C. LES FRAIS DE JUSTICE : UN EFFORT BUDGÉTAIRE IMPORTANT CONSENTI EN 2021

Les crédits alloués aux frais de justice en 2021 s'élèvent à 618,2 millions d'euros en AE et CP , contre 490,8 millions d'euros en LFI 2020, soit une augmentation de 26 % ( 127,4 millions d'euros ).

Les frais de justice constituent un enjeu important de la mission, en raison de leur montant mais surtout de la difficulté à les piloter et des importantes charges à payer qui sont apparues au cours des années, en raison d'une sous-budgétisation récurrente.

Évolution (2014-2021) des frais de justice et des charges à payer

(en millions d'euros)

Source : commission des finances à partir des réponses du ministère de la justice au questionnaire

En 2019, les charges à payer, évaluées à 175 millions d'euros, représentent ainsi environ 32 % de la dépense totale .

Ces charges à payer se concentrent sur le budget opérationnel de programme central (BOP), car l'intégration des frais de justice à Chorus Pro a permis une diminution des délais de paiement par les juridictions (sur les BOP locaux) : ce délai est de 36 jours en 2019, contre 41 jours en 2017 et 2018. L'évolution des charges à payer en 2019 tend toutefois à démontrer le caractère très dynamique de la dépense locale en frais de justice, ce malgré les actions de maitrise qui ont pu être engagées .

Les prévisions d'exécution pour 2020 s'établissent à un montant de 510 millions d'euros . D'après la direction du budget, la tendance haussière en 2020 s'explique :

- d'une part, par la complexité des enquêtes (expertises et analyses médicales ou techniques) et la technicisation de la recherche de la vérité ;

- d'autre part, par le volume de l'activité judiciaire et l'articulation avec les problématiques de scellés et gardiennage : en 2020, les dépenses de gardiennage ont été très dynamiques (+ 39 %), de même pour le gardiennage de véhicules (+ 16 %) et les destructions de scellés (+ 24 %).

Surtout, le rapporteur souligne qu'en 2020, les crédits alloués aux frais de justice avaient diminué (passant de 505 millions d'euros en 2019 à 491 millions d'euros en 2020) : la budgétisation 2020 était même inférieure à l'exécution 2019 (de près de 41 millions d'euros). D'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial, « outre la diminution des crédits en LFI 2020, le relèvement du taux de mise en réserve à 4 % (contre 3 % en 2019) a fortement impacté la gestion des frais de justice même si le responsable de programme a fait le choix de notifier aux chefs de cours, des dotations au moins égales à celles de l'exercice antérieur ».

Ainsi, « la révision du tendanciel sur 2021 devrait permettre une meilleure gestion du dynamisme de la dépense » . Pour 2021, le ministère indique que les crédits proposés tiennent compte du dynamisme lié à l'activité judiciaire, des besoins de la justice de proximité et de l'apurement des restes à payer.

Surtout, 100 millions d'euros sur le montant global alloué aux frais de justice seraient dédiés au renforcement des moyens d'enquête et d'expertise de la justice et de la médecine légale.

Des mesures d'économie à hauteur d'environ 20 millions d'euros en AE et CP ont été retenues , parmi lesquelles figurent notamment la poursuite du déploiement PNIJ conjuguée à l'harmonisation des tarifs de géolocalisation pour les prestataires hors PNIJ dans l'attente du déploiement complet de la géolocalisation sur cette plate-forme 8 ( * ) ( 16,7 millions d'euros) et la baisse des coûts de traduction (4 millions d'euros) , grâce à l'acquisition d'un logiciel de traduction automatique 9 ( * ) .

Même si diverses actions concernant la maîtrise des frais de justice (recrutement d'interprètes, recours à un logiciel sécurisé de traduction dédié, apurement de scellés, etc.) sont mises en oeuvre, les économies peinent à se réaliser et la dépense relative aux frais de justice reste très dynamique. En effet, la mise en oeuvre des politiques pénales nécessite des prestations techniques de plus en plus complexes et rapides, parfois indispensables en termes de sécurité.

Il reste toutefois un potentiel de maîtrise de la dépense : par exemple, outre la centralisation des dépenses via la PNIJ, un traitement plus rapide de la destination des biens mobiliers saisis et/ou confisqués, y compris avant jugement, qui consomment des frais de scellés et de gardiennage . La réforme de l'AGRASC devrait participer de cette maîtrise.

Le système d'information des techniques d'enquêtes numériques judiciaire

La PNIJ permet de générer des économies importantes, d'une part, en supprimant les frais de location de matériel d'interception pour les prestations couvertes, et d'autre part grâce à la nouvelle grille tarifaire des prestations mise en place par l'arrêté du 14 novembre 2016, complétée par l'arrêté du 4 février 2020, qui propose un tarif différencié lorsque la prestation est acheminée par la PNIJ vers l'opérateur de communication électronique ou lorsqu'elle lui est adressée directement. Dans le premier cas, le tarif applicable est de 33 % inférieur, cette différence se justifiant par la dématérialisation des échanges entre les enquêteurs et les opérateurs.

Le projet PNIJ évolue et devient le Système d'information des techniques d'enquêtes numérique (SITENJ). L'année 2020 a vu l'aboutissement de ses fondations à travers une nouvelle stratégie d'hébergement via des acteurs étatiques et la mise en place des marchés liés aux balises de géolocalisation.

Des modifications seront ainsi apportées à la PNIJ existante pour améliorer son fonctionnement, anticiper les évolutions des télécommunications et compléter ses capacités d'analyse. Ces évolutions se feront pour certaines d'entre elles dans le cadre d'un hébergement assuré par l'État préfigurant la réinternalisation plus globale de la PNIJ, afin de conserver la maîtrise souveraine des données interceptées. Le service de balises de géolocalisation sera expérimenté en lien avec les services enquêteurs pour finaliser les travaux entamés depuis plusieurs années.

Le cumul des économies générées par la PNIJ sur les frais de justice (hors coût PNIJ) s'élève à 53,6 millions d'euros en 2019 et 68,4 millions d'euros en 2020 et à terme, atteindront 85 millions d'euros.

Source : commission des finances, d'après les réponses au ques tionnaire du rapporteur spécial


* 8 L'intégration de la géolocalisation à la plateforme a été retardée par la crise sanitaire et est attendu pour 2021-2022.

* 9 Ce logiciel réalisera des traductions depuis le français vers des langues préalablement définies (et inversement), sous la supervision d'un traducteur. Dans un premier temps, il sera utilisé à titre expérimental par les traducteurs contractuels des services judiciaires. Le coût du logiciel est de l'ordre de 200 000 euros par an, avec un retour sur investissement dès les premières années d'utilisation. Un premier déploiement est prévu à l'horizon 2021.

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