C. ... MAIS L'AGGRAVATION DU RÉSULTAT PATRIMONIAL INDIQUE BIEN QUE LES DÉCISIONS PRISES PÈSERONT SUR LES ANNÉES À VENIR

Si le déficit budgétaire se réduit quelque peu en 2022, cette vision ne concerne que les encaissements et les décaissements de l'année, sans prendre en compte les engagements pris pour les années ultérieures et donc les véritables conséquences de l'action de l'État.

Celles-ci sont mesurées par le compte de résultat établi par la comptabilité générale de l'État (CGE), dont le résultat est négatif à hauteur de 160,0 milliards d'euros en 2022, contre 140,8 milliards d'euros en 20214(*).

Si le résultat patrimonial n'est pas lié directement à l'autorisation budgétaire, qui porte sur les dépenses et les prévisions de recettes budgétaires, il permet d'apprécier les conséquences à moyen et long terme de l'action de l'État, d'autant que les restes à payer, qui devraient apporter un éclairage sur les engagements futurs en comptabilité budgétaire, ont perdu une grande partie de leur signification avec la création du programme dit d' « amortissement » de la « dette Covid » (voir infra).

La différence entre l'évolution du déficit budgétaire et celle du résultat patrimonial illustre notamment l'effet « retardé » des mesures de soutien à l'activité économique.

La dégradation du résultat patrimonial s'explique en particulier par une augmentation considérable des charges nettes, à hauteur de + 45,7 milliards d'euros, dont 18,9 milliards d'euros de charges de fonctionnement, en raison notamment des mesures de protection du pouvoir d'achat des agents publics face à la reprise de l'inflation. Les charges financières augmentent de 25,3 milliards d'euros en raison de l'augmentation des charges d'indexation par rapport à l'inflation (+ 15,0 milliards d'euros en comptabilité générale) et de la seconde reprise par l'État de la dette de SNCF Réseau (10,0 milliards d'euros).

Certaines de ces charges pèsent plus sur la situation patrimoniale que sur le déficit budgétaire. Ainsi 10,1 milliards d'euros sont-ils provisionnés dans les comptes de l'État au titre des boucliers tarifaires pour le gaz et l'électricité : il s'agit de probables dépenses futures, qui ne sont pas prises en compte dans le déficit budgétaire de 2022 car non réalisées avant la fin de cette année.

L'inflation a également un impact plus important sur la charge de la dette en comptabilité générale qu'en comptabilité budgétaire, car la dépense budgétaire est mesurée lors de la date anniversaire des titres, en général en milieu d'année, alors que la comptabilité générale retient la référence d'inflation en fin d'exercice. L'inflation ayant été plus importante en fin d'année, le coût est plus élevé en comptabilité générale, avec un écart de 7,5 milliards d'euros qui permet de prendre en compte la probable poursuite de l'augmentation de cette charge en 2023, sauf retournement inattendu de la trajectoire de l'inflation.

En sens inverse, l'acquisition d'actions d'EDF, par exemple, pèse sur le déficit budgétaire de l'année mais pas sur la situation patrimoniale de l'État puisque ces actions rejoignent le patrimoine de l'État.

Dans le même temps, les produits régaliens nets ont augmenté de 26,4 milliards d'euros seulement, ce qui explique, par comparaison avec l'évolution des charges nettes, la dégradation de la situation patrimoniale. La principale augmentation concerne l'impôt sur les sociétés (+15,9 milliards d'euros) et l'impôt sur le revenu (+ 9,4 milliards d'euros), ce qui est cohérent avec l'analyse budgétaire de ces recettes (voir infra).


* 4 Valeur pour 2021 retraitée (compte général de l'État 2022, p. 9).