Rapport n° 310 (2022-2023) de M. Pascal ALLIZARD , fait au nom de la commission des affaires européennes, déposé le 2 février 2023

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N° 310

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 2 février 2023

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires européennes (1) sur la proposition de résolution européenne en application de l'article 73 quinquies du Règlement, visant à prendre des mesures appropriées contre les atteintes aux droits fondamentaux commises en Iran ,

Par M. Pascal ALLIZARD,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Rapin , président ; MM. Alain Cadec, Cyril Pellevat, André Reichardt, Didier Marie, Mme Gisèle Jourda, MM. Claude Kern, André Gattolin, Pierre Laurent, Mme Colette Mélot, M. Jacques Fernique, Mme Véronique Guillotin , vice-présidents ; M. François Calvet, Mme Marta de Cidrac, M. Jean-Yves Leconte, Mme Amel Gacquerre , secrétaires ; MM. Pascal Allizard, Jean-Michel Arnaud, Mme Florence Blatrix Contat, MM. Philippe Bonnecarrère, Jean-Pierre Corbisez, Pierre Cuypers, Laurent Duplomb, Christophe-André Frassa, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, M. Daniel Gremillet, Mmes Pascale Gruny, Laurence Harribey, MM. Ludovic Haye, Jean-Michel Houllegatte, Patrice Joly, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Pierre Louault, Victorin Lurel, Franck Menonville, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Louis-Jean de Nicolaÿ, Pierre Ouzoulias, Mmes Elsa Schalck, Patricia Schillinger .

Voir les numéros :

Sénat :

226 et 311 (2022-2023)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Conformément à l'article 73 quinquies du Règlement du Sénat, la commission des affaires européennes est saisie d'une proposition de résolution européenne n° 226 (2022-2023), de Mme Nathalie Goulet et plusieurs de ses collègues, visant à prendre des mesures appropriées contre les atteintes aux droits fondamentaux commises en Iran.

L'objet de cette proposition est d'appeler le Gouvernement et l'Union européenne à prendre un certain nombre de sanctions contre l'Iran, au vu de la répression et des violations des droits de l'Homme en cours.

Le présent rapport procède à un rappel historique du mouvement de contestation de l'automne 2022 et de sa répression brutale par les autorités iraniennes, ainsi qu'à un état des lieux des condamnations et sanctions prononcées par la communauté internationale. Sont également présentées, en dernière partie, les modifications proposées par le rapporteur sur le texte initialement déposé.

I. LA RÉPRESSION BRUTALE ET MEURTRIÈRE DES MANIFESTATIONS DE L'AUTOMNE 2022

A. L'ASSASSINAT DE JINA MAHSA AMINI PAR LA POLICE DES MoeURS À L'ORIGINE D'UNE CONTESTATION INÉDITE DEPUIS 2019

1. Des manifestations d'abord dirigées contre le port obligatoire du voile puis contre le régime lui-même

Alors que les manifestations de novembre 2019 avaient eu pour cause l'augmentation du prix de l'essence 1 ( * ) , dans un contexte général de crise économique à la suite du rétablissement des sanctions américaines, la contestation de l'automne 2022 a eu pour fait générateur la mort, dans des circonstances non élucidées, le 16 septembre 2022, d'une jeune femme, Jina Mahsa Amini, arrêtée trois jours plus tôt par la police des moeurs à cause d'un voile mal porté .

La réprobation de ce qui a été dénoncé comme l'illustration de la brutalité policière à l'encontre des femmes a très rapidement engendré des manifestations dans l'ensemble du pays et notamment les grandes villes (cf. carte ci-dessous).

Carte des villes où ont eu lieu des émeutes

Cette contestation est apparue inédite dans ses revendications, comme dans son ampleur :

- avant même le décès de Mahsa Amini, alors hospitalisée, des manifestations contre les violences policières et la loi sur le port du voile sont organisées puis s'étendent sur le territoire avec pour symbole des femmes enlevant leur voile en signe de protestation. Les revendications ne se limitent pas à la condamnation de la mort de Mahsa Amini et concernent plus largement le refus du port obligatoire du voile, la défense des droits des femmes, avec le slogan « Femme, Vie, Liberté » ;

- par là même, la contestation s'est étendue, tournant à la remise en cause plus globale des fondements de la République islamique , à travers la dénonciation de la police des moeurs mais aussi du guide suprême lui-même, l'ayatollah Ali Khamenei ;

- les autres caractéristiques de ce soulèvement tiennent à la jeunesse des protestataires et à sa spontanéité , tenant moins au nombre des manifestants - les rassemblements n'ayant pas dépassé la dizaine de milliers de personnes en un même lieu - qu'à l'usage des réseaux sociaux et au développement de formes multiples de désobéissance civile, notamment dans les universités et la sphère privée.

2. Un divorce profond et durable entre les autorités et une nouvelle génération d'Iraniens

Les autorités iraniennes ont pu sembler surprises dans cette première phase de contestation et craindre un élargissement du mécontentement à l'ensemble de la société, compte tenu du contexte économique désastreux : plus de 16 % de chômage, 50 % d'inflation par an, pénurie de produits de première nécessité, etc. Un tiers de la population, soit 26 millions d'Iraniens, vivrait sous le seuil de pauvreté et des coupures hivernales de gaz ont été pratiquées, suscitant des critiques au sein même de la majorité politique et du clergé chiite.

Toutefois, malgré le mécontentement social, les trois premiers mois du mouvement, de mi-septembre à mi-novembre, n'ont pas agrégé le monde du travail à la contestation . Des grèves ont bien eu lieu mais pour des motifs économiques sur des besoins de base.

Un divorce profond et durable entre les autorités et une nouvelle génération d'Iraniens mobilisée pour réclamer plus de liberté semble s'être toutefois installé dans la durée, même sans manifestations de rue. Ainsi, le durcissement du régime dans la conduite de la répression a mis en lumière des fractures au sein des plus jeunes générations qui bénéficient d'un fort taux d'éducation supérieure (à l'université).

Si la force du mouvement de l'automne 2022 réside dans son caractère spontané, l'absence de leader et d'organisation en ont fait la faiblesse face au durcissement de la répression.

B. UNE RÉPRESSION BRUTALE DANS UN CONTEXTE D'HOSTILITÉ À LA FRANCE ET À L'UNION EUROPÉENNE

1. Une répression policière brutale et meurtrière

Les dernières manifestations d'ampleur se sont déroulées à la mi-novembre 2022, pour un bilan, après trois mois de manifestations, de 527 morts dont une soixantaine d'enfants selon l'ONG Hrana , et près de 20 000 arrestations.

En raison de la terreur provoquée par les arrestations arbitraires, les condamnations à mort et es exécutions publiques, on ne rapporte plus de manifestations de rue à partir de la mi-décembre.

Au nom de la guerre culturelle à mener contre un Occident qui manipulerait les populations et les pousserait à la révolte, le guide suprême a encouragé une stratégie policière de répression méthodique et de contrôle social . Usant d'une répression brutale - rafles aléatoires de groupes d'étudiants, tabassage sur la voie publique, viols sur des manifestantes visant à déshonorer leur famille, etc. -, les autorités ont également utilisé l'arbitraire des tribunaux comme une arme de terreur, l'issue des procédures judiciaires étant incertaine et pouvant conduire à la peine de mort. Sur 24 condamnations à mort recensées en décembre, 5 exécutions ont eu lieu (2 en décembre 2022 et 3 en janvier 2023).

2. Cette crise des droits de l'Homme vient renforcer le contexte général d'hostilité des autorités iraniennes vis-à-vis de l'Occident

Alors que l'Iran était jusqu'à présent essentiellement perçue comme une menace nucléaire, cette crise des droits l'Homme constitue un nouvel enjeu de crispation de relations déjà tendues avec l'Occident, et notamment l'Union européenne . À cet égard, les autorités iraniennes n'hésitent pas à instrumentaliser le contexte international à des fins de politique intérieure :

- on note un regain d'hostilité vis-à-vis des États-Unis, d'Israël et de l'Union européenne , accusés de fomenter depuis l'extérieur le mouvement de contestation. La détention d'otages d'État, qualifiés comme tels par le Quai d'Orsay depuis octobre 2022, et la diffusion d'aveux forcés participent d'une stratégie de menaces et d'intimidation. Ainsi, sept ressortissants français, et une quarantaine de ressortissants européens, sont aujourd'hui détenus dans des conditions très difficiles avec un accès restreint aux visites consulaires ;

- la crise sur le nucléaire iranien perdure, sans volonté de retour à la table des négociations , l'Iran violant par ailleurs les règles instituées par l'accord de Vienne de 2015 en poursuivant son programme de production d'uranium enrichi à 60 %. On peut considérer que les livraisons de drones armés à la Russie, bien qu'elles ne soient pas officiellement assumées, participent de ce défi lancé par la République islamique, plus qu'elles ne traduisent une réelle alliance avec la Russie ;

- enfin, les tensions régionales perdurent au Moyen-Orient , attisées par l'Iran qui use de son influence par groupes interposés, au Yémen et dans le croissant chiite au Liban, en Syrie et en Irak, et qui joue de la menace de son programme balistique.

Il ne faut pas perdre de vue ce contexte international et régional à l'heure de discuter des condamnations et sanctions que le Gouvernement français et l'Union européenne pourraient adopter à l'encontre des autorités iraniennes.

II. UNE CONDAMNATION UNANIME (OU PRESQUE) DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

L'Iran figure parmi les pays les plus sanctionnés au monde depuis 40 ans et l'embargo des États-Unis en 1980, à la suite de la prise d'otages à l'ambassade américaine de Téhéran.

Depuis lors, le pays a en effet fait l'objet de plusieurs trains de sanctions internationales, dont le dernier - pour violation des droits de l'Homme - lié à la répression des autorités iraniennes après la mort de Mahsa Amini . Dans le concert unanime de condamnations face à cette répression, la Chine et la Russie font toutefois exception, préférant - pour des raisons politiques et économiques - ne pas s'immiscer dans les affaires iraniennes.

A. DE NOMBREUSES SANCTIONS PRISES PAR LES PAYS OCCIDENTAUX

1. Quatre trains de sanctions adoptés par l'Union européenne en matière de violation des droits de l'Homme ...

L'Union européenne a adopté, depuis le début de la répression, quatre paquets de sanctions 2 ( * ) visant des personnes et entités, en raison de leur rôle joué dans cette répression . Ainsi, depuis le 17 octobre 2022 - date du premier paquet de sanctions -, 78 personnes et 27 entités ont été ajoutées à la liste des personnes et entités faisant l'objet de mesures restrictives dans le cadre du régime existant de sanctions en matière de droits de l'Homme à l'encontre de l'Iran 3 ( * ) . Ainsi depuis 2011, 164 personnes et 31 entités au total ont été inscrites sur cette liste .

Il semblerait d'ailleurs que le prochain Conseil Affaires étrangères du 20 février prévoie d'élargir cette liste des personnes et entités faisant l'objet de mesures restrictives.

Ces mesures consistent en un gel des avoirs , une interdiction de pénétrer sur le territoire de l'Union européenne et une interdiction de mettre des fonds ou des ressources économiques à la disposition des personnes et entités inscrites sur la liste. Une interdiction des exportations vers l'Iran d' équipements susceptibles d'être utilisés à des fins de répression interne ainsi que d'équipements de surveillance des télécommunications s'applique également.

Exemples de personnes et entités visées par les mesures restrictives adoptées par l'Union européenne (UE)

Parmi les 78 personnes et 27 entités désignées depuis la répression figurent notamment les responsables du décès de Mahsa Amini: la police des moeurs iranienne , des membres des forces de l'ordre iraniennes et des membres de haut rang du Corps des gardiens de la révolution islamique (IRGC), ainsi que des membres de l'armée iranienne , pour le rôle qu'ils ont joué dans la répression brutale des récentes manifestations. L'UE a en outre inscrit sur la liste le chef de la police iranienne chargée de la cybercriminalité , pour sa responsabilité dans l'arrestation arbitraire de personnes ayant exprimé en ligne des critiques à l'égard du régime iranien. L'UE a également désigné le ministre iranien de l'intérieur , qui est responsable des forces de l'ordre iraniennes, lesquelles ont commis de graves violations des droits de l'homme. L'UE a aussi sanctionné le ministre iranien des sports et de la jeunesse pour les pressions exercées sur les athlètes.

De surcroît, l'UE a inscrit sur la liste le ministre iranien des technologies de l'information et de la communication , en raison de sa responsabilité dans la fermeture de l'internet. L'UE a désigné, par ailleurs, la société publique de télévision iranienne Press TV / Radio-télévision de la République islamique d'Iran (IRIB), responsable de la production et de la diffusion d'aveux forcés des otages français Cécile Kohler et Jacques Paris.

À ces sanctions se sont ajoutées de nombreuses condamnations de la France et des institutions européennes appelant à la cessation de la répression.

Le Conseil Affaires étrangères de l'Union européenne a adopté le 12 décembre 2022 des conclusions substantielles sur l'Iran établissant un cadre d'action commun . Dans ses conclusions, l'Union européenne s'est opposée à la répression violente des manifestations, à la poursuite du programme nucléaire et balistique iranien en violation de l'accord sur le nucléaire et de la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies 4 ( * ) , aux actions de déstabilisation régionale et internationale y compris les transferts de drones à la Russie, ainsi qu'à la multiplication des actes hostiles des autorités iraniennes à l'égard des pays européens ces dernières semaines.

Le 15 décembre 2022, face à l'escalade de la violence et à la situation des droits de l'Homme en Iran, le Conseil européen a également condamné les condamnations à mort prononcées et a demandé aux autorités iraniennes de mettre immédiatement fin à cette pratique.

Sanctions de l'UE à l'encontre de l'Iran au titre de la livraison d'armes en Ukraine et des activités de prolifération nucléaire

Outre ces sanctions prises au titre de graves violations des droits de l'Homme, le Conseil de l'Union européenne a également adopté deux paquets de sanctions, les 20 octobre et 12 décembre 2022, au titre du rôle de l'Iran dans la mise au point et la livraison de drones utilisés par la Russie dans sa guerre contre l'Ukraine. Il a ainsi ajouté 7 personnes et 5 entités à la liste des individus et entités faisant l'objet de mesures restrictives au motif qu'elles compromettent ou menacent l'intégrité territoriale, la souveraineté et l'indépendance de l'Ukraine.

Ces personnes et entités désignées font également l'objet d'un gel des avoirs et il est interdit aux citoyens et aux entreprises de l'UE de mettre des fonds à leur disposition. Les personnes physiques sont en outre frappées d'une interdiction de voyager qui les empêche d'entrer sur le territoire de l'UE ou de transiter par celui-ci.

S'agissant des sanctions visant les activités iraniennes de prolifération nucléaire , l'accord sur le nucléaire (JCPOA) - conclu le 14 juillet 2015 5 ( * ) et destiné à garantir la nature exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien - prévoyait une levée générale de toutes les sanctions du Conseil de sécurité des Nations unies, de l'UE et des États-Unis liées au programme nucléaire de l'Iran après la mise en oeuvre d'une série de mesures arrêtées en commun.

Le 16 janvier 2016 , après que l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a confirmé que l'Iran avait mis en oeuvre les mesures relatives au nucléaire , la plupart des sanctions de l'UE et des Nations unies ont été levées . L'UE a levé toutes les sanctions économiques et financières liées au nucléaire. Toutefois, certaines restrictions sont restées en vigueur, y compris des restrictions au transfert de biens posant un risque de prolifération, les embargos sur les armes et les missiles balistiques et les mesures restrictives à l'encontre de certaines des personnes et entités inscrites sur la liste.

Il était prévu que 8 ans après la date d'adoption, ou à la date de présentation par l'AIEA d'un rapport concluant que toutes les matières nucléaires se trouvant en Iran sont utilisées à des fins pacifiques, l'UE lèverait les sanctions liées à la prolifération .

Or, le retrait unilatéral de l'accord des États-Unis en 2018 a bouleversé la mise en oeuvre de l'accord , puisque l'administration américaine a décidé de réimposer toutes les sanctions qui avaient été levées dans le cadre du JCPOA. L'extraterritorialité des sanctions américaines a conduit de nombreuses entreprises européennes à se retirer du marché iranien 6 ( * ) . La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni ont ainsi mis en place, début 2019, un système censé leur permettre de continuer de commercer avec l'Iran, via la société INSTEX 7 ( * ) , basée à Paris. Cet outil - devant d'abord être utilisé dans les secteurs pharmaceutique et alimentaire - a mis du temps à se mettre en place : il a été utilisé pour la première fois, en mars 2020, pour du matériel médical. S'agissant des sanctions, l'Union européenne a continué de respecter l'accord et n'a pas ré-imposé les sanctions qui avaient été levées. Mais certaines restrictions, comme indiqué supra , sont restées en vigueur.

La France a également condamné publiquement la situation en Iran , avec une quinzaine de déclarations publiques du ministère des affaires étrangères, et la convocation à plusieurs reprises du chargé d'affaires iranien par la ministre des affaires étrangères.

2. ...en coordination avec les sanctions prises notamment par les États-Unis et le Royaume-Uni

Ces paquets de sanctions ont été adoptés par l'Union européenne en coordination avec les autres pays occidentaux, au premier rang desquels les États-Unis et le Royaume-Uni , qui ont aussi décidé, dès le 22 septembre 2022 pour l'un, et le 10 octobre 2022 pour le second, un certain nombre de mesures restrictives à l'égard des responsables iraniens.

Le Royaume-Uni a notamment renforcé son train de sanctions à la suite de l'exécution, le 14 janvier dernier, de son ressortissant irano-britannique Alireza Akbari, ancien haut responsable au ministère de la Défense iranien, accusé d'espionnage au profit du Royaume-Uni. Le 23 janvier dernier - date également d'adoption par l'UE du dernier paquet de sanctions, le Royaume-Uni a ciblé des responsables des services de sécurité et le procureur général adjoint , portant à cinquante le nombre d'Iraniens sous mesures restrictives. De même, les États-Unis ont imposé de nouvelles sanctions, le même jour , à 10 responsables iraniens, liés à la répression en cours.

3. ... et avec l'action des Nations-Unis, qui a exclu l'Iran de la commission sur le statut de la femme

La France et les pays occidentaux poursuivent également la pression sur les autorités iraniennes dans les enceintes internationales . Après la mise en place fin novembre 2022 par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies d'une mission d'établissement des faits - dont le rapport est attendu pour juin-, l'Iran a été exclu de la commission sur le statut de la femme à New-York par un vote à une large majorité, le 14 décembre dernier.

La Chine et la Russie : des voix dissonantes dans le concert unanime de condamnations

La répression des autorités iraniennes a ainsi fait l'objet d'une condamnation unanime, ou presque puisque la Chine et la Russie ont décidé de ne pas prendre de sanctions envers les autorités iraniennes , adoptant ainsi une attitude de non-ingérence dans les affaires du pays.

Cette absence de réaction s'explique par des raisons politiques, économiques et stratégiques assez claires . La Chine est, en effet, le premier partenaire commercial de l'Iran, et un des plus gros importateurs du pétrole iranien. Les deux pays ont signé en 2021 un accord de coopération sur 25 ans. Quant à Moscou et Téhéran, leur rapprochement se manifeste notamment par un soutien en armement iranien à la Russie.

En réaction à ces sanctions internationales, les autorités iraniennes ont annoncé des mesures de représailles , visant un certain nombre de personnes et d'entités, parmi lesquelles Charlie Hebdo, des parlementaires européens, ou des personnalités françaises comme Bernard Kouchner, Anne Hidalgo et Bernard-Henri Levy. Elles ont également annoncé la fermeture de l'Institut de Recherche en Iran (IRI) de Téhéran . L'ambassadeur de France à Téhéran a également été convoqué à cinq reprises par les autorités iraniennes.

B. LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE CONDAMNE FERMEMENT LA REPRESSION EN COURS ET APPELLE À DES SANCTIONS FERMES ET GRADUÉES

1. Cette proposition de résolution européenne s'inscrit dans la ligne de plusieurs initiatives parlementaires...

Cette proposition de résolution européenne (PPRE), qui fait l'objet du présent rapport, a été publiée après que l'Assemblée nationale eut adopté, le 28 novembre 2022, au titre de l'article 34-1 de la Constitution, une résolution en soutien au mouvement pour la liberté du peuple iranien 8 ( * ) . Le même texte a également été déposé par notre collègue François Patriat sur le bureau du Sénat le 1 er décembre dernier 9 ( * ) .

Le rapporteur a accordé la plus grande attention à ces propositions de résolution, ainsi qu'aux résolutions du Parlement européen du 6 octobre 2022 10 ( * ) et du 19 janvier dernier 11 ( * ) .

2. ...en condamnant fermement la répression en cours et prévoyant une série de sanctions graduées, en fonction de l'évolution de la situation en Iran

Le texte, tel que modifié sur proposition du rapporteur, vise à condamner fermement la répression en cours orchestrée par les autorités iraniennes, et à en demander l'arrêt immédiat.

Le rapporteur a proposé à la commission des affaires européennes, qui l'a suivi, de renforcer certaines dispositions - figurant dans le texte déposé par Mme Nathalie Goulet - et d'en ajouter de nouvelles , notamment aux alinéas 28 à 40 de la PPRE.

Le texte dénonce ainsi notamment « l'usage généralisé, brutal et disproportionné de la force » par les autorités iraniennes, les détentions arbitraires , la pratique de la torture et des discriminations , notamment à l'encontre des femmes et des minorités et appelle à la cessation de ces pratiques . La proposition de résolution soutient les sanctions prises par l'Union européenne et les instances internationales concernant ces graves violations des droits de l'Homme.

Est également affirmé, dans le texte, le soutien du Sénat « au peuple iranien dans son aspiration à la démocratie et au respect de ses droits et libertés fondamentale » (alinéa 31 de la PPRE).

À l'initiative du rapporteur, a également été introduit dans le texte la mention d'« otages d'État» : il prévoit que le Sénat « invite le Gouvernement et l'Union européenne à exiger des autorités iraniennes la libération immédiate des otages d'État européens arrêtés et détenus arbitrairement, et l'application sans délai, y compris pour les ressortissants binationaux, de leur droit à la protection consulaire, conformément aux obligations internationales souscrites par la République islamique d'Iran » (alinéa 40 de la PPRE) .

La condamnation du soutien militaire apporté par l'Iran à la Russie dans sa guerre contre l'Ukraine a également été ajoutée au texte. Par cette PPRE, le Sénat affirme son soutien aux sanctions prises par l'Union européenne contre les individus et entités iraniens pour leur rôle dans la mise au point et la livraison de drones à l'Ukraine (alinéa 33 de la PPRE).

La disposition - prévue dans la PPRE telle qu'initialement déposée par Mme Nathalie Goulet - encourageant le Gouvernement et l'Union européenne à la délivrance de visas à toute personne craignant avec raison d'être persécutée en Iran a été conservée (alinéa 41 de la PPRE). Le rapporteur soutient cette disposition qui correspond à la politique actuellement mise en oeuvre par les autorités françaises. Il salue d'ailleurs les accords conclus afin que les demandes de visas d'Iraniens puissent être faites dans des pays tiers, dans lesquels ils se seraient réfugiés.

Sur le volet sanctions, les modifications du texte - proposées par le rapporteur - ont été guidées par la nécessité de garder ouvert un canal de communication avec l'Iran et de ne pas aller à l'encontre de la politique du gouvernement français vis-à-vis de l'Iran au Moyen-Orient.

La question des otages d'État européens, et notamment des sept otages français retenus en Iran, fut un des paramètres essentiels pris en compte par le rapporteur dans ses propositions d'amendements au texte de Mme Nathalie Goulet.

Ainsi le texte proposé par le rapporteur, contrairement au texte initialement déposé par l'auteur, n'appelle pas à la cessation de l'accord sur le nucléaire, qui serait dangereux et contraire à la position de la France. Certes les négociations sont suspendues, mais depuis le retrait américain de l'accord sur décision du Président Trump, ni la France, ni l'Union européenne ne souhaitent rompre pour le moment cet accord, bien que l'Iran n'en respecte plus les termes et accélère son programme nucléaire. Dans ses conclusions du 12 décembre 2022, le Conseil de l'Union européenne indique ainsi que « l'Union européenne réaffirme son attachement et son soutien constant à la mise en oeuvre intégrale et effective d'un JCPoA restauré. (...). En tant que priorité essentielle en matière de sécurité, l'UE continuera à s'investir diplomatiquement et politiquement pour faire en sorte que l'Iran ne se dote pas de l'arme nucléaire ».

Le risque - en mettant un terme à cet accord - est en effet de mettre fin à un canal de discussion et de contrôle de la politique nucléaire iranienne, et de laisser les autorités iraniennes se diriger vers l'arme nucléaire. Le texte dénonce toutefois « le manque de coopération de l'Iran dans la mise en oeuvre de l'accord (...) » (alinéa 34 de la PPRE).

Sur la question des visas , la mesure - proposée dans le texte initial - visant à recenser les étudiants iraniens au sein de l'Union européenne et d'expulser sans délai ceux qui ont un lien familial avec les responsables iraniens sanctionnés n'a pas été conservée . Le rapporteur considère cette mesure comme techniquement difficile à mettre en oeuvre et juridiquement contraire à nos engagements internationaux.

Néanmoins, il a été considéré que le régime iranien ne pouvait pas rester impuni face à la répression et les violations des droits de l'Homme en cours. Le texte proposé par le rapporteur appelle ainsi à prendre une série de nouvelles sanctions, qui pourront l'être progressivement au vu de l'évolution de la situation en Iran.

Parmi ces sanctions possibles, figure l'élargissement de la liste des personnes et entités faisant l'objet de mesures restrictives (alinéa 42 de la PPRE).

Concernant la limitation de l'accès aux marchés des capitaux de l'Union ainsi que la fermeture de l'espace aérien de l'Union aux avions iraniens, le texte n'appelle pas immédiatement à la prise de telles sanctions , pour plusieurs raisons : car il s'agit de sanctions qui ont été levées dans le cadre de l'accord sur le nucléaire iranien, et car elles auraient des répercussions pratiques gênantes, entravant par exemple le départ d'Iraniens, voulant quitter le territoire par avion. Toutefois, le rapporteur considère que ces sanctions doivent demeurer à l'étude et être prises si l'évolution de la situation en Iran le nécessitait (alinéa 43 de la PPRE).

Concernant l'inscription sur la liste des entités terroristes du corps des Gardiens de la révolution, le rapporteur n'a pas jugé que cette mesure était la réponse immédiate à apporter, à ce stade , à la crise actuelle. Il a estimé qu'il convenait d'attendre les conclusions de l'analyse du Service juridique du Conseil, demandée par certains États membres et attendue pour le prochain Conseil Affaires étrangères du 20 février. Il semblerait que cette mesure se heurte, sur le plan juridique, à l'absence de décision d'une autorité judiciaire d'un État membre concernant l'implication du corps des Gardiens de la révolution ou d'un de ses membres dans un acte terroriste 12 ( * ) . Sur le plan politique ensuite, le rapporteur a jugé qu'une telle sanction pourrait être comprise comme un acte de rupture par les autorités iraniennes.

Toutefois, le rapporteur n'a nullement exclu la possibilité d'une telle sanction, considérant qu'elle devait demeurer dans l'arsenal des mesures possibles à l'encontre de l'Iran, au vu de l'évolution de la situation . Le texte proposé invite ainsi « le Gouvernement et le Conseil de l'Union à examiner le moment venu, et sur la base de décisions de justice, la possibilité d'inscrire des groupes et entités tels que le corps des Gardiens de la Révolution islamique sur la liste des organisations terroristes de l'Union » (alinéa 44 de la PPRE).

Pour le rapporteur, cette proposition de résolution n'est ainsi pas exclusive d'un texte ultérieur sur le sujet , qui pourrait appeler à de nouvelles sanctions, au vu de l'évolution de la situation en Iran.

*

En conséquence, le rapporteur propose d'adopter la proposition de résolution européenne, déposée par Mme Nathalie Goulet et plusieurs de ses collègues, ainsi modifiée en vue de son renvoi à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires européennes, réunie le jeudi 2 février 2023, a engagé le débat suivant :

M. Jean-François Rapin , président . - Nous abordons maintenant le deuxième point de notre ordre du jour, qui nous fait traverser d'autres mers pour nous conduire en Iran, république islamique qui joue un rôle central au Moyen-Orient et au-delà, et qui se trouve secouée depuis quatre mois par des mouvements de contestation internes à la suite de l'arrestation ayant conduit au décès de la jeune Mahsa Amini, pour n'avoir pas entièrement couvert ses cheveux sous le foulard que toute femme doit porter en Iran. L'Union européenne et la France avaient alors manifesté leur vive émotion à l'égard de ce décès « inacceptable » et « choquant ». La fermeté avec laquelle les autorités iraniennes répliquent depuis lors aux manifestations de protestation qui se sont étendues entre-temps à l'ensemble du territoire iranien ne manque pas aussi de choquer, de nombreuses arrestations arbitraires et des dizaines de morts étant à déplorer.

C'est dans ce contexte que notre collègue Nathalie Goulet, dont je salue la présence parmi nous, a déposé une proposition de résolution européenne qui appelle l'Union européenne à sanctionner plus fermement les atteintes aux droits fondamentaux commises en Iran. Ce texte, cosigné par plusieurs de nos collègues, est aujourd'hui soumis à l'examen de notre commission. Je cède la parole à Pascal Allizard, que je remercie de nous présenter son rapport sur cette proposition.

M. Pascal Allizard , rapporteur . - Notre commission a été saisie d'une proposition de résolution européenne, déposée le 4 janvier dernier par notre collègue Nathalie Goulet, visant à prendre des mesures appropriées contre les atteintes aux droits fondamentaux commises en Iran.

Je vous ferai, en guise d'introduction, un bref rappel historique du mouvement de contestation de l'automne 2022, avant de vous présenter les éléments justifiant notre présence aujourd'hui, à savoir la répression brutale des autorités iraniennes, de dresser l'état des lieux des condamnations et sanctions prononcées par la communauté internationale et, enfin, de vous proposer une méthode pour l'adoption d'une résolution européenne par le Sénat.

Compte tenu de la tension caractérisant nos relations bilatérales avec ce pays et de la sensibilité très particulière des enjeux qui s'y attachent en matière de sécurité, de nucléaire et de droits de l'homme, il m'a paru indispensable d'aborder l'examen de cette proposition de résolution européenne en toute connaissance de cause sur les risques et menaces que l'Iran fait peser au Moyen-Orient, où, je le rappelle, la France joue un rôle non négligeable par sa présence militaire - aux Émirats arabes unis, en Jordanie et en Irak - et par son influence au Liban, notamment.

Dans un environnement diplomatique où tous les mots sont pesés, j'ai tenu à me rapprocher de nos services de renseignement qui ont bien voulu me présenter un « briefing de sécurité » sur l'Iran, puis dans un délai très court, j'ai pu bénéficier de la présence en France de notre ambassadeur à Téhéran, Nicolas Roche, par l'intermédiaire duquel je tiens à saluer le travail et l'abnégation de nos agents diplomatiques et consulaires. J'ai également entendu une diplomate de la direction Afrique du Nord-Moyen-Orient du Quai d'Orsay, l'ambassadrice représentante permanente de la France au comité politique et de sécurité de l'Union européenne, et deux chercheurs spécialistes de l'Iran : Bernard Hourcade et Thierry Coville. Ils ont tous deux travaillé à l'Institut français de recherche en Iran (Ifri) à Téhéran, qui vient d'être fermé par les autorités iraniennes. Nous avons, par ailleurs, contacté l'ambassade d'Iran à Paris, qui n'a pas répondu à notre demande d'audition.

J'en viens maintenant aux manifestations de l'automne 2022. Le 16 septembre 2022, une jeune femme de 22 ans d'origine kurde, Mahsa Amini, a été arrêtée par la police des moeurs pour avoir mal mis son voile, puis elle a été assassinée dans des circonstances non élucidées à ce jour. Pendant l'automne 2022, un mouvement de contestation inédit s'est développé dans toutes les grandes villes d'Iran.

Cette contestation est inédite, car il s'agissait pour une nouvelle catégorie d'Iraniennes et d'Iraniens, les jeunes, de protester contre le port obligatoire du voile et de manifester pour les droits des femmes, avec le slogan « Femme, vie, liberté ». Nous avons tous vu avec quel courage des Iraniennes ont bravé ouvertement l'obligation du port du voile en se découvrant dans les lieux publics et sur les réseaux sociaux.

Cette contestation est inédite aussi par l'ampleur de la remise en cause des fondements de la République islamique d'Iran, à commencer par le Guide suprême, l'ayatollah Khamenei lui-même, mais aussi des valeurs et des méthodes policières des autorités. Même si les manifestations qui se sont déroulées entre septembre et novembre ont rarement dépassé la dizaine de milliers de participants dans les rues, des actions de désobéissance civile se sont développées dans la sphère privée et les universités, et parmi les élites culturelles.

Les autorités iraniennes ont pu sembler surprises dans cette première phase de contestation et craindre un élargissement du mécontentement à l'ensemble de la société compte tenu du contexte économique désastreux : plus de 16 % de chômage, 50 % d'inflation par an, pénurie de produits de première nécessité, etc.

Si je peux employer ici ce terme dans le contexte iranien, cette « convergence » des luttes n'a pas eu lieu. En effet, la reprise en main à laquelle les autorités iraniennes ont procédé à l'instigation du guide suprême a été très dure et méthodique.

J'en viens maintenant à la répression du régime et à ce à quoi, plus largement, la France est confrontée.

Il est difficile de chiffrer exactement le nombre des victimes de la répression. Selon l'ONG Hrana, sur laquelle se basent les chancelleries européennes, le bilan serait de 516 morts, dont 63 enfants, et environ 20 000 arrestations sur les trois premiers mois de manifestations. C'est un chiffre effroyable et pourtant, on nous dit, de source autorisée, que le régime se serait organisé pour que la répression de la contestation ne tourne pas au bain de sang comme en 2019 où des centaines de manifestants avaient été tués en une seule semaine.

Ici, ce qu'il convient de dénoncer est une stratégie élaborée de répression méthodique, de contrôle social et de guerre culturelle d'un régime contre sa propre population. Il s'agit d'une stratégie policière de la terreur faite de tabassages au hasard dans les rues, de rafles aléatoires de groupes d'étudiants, de contrôle des réseaux sociaux et d'arrestations arbitraires. Cette stratégie de dissuasion fonctionne par l'incertitude sur l'issue des procédures judiciaires, une simple arrestation pouvant conduire à la condamnation à mort.

De fait, on nous rapporte que depuis mi-décembre les manifestations ont cessé, hormis dans le Kurdistan iranien et le Baloushistan à la frontière afghane où les tensions sont plus vives du fait des différences ethniques, religieuses et des conditions de vie encore plus précaires des populations qui y vivent.

Très clairement, les autorités iraniennes ont durci leur discours et leurs actes. Plus d'une vingtaine de condamnations à mort ont été prononcées et les exécutions ont débuté à la mi-décembre - deux exécutions publiques -, pour se poursuivre en ce début d'année - trois exécutions en ce mois de janvier. Malheureusement, ces chiffres sont évolutifs, car la machine judiciaire iranienne est en route. Je sais que nous sommes nombreux, par la voix de nos commissions ou à titre individuel, à nous mobiliser pour dénoncer ces condamnations à mort et ces exécutions. Certains motifs interrogent même les membres du clergé chiite : ainsi, l'un des condamnés à mort aurait seulement brûlé la moto d'un membre des forces de l'ordre sans commettre d'homicide.

Il faut ici revenir plus largement sur ce qui n'est pas seulement une affaire de politique intérieure. En réalité, nous assistons à quatre crises concomitantes.

Premièrement, à une crise des droits de l'Homme, comme je viens de vous l'exposer.

Deuxièmement, nous sommes face à une hostilité générale de l'Iran par rapport à l'Occident, aux États-Unis, à Israël et à l'Union européenne, accusés de fomenter depuis l'extérieur le mouvement de contestation. La politique consistant à détenir des otages d'État, qualifiés comme tel par le Quai d'Orsay depuis octobre dernier, et la diffusion d'aveux forcés participent d'une stratégie de menaces et d'intimidation. Je rappelle que sept de nos ressortissants sont emprisonnés dans des conditions très difficiles avec un accès restreint aux visites consulaires. Le sort de nos concitoyens est très préoccupant et leur libération est naturellement une priorité.

Troisièmement, la crise sur le nucléaire iranien perdure et nous constatons que les discussions pour un retour à la table des négociations des États-Unis et de l'Iran ne reprennent pas. L'Iran viole, par ailleurs, les règles instituées par l'accord de Vienne de 2015 en poursuivant son programme de production d'uranium enrichi à 60 %. Les livraisons d'armes à la Russie, non assumées par les autorités iraniennes, entrent dans ce défi idéologique lancé par la République islamique à l'Occident, plus qu'elles ne traduisent une réelle alliance avec la Russie.

Quatrièmement, enfin, nous assistons à une crise régionale où l'Iran use de son influence dans tout le Moyen-Orient, par groupes interposés, au Yémen et dans ce qu'on appelle le croissant chiite au Liban, en Syrie et en Irak.

Il ne faut donc pas perdre de vue le contexte international et régional dans lequel nous avons à discuter des condamnations et sanctions que nous souhaiterions que notre gouvernement et l'Union européenne adoptent face à l'Iran.

Après ce tableau sur le mouvement de contestation et la répression des autorités iraniennes, j'en viens maintenant au chapitre des condamnations internationales, aux sanctions déjà prises et à celles que nous pourrions proposer d'y ajouter au travers de la proposition de résolution européenne (PPRE) déposée par notre collègue Nathalie Goulet.

Cette répression des autorités iraniennes a fait l'objet d'une condamnation unanime ou presque - nous reviendrons sur l'attitude de la Chine et de la Russie - de la communauté internationale. Depuis septembre 2022, les pays occidentaux - l'Union européenne en tête - ont voté plusieurs paquets de sanctions contre l'Iran, l'un des pays les plus sanctionnés au monde depuis quarante ans et l'embargo des États-Unis en 1980 à la suite de la prise d'otages à l'ambassade américaine de Téhéran.

L'Union européenne a ainsi voté, depuis le début de la répression, quatre paquets de sanctions visant des personnes et entités, en raison de leur rôle joué dans cette répression. Ainsi, depuis le 17 octobre 2022 - date du premier paquet de sanctions -, 78 personnes et 27 entités ont été ajoutées à la liste des personnes et entités faisant l'objet de mesures restrictives dans le cadre du régime existant, au titre de sanctions en matière de droits de l'Homme à l'encontre de l'Iran. Ainsi, au total, depuis 2011, 164 personnes et 31 entités ont été inscrites sur cette liste à ce titre.

Ces mesures consistent en un gel des avoirs, une interdiction de pénétrer sur le territoire de l'Union européenne et une interdiction de mettre des fonds ou des ressources économiques à la disposition des personnes et entités inscrites sur la liste. Une interdiction des exportations vers l'Iran d'équipements susceptibles d'être utilisés à des fins de répression interne ainsi que d'équipements de surveillance des télécommunications s'applique également.

Parmi les personnes et entités désignées figurent les responsables du décès de Mahsa Amini, la police des moeurs iranienne, mais également des chefs provinciaux des forces de l'ordre iraniennes et des membres de haut rang du Corps des gardiens de la révolution islamique, ainsi que des ministres pour le rôle qu'ils jouent dans la répression. L'Union européenne a également inscrit sur cette liste des entités comme la société publique de télévision iranienne Press TV/Radio-télévision de la République islamique d'Iran ou Islamic Republic of Iran Broadcasting (Irib), responsable de la production et de la diffusion d'aveux forcés de deux otages français, Cécile Kohler et Jacques Paris.

À ces sanctions se sont ajoutées de nombreuses condamnations de la France et des institutions européennes appelant à la cessation de la répression. Le Conseil des affaires étrangères de l'Union européenne a adopté le 12 décembre 2022 des conclusions substantielles sur l'Iran établissant un cadre d'action commun. De même, le Conseil européen a appelé le 15 décembre dernier les autorités iraniennes à mettre immédiatement fin à cette répression et aux condamnations à mort. La France a également condamné publiquement la situation en Iran, avec une quinzaine de déclarations publiques du ministère des affaires étrangères, et la convocation à plusieurs reprises du chargé d'affaires iranien par la ministre des affaires étrangères. Réciproquement, notre ambassadeur de France à Téhéran a été convoqué à cinq reprises par les autorités iraniennes.

Outre ces sanctions, prises au titre de graves violations des droits de l'homme, l'Union européenne a également adopté des mesures contre l'Iran pour ses livraisons d'armes à la Russie. Le Conseil de l'Union européenne a effectivement adopté deux paquets de sanctions - les 20 octobre et 12 décembre 2022 - au titre du rôle de l'Iran dans la mise au point et la livraison de drones utilisés par la Russie dans sa guerre contre l'Ukraine.

Ces paquets de sanctions ont été adoptés par l'Union européenne en coordination avec les autres pays occidentaux, au premier rang desquels les États-Unis et le Royaume-Uni, qui ont aussi décidé, dès le 22 septembre 2022 pour l'un, et le 10 octobre 2022 pour l'autre, un certain nombre de mesures restrictives à l'égard des responsables iraniens. Le Royaume-Uni a notamment renforcé son paquet de sanctions à la suite de l'exécution de son ressortissant irano-britannique Alireza Akbari en janvier dernier.

La France et les pays occidentaux poursuivent également la pression sur les autorités iraniennes dans les enceintes internationales. Après la mise en place fin novembre 2022 par le Conseil des droits de l'homme (CDH) d'une mission d'établissement des faits - dont le rapport est attendu pour juin -, l'Iran a été exclu de la Commission sur le statut de la femme à New York par un vote à une large majorité, le 14 décembre dernier. Il est également intéressant de noter que l'Union européenne a entamé un rapprochement avec les pays du Golfe.

Cette condamnation des autorités iraniennes est donc unanime, ou presque, comme je le soulignais, puisque, dans ce concert des nations, la Chine et la Russie brillent par leur silence. Elles ont adopté une attitude de non-ingérence dans les affaires iraniennes. La Chine est le premier partenaire commercial de l'Iran, et l'un des plus gros importateurs du pétrole iranien. Les deux pays ont signé en 2021 un accord de coopération sur vingt-cinq ans. Quant au rapprochement entre Moscou et Téhéran, il se manifeste notamment par un soutien en armement iranien à la Russie.

En réaction à ces sanctions, les autorités iraniennes ont annoncé des mesures de représailles, visant un certain nombre de personnes et d'entités, parmi lesquelles Charlie Hebdo, des parlementaires européens, ou des personnalités françaises comme Bernard Kouchner, Anne Hidalgo et Bernard-Henri Levy.

C'est dans ce contexte particulièrement tendu - entre l'Iran et l'Union européenne, dont la France notamment - que nous devons examiner la proposition de résolution européenne de notre collègue Nathalie Goulet. Si je ne peux qu'être favorable au principe de cette résolution visant à condamner la répression et à soutenir le peuple iranien, je suggérerai néanmoins quelques modifications concernant les mesures proposées, notamment pour « calibrer » au mieux la rédaction des différents appels à interventions et sanctions que nous formulerons à l'adresse de notre gouvernement et de l'Union européenne.

Cette PPRE intervient alors que l'Assemblée nationale a adopté, le 28 novembre 2022, au titre de l'article 34-1 de la Constitution, une résolution en soutien au mouvement pour la liberté du peuple iranien. Le même texte a également été déposé par notre collègue François Patriat sur le bureau du Sénat le 1 er décembre dernier. J'ai ainsi pu prendre connaissance, avec beaucoup d'attention et d'intérêt, des dispositions proposées. Je souligne que notre ambassadeur à Téhéran a été convoqué pour s'expliquer sur la teneur de la résolution adoptée par nos collègues députés. Les autorités iraniennes suivent donc précisément les travaux du Parlement, et ne sont pas insensibles aux condamnations et appels à sanction dont elles font l'objet.

À la lueur de ces textes, du contexte international actuel et des entretiens de haut rang que j'ai pu avoir, je souhaiterais proposer quelques ajustements aux mesures proposées par notre collègue Nathalie Goulet. Ces modifications ont été guidées par la recherche d'un équilibre entre le besoin d'une condamnation ferme et déterminée de la répression en cours, et la nécessité d'adapter nos appels à sanction à la position que tient la France par rapport à l'Iran au Moyen-Orient.

Le poids des mots et des sanctions est scruté avec beaucoup d'attention par les autorités iraniennes. S'il fallait le préciser, la sensibilité du sujet et des enjeux doit nous appeler à la responsabilité dans les mesures que le Sénat proposera. Côté iranien, toute déclaration ou publication en provenance de la France, qu'elle soit gouvernementale, parlementaire ou même journalistique est considérée comme une position officielle de la France. Par paranoïa, cynisme ou idéologie, les autorités iraniennes ne décèlent pas les nuances des expressions - la liberté d'expression, l'indépendance du Parlement et le pluralisme démocratique étant des termes étrangers au régime.

Nous devons être conscients que la résolution que nous adopterons au Sénat sera ainsi considérée, par les autorités iraniennes, comme un texte représentant la voix de la France. Ceci étant dit, cela ne doit pas nous empêcher d'agir et de condamner vivement la répression en cours, les condamnations à mort, les détentions arbitraires, la pratique de la torture et des discriminations, notamment à l'encontre des femmes et des minorités, et d'en demander immédiatement l'arrêt. Les sanctions prises par l'Union européenne et les instances internationales doivent être soutenues, concernant les graves violations des droits de l'Homme en cours. Je propose ainsi, aux alinéas 28 à 40 de la PPRE, de renforcer certaines des dispositions proposées par Nathalie Goulet et d'en ajouter de nouvelles.

La question des otages européens, notamment de nos sept otages français retenus en Iran, est cruciale. La préservation de leur sécurité est essentielle. À cet égard, la position de la France n'est pas de proposer des mesures qui impliqueraient une rupture unilatérale des relations diplomatiques avec l'Iran. Le canal de discussion doit demeurer, ne serait-ce que dans le cadre de l'accord sur le nucléaire, ne fût-ce que pour dénoncer les manquements de l'Iran et garantir le difficile travail de contrôle de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).

La première mesure, que propose la PPRE, est l'inscription sur la liste des entités terroristes du corps des Gardiens de la révolution islamique : cela ne nous apparaît pas, à ce stade, comme la réponse nécessaire à la crise actuelle. Sur le plan juridique d'abord, il semble que cette mesure se heurte à l'absence de décision d'une autorité judiciaire d'un État membre concernant l'implication du corps des Gardiens de la révolution ou d'un de ses membres dans un acte terroriste. Une analyse du service juridique du Conseil a été demandée par certains États membres sur ce point et devrait être rendue pour le prochain Conseil des affaires étrangères du 20 février. Sur le plan politique ensuite, une telle inscription serait comprise comme un acte d'hostilité par les autorités iraniennes. Ces dernières ont prévenu qu'une telle mesure - qui a notamment été proposée par le Parlement européen dans une résolution de janvier dernier - pourrait les conduire à prendre des mesures réciproques de représailles.

Cela ne doit pas pour autant nous restreindre dans l'expression de notre liberté d'opinion. C'est pourquoi, dans un esprit de gradation des sanctions en fonction de la situation en Iran, je vous proposerai un amendement au texte qui vous a été transmis hier, qui invite le Gouvernement et le Conseil de l'Union à examiner le moment venu, et sur la base de décisions de justice, la possibilité d'inscrire des groupes et entités tels que le corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des organisations terroristes de l'Union.

S'agissant de la question du nucléaire iranien, il me semble dangereux et contraire à la position de la France d'appeler à la cessation d'un tel accord : certes, les négociations sont suspendues, mais depuis le retrait américain voulu par le Président Trump, ni la France ni l'Union européenne ne souhaitent rompre pour le moment cet accord, bien que l'Iran n'en respecte plus les termes, avec une accélération de son programme nucléaire. Le fait d'envisager sortir de cet accord en raison des manifestations de l'automne 2022 signifierait qu'on subordonnerait le risque nucléaire à la situation des droits de l'Homme : cela n'a pas été fait par le passé lors des répressions de 2009, de 2017, de 2019. Il s'agirait d'un renversement de position, que la France et l'Union européenne ne semblent pas prêtes à faire.

Le risque - en mettant un terme à cet accord - est de mettre fin à un canal de discussion et de contrôle de la politique nucléaire iranienne, et de laisser les autorités iraniennes se diriger seules vers l'arme nucléaire.

À une échelle de sanctions moindres, je ne suis pas non plus favorable, à ce stade, aux mesures prévoyant l'extension de la limitation de l'accès aux marchés primaire et secondaire des capitaux de l'Union, ainsi que la fermeture de l'espace aérien de l'Union aux avions iraniens. D'abord, car il s'agit de sanctions qui ont été levées dans le cadre de l'accord sur le nucléaire iranien. Ensuite, car elles auraient des répercussions pratiques gênantes, entravant par exemple le départ d'Iraniens voulant quitter le territoire par avion. Mais ces sanctions me semblent devoir demeurer à l'étude, en fonction de l'évolution de la situation en Iran. C'est pourquoi je vous propose de modifier leur rédaction dans l'esprit d'une gradation de l'échelle des sanctions à l'alinéa 43 de la PPRE.

Sur la question des visas, la mesure proposée de recenser les étudiants iraniens au sein de l'Union européenne et d'expulser sans délai ceux qui ont un lien familial avec les responsables iraniens sanctionnés me semble techniquement difficile à mettre en oeuvre, et juridiquement contraire à nos engagements internationaux.

Je suis, en revanche, très favorable à la disposition encourageant notre gouvernement et l'Union européenne à la délivrance de visas à toute personne craignant avec raison d'être persécutée en Iran, figurant à l'alinéa 41. C'est d'ailleurs la politique actuellement mise en oeuvre par les autorités françaises. Des accords ont été conclus afin que les demandes de visas d'Iraniens puissent être faites dans des pays tiers, dans lesquels ils se seraient réfugiés.

Pour conclure, la politique menée par les autorités iraniennes emporte de graves violations des droits de l'homme, qui doivent être sanctionnées. Il doit y être mis fin sans délai. Le soutien militaire apporté par l'Iran à la Russie dans sa guerre contre l'Ukraine doit également être dénoncé, et les sanctions prises par l'Union européenne contre les individus et entités iraniens pour leur rôle dans la mise au point et la livraison de drones à l'Ukraine soutenues. Le rapprochement de l'Iran et de la Russie est à surveiller de près.

Il faut toutefois demeurer vigilant à conserver un dialogue avec les autorités iraniennes, sans s'interdire de nouvelles sanctions au vu de l'évolution de la situation. Il semblerait d'ailleurs que le prochain Conseil des affaires étrangères du 20 février prévoie d'élargir la liste des personnes et entités faisant l'objet de mesures restrictives. S'agissant de la position des États membres, si un consensus existe sur la nécessité des sanctions, il semble qu'il y ait néanmoins une différence d'appréciation entre États sur la gradation des sanctions à prendre. Un débat aura certainement lieu lors du prochain Conseil.

La proposition de résolution sur laquelle vous allez être amenés à vous prononcer n'est également pas à considérer, selon moi, comme exclusive d'une PPRE ultérieure, qui pourrait être déposée pour appeler à de nouvelles sanctions, au vu de l'évolution de la situation en Iran.

Sous réserve de notre débat, je salue par avance l'apport du Sénat pour l'adoption d'un texte présentant des axes forts de soutien aux droits des femmes iraniennes, et de condamnation et e sanction à l'encontre des autorités iraniennes.

M. Jean-François Rapin , président . - Merci pour ce travail important, qui a nécessité beaucoup d'échanges et de concertations. Je passe à présent la parole à ceux d'entre vous qui auraient des questions à poser.

M. Didier Marie . - Je remercie Nathalie Goulet de son initiative, qui nous permet de manifester notre solidarité avec le peuple iranien persécuté par ses dirigeants. Je salue également le travail de Pascal Allizard, qui vise à la fois à prendre en compte les efforts diplomatiques pour tenter de résoudre la crise et à protéger l'intégrité des otages d'État français et européens. Nous nous retrouvons sur la quasi-totalité des points de cette PPRE, notamment pour souligner la multiplication des sanctions prises par l'Union européenne et demander leur poursuite graduelle. Le Conseil des affaires étrangères du mois de février permettra vraisemblablement d'aller en ce sens. Je me félicite des ajouts proposés par notre rapporteur, notamment s'agissant des diverses condamnations des agissements du régime iranien aux alinéas 28, 29 et 30, et de l'affirmation du soutien au peuple iranien. L'ajout relatif aux relations entre l'Iran et la Russie me semble également pertinent dans le contexte international actuel.

Nous saluons tout particulièrement la suppression de l'alinéa 31 sur l'accord nucléaire : il convient effectivement de maintenir des canaux de discussion même si les choses sont aujourd'hui mal engagées puisque l'Iran, après avoir augmenté le niveau d'enrichissement de son uranium, sera, probablement dans les deux ans qui viennent, capable de produire une bombe nucléaire, ce qui posera d'énormes difficultés dans la région et sur le plan international. Les discussions doivent être poursuivies avec les autorités iraniennes pour trouver une solution.

Enfin, je salue la dernière proposition d'amendement du rapporteur concernant l'inscription du corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des entités terroristes de l'Union : il faut maintenir la pression sur les autorités iraniennes, en particulier sur les Gardiens de la révolution islamique. Il conviendra effectivement de prendre des dispositions en temps utile, au regard des décisions de justice. Nous voterons cette PPRE telle qu'elle nous est proposée par notre rapporteur.

M. André Reichardt . - À mon tour de remercier Nathalie Goulet pour cette initiative de PPRE, que j'ai cosignée avec une hésitation - levée ensuite - concernant la sortie du nucléaire - j'y reviendrai. Je salue le travail réalisé par Pascal Allizard pour nous proposer aujourd'hui un nouveau texte, dans des conditions matérielles difficiles.

Permettez-moi néanmoins de regretter quelque peu les atténuations importantes qui ont été apportées par notre rapporteur, même si j'en comprends, bien entendu, les raisons, liées tout particulièrement à la présence d'otages en Iran. Mais c'est précisément parce qu'il y a des otages d'État et que cette situation est tout à fait intolérable qu'il importe de ne pas trop hésiter à lever le ton par rapport à ce régime mortifère.

Concernant l'inscription du corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des organisations terroristes de l'Union européenne, j'ai bien entendu les remarques du Haut représentant de l'Union européenne pour les affaires étrangères, Josep Borrell, qui n'y est pas favorable. Ne nous appartiendrait-il pas précisément d'ouvrir la voie à cette possibilité en vue de la prochaine réunion du Conseil de l'Union européenne ? Au sein de l'Union européenne, un certain nombre de pays, pour de multiples raisons, hésitent à aller trop loin vis-à-vis de ce régime. Je ne suis pas sûr que les sanctions prises, même si elles sont nombreuses, puissent véritablement convaincre l'Iran de changer de position. C'est la raison pour laquelle il serait bon de ne pas hésiter à inscrire d'ores et déjà le corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des organisations terroristes de l'Union. Où s'arrêteront-ils ? Nous ne connaissons qu'une partie de ce qui se passe en Iran. Que nous faut-il constater de plus pour inscrire le corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des organisations terroristes de l'Union? J'éprouve quelques réserves sur les atténuations apportées par notre rapporteur dans l'attente de décisions de justice : de quelles décisions de justice s'agit-il ?

Comme je l'ai souligné, j'ai eu quelques hésitations en ce qui concerne la sortie de l'accord sur le nucléaire, mais elles ont été levées grâce aux explications données par Nathalie Goulet. J'aimerais qu'elle réitère devant nous ses propos pour éclairer la commission. En quoi la renonciation à cet accord sur le nucléaire peut-elle ou non améliorer la situation en Iran, notamment à l'égard des manifestations ?

Par ailleurs, comme l'a souligné Didier Marie, je remercie le rapporteur pour son ajout concernant l'intervention de l'Iran dans la guerre lancée par la Russie en Ukraine, tout particulièrement en ce qui concerne la livraison d'armes.

M. Jean-François Rapin , président . - L'amendement et l'insertion de l'alinéa 44 ont fait l'objet de discussions, l'objectif étant de parvenir à une unanimité de notre commission et à préparer l'examen du texte par la commission permanente à laquelle il sera renvoyé. Je ne suis pas certain que le Conseil de l'Union européenne acceptera d'emblée d'inscrire de manière péremptoire le corps des Gardiens de la révolution sur la liste des organisations terroristes. Tenons-nous-en plutôt à une position équilibrée afin qu'elle puisse être ralliée par tous.

M. André Gattolin . - Je souscris aux propos de Didier Marie et de M. le rapporteur. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a auditionné la semaine dernière notre remarquable ambassadeur de France en Iran. La question de la sécurité de nos otages a été évoquée, mais aussi celle du personnel local de l'ambassade. Je salue les modifications apportées par le rapporteur au texte de la PPRE. Il était important de rappeler les éléments de propagande, je pense à la diffusion d'aveux forcés de nos otages à la télévision. Le fait géopolitique et la situation avec la Russie amèneront sans doute un autre type de réflexion et de travail d'investigation.

Je comprends le sens qu'aurait l'inscription du corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des organisations terroristes de l'Union, mais j'en pèse les conséquences. Il convient d'affiner notre réflexion. Je rappelle que ces listes sont parfois dangereuses. Je pense, notamment, à l'inscription à tort de représentants ouïghours par les États-Unis et d'autres organisations internationales...

Certes, les Gardiens de la révolution font peser une répression et une terreur, mais cela en fait-il pour autant un groupe terroriste ? À mon sens, les organisations terroristes répondent à une définition précise, impliquant notamment la conduite d'actions internationales. Aujourd'hui, la priorité concerne bel et bien le groupe Wagner, qui intervient en dehors du territoire russe et ne bénéficie d'aucune reconnaissance officielle, puisque ce groupe est interdit sur le territoire de la Fédération de Russie.

Enfin, je tiens à remercier le rapporteur d'avoir rappelé la proposition de résolution déposée par mon groupe, après son adoption à l'Assemblée nationale. Je salue l'initiative de Nathalie Goulet, qui nous offre la possibilité d'envisager l'adoption d'un texte identique dans les deux chambres.

M. Pierre Laurent . - Je remercie à mon tour Nathalie Goulet d'avoir pris cette initiative politiquement nécessaire. Je salue également les efforts de Pascal Allizard pour parvenir à un vote unanime. C'est ce qui déterminera principalement mon soutien à cette PPRE, d'autant que le régime de terreur iranien fait l'objet, en France, d'une condamnation générale. Il s'agit aujourd'hui d'un geste important : la solidarité internationale, qui s'est exprimée fortement dans les premiers temps de la répression, peut s'amenuiser au fil du temps. Comme nous l'a très bien expliqué la semaine dernière l'ambassadeur de France en Iran, le régime parvient, sans amoindrir la contestation, à éteindre la possibilité de manifester. Il convient donc d'amplifier l'effort de solidarité internationale, qui est au moins aussi important que les sanctions. Ces dernières, qui alimentent parfois le sentiment anti-occidental, peuvent avoir aussi des effets pervers. Il faut toutefois maintenir les deux - effort de solidarité internationale et sanctions - pour soutenir le peuple iranien engagé dans un long combat pour desserrer l'étau de la terreur du régime.

Quant à inscrire ou non le corps des Gardiens de la révolution sur la liste des organisations terroristes de l'Union, je ne discuterai pas ici de la modification proposée par M. le rapporteur, mais je l'accepterai. Ce qui l'emporte, pour moi, ce n'est pas un souci d'équilibre, car selon moi la condamnation doit être ferme et totale, mais plutôt le sentiment que nous ne pouvons pas avoir ici un débat sur ce qu'est la liste des organisations terroristes de l'Union européenne et comment elle est définie Il y aurait beaucoup à dire sur cette question. Je me contenterai donc de soutenir cette modification du texte.

M. Pascal Allizard , rapporteur . - Je remercie mes collègues pour leurs interventions et leur soutien au texte de la PPRE. Je comprends les questionnements exprimés par André Reichardt ; j'ai eu les mêmes au cours de mon travail de rapporteur mais vu l'environnement dans lequel nous travaillons, tous nos mots ont dû être pesés. Pour autant, comme je l'ai indiqué en conclusion, cette PPRE n'est pas exclusive d'un autre texte, ce qui maintient ouvert la possibilité de retravailler sur ce sujet, en fonction de l'évolution de la situation.

Nous avons travaillé dans un « couloir » : d'un côté, nous n'avons pas souhaité être faibles dans la dénonciation et la condamnation ; de l'autre, nous avons voulu garder le canal des négociations ouvert.

Mme Nathalie Goulet , auteur de la proposition de résolution européenne . - Je remercie la commission ainsi que Pascal Allizard de son travail d'orfèvre. Mes liens sont anciens avec l'Iran, où je me suis rendue à plusieurs reprises. La population est dans un état de frayeur et de colère extraordinaire, qui n'avait pas été vu depuis la dernière « révolution verte » en 2009. C'est vraiment la rue qui s'exprime ici, aucun leader politique n'a été capable d'organiser ce mouvement. Le mouvement social est important, avec le soutien notamment de l'industrie pétrolière : on a bien cru que ces éléments cumulés, qui sont les mêmes que ceux qui avaient provoqué la chute du shah, pourraient modifier les choses. Aujourd'hui, le mouvement s'affaiblit. Il faut dire que les condamnations à mort, les viols, les tortures continuent, et que la jeunesse est effrayée.

Je rejoins les remarques de Pierre Laurent, car le sang sèche vite quand il entre dans l'histoire. Ne lâchons pas la population iranienne, qui s'est montrée très courageuse. Je connais peu de personnes qui résistent comme ces femmes qui se prennent en photo, sans voile, en sortant de prison! Je ne sais pas si nous aurions, les uns et les autres, le courage de faire cela. Deux jeunes gens qui ont dansé dans la rue ont écopé de dix ans de prison, des sanctions disproportionnées ! Concernant la question de la liste des organisations terroristes, je comprends la logique commandée par l'existence des otages d'État. Je comprends aussi la volonté d'une gradation des sanctions, comme j'ai eu l'occasion de le dire à Pascal Allizard lors de nos échanges. Pour autant, abattre des avions civils, financer le Hezbollah et le Hamas, organiser des mouvements dans le monde entier, tenter d'assassiner des ressortissants aux États-Unis ou en France, organiser des campagnes de fake news comme sur la question de l'abolition de la police des moeurs - , conduire des campagnes d'espionnage et se livrer à des cyberattaques, n'est-ce pas du terrorisme?

S'agissant de l'accord sur le nucléaire, je comprends les modifications proposées par le rapporteur. La raison pour laquelle j'avais proposé de telles dispositions - en réponse à André Reichardt - est que l'accord sur le nucléaire procure à l'Iran plusieurs centaines de millions de dollars tous les ans. C'est aussi la raison pour laquelle j'ai demandé la limitation de l'accès aux marchés des capitaux de l'Union pour des banques iraniennes. Il faut assécher financièrement ce mouvement corrompu et terroriste. Le No Money for Terror est une pratique communément mise en oeuvre depuis des années dans ce genre de situation.

Enfin, la proposition de résolution déposée en décembre dernier par François Patriat ne prend pas en compte un certain nombre d'éléments, car la situation a changé depuis. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé cette PPRE en janvier. À l'époque, la terreur n'était pas aussi forte et l'Iran n'avait pas encore apporté son soutien à la Russie. En tout état de cause, cette PPRE, qui suscite beaucoup d'émotions, a été améliorée par Pascal Allizard, qui a su y mettre de la raison. Je l'en remercie.

La commission autorise la publication du rapport et adopte à l'unanimité la proposition de résolution européenne ainsi modifiée, disponible en ligne sur le site du Sénat.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE MODIFIÉE

Le Sénat,

L

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

M

Vu la Charte des Nations unies du 26 juin 1945,

N

Vu la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948,

O

Vu la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés,

P

Vu le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966,

Q

Vu la Convention sur l'élimination de toute forme de discrimination à l'égard des femmes du 18 décembre 1979,

R

Vu le traité sur l'Union européenne, notamment le chapitre II du titre V, notamment l'article 29,

S

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, notamment l'article 215,

T

Vu l'accord sur le plan d'action global conjoint (JCPOA) intervenu à Vienne le 14 juillet 2015, approuvé par la résolution 2231 (2015) du 20 juillet 2015 du Conseil de sécurité des Nations unies,

1a

Vu les conclusions du Conseil « Affaires étrangères » du 12 décembre 2022 et vu les sanctions adoptées par le Conseil de l'Union européenne les 17 octobre 2022, 14 novembre 2022, 12 décembre 2022 et 23 janvier 2023,

1b

Vu les conclusions du Conseil européen du 15 décembre 2022,

1c

Vu la déclaration du vice-président de la Commission/Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité au nom de l'Union européenne du 25 septembre 2022 sur l'Iran,

1d

Vu la résolution 2022/2849 du Parlement européen du 6 octobre 2022 sur la mort de Mahsa Jina Amini et la répression des manifestants pour les droits des femmes en Iran,

1e

Vu la résolution 2023/0016 du Parlement européen du 19 janvier 2023 sur la réaction de l'Union européenne face aux manifestations et aux exécutions en Iran,

1f

Vu la position commune 2001/931/PESC du Conseil du 27 décembre 2001 relative à l'application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme, mise à jour par la décision (PESC) 2022/1241 du Conseil du 18 juillet 2022,

1g

Vu les lignes directrices de l'Union européenne sur les violences contre les femmes et les filles et la lutte contre toutes les formes de discrimination à leur encontre, adoptées par le Conseil des affaires générales du 8 décembre 2008,

1h

Vu la résolution n° 35 (16 e législature) de M. Hadrien Ghomi et de plusieurs de ses collègues députés en soutien au mouvement pour la liberté du peuple iranien, adoptée le 28 novembre 2022,

1i

Vu la proposition de résolution n° 165 (2022-2023) de M. François Patriat et plusieurs de ses collègues sénateurs, en soutien au mouvement pour la liberté du peuple iranien, déposée le 1 er décembre 2022,

1j

Considérant les graves atteintes aux droits de l'Homme et aux libertés fondamentales commises par le régime de la République islamique d'Iran ;

2a

Considérant que les forces de sécurité iraniennes, parmi lesquelles figurent le corps des Gardiens de la révolution islamique, ont, de manière illégale et délibérée, tiré directement sur les manifestants avec des balles réelles, de la grenaille et d'autres projectiles métalliques ; que cette répression violente et systématique a causé la mort de plusieurs centaines de personnes ainsi que des centaines de blessés ;

2b

Considérant que de nombreux Iraniennes et Iraniens ont été placés arbitrairement en détention ou envoyés dans des centres de rééducation par ces mêmes forces de sécurité intérieure en raison de leur participation à des manifestations d'opposition ou de leur refus de participer à des rassemblements en faveur des autorités iraniennes ;

2c

Constatant que la mort de Mahsa Jina Amini n'a, jusqu'à présent, fait l'objet d'aucun compte rendu transparent de la part des autorités iraniennes ;

2d

Constatant que le réseau internet et téléphonique en Iran apparaît sévèrement perturbé du fait des agissements des autorités iraniennes, afin d'entraver la communication entre citoyens et l'accès à des informations libres ;

2e

Considérant que de nombreux citoyens étrangers, dont des ressortissants français, sont victimes d'arrestations arbitraires et maintenus en détention sans jugement ou sur la base d'aveux extirpés sous la contrainte ;

2f

Considérant que l'Union européenne a adopté des mesures restrictives liées à ces violations des droits de l'Homme, notamment à l'encontre de membres de la police des moeurs, responsables du décès de Mahsa Jina Amini, des dirigeants du corps des Gardiens de la révolution islamique pour le rôle qu'ils ont joué dans la répression brutale des récentes manifestations et à l'encontre de la société publique de télévision iranienne Press TV, responsable de la production et de la diffusion d'aveux forcés de détenus ;

2g

Considérant que ces mesures restrictives comprennent notamment un gel des avoirs et une interdiction de visa pour les personnes et entités responsables de graves violations des droits de l'Homme en Iran, ainsi qu'une interdiction d'exporter à destination de l'Iran des équipements susceptibles d'être utilisés à des fins de répression interne ou des équipements de surveillance des télécommunications ;

2h

Condamne avec la plus grande fermeté l'usage généralisé, brutal et disproportionné de la force par les autorités iraniennes contre des manifestants pacifiques, y compris des femmes et des enfants, qui constitue une atteinte flagrante et inacceptable au droit de manifester et à la liberté d'expression ;

2i

Condamne la discrimination exercée par la République islamique d'Iran à l'encontre des femmes et des groupes minoritaires au moyen de lois et de règlements qui restreignent lourdement leurs libertés et leurs droits ;

2j

Dénonce l'usage de la torture ainsi que toutes les autres formes de mauvais traitements contraires à la dignité de la personne humaine dans les prisons iraniennes et demande qu'il y soit immédiatement mis un terme ;

3a

Affirme son soutien au peuple iranien dans son aspiration à la démocratie et au respect de ses droits et libertés fondamentales ;

3b

Salue les conclusions du Conseil des affaires étrangères du 12 décembre 2022 et approuve les récentes sanctions prises par l'Union européenne à l'encontre des autorités iraniennes, en réaction à leurs violations répétées des droits de l'Homme;

3c

Dénonce le soutien militaire apporté par l'Iran à la Russie dans sa guerre contre l'Ukraine et soutient les sanctions prises par l'Union européenne contre les individus et entités iraniens pour leur rôle dans la mise au point et la livraison de drones à la Russie;

3d

Dénonce le manque de coopération de l'Iran dans la mise en oeuvre de l'accord de Vienne sur le nucléaire iranien intervenu le 14 juillet 2015 ;

3e

Salue la décision du Conseil des droits de l'homme des Nations unies, dans sa résolution S35/1 du 24 novembre 2022, de mettre en place une mission d'enquête internationale indépendante sur les violations des droits de l'Homme commises en République islamique d'Iran ;

3f

Salue l'exclusion de l'Iran de la Commission de la condition de la femme des Nations unies, par une résolution du Conseil économique et social des Nations unies le 14 décembre 2022 ;

3g

Regrette les mesures prises par l'Iran, en réaction aux sanctions de l'Union européenne, et notamment la fermeture de l'Institut Français de Recherche en Iran ;

3h

Invite le Gouvernement et l'Union européenne à demander aux autorités iraniennes de mettre fin aux condamnations à mort et aux exécutions de manifestants pacifiques en Iran, et de libérer sans délai tous les manifestants condamnés à mort ;

3i

Invite le Gouvernement et l'Union européenne à demander aux autorités iraniennes de mettre fin à toute forme de répression à l'encontre de leur propres citoyens et de libérer toutes les personnes détenues arbitrairement ;

3j

Invite le Gouvernement et l'Union européenne à exiger des autorités iraniennes la libération immédiate des otages d'État européens arrêtés et détenus arbitrairement, et l'application sans délai, y compris pour les ressortissants binationaux, de leur droit à la protection consulaire, conformément aux obligations internationales souscrites par la République islamique d'Iran ;

4a

Invite le Gouvernement et l'Union européenne à favoriser, dans le strict respect des principes et de la règlementation applicables, la délivrance de visas à toute personne craignant avec raison d'être persécutée pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d'expression, d'association et de réunion pacifique dans le cadre des manifestations en Iran ;

4b

Invite le Conseil de l'Union européenne, en cas de poursuite de la répression par les autorités iraniennes, à élargir la liste des personnes et entités qui font l'objet de mesures restrictives pour de graves violations des droits de l'Homme en Iran ;

4c

Invite le Gouvernement et le Conseil de l'Union européenne, en cas de poursuite des atteintes aux droits fondamentaux et de maintien en détention des otages d'État européens par les autorités iraniennes, à envisager le renforcement et l'élargissement du panel des sanctions à d'autres mesures pouvant inclure des restrictions d'accès aux marchés de capitaux et à l'espace aérien de l'Union ;

4d

Invite le Gouvernement, le moment venu, à examiner, avec ses partenaires du Conseil de l'Union européenne, et sur la base de décisions de justice, la possibilité d'inscrire des groupes et entités tels que le corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des organisations terroristes de l'Union ;

4e

Invite le Gouvernement à soutenir ces orientations et à les faire valoir dans les négociations en cours.

4f

LA RÉSOLUTION EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la résolution en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/tableau-historique/ppr22-226.html

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

• M. Nicolas Roche, Ambassadeur de France à Téhéran ;

• Mme Claire Raulin, Ambassadrice, représentante permanente de la France auprès du Comité politique et de sécurité de l'Union européenne, et M. Manuel Bufala, conseiller Afrique-Nord et Moyen-Orient de la Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne ;

• Mme Chloé Baudreux, adjointe au sous-directeur du Moyen-Orient de la Direction d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient du Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères ;

• M. Thierry Coville, chercheur à l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS), économiste ;

• M. Bernard Hourcade, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), géographe ;

• Direction générale de la sécurité extérieure.


* 1 Les manifestations de 2019, les plus importantes en date avant la contestation de l'automne 2022, avaient provoqué des émeutes dans une quarantaine de villes concernant, selon le Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme, entre 120 000 et 200 000 personnes. Selon les mêmes sources, au moins 208 personnes auraient été tuées en 5 jours, ce nombre étant estimé à environ 1 500 selon l'agence Reuter ; sont cités l'usage de tir à balles réelles ainsi que la pratique d'aveux forcés contre les personnes arrêtées (le nombre d'arrestations a été estimé à plus de 7 000).

* 2 Ces paquets de sanctions ont été adoptés par le Conseil Affaires étrangères les 17 octobre 2022, 14 novembre 2022, 12 décembre 2022 et 23 janvier 2023.

* 3 Règlement (UE) n° 359/2011 du Conseil concernant des mesures restrictives à l'encontre de certaines personnes, entités et organismes au regard de la situation en Iran et décision 2011/235/PESC du Conseil du 12 avril 2011 concernant des mesures restrictives à l'encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Iran.

* 4 Résolution 2231 (2015) du 20 juillet 2015 du Conseil de sécurité des Nations unies sur le programme nucléaire iranien.

* 5 L'accord nucléaire ( Joint Comprehensive Plan of Action ou Plan d'action global commun)) a été conclu le 14 juillet 2015 entre trois États membres de l'Union européenne (E3/UE) - Royaume-Uni, Allemagne, France -, plus la Chine, la Russie, les États-Unis, d'une part, et l'Iran, d'autre part, avec l'aide du Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Il a été approuvé à l'unanimité par la résolution 2231 du Conseil de sécurité le 20 juillet 2015.

* 6 Cf. Résolution du Sénat n° 22 sur l'extraterritorialité des sanctions américaines du 12 novembre 2018.

* 7 Instrument in support of trade exchanges.

* 8 Résolution n° 35 (16 e législature) de M. Hadrien Ghomi et de plusieurs de ses collègues députés en soutien au mouvement pour la liberté du peuple iranien, adoptée le 28 novembre 2022.

* 9 Proposition de résolution n° 165 (2022-2023) de M. François Patriat et plusieurs de ses collègues sénateurs, en soutien au mouvement pour la liberté du peuple iranien, déposée le 1 er décembre 2022.

* 10 Résolution 2022/2849 du Parlement européen du 6 octobre 2022 sur la mort de Mahsa Jina Amini et la répression des manifestants pour les droits des femmes en Iran.

* 11 Résolution 2023/0016 du Parlement européen du 19 janvier 2023 sur la réaction de l'Union européenne face aux manifestations et aux exécutions en Iran.

* 12 Cf. Article 1 er de la position commune 2001/931/PESC du Conseil du 27 décembre 2001 relative à l'application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme.

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