II. - RESSOURCES AFFECTÉES

A. - Dispositions relatives aux collectivités territoriales

ARTICLE 16 (Art. L. 1613-1, art. L. 2335-3, art. L. 3334-17 du code général des collectivités territoriales, art. 1384 B, art. 1586 B et art. 1648 A du code général des impôts, art. 21 de la loi n° 91-1322 du 30 décembre 1991 de finances pour 1992, art. 29 de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances, art. 27 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, art. 4 et 7 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, art. 49 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014, art. 6 de la loi n° 2001-602 du 9 juillet 2001 d'orientation sur la forêt, art. 6 de la loi n° 87-1317 de finances pour 1987 du 30 décembre 1986, art. 52 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement des territoires, art. 95 de la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 de finances pour 1998, art. 2, art. 77 et art. 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, art. 51 de la loi n° 2010-1657 de finances pour 2011, art. 154 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales) - Fixation pour 2018 de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et des allocations compensatrices d'exonérations d'impôts directs locaux (IDL)

. Commentaire : le présent article fixe le montant de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour l'année 2018, définit le périmètre et le taux de minoration des variables d'ajustement et modifie la base de calcul de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) transférée aux régions.

I. LA TVA DES RÉGIONS

A. LE DROIT EXISTANT

La loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) 348 ( * ) a très fortement réduit la possibilité pour les départements d'intervenir en matière économique, tout en renforçant les possibilités d'action des régions en ce domaine. S'il ne s'agit pas au sens strict d'un transfert ou d'une extension de compétence, il n'en demeure pas moins que pour conserver le même niveau d'aide aux entreprises, les régions devraient augmenter sensiblement leurs dépenses en matière de développement économique. Régions de France estimait l'an dernier à 800 millions d'euros le coût annuel pour les régions.

Pour financer cette hausse de dépenses, l'État n'a pas souhaité transférer des ressources financières des départements aux régions, étant donné la situation financière de ceux-ci. Le précédent Gouvernement avait envisagé de créer une taxe spéciale d'équipement pour un produit total en 2017 de 600 millions d'euros. Cette piste fut abandonnée à la demande de Régions de France et la loi de finances pour 2017 349 ( * ) a prévu un fonds exceptionnel et le transfert, à compter de 2018, d'une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) .

Plus précisément, celle-ci prévoit que les régions bénéficient :

- d'un fonds exceptionnel de 450 millions d'euros au maximum, dont un premier versement de 200 millions d'euros en 2017 complété par un second versement de 250 millions d'euros en 2018 , conditionné à l'augmentation du même ordre de leurs dépenses en matière économique ;

- du transfert, à compter de 2018 , d'une fraction du produit de la TVA ; cette fraction est égale au rapport entre :

o d'une part, la somme de la DGF des régions (et de la dotation générale de décentralisation de Corse) en 2017 et du fonds exceptionnel de 450 millions d'euros

o et, d'autre part, du produit de TVA en 2017 .

À compter de 2018, les ressources supplémentaires des régions par rapport à 2016 comprendront donc, d'une part, les 450 millions d'euros intégrés dans la base de calcul de la fraction de TVA transférée et, d'autre part, la hausse « spontanée » du produit transféré , du fait de la dynamique de la TVA. En 2018, de façon exceptionnelle, les régions bénéficient également bénéficier du second versement du fonds (250 millions d'euros).

LFI 2017 - ressources nouvelles accordées aux régions

(en millions d'euros)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Produit de TVA transféré 350 ( * )

-

4 766,3

4 885,4

5 007,5

5 132,7

5 261,0

dont dynamique de l'année

-

116,3

119,2

122,1

125,2

128,3

Fonds exceptionnel

200,0

250,0

-

-

-

-

Gain net sur la ressource TVA par rapport à 2017

-

566,3

685,4

807,5

932,7

1 061,0

Total ressources nouvelles par rapport à 2016

200,0

816,3

685,4

807,5

932,7

1 061,0

Source : commission des finances du Sénat

En 2019, le total des ressources nouvelles diminue du fait de la disparition du fonds exceptionnel, mais la ressource TVA continue à croître.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le II du présent modifie les dispositions adoptées l'an dernier : le 1° exclut les 450 millions d'euros de la base de calcul de la fraction de TVA transférée et le 2° en tire les conséquences sur les modalités de répartition de cette fraction entre les collectivités territoriales. Le Gouvernement a par ailleurs confirmé que le second versement du fonds prévu pour 2018 (250 millions d'euros) sera bien effectué.

Comme le montre le tableau ci-dessous, les ressources nouvelles accordées aux régions par rapport à 2016 diminuent donc de 450 millions d'euros chaque année, auxquels s'ajoute la perte de dynamique, du fait du transfert d'une fraction de TVA moins importante.

PLF 2018 - ressources nouvelles accordées aux régions

(en millions d'euros)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Produit de TVA transféré 1

-

4 305,0

4 412,6

4 522,9

4 636,0

4 751,9

dont dynamique de l'année

-

105,0 351 ( * )

107,6

110,3

113,1

115,9

Fonds exceptionnel

200,0

250,0

-

-

-

-

Hausse de ressource TVA par rapport à 2017

-

105,0

212,6

322,9

436,0

551,9

Total ressources nouvelles par rapport à 2016

200,0

355,0

212,6

322,9

436,0

551,9

Source : commission des finances du Sénat

*

L'Assemblée nationale a adopté ce paragraphe sans modification.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances constate que les ressources des régions augmenteront moins que ce qu'avait promis le précédent Gouvernement. Manuel Valls, alors Premier ministre, s'était engagé à ce qu'en 2018 les régions bénéficient de 800 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2016... mais en se limitant à leur verser 200 millions d'euros en 2017. Certes le montant promis aux régions n'était pas injustifié, étant donné les dépenses qu'elles devront engager en matière de développement économique, mais il s'agirait de solder cette année les promesses que l'ancien Gouvernement savait ne pas pouvoir financer.

En tout état de cause, votre commission souligne que les ressources des régions augmenteront malgré tout en 2018 par rapport à 2017 et que le transfert d'une fraction de TVA est maintenu, ce qui leur assurera pour l'avenir une recette fiscale dynamique. Ainsi, en 2022, elles devraient bénéficier de 550 millions d'euros de ressources nouvelles par rapport à 2016.

Enfin, votre commission rappelle qu'elle a veillé, lors de l'examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018-2022, à exclure la ressource TVA des régions du périmètre des concours financiers , afin qu'il soit clairement établi que cette ressource n'est pas pilotable et que les régions doivent pleinement bénéficier de sa dynamique.

II. LE MONTANT DE LA DGF EN 2018 ET L'ÉVOLUTION DES VARIABLES D'AJUSTEMENT

A. LE DROIT EXISTANT

Les lois de programmation des finances publiques plafonnent le montant des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales sur un périmètre qu'elles définissent, traditionnellement qualifié « d'enveloppe normée ». Celle-ci comprend notamment la dotation globale de fonctionnement (DGF), les crédits budgétaires de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et de nombreux prélèvements sur les recettes de l'État affectés aux collectivités territoriales.

Afin de garantir le respect de l'enveloppe normée, les hausses de certains concours financiers, qu'elles résultent d'une disposition législative (hausse de la péréquation par exemple) ou de leur évolution spontanée, sont compensées à dure concurrence par la minoration d'autres concours financiers, qualifiés de « variables d'ajustement ». La loi de finances fixe chaque année la liste de ces variables d'ajustement et leur taux de minoration.

Le tableau ci-dessous retrace le montant de minoration prévu dans le projet de loi de finances de l'année.

Montant de la minoration des variables d'ajustement
en projet de loi de finances

(en millions d'euros)

2013

2014

2015

2016

2017

167,0

106,0

327,0

57,0

788,0

Source : commission des finances du Sénat

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

1. Une DGF en légère augmentation du fait de la hausse de la péréquation

Le I du présent article fixe le montant de la DGF pour 2018 à 27,05 milliards d'euros, soit un montant en hausse de 94,4 millions d'euros par rapport à 2017, à périmètre constant (cf. infra ). Cette hausse s'explique quasiment entièrement par l'augmentation de la péréquation verticale (cf. infra ).

Cette légère hausse rompt avec les quatre années précédentes, au cours desquelles la DGF a diminué fortement chaque année , pour une baisse totale de 11,5 milliards d'euros. Le tableau retrace les baisses intervenues ces dernières années, étant entendu qu'il ne s'agit pas de l'évolution du montant net de la DGF, qui dépend également d'autres évolutions : progression des dotations de péréquation, évolution spontanée du fait de la démographie, etc.

Baisses annuelles de la DGF depuis 2012

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

- 200

-

- 1 500

- 3 670

- 3 670

- 2 635

-

Source : commission des finances du Sénat

Le tableau ci-dessous explique le passage de la DGF 2017 à la DGF 2018.

Baisses annuelles de la DGF depuis 2012

(en millions d'euros)

DGF 2017 (CP)

30 860,0

DGF « négatives » 352 ( * )

30,8

DGF 2017 répartie

30 890,8

DGF des régions

- 3 936,0

Recentralisation des compétences sanitaires de certains départements

- 1,6

Fonds d'aide au relogement d'urgence (Faru)

1,0

Hausse de la péréquation (part non-financée au sein de la DGF)

95,0

DGF 2018

27 050,1 353 ( * )

Source : commission des finances du Sénat

On note en particulier la suppression de la DGF des régions (cf. supra ) qui explique l'essentiel de la variation par rapport à 2017, ainsi que la hausse de la péréquation « verticale » : dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) et dotation de solidarité rurale (DSR).

En 2018, la péréquation « verticale » augmente de 180 millions d'euros pour les communes (90 millions d'euros sur la DSU et autant sur la DSR) et de 10 millions d'euros pour les départements , soit un total de 190 millions d'euros. La moitié de ce montant (95 millions d'euros) est financé au sein de la DGF, l'autre moitié étant financée au sein des variables d'ajustement (cf. infra ) et vient abonder le total de la DGF 2018 . Dans la mesure où la péréquation « verticale » est désormais entièrement financée par les collectivités territoriales elles-mêmes et non plus par l'État, on peut l'additionner aux variations de la péréquation horizontale communale (fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales - FPIC - et fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France - FSRIF). On note ainsi un ralentissement de la hausse de péréquation depuis 2015, du fait de la stabilisation de la péréquation horizontale. En 2018, la diminution se poursuit mais vient cette fois d'une forte diminution de l'augmentation de la péréquation verticale .

Évolution de la péréquation verticale et des fonds de péréquation du bloc communal depuis 2012

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

2. Un élargissement du périmètre des variables d'ajustement à la DCRTP des communes destiné à financer un gage de 323 millions d'euros

En 2017, le périmètre des variables d'ajustement avait été élargi à la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) des départements et des régions, ainsi qu'aux fonds départements de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP). En 2018, ce périmètre est encore élargi, à la DCRTP du bloc communal (1 175 millions d'euros en 2017). En revanche, les principales compensations qui ont fait l'objet de minorations dans les années précédentes sont exclues de ce périmètre ; le taux de minoration qui leur a été appliqué en 2017 est maintenu .

En définitive, le périmètre des variables d'ajustement comprend désormais la DCRTP et les FDPTP, ainsi que la dotation pour transferts de compensation d'exonérations de fiscalité directe locale (DTCE dite « dot²») et la dotation unique des compensations spécifiques à la taxe professionnelle (DUCSTP).

S'agissant du montant des minorations, il s'élève en 2018 à 323 millions d'euros. Les montants à gager et les minorations se répartissent conformément au tableau ci-dessous.

Minoration des variables d'ajustement en 2018

(en millions d'euros)

Montant à gager

Minorations

Répartition du « gage »
par échelon

Hausse Péréquation

+ 95

DCTE dite "dot carrée"

- 7

Bloc communal

- 273

évolution spontanée des allocations compensatrices

- 35

DUCSTP

- 9

Départements

- 5

Hausse mission RCT

+ 263

FDPTP

- 66

Régions

- 45

DCRTP

- 241

Total

+ 323

Total

- 323

Total

- 323

Source : commission des finances du Sénat

C. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de son rapporteur général, l'Assemblée nationale a adopté un amendement introduisant un article 3 ter 354 ( * ) , qui représente un coût supplémentaire de 60 millions d'euros, qui vient majorer d'autant le montant à gager sur les variables d'ajustement du bloc communal.

Afin d'éviter de minorer d'avantage la DCRTP, nos collègues députés ont adopté, à l'initiative du rapporteur général, une minoration de la DGF de 90 millions d'euros : 60 millions d'euros pour financer l'article 3 ter et 30 millions d'euros pour ramener de 200 à 170 millions d'euros la minoration de la DCRTP communale. Cette baisse de la DGF a été justifiée par le fait que cette dotation augmentait de 94 millions d'euros dans le projet de loi de finances, laissant penser que cette baisse serait donc indolore. Cependant, la hausse de 94 millions d'euros provient uniquement de l'augmentation de la péréquation... que le rapporteur général a souhaité maintenir. L'amendement du rapporteur général de l'Assemblée nationale ne sera donc pas indolore et conduira à minorer de 90 millions d'euros la dotation forfaitaire de certaines communes pour financer notamment l'article 3 ter .

Par ailleurs, face à l'émoi suscité à l'Assemblée nationale par la minoration de la DCRTP communale, le ministre a annoncé étudier une alternative à cette minoration, sans avancer de proposition précise .

Enfin, à l'initiative de son rapporteur général, l'Assemblée nationale a adopté huit amendements rédactionnels.

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances se réjouit que les dotations aux collectivités territoriales ne soient pas diminuées de façon unilatérale en 2018. Ce choix, combiné à la logique de contractualisation s'agissant de l'évolution des dépenses des collectivités territoriales 355 ( * ) , montre que le Gouvernement est prêt à faire confiance aux élus locaux.

Cependant, comme votre commission des finances le soulignait l'an dernier, le système de minoration des variables d'ajustement est à bout de souffle . Si le Gouvernement a choisi de modifier le périmètre de ces variables, c'est parce que le montant des compensations « historiques » n'atteint plus que 58 millions d'euros en 2017. Globalement, le taux de compensation des pertes de recettes pour les collectivités territoriales résultant des décisions de l'État ne dépasse pas 46 %.

De plus, les variables d'ajustement retenues conduisent à minorer les ressources de collectivités qui ne sont pas forcément celles qui connaissent la situation financière la plus facile . Le Gouvernement justifie le choix de minorer la DCRTP par le fait que « la fiscalité économique est dynamique » : mais la DCRTP a justement été mise en place pour compenser les collectivités territoriales perdantes à la réforme de la taxe professionnelle, c'est-à-dire celles qui ne bénéficieront que marginalement du dynamisme de la fiscalité économique. Votre commission des finances attend donc de voir les propositions que fera le ministre sur ce sujet, à la suite de ces propos à l'Assemblée nationale.

Il en est de même pour les FDPTP, qui correspondent à d'anciennes enveloppes de péréquation départementale et qui doivent être réparties au profit de communes ou EPCI « défavorisés par la faiblesse de leur potentiel fiscal [...] ou par l'importance de leurs charges ». Ainsi, les Ardennes ou le Gers font partie des départements qui bénéficient des FDPTP les plus importants (par habitant). C'est pourquoi votre commission des finances vous propose un amendement FINC-13 prévoyant de supprimer la minoration de 65,8 millions d'euros (- 17 %) des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP) .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 17 (Art. 39 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, art. 29 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, art. 38 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016) - Compensation des transferts de compétences aux régions et aux départements par attribution d'une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

. Commentaire : le présent article prévoit d'actualiser, pour 2017, les montants des compensations financières dues par l'État aux collectivités territoriales au titre des transferts de compétences, assurés notamment par l'attribution d'une part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE).

L'article 72-2 de la Constitution prévoit que « tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ». Le présent article propose d'actualiser la part de taxe intérieure sur la consommation sur les produits énergétiques (TICPE) attribuée aux collectivités territoriales, en raison de transferts de compétences.

I. LES COMPENSATIONS DE TRANSFERTS DE COMPÉTENCES AU PROFIT DU DÉPARTEMENT DE MAYOTTE

A. LE DROIT EXISTANT

La loi de finances pour 2012 356 ( * ) a prévu, dans la perspective de la départementalisation de Mayotte, le transfert à Mayotte d'une fraction de tarif de TICPE en compensation des compétences transférées par l'État. Il s'agit en particulier du revenu de solidarité active (RSA) ou de la gestion et du financement du fonds de solidarité pour le logement (FSV).

Aujourd'hui, la fraction de tarif de TICPE ainsi attribuée à Mayotte correspondant à :

- 0,068 euro par hectolitre s'agissant des carburants sans plomb ;

- 0,048 euro par hectolitre s'agissant du gazole « présentant un point éclair inférieur à 120° C ».

La loi du 5 mars 2014 357 ( * ) a confié aux régions de nouvelles compétences en matière de formation professionnelle. Le département de Mayotte, qui exerce les compétences des régions, se verra transférer cette compétence à compter du 1 er janvier 2018 358 ( * ) .

Par ailleurs, depuis 2009, le département de Mayotte est compétent en matière de protection maternelle et infantile (PMI) 359 ( * ) . Toutefois, bien que la loi de finances pour 2012 360 ( * ) prévoie que « des ressources sont attribuées au département de Mayotte à titre de compensation des charges résultant des créations de compétences consécutives à la mise en oeuvre », le département de Mayotte ne perçoit pas de compensation au titre du transfert de cette compétence.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le 2° et le a) du 3° du I du présent article proposent d'attribuer au département de Mayotte un montant de 917 431 euros en compensation du transfert de la compétence relative à la formation professionnelle, à partir du 1 er janvier 2018.

Ce montant correspond à la « moyenne des dépenses actualisées constatées durant les trois années précédant le transfert » 361 ( * ) ; il s'agit de la méthodologie utilisée en métropole en 2015 pour calculer la compensation due par l'État aux régions au titre de ce transfert de compétences.

Le Gouvernement prévoit que le montant de la compensation sera actualisé en 2018, une fois connues les dépenses relatives à l'exercice 2017.

Le 1° et le b) du 3° du I prévoient que la compensation du transfert du service de la PMI à Mayotte, évaluée à 14,53 millions d'euros 362 ( * ) , est assurée par l'attribution d'une fraction de tarif de TICPE.

Par conséquent, pour compenser le transfert de la formation professionnelle et de la PMI, il est nécessaire d'augmenter la fraction de tarif de TICPE attribuée au département de Mayotte :

- à 0,109 euro par hectolitre pour les supercarburants sans plomb (au lieu de 0,068 euro) ;

- à 0,077 euro pour « le gazole présentant un point éclair inférieur à 120° C » (au lieu de 0,048 euro).

Cette augmentation de la fraction de tarif permet au département de Mayotte de percevoir 15,44 millions d'euros supplémentaires en 2018 .

En outre, le IV du présent article propose de compenser le transfert au département de Mayotte de la protection maternelle infantile pour la période comprise entre la date du transfert de la compétence en 2009 et 2017.

Il est donc proposé d'allouer au département de Mayotte un montant total de 105,745 millions d'euros, versé sur trois ans 363 ( * ) , soit 35,5 millions d'euros par an entre 2018 et 2020. Ces montants sont prélevés sur la part du produit de la TICPE revenant à l'État.

Au total, en 2018, les dispositions relatives aux compensations de transferts de compétences au bénéfice du département de Mayotte prévues par le présent article conduiront à diminuer de 50,69 millions d'euros les recettes de TICPE perçues par l'État .

*

L'Assemblée nationale a adopté ces dispositions sans modification.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances prend acte de cette compensation, tout en regrettant qu'il ait fallu qu'une mission de l'Inspection générale des affaires sociales écrive, en 2016, que « le département est lésé par le fait que des ressources auxquelles il peut prétendre ne lui sont pas versées » pour que l'État commence, neuf ans après le transfert de la compétence, à la compenser.

II. L'ACTUALISATION DE LA COMPENSATION VERSÉE AUX RÉGIONS AU TITRE DE L'APPRENTISSAGE

A. LE DROIT EXISTANT

L'article L. 6243-1 du code du travail prévoit que « les contrats conclus dans les entreprises de moins de onze salariés ouvrent droit à une prime versée par la région à l'employeur. La région détermine le montant de cette prime, qui ne peut être inférieure à 1 000 euros par année de formation, ainsi que ses modalités d'attribution ».

La prime d'apprentissage est financée par la taxe d'apprentissage, complétée par une part de la TICPE 364 ( * ) . Pour 2017, cette part a été fixée à 150,543 millions d'euros, répartie entre les régions, la collectivité territoriale de Corse et le département de Mayotte.

L'évolution, en année N, de la part de TICPE dédiée à l'apprentissage est indexée sur la progression de la masse salariale de l'année N-2.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le II du présent article propose de procéder à l'actualisation de la part de TICPE ainsi attribuée aux régions, à la collectivité territoriale de Corse et au département de Mayotte.

Ces collectivités locales percevraient 154 306 110 euros en 2018, contre 150 543 000 euros en 2017, correspondant à une augmentation de 2,5 %. C'est en effet l'augmentation constatée de la masse salariale en 2016, selon le dernier programme de stabilité présenté en avril 2017.

Par conséquent, la fraction du tarif de TICPE attribuée pour le financement de l'apprentissage augmenterait :

- de 0,40 euro à 0,41 euro par hectolitre de supercarburant sans plomb ;

- et de 0,28 euro à 0,29 euro par hectolitre de pétrole présentant un point d'éclair inférieur à 120° C.

*

L'Assemblée nationale a adopté ces dispositions sans modification.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances prend acte de cette actualisation de la part de TICPE attribuée aux régions en fonction de l'évolution constatée de la masse salariale, qui permet aux régions de bénéficier d'une ressource dynamique pour financer l'apprentissage.

III. L'ACTUALISATION DE LA COMPENSATION AU TITRE DU NOUVEL ACCOMPAGNEMENT POUR LA CRÉATION ET LA REPRISE D'ENTREPRISE (NACRE)

A. LE DROIT EXISTANT

Le nouvel accompagnement pour la création et la reprise d'entreprise (NACRE), instauré en 2010 365 ( * ) , vise à financer des actions d'accompagnement et de conseil à destination des créateurs et repreneurs d'entreprises durablement éloignés de l'emploi 366 ( * ) .

Le dispositif NACRE a été transféré aux régions par la loi NOTRe 367 ( * ) et compensé par l'attribution d'une part de la TICPE aux régions. En 2017, cette fraction de tarif est fixée à :

- 0,123 euro par hectolitre de supercarburants sans plomb ;

- 0,092 euro par hectolitre de gazole présentant un point d'éclair inférieur à 120 C° 368 ( * ) .

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le dispositif NACRE s'appliquera, à compter du 1 er janvier 2018 :

- au département de Mayotte 369 ( * ) ;

- aux collectivités d'outre-mer de Saint-Martin, Saint-Barthélémy ainsi que Saint-Pierre-et-Miquelon 370 ( * ) .

Pour compenser ces nouveaux transferts du dispositif NACRE, il convient d'attribuer 250 000 euros aux collectivités territoriales concernées. La fraction de tarif de TICPE ainsi attribuée augmenterait donc :

- à 0,124 euro (au lieu de 0,123 euro) par hectolitre de supercarburant sans plomb ;

- et à 0,093 euro (au lieu de 0,092 euro) par hectolitre de gazole présentant un point d'éclair inférieur à 120 C°.

En outre, la répartition de ce montant collecté entre les régions est modifiée, afin de tenir compte des territoires nouvellement concernés.

*

L'Assemblée nationale a adopté ces dispositions sans modification.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances prend acte de ces modifications, qui permettront aux collectivités territoriales concernées de bénéficier du financement de l'État selon les modalités de droit commun.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 18 - Évaluation des prélèvements opérés sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales

. Commentaire : le présent article retrace l'évaluation, pour 2018, des prélèvements opérés sur les recettes de l'État au bénéfice des collectivités territoriales

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

L'évaluation des prélèvements sur recettes (PSR) de l'État au profit des collectivités territoriales résulte des dispositions de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), dont l'article 6 précise qu'ils « sont, dans leur destination et leur montant, définis et évalués de façon précise et distincte ».

Évolution des prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales par rapport à 2017 - Projet de loi de finances -

(en millions d'euros en autorisations d'engagements)

LFI 2017

PLF 2018 à périmètre constant

Évolution PLF 2018 constant / LFI 2017

Mesures de transfert et de
périmètre en PLF

PLF 2018 à périmètre courant

Dotation globale de fonctionnement (DGF)

30 860

30 987

0%

-3 936

27 050

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la dotation spéciale pour le logement des instituteurs (DSI)

15

13

-16%

0

13

Dotation de compensation des pertes de base de la TP et de redevance des mines des communes et de leurs groupements

74

74

0%

0

74

Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

5 524

5 612

2%

0

5 612

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale

2 053

2 019

-2%

0

2 019

Dotation pour transferts de compensations d'exonérations de fiscalité directe locale (Dot²)

536

530

-1%

0

530

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la Dotation unique des compensations spécifiques à la taxe professionnelle (DUCSTP)

51

42

-18%

0

42

Dotation élu local (DEL)

65

65

0%

0

65

Prélèvement sur les recettes de l'État au profit de la Corse et des départements de Corse

41

41

0%

0

41

Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI)

500

500

0%

0

500

Dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC)

326

326

0%

0

326

Dotation régionale d'équipement scolaire (DRES)

661

661

0%

0

661

Dotation globale de construction et d'équipement scolaire

3

3

0%

0

3

Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle

3 099

2 859

-8%

0

2 859

Dotation de compensation de la réforme de la taxe sur les logements vacants

4

4

0%

0

4

Dotation de compensation de la réforme de la fiscalité à Mayotte

83

99

19%

0

99

Dotation de garantie des reversements des FDPTP

389

324

-17%

0

324

Fonds de compensation des nuisances aéroportuaires

7

7

0%

0

7

PSR de compensation du versement transport

82

82

1%

0

82

PSR Guyane

0

0

0%

18

18

TOTAL Prélèvements sur recettes

44 374

44 245

0%

-3 918

40 327

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de la direction du budget - En grisé les PSR tout ou partie variables d'ajustement

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Évolution des prélèvements sur recettes
au profit des collectivités territoriales par rapport à 2017
- Texte transmis au Sénat -

(en millions d'euros en autorisations d'engagements)

LFI 2017

PLF 2018 à périmètre constant

Évolution PLF 2018 constant / LFI 2017

Mesures de transfert et de péri-mètre en PLF

PLF 2018 à périmètre courant

Dotation globale de fonctionnement (DGF)

30 860

30 897

0%

-3 936

26 960

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la dotation spéciale pour le logement des instituteurs (DSI)

15

13

-16%

0

13

Dotation de compensation des pertes de base de la TP et de redevance des mines des communes et de leurs groupements

74

74

0%

0

74

Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

5 524

5 612

2%

0

5 612

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale

2 053

2 079

1%

0

2 079

Dotation pour transferts de compensations d'exonérations de fiscalité directe locale (Dot²)

536

530

-1%

0

530

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la Dotation unique des compensations spécifiques à la taxe professionnelle (DUCSTP)

51

42

-18%

0

42

Dotation élu local (DEL)

65

65

0%

0

65

Prélèvement sur les recettes de l'État au profit de la Corse et des départements de Corse

41

41

0%

0

41

Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI)

500

500

0%

0

500

Dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC)

326

326

0%

0

326

Dotation régionale d'équipement scolaire (DRES)

661

661

0%

0

661

Dotation globale de construction et d'équipement scolaire

3

3

0%

0

3

Dotation de compensation de la réforme de la Taxe professionnelle

3 099

2 889

-7%

0

2 889

Dotation de compensation de la réforme de la taxe sur les logements vacants

4

4

0%

0

4

Dotation de compensation de la réforme de la fiscalité à Mayotte

83

99

19%

0

99

Dotation de garantie des reversements des FDPTP

389

324

-17%

0

324

Fonds de compensation des nuisances aéroportuaires

7

7

0%

0

7

PSR de compensation du versement transport

82

82

1%

0

82

PSR Guyane

0

0

0%

18

18

TOTAL Prélèvements sur recettes

44 374

44 245

0%

-3 918

40 327

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de la direction du budget - En grisé les PSR tout ou partie variables d'ajustement - En surligné les prélèvements sur recettes modifiés à l'Assemblée nationale.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Les principales évolutions au sein du tableau des prélèvements sur recettes proposé dans le projet de loi de finances présenté par le Gouvernement portent sur :

- le montant de la DGF, qui est en légère hausse à périmètre constant , après plusieurs années de baisses considérables ; à périmètre courant, la diminution des crédits s'explique par la transformation de la DGF des régions en fraction de TVA ;

- le montant de la DCRTP et des FDPTP, qui sont fortement minorés afin de respecter le plafond de l'enveloppe normée .

Nos collègues députés ont diminué de 90 millions d'euros le montant de la DGF afin de majorer de 60 millions d'euros les compensations d'exonérations relatives à la fiscalité locale, à la suite de l'adoption de l'article 3 ter, et de réduire de 30 millions d'euros la minoration de la DCRTP du bloc communal.

Ces différents points sont présentés en détail dans le commentaire de l'article 16 du présent rapport.

Par coordination avec ses amendements à l'article 3 ter (suppression de l'article) et à l'article 16 (non minoration des FDPTP), votre commission des finances vous propose un amendement FINC-14 réduisant de 60 millions d'euros le montant de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale, majorant de 65,8 millions d'euros le montant des FDPTP et augmentant de 5,8 millions d'euros le montant total des prélèvements sur recettes .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.


* 348 Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 349 Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

* 350 En se basant sur une croissance de 2,5 % par an du produit de TVA.

* 351 Le chiffre 2018 correspond à l'hypothèse d'une augmentation moyenne de 2,5 % par an sur la période retracée. Le ministre de l'action et des comptes publics a cependant expliqué devant la commission des finances - audition du 27 septembre dernier - que ce chiffre pourrait atteindre 130 millions d'euros

* 352 La DGF ne pouvant être négative, les collectivités territoriales concernées perçoivent un montant de zéro et font l'objet d'un prélèvement sur leurs ressources fiscales : le total réparti est cependant supérieur au total voté en loi de finances.

* 353 Le total du tableau est en fait légèrement inférieur du fait que les montants disponibles sont arrondis.

* 354 Voir le commentaire de cet article dans le présent rapport général.

* 355 Voir le commentaire de l'article 10 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018-2022.

* 356 Article 39 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

* 357 Article 21 de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale.

* 358 Article 120 de la loi n° 2016-1088 du 8 aout 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurité des parcours professionnels.

* 359 Ordonnance n° 2008-859 du 28 août 2008 relative à l'extension et à l'adaptation outre-mer de diverses mesures bénéficiant aux personnes handicapées et en matière d'action sociale et médico-sociale.

* 360 Article 39 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

* 361 Méthode de calcul fixée par le décret n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République relatif à la compensation financière des transferts de compétence.

* 362 Cette évaluation résulte des travaux de la mission d'appui au département de Mayotte sur le pilotage de la protection de l'Enfance, remis par l'Inspection générale des affaires sociales en février 2016.

* 363 Selon les évaluations préalables annexées au présent projet de loi de finances.

* 364 Article L. 6241-2 du code du travail

* 365 Article 140 de la loi n°2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010.

* 366 Article L. 5141-5 du code du travail

* 367 Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 368 Article 38 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 369 En application de l'article 120 la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 370 En application de l'article 74 de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

Page mise à jour le

Partager cette page