taxe pour le développement des industries de la fonderie

1,2

4,0

5,0

1,0

25,0%

0,3%

Établissement public foncier et d'aménagement de Guyane

3,0

3,5

0,5

16,7%

0,1%

Taxe spéciale d'équipement

3,0

3,5

0,5

16,7%

0,1%

Établissement public foncier et d'aménagement de Mayotte

0,1

0,4

0,3

220,0%

0,1%

Taxe spéciale d'équipement

0,1

0,4

0,3

220,0%

0,1%

Institut des corps gras

0,4

0,6

0,7

0,2

26,8%

0,0%

Taxe affectée au financement de l'Institut des corps gras

0,4

0,6

0,7

0,2

26,8%

0,0%

Société du Grand Paris (SGP)

527,0

552,0

532,0

568,0

579,0

11,0

1,9%

3,1%

Imposition forfaitaire sur le matériel roulant

60,0

60,0

65,0

66,0

67,0

1,0

1,5%

0,3%

Taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux dans la région Île-de-France

350,0

375,0

350,0

385,0

395,0

10,0

2,6%

2,8%

Taxe spéciale d'équipement

117,0

117,0

117,0

117,0

117,0

0,0

0,0%

0,0%

Total

1 137,0

2 252,0

1 814,6

1 881,7

2 141,8

354,3

18,8%

100,0%

Note de lecture : s.o. = sans objet. Par ailleurs, dans le cas où un affectataire bénéficie de plusieurs taxes dont seules certaines voient leur plafond relevé, l'ensemble des taxes affectées plafonnées est présenté pour chaque affectataire concerné afin de permettre l'appréhension de l'évolution du total des ressources fiscales affectées à chaque opérateur. Cependant, les lignes ne correspondant pas à des augmentations de plafond sont grisées et ne sont pas prises en compte dans la détermination du total général de la hausse des plafonds.

Source : commission des finances du Sénat, d'après le présent projet de loi de finances et les lois de finances pour 2014, 2015, 2016 et 2017

b) Une baisse des plafonds de 712 millions d'euros à périmètre constant, dont plus du quart porte sur les agences de l'eau

Un nombre conséquent d'organismes chargés d'une mission de service public verraient le plafonnement de leur fiscalité affectée abaissé pour l'année 2018, à périmètre constant. Les agences de l'eau figurent parmi les affectataires les plus fortement concernés par cette redéfinition à la baisse des plafonds, qui se chiffre au total à 712 millions d'euros à périmètre constant.

Plafonds abaissés par le présent projet d'article

(en millions d'euros et en %)

Affectataire
Taxe affectée

2014

2015

2016

2017

2018

2018 Vs. 2017

En % par rapport à 2017

En % par rapport au total

Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf)

610,0

1 700,0

1 281,0

1 306,0

1 553,2

247,2

18,9%

s.o.

Taxe due par les concessionnaires d'autoroutes

610,0

561,0

566,0

571,0

476,8

-94,2

-16,5%

13,2%

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

1 139,0

715,0

735,0

1 076,4

341,4

46,4%

s.o.

Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA)

120,0

100,0

85,0

70,0

65,0

-5,0

-7,1%

0,7%

Taxe additionnelle à la taxe sur les installations nucléaires de base - Recherche

120,0

100,0

85,0

70,0

65,0

-5,0

-7,1%

0,7%

Agence pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en Guadeloupe

1,7

1,6

1,5

-0,1

-6,2%

0,0%

Taxe spéciale d'équipement

1,7

1,6

1,5

-0,1

-6,2%

0,0%

Agence pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en Martinique

1,7

1,6

1,5

-0,1

-6,2%

0,0%

Taxe spéciale d'équipement

1,7

1,6

1,5

-0,1

-6,2%

0,0%

Agences de l'eau

2 300,0

2 300,0

2 105,0

-195,0

-8,5%

27,4%

Taxes affectées aux agences de l'eau

2 300,0

2 300,0

2 105,0

-195,0

-8,5%

27,4%

Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)

205,0

195,0

190,0

190,0

188,0

-2,0

-1,1%

0,3%

Contributions pour frais de contrôle

205,0

195,0

190,0

190,0

188,0

-2,0

-1,1%

0,3%

Centre national pour le développement du sport (CNDS)

272,2

270,0

264,3

270,0

133,4

-136,6

-50,6%

19,2%

Contribution sur la cession à un service de télévision des droits de diffusion de manifestations ou de compétitions sportives

40,9

40,9

40,9

40,9

25,0

-15,9

-38,9%

2,2%

Prélèvement complémentaire temporaire 2011-2015 "UEFA Euro 2016" sur les jeux exploités par la FdJ hors paris sportifs

24,0

24,0

27,6

25,5

-25,5

-100,0%

3,6%

Prélèvement sur les jeux exploités par la FdJ hors paris sportifs

176,3

170,5

163,5

159,0

73,8

-85,2

-53,6%

12,0%

Prélèvement sur les paris sportifs en ligne de la FdJ et des nouveaux opérateurs agréés

31,0

34,6

32,3

44,6

34,6

-10,0

-22,4%

1,4%

Chambres de commerce et d'industrie

1 268,0

1 055,1

925,1

925,1

775,1

-150,0

-16,2%

21,1%

TA-CFE - fraction CCI-R de la Taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises pour frais de chambres de commerce et d'industrie de région

549,0

549,0

549,0

549,0

549,0

0,0

0,0%

s.o.

TA-CVAE - Taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises pour frais de chambres de commerce et d'industrie de région

719,0

506,1

376,1

376,1

226,1

-150,0

-39,9%

21,1%

Chambres de métiers et de l'artisanat

245,0

244,0

243,0

243,0

243,0

0,0

0,0%

s.o.

Contribution à la formation professionnelle des micro-entrepreneurs

39,9

39,9

s.o.

s.o.

TA-CFE - fraction CRMA de la Taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises pour frais de chambre régionale de métiers et d'artisanat

245,0

244,0

243,0

243,0

203,1

-39,9

-16,4%

5,6%

Établissement public foncier de Normandie

22,1

14,3

17,9

15,0

-3,0

-16,5%

0,4%

Taxe spéciale d'équipement

22,1

14,3

17,9

15,0

-3,0

-16,5%

0,4%

Établissement public foncier de Provence-Alpes-Côte d'Azur

83,7

83,7

83,7

56,5

-27,2

-32,5%

3,8%

Taxe spéciale d'équipement

83,7

83,7

83,7

56,5

-27,2

-32,5%

3,8%

France Télévisions

166,1

86,4

-79,7

-48,0%

11,2%

Taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques

166,1

86,4

-79,7

-48,0%

11,2%

Voies navigables de France (VNF)

142,6

139,7

132,8

132,8

127,8

-5,0

-3,8%

0,7%

Taxe sur les titulaires d'ouvrages de prise d'eau, rejet d'eau ou autres ouvrages hydrauliques

142,6

139,7

132,8

132,8

127,8

-5,0

-3,8%

0,7%

Total général

2 862,8

3 809,7

5 522,6

5 707,9

5 351,5

-712,2

-12,5%

100,0%

Note de lecture : s.o. = sans objet. Par ailleurs, dans le cas où un affectataire bénéficie de plusieurs taxes dont seules certaines voient leur plafond abaissé, l'ensemble des taxes affectées plafonnées est présenté pour chaque affectataire concerné afin de permettre l'appréhension de l'évolution du total des ressources fiscales affectées à chaque opérateur. Cependant, les lignes ne correspondant pas à des baisses de plafond sont grisées et ne sont pas prises en compte dans la détermination du total général de la baisse des plafonds.

Source : commission des finances du Sénat, d'après le présent projet de loi de finances et les lois de finances pour 2014, 2015, 2016 et 2017

Onze organismes chargés d'une mission de service public et seize taxes afférentes devraient voir leur niveau de plafonnement diminuer en 2018. Ainsi, la baisse totale du plafonnement s'élève à 712,2 millions d'euros.

Elle est principalement supportée par les Agences de l'eau, suivies des Chambres de commerce et d'industrie puis du Centre national pour le développement du sport (CNDS), contribuant respectivement à 27,4 %, 21,2 % et 19,2 % du total des baisses de plafonnements, soit des diminutions nettes pour ces organismes de 195 millions d'euros, 150 millions d'euros et 136,6 millions d'euros.

Concernant les chambres de commerce et d'industrie, qui sont alimentées à la fois par la contribution foncière sur les entreprises (CFE) et la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), tandis que le plafond de la première reste stable à 549 millions d'euros, le plafond de la part de CVAE dédiée au financement des chambres de commerce diminue, quant à lui, dans des proportions très significatives puisque la réduction du plafond équivaut à une baisse de 40 % par rapport au montant affecté en 2017.

Le CNDS voit le plafond de sa fiscalité transférée abaissé de plus de moitié : en effet, il passe de 270 millions d'euros en 2017 à 133,4 millions d'euros en 2018, soit une diminution de 50,6 %. Toutefois, cette baisse intègre la rebudgétisation d'une des taxes affectées à cet organisme, jusqu'alors plafonnée à 25,5 millions d'euros. La baisse des ressources affectées au CNDS s'élève donc, à périmètre constant, à environ 111 millions d'euros.

2. L'évolution du périmètre du plafonnement

Le Gouvernement indique que deux taxes sont intégrées au périmètre du plafonnement. En réalité, l'un de ces deux mouvements correspond à un retour à la situation antérieure et la seule extension réelle du périmètre correspond à l'intégration du fonds de prévention des risques naturels et majeurs au sein du dispositif de plafonnement.

a) Une seule extension réelle du périmètre du plafonnement : l'intégration du fonds de prévention des risques naturels majeurs

Le Gouvernement propose la création d'un plafonnement pour la taxe affectée au fonds de prévention des risques naturels et majeurs, à hauteur de 137 millions d'euros.

Cet établissement, créé en 1995 383 ( * ) , et dont les compétences se sont récemment étendues au financement d'action de prévention concourant à la sécurisation des personnes et biens exposés à des risques naturels, est alimenté par le prélèvement sur le produit des primes ou cotisations additionnelles relatives à la garantie contre le risque de catastrophes naturelles.

Nouvelles lignes de plafonnement créées par l'article 19
du projet de loi de finances pour 2018

(en millions d'euros)

Étiquettes de lignes

2014

2015

2016

2017

2018

Chambres de métiers et de l'artisanat

245,0

244,0

243,0

243,0

243,0

Contribution à la formation professionnelle des micro-entrepreneurs

39,9

Fonds d'assurance formation des chefs d'entreprise inscrits au répertoire des métiers mentionné au III de l'article 8 de l'ordonnance n° 2003-1213 du 18 décembre 2003

54,0

54,0

54,0

54,0

Contribution à la formation professionnelle des micro-entrepreneurs

54,0

Contribution assise sur le montant annuel du plafond de la sécurité sociale

54,0

54,0

54,0

Fonds de prévention des risques naturels et majeurs

137,0

Prélèvement sur le produit des primes ou cotisations additionnelles relatives à la garantie contre le risque de catastrophes naturelles

137,0

Total général

245,0

298,0

297,0

297,0

492,5

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents budgétaires)

b) Le replafonnement de la ressource affectée au fonds d'assurance formation des chefs d'entreprise

La contribution à la formation professionnelle des artisans non micro entrepreneurs était affectée respectivement à des actions de formation menées par les chambres régionales des métiers et de l'artisanat (CMA) et au fonds d'assurance formation des chefs d'entreprise artisanale (FAFCEA). L'article 41 de la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a eu pour effet de supprimer le plafonnement des ressources affectées à ces organismes.

Le présent article prévoit le « replafonnement » de ces deux ressources, tant pour les chambres de métiers et d'artisanat (CMA) que pour les FAFCEA, ce qui se traduit par l'ajout de deux lignes supplémentaires au sein du tableau de l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2016.

Ces mouvements ne sauraient cependant s'assimiler à une extension du périmètre du plafonnement : les plafonds existaient déjà, mais portaient sur une ressource supprimée par la loi du 8 août 2016.

c) Le relèvement des ressources affectées à deux établissements publics fonciers en lien avec l'extension de leur périmètre d'intervention

Le plafonnement de la ressource affectée au profit de deux établissements publics fonciers est revu en raison de l'extension de leur périmètre d'intervention : il s'agit des établissements publics fonciers des régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie, résultant de la réforme territoriale mise en oeuvre en 2016 384 ( * ) .

Une hausse importante du niveau de plafonnement de ces établissements est prévue par le Gouvernement : en effet, le plafond de l'établissement public foncier de l'ancienne région Poitou-Charentes, remplacée par celui de la région Nouvelle-Aquitaine 385 ( * ) , passerait de 9,9 à 25,5 millions d'euros, soit une hausse de 150 % environ.

Concernant l'établissement public foncier de l'ancienne région Languedoc-Roussillon, remplacé par celui de la région Occitanie 386 ( * ) , il passe de 19,2 à 30 millions d'euros, soit une hausse de 56 % environ.

Il ne s'agit donc pas à proprement parler d'un plafonnement nouveau ni d'une hausse du plafond à périmètre constant, mais de la redéfinition de ce dernier à la suite de l'extension géographiques des compétences de ces deux organismes, dont les zones d'intervention se sont accrues.

En effet, la région Nouvelle Aquitaine englobe, en plus de l'ancienne région Poitou-Charentes, l'Aquitaine et le Limousin, tandis que l'Occitane regroupe les anciennes régions du Languedoc-Roussillon et des Midi-Pyrénées.

d) Deux taxes rebudgétisées pour un montant total d'environ 475 millions d'euros

Le Gouvernent propose de réintégrer au sein du budget de l'État deux taxes, la taxe générale sur les activités polluantes 387 ( * ) et un prélèvement complémentaire temporaire « UEFA Euro 2016 » portant sur les jeux exploités par la Française des Jeux hors paris sportifs, 388 ( * ) alimentant respectivement l'ADEME et le CNDS.

Ces rebudgétisations ont pour conséquence la sortie de ces deux taxes du champ de la fiscalité affectée, réduisant ainsi le montant total de son plafonnement de 475 millions d'euros.

e) La suppression du Fonds national de promotion et de communication de l'artisanat, jusqu'ici financé par une ressource fiscale affectée

Le Fonds national de promotion et de communication de l'artisanat était jusqu'alors financé par « un droit égal à 10 % maximum du droit fixe revenant aux chambres régionales de métiers et de l'artisanat ou aux chambres de métiers et de l'artisanat de région » 389 ( * ) . Le présent projet de loi propose la suppression de ce fonds 390 ( * ) . Par conséquent, cette ressource fiscale affectée et son plafonnement sont amenés à disparaitre.

3. Une modification des modalités d'affectation de la taxe sur les transactions financières au Fonds de solidarité pour le développement

La taxe sur les transactions financières (TTF) était jusqu'alors affectée à l'Agence française de développement (AFD) 391 ( * ) , qui avait la charge de la gestion du Fonds de solidarité pour le développement (FSD), créé en 2005.

Le présent projet de loi propose de retirer cette affectation à l'AFD, soit une diminution de ses ressources de 270 millions d'euros, et d'affecter cette somme directement au FSD pour un montant identique de 270 millions d'euros. Ceci explique que le plafond s'appliquant à la fraction de cette taxe affectée au FSD passe d'un niveau de 528 millions d'euros à un montant de 798 millions d'euros.

Cette modification intervient à la suite de la réforme du FSD en 2016 392 ( * ) , qui a notamment élargi ses champs d'intervention.

B. LA MODIFICATION DE CERTAINES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES RELATIVES À DES TAXES AFFECTÉES

1. La mise en cohérence des dispositions législatives préexistantes avec les créations et les suppressions de plafonnements prévues

Le Gouvernement propose tout d'abord, pour assurer la cohérence juridique des plafonnement créés, de modifier l'article 561-3 du code de l'environnement portant sur le fonds de prévention des risques naturels majeurs, en précisant que le fonds est alimenté par un prélèvement sur le produit des primes ou cotisations additionnelles relatives à la garantie contre le risque de catastrophes naturelles, « dans les limites du plafond prévu au I de l'article 46 de la loi n° 2011-1977 de finances pour 2012 » 393 ( * ) .

De plus, le Gouvernement propose de modifier le code du travail 394 ( * ) pour y inclure le plafonnement de la contribution versée au fonds d'assurance formation des chefs d'entreprise : ainsi, il propose de modifier la rédaction de l'article L. 6331-48 du code du travail pour y inclure l'affectation de la taxe concernée au fonds d'assurance formation des chefs d'entreprise et la participation des travailleurs indépendants au financement des chambres des métiers et de l'artisanat.

Concernant la suppression de plafonds, le Gouvernement propose de supprimer l'article L.131-5-1 du code de l'environnement, permettant ainsi de procéder à la rebudgétisation de la taxe qui alimentait l'ADEME, et de modifier l'article L. 1609 novovicies du code général des impôts, en supprimant l'affectation, et donc le plafonnement du prélèvement complémentaire effectué sur le prélèvement général portant sur les sommes misées sur les jeux exploités en France.

Enfin, la suppression du fonds de promotion et de communication de l'artisanat est effectuée par l'abrogation de l'article 1601 A du code général des impôts, ce qui acte par conséquent de la suppression de la taxe affectée à ce fonds. Le Gouvernement propose également de supprimer la mention de l'article 235 ter ZD du code général des impôts qui permettait d'affecter à l'AFD une part de la taxe sur les transactions financières dans les limites de l'article 46 de la loi de finances pour 2012.

2. La définition du mode de répartition de la contribution des micro-entrepreneurs aux chambres de métiers et d'artisanat

La contribution des micro-entrepreneurs aux chambres de métiers et d'artisanat est fixée par l'article L. 6331-48 du code du travail, dans sa version à venir 395 ( * ) .

Les travailleurs indépendants immatriculés au répertoire des métiers et affiliés à la sécurité sociale participent au financement du fonds d'assurance formation de non-salariés. Les travailleurs indépendants immatriculés au répertoire des métiers mais non affiliés à la sécurité sociale participent au financement des chambres des métiers et d'artisanat et au fonds d'assurance-formation des chefs d'entreprise.

Le présent article du projet de loi de finances détermine le mode de répartition de la contribution aux chambres des métiers d'artisanat, en proposant la modification de l'article L. 6331-50 du code du travail : il s'agirait de répartir les contributions entre les chambres des métiers et de l'artisanat au prorata des appels à contributions qu'elles ont émis en année N-1 auprès des travailleurs indépendants de la zone géographique qu'elles recouvrent.

C. UNE HAUSSE DE 105 MILLIONS D'EUROS DE LA CONTRIBUTION DES BAILLEURS SOCIAUX AU FINANCEMENT DU FONDS NATIONAL DES AIDES À LA PIERRE (FNAP)

Le financement du fonds national des aides à la pierre repose en partie sur une fraction des cotisations versées par les bailleurs sociaux 397 ( * ) .

Le Gouvernement propose de relever le montant de la fraction prélevée sur ces cotisations pour financer le Fnap de 105 millions d'euros, pour le porter à 375 millions 398 ( * ) .

Cette mesure ne constitue pas un plafond, mais fixe le montant effectivement distribué au Fnap. Elle intervient en contrepartie de la réduction à 50 millions d'euros de la contribution de l'État aux aides à la pierre (contre 200 millions d'euros en LFI 2017). À l'Assemblée nationale, en première lecture, une taxe sur le produit des cessions de logements réalisé par les bailleurs sociaux a été créée à l'article 52 quater . Son produit est prévu pour alimenter également le Fnap, dans le cadre de cette fraction.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Outre des modifications rédactionnelles, plusieurs amendements adoptés par l'Assemblée nationale ont conduit à la création de deux plafonds supplémentaires au profit de la société nationale de sauvetage en mer pour un montant de 8 millions d'euros 399 ( * ) et à un relèvement des plafonds de 189 millions d'euros à périmètre constant.

Ainsi, à l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à rehausser le plafond des ressources affectées à l'Autorité du contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), qui passerait de 190 millions d'euros à 195 millions d'euros. Cette hausse est justifiée, selon le Gouvernement, par le développement des activités de l'ACPR, notamment dans les domaines de la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.

A également été votée, à l'initiative du rapporteur général de la commission des finances, Joël Giraud, une hausse du plafond de la ressource affectée au Fonds d'assurance formation des chefs d'entreprise artisanale (FAFCEA) afin de l'ajuster à son rendement prévisionnel. Le tome I de l'annexe « Voies et Moyens » présente ainsi une estimation de 60,8 millions d'euros pour le rendement des contributions au FAFCEA, dont le plafond est par conséquent relevé de 7 millions d'euros pour éviter un écrêtement.

Évolution des ressources affectées aux organismes concourant à une mission de service public à la suite des votes de l'Assemblée nationale

(en millions d'euros)

2014

2015

2016

2017

2018

pré AN

2018 post AN

Incidence votes AN

Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)

205

195

190

190

188

195

7

FAFCEA

54

54

54

54

61

7

Organismes de secours et de sauvetage en mer agréés

1

9

8

Agences de l'eau

2 300

2 300

2 105

2 280

175

Total

197

Total à périmètre constant

189

Total à périmètre constant net du prélèvement sur les ressources des agences de l'eau

-11

Source : commission des finances du Sénat (à partir des amendements adoptés par l'Assemblée nationale)

La hausse la plus importante concerne les agences de l'eau, dont le plafond est relevé de 175 millions d'euros, passant de 2 105 millions d'euros à 2 280 millions d'euros, soit un montant cependant un peu inférieur au plafond 2017 (qui s'établissait à 2 300 millions d'euros). Cependant, ce relèvement des plafonds est plus que compensé par un prélèvement de 200 millions d'euros sur les ressources des agences de l'eau.

En effet, la discussion à l'Assemblée nationale a fait apparaître la difficulté d'une baisse rapide du plafond des redevances sur l'eau, qui allait se traduire par une baisse des redevances elles-mêmes (dans la mesure où les agences fixent le niveau de la ressource dont elles bénéficient) et donc par une réduction du « signal prix » sur l'eau.

D'après les éléments de réponses transmis par le Gouvernement, « il a donc été privilégié un prélèvement la première année, le temps de lancer une réflexion sur l'avenir des redevances pesant sur l'eau », d'autant plus que leur structure est déformée entre pollueur et payeur - les particuliers payent plus qu'ils ne consomment, à l'inverse d'autres catégories de consommateurs.

La baisse du plafond a donc été reportée à 2019 et convertie en prélèvement, avec une légère hausse du montant pour « compenser » partiellement l'impact défavorable de la mesure sur la norme de dépense 2018. En effet, conformément au rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 et à la charte de budgétisation jointe au projet de loi de finances pour 2018, les prélèvements ne sont plus comptabilisés comme des « moindres dépenses » dans la norme de dépenses de l'État.

Le prélèvement sur les ressources accumulées par les agences de l'eau sera réparti entre les agences au prorata de leur part respective dans le total des redevances dont elles bénéficient. Il serait effectué en deux fois : 30 % serait perçu avant le 30 juin 2018 et 70 % avant le 30 novembre 2018.

L'Assemblée nationale a également prévu le maintien de l'affectation directe à l'Agence française de développement (AFD) d'une fraction du produit de la taxe sur les transactions financières pour un montant de 270 millions d'euros.

La dotation des fonds de péréquation des chambres de commerce et d'industrie a été relevée à hauteur de 20 millions d'euros à la suite de l'adoption de plusieurs amendements, dont un à l'initiative du rapporteur général de la commission des finances Joël Giraud : les ressources affectées aux « projets structurants de modernisation des chambres » ont été relevées de 18 millions d'euros pour atteindre 40,5 millions d'euros et les fonds dédiés aux « projets d'intérêt national en faveur de l'innovation et de la modernisation du réseau » ont été accrus de 2 millions d'euros, passant à 4,5 millions d'euros.

Cette progression de la dotation des fonds de péréquation ne correspond pas à une hausse nette des ressources des chambres de commerce et d'industrie : les fonds sont alimentés dans la limite des plafonds s'appliquant aux ressources fiscales affectées au réseau des CCI.

Deux amendements supplémentaires adoptés à l'initiative du rapporteur général de l'Assemblée nationale Joël Giraud ont modifié les conditions de versement des aides de ces fonds de dotation. Ainsi, un assouplissement des critères d'attribution des aides du fonds de péréquation versé par CCI France aux CCI régionales a été prévu : le taux de communes ou groupements de communes classés en zone de revitalisation rurale (ZRR) nécessaire pour bénéficier des fonds a été revu à la baisse de 66,6 % à 60 %. En outre, le bénéfice du fonds de péréquation pour les chambres de commerce et d'industrie infra-départementales a été conditionné à la mise en oeuvre d'un processus de fusion avant le 1 er août de chaque année.

Enfin, l'amendement n° I-606 adopté à l'initiative du rapporteur général Joël Giraud prévoit que le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1 er février 2018, un rapport étudiant les possibilités de rapprochement et de fusion du réseau des chambres de commerce et d'industrie (CCI) et du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat (CMA).

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Les taxes affectées aux opérateurs de l'État peuvent constituer un point de fuite de la dépense publique : alors même qu'elles permettent de financer les dépenses des opérateurs, elles ne sont pas retracées au sein du budget général de l'État et l'évolution de leur produit n'est pas nécessairement en adéquation avec les besoins de leur affectataire.

Cependant, le financement par affectation de ressources fiscales n'est pas, en tant que tel, un obstacle à la bonne gouvernance des finances publiques dès lors que le produit de l'affectation et son périmètre font l'objet d'ajustements réguliers, en lien avec les besoins des opérateurs et de façon à les inciter à la maîtrise de leurs dépenses et au développement de leurs ressources propres.

À cet égard, le plafonnement des taxes affectées permet non seulement de mieux maîtriser l'évolution des dépenses des organismes concourant à une mission de service public, mais aussi au Parlement de disposer d'une visibilité accrue et d'un levier d'action sur les moyens réels dont disposent les opérateurs : l'ajustement du plafond permet un débat comparable à ceux qui existent concernant les crédits budgétaires.

Il serait donc opportun que le mouvement amorcé par la loi de finances pour 2012 trouve un prolongement dans le présent projet de loi et que le périmètre du plafonnement soit étendu à l'ensemble des taxes affectées à des opérateurs hors secteurs local et social.

Or, contrairement au principe fixé à l'article 15 du projet de loi de programmation des finances publiques, le périmètre du plafonnement n'est que très peu étendu par le présent article et près de 1,7 milliard d'euros de taxes affectées demeurent non plafonnées. Le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) représente 40 % du montant total de ressources affectées demeurant hors du dispositif du plafonnement.

Les rebudgétisations sont également d'une ampleur limitée et concernent essentiellement le CNDS et l'Ademe . Le transfert vers le programme 219 « Sport » est bienvenu et prolonge le recentrage du CNDS sur son indispensable rôle de soutien au mouvement sportif dans les territoires. Toutefois, au-delà de la clarification des rôles entre le budget général et le CNDS, un important effort en dépenses est attendu de cet opérateur pour 2018, ce qui pourrait remettre en question sa capacité à soutenir la construction des équipements sportifs. Conjugué à la baisse des dotations aux collectivités territoriales, ce recul menace les objectifs par ailleurs promus par le Gouvernement en faveur du sport pour tous .

Un effort très significatif est également demandé aux agences de l'eau , qui ont déjà subi plusieurs prélèvements sur leurs ressources dans les dernières années : au total, celles-ci contribueraient à hauteur de 220 millions d'euros à l'équilibre du budget de l'État en 2018 .

Enfin, concernant l'évolution de l'affectation des recettes au Fonds de solidarité pour le développement, comme l'ont souligné les rapporteurs spéciaux de la mission « Aide publique au développement », le transfert de 270 millions d'euros de recettes de la taxe sur les transactions financières de l'AFD au Fonds de solidarité pour le développement (FSD) serait incohérent avec le souhait récurrent du Parlement de privilégier l'aide bilatérale plutôt que l'aide multilatérale. Cette priorité accordée à l'aide bilatérale correspond d'ailleurs au souhait du Président de la République, comme il l'a exprimé lors de la conférence des ambassadeurs le 29 août dernier.

Parallèlement, les prévisions révisées associées au projet de loi de finances pour 2018 concernant le produit des taxes affectées tendent à démontrer l'existence d'écrêtements au profit du budget de l'État particulièrement importants en 2017 : ils atteindraient 826 millions d'euros, contre une prévision initiale de 335 millions d'euros, soit une réévaluation à la hausse de près de 500 millions d'euros. Le surcroît de recettes finançant le budget de l'État découle principalement de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) affectée à l'Ademe (+ 194 millions d'euros), de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques (TOCE) affectée à France Télévisions (+ 128 millions d'euros) et de la fraction des droits de timbre sur les passeports sécurisés affectée à l'Agence nationale des titres sécurisés (+ 119 millions d'euros).

En 2018, la somme des écrêtements devrait, pour la première fois depuis la mise en oeuvre du mécanisme du plafonnement, dépasser le milliard d'euros.

Montant des écrêtements sur taxes affectées plafonnées
de 2014 à 2018

(en millions d'euros)

N.B. : le montant exécuté pour 2017 correspond à la prévision révisée présentée dans le tome I de l'annexe « Voies et moyens » au projet de loi de finances pour 2018.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents budgétaires)

Si l'existence d'écrêtements ne constitue pas, en soi, une anomalie, les montants atteints posent question. En effet, ceux-ci tendent à signifier soit que les taxes concernées n'ont pas pour principal objet de financer les entités qui en bénéficient - auquel cas une rebudgétisation des ressources pourrait être pertinente - soit que l'assiette de la taxe ne correspond pas aux besoins qu'elle est censée financer. Dans ce dernier cas, une redéfinition des modalités de calcul de la ressource fiscale semble opportune.

Il apparaît donc nécessaire d'engager une réflexion sur le périmètre des taxes affectées , afin d'éviter que des contributions payées par le contribuable pour financer des dépenses bien identifiées ne deviennent des « recettes de poche » pour l'État.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 19 bis (nouveau) (Art. 224 du code des douanes et L. 541-10-10 du code de l'environnement) - Report de la mise en oeuvre de la responsabilité élargie des producteurs (REP) de navires de plaisance ou de sport

. Commentaire : le présent article prévoit le report d'un an au 1 er janvier 2019 de la responsabilité élargie des producteurs (REP) de navires de plaisance ou de sport.

I. LE DROIT EXISTANT

La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a mis en place une responsabilité élargie des producteurs (REP) de navires de plaisance ou de sport .

L'article L.541-10-10 du code de l'environnement prévoit qu'à compter du 1 er janvier 2018 , toutes les personnes physiques ou morales qui mettent sur le marché national à titre professionnel des navires de plaisance ou de sport sont tenues de pourvoir au recyclage et au traitement des déchets issus de ces produits ou d'y contribuer en versant une éco-contribution à un éco-organisme . Le décret n° 2016-1840 du 23 décembre 2016 relatif au recyclage et au traitement des déchets issus des bateaux et navires de plaisance ou de sport a précisé les obligations qui incomberont aux professionnels lors de l'entrée en vigueur du dispositif.

En complément, l'article 224 du code des douanes dispose qu'une quote-part du produit brut du droit annuel de francisation et de navigation (DAFN) prévu à l'article 223 du même code 400 ( * ) est affecté à la gestion de la fin de vie des navires de plaisance ou de sport qui ne sont plus utilisés régulièrement et dont les propriétaires n'assument plus les charges afférentes.

Cette quote-part est plafonnée à 5 % du produit brut de la taxe . Son montant et l'organisme affectataire sont fixés annuellement par la loi de finances.

Le 6 de l'article 224 susmentionné fixe cette quote-part à 2 % pour les années 2018 et 2019 et prévoit que son montant est affecté aux éco-organismes agréés qui opèrent dans le cadre de la filière définie à l'article L. 541-10-10 du code de l'environnement, au prorata des mises sur le marché de leurs adhérents.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article est issu d'un amendement présenté par le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale . Il a reçu un avis favorable du Gouvernement .

Il vise à reporter au 1 er janvier 2019 , au lieu du 1 er janvier 2018, l'entrée en vigueur du dispositif de gestion de la fin de vie des navires de plaisance ou de sport prévu par les articles L. 541-10-10 du code de l'environnement et 224 du code des douanes.

Ainsi que le précise l'exposé des motifs de l'amendement à l'origine de l'article 19 bis , le dispositif de responsabilité élargie des producteurs (REP) de navires de plaisance ou de sport n'est à ce jour pas opérationnel , car aucun éco-organisme agréé affectataire de la quote-part de 2 % du produit brut du droit annuel de francisation et de navigation (DAFN) n'a pour le moment été désigné .

Dans l'attente de cette désignation, qui devrait intervenir en 2018, la quote-part de 2 % du produit brut du DAFN reste donc affectée au Conservatoire du littoral et des rivages lacustres , dans la limite d'un plafond fixé à 38,5 millions d'euros pour 2017 au I de l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012. Si le rendement de la taxe est supérieur à cette somme, les excédents sont reversés au budget général .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Le fait qu'aucun éco-organisme n'ait été agréé à ce stade pour gérer le recyclage et le traitement des déchets issus des navires de plaisance ou de sport rend de facto impossible la mise en place au 1 er janvier 2018 de la responsabilité élargie des producteurs (REP) de ces navires .

Il faudra que cet éco-organisme soit rapidement créé pour que le dispositif de REP entre effectivement en vigueur au 1 er janvier 2019 , sans quoi ce mécanisme écologiquement vertueux finira par perdre toute crédibilité .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 19 ter (nouveau) (Art. 71 de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative pour 2003) - Modulation du taux de prélèvement de la taxe affectée au centre technique industriel de la plasturgie et des composites (CTIPC)

. Commentaire : le présent article vise à permettre la modulation, par voie réglementaire, des taux de la taxe affectée au centre technique industriel de la plasturgie et des composites (CTIPC), dans la limite des taux plafonds fixés par la loi.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES CENTRES TECHNIQUES INDUSTRIELS

Les centres techniques industriels (CTI) sont des établissements d'utilité publique qui exercent des missions de développement économique et technique au service des entreprises d'une filière, souvent composées de PME et d'ETI n'ayant pas les moyens d'assumer le coût de ces missions « en interne » : recherche et développement, diffusion de technologies, formation, normalisation, certification et contrôle de la qualité, veille stratégique et technologique etc. Il existe aujourd'hui douze CTI, auxquels s'ajoutent quatre comités professionnels de développement économique (CPDE) , ces derniers menant également des actions de promotion, d'accompagnement des entreprises à l'international, de lutte contre la contrefaçon etc.

Les CTI et les CPDE peuvent être financés soit par une dotation budgétaire, soit par une taxe affectée , assise sur les produits vendus par les entreprises de la filière. Les neuf taxes affectées sont prévues par l'article 71 de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative pour 2003 401 ( * ) .

À la suite du rapport de Clotilde Valter du 7 octobre 2014 qui préconisait la généralisation du financement par taxe affectée 402 ( * ) , l'article 137 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2015 403 ( * ) a :

- institué deux nouvelles taxes affectées , au bénéfice du centre technique des industries de la fonderie (CTIF) d'une part, et de l'institut des corps gras (ITERG) d'autre part ;

- harmonisé et sécurisé les dispositions législatives encadrant l'ensemble des taxes affectées aux CTI et aux CPDE , s'agissant des missions que celles-ci sont susceptibles de financer d'une part, et des procédures de recouvrement, de contrôle et de recours d'autre part.

B. LA TAXE AFFECTÉE AU CTI DE LA PLASTURGIE ET DES COMPOSITES

Créé par le même article 137 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2015, le centre technique industriel de la plasturgie et des composites (CTIPC) est le plus récent des CTI.

Il est financé par une taxe affectée 404 ( * ) , due « par les fabricants établis en France des produits des secteurs de la transformation des matières plastiques et des composites à matrice organique » et assise sur le chiffre d'affaires hors taxes, et due par les importateurs, et assise sur la valeur en douane. Le taux de cette taxe est fixé en fonction du niveau de chiffre d'affaires :

Fraction de chiffre d'affaires imposable

Taux

Inférieure ou égale à 100 millions d'euros

0,05 %

Supérieure à 100 millions d'euros et inférieure à 200 millions d'euros

0,02 %

Supérieure ou égale à 200 millions d'euros

0,01 %

Pour 2016, par dérogation, les taux étaient fixés à un niveau inférieur , soit respectivement, à 0,025 %, 0,01 % et 0,005 %.

La taxe affectée au CTIPC est plafonnée à 6,5 millions d'euros à compter de 2017 405 ( * ) , après deux années de montée en charge avec un plafond à 3 millions d'euros. Les montants collectés au-delà de ce plafond sont écrêtés au profit du budget de l'État.

Or, compte tenu de l'activité du secteur de la plasturgie et des composites, le rendement prévu de cette taxe excède déjà le plafond d'environ 800 000 euros en 2017, et pourrait excéder ce plafond de plus de 3 millions d'euros dès 2018, soit un tiers du montant collecté .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de Joël Giraud, rapporteur général au nom de la commission des finances, vise à permettre, à compter du 1 er janvier 2018, de modifier chaque année, par décret, le taux de la taxe affectée au CTIPC , dans les limites suivantes :

Fraction de chiffre d'affaires imposable

Taux

Inférieure ou égale à 100 millions d'euros

de 0,025 % à 0,05 %

Supérieure à 100 millions d'euros et inférieure à 200 millions d'euros

de 0,01 % à 0,02 %

Supérieure ou égale à 200 millions d'euros

de 0,005 % à 0,01 %

Il ne serait donc plus nécessaire de passer par la loi pour abaisser les taux de la taxe affectée au CTIPC une année donnée . En revanche, une éventuelle hausse de ces taux au-delà des taux maximums existant nécessiterait toujours l'intervention du législateur.

Le présent article est issu d'un amendement présenté « à titre personnel » par Joël Giraud, rapporteur général au nom de la commission des finances. Il a reçu l'avis favorable de la commission des finances, ainsi que le soutien à titre personnel d'Éric Woerth, président de la commission des finances. Le Gouvernement a en revanche émis un avis de sagesse.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La souplesse introduite par le présent article dans la fixation du taux de la taxe affectée au CTIPC permettra d'adapter le niveau des prélèvements sur les entreprises du secteur, pour tenir compte des besoins réels de cet organisme et du plafond de 6,5 millions d'euros de l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances initiale pour 2012.

Ces prélèvements constituent en effet une fiscalité sectorielle, qui n'a pas vocation à alimenter le budget général . Le présent article est donc conforme à l'esprit des taxes affectées.

Cette possibilité existe déjà pour un autre CTI, l'Institut des corps gras (ITERG) , selon des modalités légèrement différentes puisqu'il s'agit d'un droit fixe : « le tarif de la taxe est fixé à 0,25 euro par tonne de produits commercialisés. Ce tarif peut être révisé chaque année par arrêté du ministre chargé de l'industrie dans la limite de 0,50 euro par tonne 406 ( * ) ».

Le présent article constitue essentiellement une mesure technique, à laquelle il n'y a pas lieu de s'opposer . Il n'en demeure pas moins que, sur le principe, la complexité de ces multiples taxes affectées est problématique.

Pour mémoire, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2016, la commission des finances avait proposé de supprimer l'article relatif aux taxes affectées aux CTI et CPDE pour des raisons de principe . En séance publique 407 ( * ) , votre rapporteur général avait notamment rappelé que « cet article crée des taxes extrêmement complexes . Dans un rapport, certes non public, de l'Inspection générale des finances, qui a examiné plus de 160 taxes à faible rendement, on découvre que le coût de recouvrement de nombre de ces taxes est supérieur à leur rendement ». Lors des débats en commission 408 ( * ) , votre rapporteur général avait aussi déclaré : « voyez par ailleurs la complexité de l'article - sa lecture prendrait une demi-heure, je vous l'épargnerai en séance. (...) Une pièce comportant du plastique et du métal sera-t-elle assujettie aux taxes sur le plastique et à celles sur le métal ? Et l'on prétend simplifier le code général des impôts ! On pourrait trouver des assiettes et des rédactions plus claires ».

À vrai dire, il est même permis de voir dans l'ajustement proposé par le présent article la confirmation du bien-fondé de cette position .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.


* 371 L'État alloue des fonds non consomptibles aux opérateurs qui, en contrepartie du dépôt de ces fonds au Trésor, bénéficient d'un financement censé correspondre à la rémunération des fonds.

* 372 Article 2 de la loi n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

* 373 I de l'article 34 de la LOLF.

* 374 Article 51 de la LOLF. Cette annexe est intégrée au tome I des évaluations des voies et moyens, qui récapitule les évaluations de recettes.

* 375 Loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

* 376 En principe, sont des opérateurs les organismes qui mènent une activité de service public, sont financés directement par l'État et sur lesquels l'État exerce un contrôle direct. Cependant, il est également possible de qualifier d'opérateur de l'État des organismes ne répondant pas à tous ces critères, mais considérés comme porteurs d'enjeux importants pour l'État : en définitive, c'est la proximité de l'établissement par rapport au budget et aux missions de l'État qui détermine la qualification d'un organisme comme opérateur de l'État. Dans la suite du présent commentaire d'article, le terme d'opérateur sera employé pour désigner l'ensemble des organismes affectataires de ressources fiscales.

* 377 Annexe « Voies et moyens » jointe au PLF 2018, p. 132.

* 378 Annexe « Voies et moyens » jointe au PLF 2018, p. 134.

* 379 Article 1609 B du code général des impôts pour l'établissement public foncier de Guyane et IV de l'article 48 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 concernant France Télévisions.

* 380 Tome I de l'annexe « Voies et Moyens » jointe au projet de loi de finances pour 2017, p. 141.

* 381 Article 15 de la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

* 382 Article 16 de la même loi.

* 383 par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement.

* 384 Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 385 Décret n° 2016-1267 du 28 septembre 2016 portant fixation du nom et du chef-lieu de la région Nouvelle-Aquitaine.

* 386 Décret n° 2016-1264 du 28 septembre 2016 portant fixation du nom et du chef-lieu de la région Occitanie.

* 387 Taxe prévue à l'article 266 sexies du code des douanes, qui était affectée à l'ADEME par l'article L. 131-5-1 du code de l'environnement.

* 388 Article 1609 novovicies du code général des impôts.

* 389 Article 1601 A du code général des impôts.

* 390 Par suppression de l'article 160 A du code général des impôts.

* 391 Article 235 ter ZD du code général des impôts.

* 392 Décret du 6 décembre 2016.

* 393 Projet de loi de finances pour 2018.

* 394 Article 6331-50 du code du travail.

* 395 Tel que modifié par les lois n°2016-1827 du 23 décembre 2016396 et n ° 2016-1917 du 29 décembre 2016.

* 397 Articles L. 452-4 et L. 452-4-1 du code de la construction et de l'habitation, concernant les organismes d'habitations à loyer modéré, les sociétés d'économie mixte agréées en application de l'article L. 481-1 et les organismes bénéficiant de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage, au titre de leur activité locative d'ouvrage

* 398 Par modification de l'article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 399 L'amendement n° I- 1378 du Gouvernement tire les conséquences de l'adoption de l'amendement n° 1140 (de Richard Ferrand et plusieurs membres du groupe La République en marche), qui procède à l'augmentation du droit annuel de francisation et de navigation et du droit de passeport applicable aux grands navires de plaisance. Cet amendement prévoit en effet qu'une fraction de ces nouvelles recettes est affectée à la société nationale de sauvetage en mer (SNSM) dans la limite d'un plafonnement. Par conséquent, ces deux ressources affectées doivent être incluses dans l'article 46 de la loi de finances pour 2012.

* 400 Les navires francisés dont la longueur de coque est supérieure ou égale à 7 mètres ou dont la puissance administrative des moteurs est supérieure ou égale à 22 chevaux (CV) et les véhicules nautiques à moteur francisés dont la puissance réelle des moteurs est supérieur ou égale à 90 kilowatts (kW) sont soumis au paiement d'un droit annuel, dénommé droit de francisation et de navigation, à la charge des propriétaires, au 1 er janvier de l'année considérée. Cette taxe ne s'applique ni aux navires de commerce ni aux navires de pêche mais s'applique en revanche aux navires de plaisance ou de sport.

* 401 Ces taxes sont plafonnées par l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances initiale pour 2012 (cf. commentaire de l'article 19 du présent projet de loi de finances pour 2018).

* 402 Clotilde Valter, députée du Calvados, « Les CTI et CPDE au service du redressement productif », rapport au Premier ministre, 7 octobre 2014. Dans un contexte de dotations budgétaires contraintes, le rapport soulignait les avantages d'un financement par taxe affectée : pérennité et stabilité de la ressource ; neutralité sur le solde budgétaire ; contribution le cas échéant des importations et acquisitions intracommunautaires ; implication des acteurs de la filière.

* 403 Cet article était rattaché à la mission « Économie ».

* 404 Prévue au de l'article 71 de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative pour 2003.

* 405 Les plafonds des taxes affectées figurent à l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances initiale pour 2012.

* 406 La taxe affectée à l'ITERG est prévue au G de l'article 71 de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative pour 2003.

* 407 Compte-rendu intégral des débats, 28 novembre 2015.

* 408 Compte-rendu des débats de la commission des finances, 27 octobre 2015.

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