II. AU-DELÀ DE LA CRISE SANITAIRE ET ÉNERGÉTIQUE, UNE DÉGRADATION EN PROFONDEUR DES COMPTES PUBLICS
EN 2022 ET AU COURS DES ANNÉES PRÉCÉDENTES

A. LE DÉFICIT ET LA DETTE NE S'AMÉLIORENT QUE POUR DES MOTIFS CONJONCTURELS ET GRÂCE AUX RÉSULTATS DES COLLECTIVITÉS LOCALES ET DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

1. Des recettes plus dynamiques qu'anticipé ont permis à l'État d'augmenter les dépenses tout en réduisant légèrement le déficit public

En 2022, le déficit des administrations publiques s'élève à 4,7 % du PIB, soit 124,5 milliards d'euros, un résultat qui est meilleur de 0,3 point que la prévision retenue par le Gouvernement lors de l'examen de la loi de finances initiale pour 2022 et que pour la première loi de finances rectificative pour 2022 (PLFR I).

Décomposition du solde public en 2022

(en point de PIB)

 

LPFP

LFI

Exécution

Écart LPFP

Écart LFI

Solde structurel

- 0,8

- 4,0

- 3,4

- 2,6

0,6

Solde conjoncturel

0,6

- 0,8

- 1,2

- 1,8

- 0,5

Mesures ponctuelles
et temporaires

0,0

- 0,2

- 0,1

- 0,1

0,2

Solde effectif

- 0,3

- 5,0

- 4,7

- 4,5

0,3

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires et des comptes nationaux de l'INSEE pour 2022

Cette situation découle de deux facteurs principaux :

- d'une part, une augmentation des recettes publiques supérieure de 0,9 point de PIB par rapport aux prévisions formulées en LFR I
pour 2022, ce qui a contribué à améliorer le solde ;

- d'autre part, des dépenses publiques supérieures de 0,7 point de PIB à la prévision retenue en LFR I pour 2022.

Les objectifs fixés par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018-2022 n'ont donc pas été atteints.

En effet, la loi de programmation prévoyait un déficit public limité à - 0,3 % du PIB en 2022, contre -4,7 % effectivement réalisé. Sur ce point, la survenue des crises sanitaires et énergétiques ne suffisent pas à expliquer cet écart.

Comme la commission des finances l'ont régulièrement souligné, le Gouvernement a abandonné les efforts promis à partir de 2019 suite à la crise des Gilets Jaunes.

Évolution du solde et de l'endettement public

(en point de PIB)

 

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires et des comptes nationaux de l'INSEE pour 2022

2. L'amélioration du taux d'endettement public s'explique uniquement par le dynamisme de la croissance du PIB tandis que la comparaison de la situation de la France à celle de ses voisins européens ne lui est pas favorable

L'endettement public a atteint 111,8 % du PIB en 2022, en baisse de 1,1 point par rapport à l'année précédente. Pour autant, cette diminution ne peut être attribuée à une bonne tenue des dépenses.

En effet, le solde primaire, c'est-à-dire corrigé des intérêts de la dette, a contribué à augmenter la dette de 2,8 points de PIB. La réduction de l'endettement public en proportion du PIB n'est ainsi due qu'à un effet « boule de neige » favorable résultant de la différence entre le taux de progression de la dette en valeur et le taux de croissance du PIB.

Décomposition des facteurs d'évolution
de l'endettement public

(en point de pourcentage)

 

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires et des comptes nationaux de l'INSEE pour 2022

En comparaison européenne, la France figure parmi les pays qui maintiennent des déficits parmi les plus élevés depuis 2020. En outre, elle présente un niveau d'endettement parmi les plus importants.

À l'inverse, certains pays, comme l'Allemagne, ont déjà fortement réduit leur déficit par rapport à 2020 et affichent un niveau d'endettement inférieur ou très proche du ratio de 60 % prévu par le Pacte de stabilité et de croissance.

Comparaison européenne des soldes publics et de
l'endettement public

(en point de pourcentage - la taille des bulles signalent l'importance de l'endettement)

 

Source : commission des finances du Sénat à partir des données Eurostat

3. La légère baisse du déficit et de l'endettement doit plus aux administrations de sécurité sociale et aux collectivités locales qu'à l'État

En 2022, le déficit public a été principalement porté par les administrations centrales, qui affichaient un solde de - 5,1 % du PIB, bien qu'en amélioration de 0,7 point par rapport à 2021.

En revanche, les administrations publiques locales présentent un solde public à l'équilibre et les administrations de sécurité sociale ont généré un excédent de 0,4 point de PIB.

Décomposition du solde public

(en point de pourcentage)

 

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires et des comptes nationaux de l'INSEE pour 2022

De même, l'amélioration de l'endettement public est essentiellement due à l'action des administrations publiques locales et des administrations de sécurité sociale, qui ont diminué leurs dettes respectives de 0,5 et 0,7 point de PIB. Par contraste, la dette de l'État a augmenté de 0,4 point.

Décomposition de l'endettement public
entre catégories d'administration

(en point de pourcentage)

 

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires et des comptes nationaux de l'INSEE pour 2022