C. UN CAS PARTICULIER : LE BUDGET ANNEXE « CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS » CONNAÎTRA EN 2020 DES DIFFICULTÉS IMPORTANTES DE FINANCEMENT

1. L'impact de la crise du Covid 19 réduit considérablement les recettes du BACEA

Le secteur du transport aérien étant l'un des plus touchés par la crise du Covid 19, le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) , dont les recettes sont étroitement liées à l'activité des compagnies aériennes, est naturellement très fortement impacté .

À cette chute spontanée des recettes provoquées par le quasi-arrêt du trafic aérien, le programme de vol d'Air-France KLM ne représentant plus que 10 % de son programme de vol habituel, sont venues s'ajouter des mesures destinées à venir en aide aux compagnies aériennes françaises.

Un soutien rapide en trésorerie paraissait en effet indispensable, les compagnies aériennes ne disposant en moyenne que de deux mois de liquidités, et devant faire face à des charges fixes très lourdes, évaluées à un milliard d'euros par mois environ pour Air France par la banque UBS.

Aux mesures dont bénéficient toutes les entreprises, l'État a donc décidé le 1 er avril d'ajouter des aides spécifiques pour le transport aérien, sous la forme d'un report en fin d'années de taxes et redevances spécifiques aux compagnies aériennes titulaires d'une licence d'exploitation en France exigibles entre mars et décembre 2020 et d'un étalement de leur remboursement en 2021 et 2022.

Or, ces recettes sont celles du BACEA : il s'agit donc, comme lors de la précédente crise aérienne survenue en 2009 - et qui avait déjà provoqué une forte hausse de l'endettement du BACEA -, de faire jouer à celui-ci un rôle « d'amortisseur de la crise », selon les termes du secrétaire d'État chargé des transports.

Dans le détail, sont concernées la taxe de l'aviation civile et les redevances pour services terminaux de la circulation aérienne (RSTCA).

Par ailleurs, l'organisation Eurocontrol a décidé d'un moratoire de plusieurs mois de la redevance de route, laquelle constitue de loin la principale ressource du BACEA.

L'impact massif sur les recettes du BACEA de la chute brutale du trafic à compter de mars 2020 et des mesures destinées à soutenir les compagnies aériennes est décrit dans le tableau ci-dessous.

Principales recettes du BACEA en 2020

LFI 2020

Première

LFR 2020

Deuxième
PLFR 2020

Prévision
2020
actualisée

Redevances de route

1 293,0

- 312,7

- 549,4

430,9

Redevance océanique

13,0

- 3,1

- 6,1

3,8

RSTCA-M

214,0

- 51,8

- 116,0

46,2

RSTCA-OM

31,0

- 7,5

- 15,8

7,7

Redevances certification

30,4

- 7,4

- 9,4

13,6

Taxe de l'aviation civile

472,0

- 114,1

- 200,1

157,8

Frais taxes pour compte tiers

6,5

- 1,6

- 2,8

2,1

Total

2 060

- 498

- 900

662

Source : commission des finances

Des 2,06 milliards d'euros de recettes initialement prévues ne subsisteraient donc plus que 662 millions d'euros en 2020.

Par ailleurs, les compagnies aériennes ont également bénéficié du report sur 2021 et 2022 de la taxe de solidarité sur les billets d'avion exigible au titre de 2020. Cette mesure n'a pas d'impact sur le BACEA puisque la taxe de solidarité finance le Fonds de solidarité pour le développement (FSD) et l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF).

2. Les dépenses du BACEA ne diminueraient que faiblement

Selon la secrétaire générale de la direction générale de l'aviation civile (DGAC), la baisse des dépenses du budget annexe en 2020 pourrait être de 80 millions d'euros , alors que la prévision d'exécution initiale du BACEA, y compris reports de crédits et fonds de concours, était de 2 211 millions d'euros.

Cette baisse serait surtout due à une réduction des investissements en faveur de la modernisation des systèmes de la navigation aérienne, l'entrée en service du principal outil, 4-Flight , étant par exemple repoussée d'un an à l'hiver 2022-2023.

Pour mémoire, les dépenses de personnel du BACEA représentent au total, une fois incluses les cotisations sociales employeurs (278,7 millions d'euros de contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions »), les prestations sociales et l'action sociale, un montant de 1 217,5 millions d'euros sur lequel il n'existe guère de marge de manoeuvre.

3. L'endettement du BACEA progresserait de manière spectaculaire

Les emprunts dont bénéficie le BACEA sont retracés par le programme 824 « Avances à des services de l'État ». La loi de finances initiale a prévu que la DGAC pourrait contracter pour 50 millions d'euros d'emprunts en autorisations d'engagement et en crédits de paiement au titre de l'année 2020. Il s'agissait essentiellement d'une mesure de précaution, l'objectif étant plutôt de poursuivre la réduction de la dette du BACEA, qui s'élevait à 667 millions d'euros au 31 décembre 2019.

À la suite de l'effondrement des recettes du BACEA (voir supra ), la première loi de finances rectificative pour 2020 a ouvert 500 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement supplémentaires à son profit via le programme 824. La DGAC disposait ainsi d'une capacité d'emprunts en 2020 de 550 millions d'euros .

En raison de la décision de reporter la perception des recettes de la taxe de l'aviation civile et des différentes redevances de la navigation aérienne pour aider les compagnies, le présent projet de loi de finances rectificative accorde à présent 700 millions d'euros de prêts supplémentaires au BACEA pour l'année 2020.

La DGAC pourra donc emprunter cette année 1 250 millions d'euros, ce qui pourrait porter sa dette à près de 2 milliards d'euros , à comparer avec un maximum historique de 1,3 milliard d'euros atteint en 2014.

Cependant, en l'absence de retour à meilleure fortune du trafic aérien, ces sommes ne permettraient de subvenir aux dépenses contraintes de la DGAC (masse salariale principalement) que jusqu'au mois de novembre. Une nouvelle autorisation d'emprunter jusqu'à 200 millions d'euros supplémentaires serait donc probablement nécessaire pour couvrir ses charges du mois de décembre.

Compte tenu de la dégradation sans doute durable du trafic aérien, on peut considérer que le BACEA pourrait encore voir son endettement augmenter de 200 à 400 millions d'euros en 2021.

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