II. LA PROPOSITION DE LOI ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : RENFORCER L'ENCADREMENT DU DÉMARCHAGE TÉLÉPHONIQUE ET LUTTER CONTRE LES PRATIQUES FRAUDULEUSES

La proposition de loi n° 183 (2018-2019) adoptée par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Christophe Naegelen et plusieurs de ses collègues députés vise, d'une part, à mieux encadrer le démarchage téléphonique et, d'autre part, à lutter contre les appels frauduleux. Composée initialement de six articles, elle en comptait onze lors de sa transmission au Sénat.

A. RENFORCER L'ENCADREMENT DU DÉMARCHAGE TÉLÉPHONIQUE SANS REVENIR SUR LE PRINCIPE DE L'OPT OUT

La proposition de loi tend tout d'abord à imposer aux professionnels de saisir l'organisme chargé de la gestion de la liste d'opposition au démarchage téléphonique « aux fins de s'assurer de la conformité de ses fichiers de prospection commerciale avec la liste d'opposition au démarchage téléphonique », sous peine de sanction administrative. Introduit à l'initiative de notre collègue députée Annaïg Le Meur en commission, cette mesure prévue à l' article 1 er bis tend à remédier à l'absence de mise en conformité de leurs fichiers par de nombreuses entreprises à qui incombe pourtant cette obligation, qui n'est aujourd'hui passible d'aucune sanction.

Ce faisant, cet article confirme le choix du principe de l' opt out en matière de démarchage téléphonique.

Toutefois, à l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté en séance publique des dispositions modifiant substantiellement les conditions de « l'exception contractuelle », prévue à l'article L. 223-1 du code de la consommation, et qui permet à un professionnel de contacter un consommateur inscrit sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique en cas de « relations contractuelles préexistantes ». L' article 5 de la proposition de loi tend ainsi à limiter cette exception aux seules « sollicitations ayant un rapport direct avec un contrat en cours » entre le consommateur et le professionnel.

La proposition de loi tend également à reformuler, sans apporter de changement notable, les modalités de délivrance des informations obligatoires qu'un professionnel doit indiquer au consommateur lors d'un appel de prospection commerciale ( article 1 er ). Afin de pallier le déficit de connaissance du dispositif Bloctel par tous les consommateurs, ce même article fixe aussi une nouvelle obligation au professionnel qui devra indiquer au consommateur lors d'un appel de prospection commerciale qu'il peut s'inscrire gratuitement sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique s'il ne souhaite pas faire l'objet de prospection commerciale par cette voie.

Surtout, l' article 3 de la proposition de loi tend à renforcer significativement le montant des amendes administratives qui peuvent être prononcées par l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation (DGCCRF), en cas de méconnaissance du cadre législatif relatif au démarchage téléphonique. Ainsi, alors que dans le droit en vigueur les amendes sanctionnant des manquements au régime de l'opposition au démarchage téléphonique ne peuvent excéder 15 000 euros pour une personne physique et 75 000 euros pour une personne morale, elles seraient relevées respectivement à 75 000 et 375 000 euros.

Dans le même esprit, à l'initiative de notre collègue députée Aude Luquet, deux articles additionnels ont été adoptés, relevant le montant des sanctions administratives en cas de méconnaissance des obligations fixées aux articles L. 221-16 du code de la consommation (information du consommateur lors d'un appel de prospection commerciale) et L. 221-17 du même code (interdiction des appels masqués). Les amendes aujourd'hui encourues ne peuvent excéder 3 000 et 15 000 euros, selon qu'il s'agit d'une personne physique ou morale. Les articles 2 ter et 2 quater relèveraient ces montants à 75 000 et 375 000 euros.

Par parallélisme, l' article 4 de la proposition de loi prévoit un relèvement similaire des sanctions en cas de manquement au régime encadrant la prospection commerciale automatisée qui requiert, comme déjà indiqué, le consentement préalable du consommateur.

De surcroît, l' article 8 de la proposition de loi, introduit à l'initiative du rapporteur de l'Assemblée nationale, prévoit la publication systématique des sanctions prononcées par la DGCCRF sur le fondement de la méconnaissance de la législation relative à l'opposition au démarchage téléphonique, sauf exceptions. Cet article vise là encore à accroître le caractère dissuasif des sanctions.

Enfin, le texte adopté par l'Assemblée nationale propose deux mesures visant à mieux contrôler la mise en oeuvre des règles relatives au démarchage téléphonique.

En premier lieu, l' article 1 er bis tend à imposer aux professionnels du secteur qui saisissent l'organisme aux fins de mise en conformité de leurs fichiers de prospection commerciale le respect d'une charte de bonnes pratiques. Adopté à l'initiative du rapporteur en commission, cet article ne précise pas l'organe en charge de l'élaboration de cette charte, bien que le rapporteur ait émis le souhait qu'elle fût établie par l'organisme gérant la liste d'opposition au démarchage téléphonique.

En second lieu, l' article 2 prévoit la remise au Parlement d'un rapport du Gouvernement évaluant la gestion par le délégataire de la liste d'opposition au démarchage téléphonique. Ce rapport aurait aussi vocation à présenter les possibilités d'harmonisation des différents dispositifs légaux et réglementaires permettant au consommateur de manifester son opposition au démarchage téléphonique et au traitement de ses données à des fins de prospection commerciale. Ces dispositions tendent à répondre à des dysfonctionnements supposés de la société Opposetel.

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