II. LES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Les rapporteurs spéciaux formulent trois séries d'observations à propos de l'exécution du budget de la mission RCT en 2022 : les deux premières concernent le programme 119, marqué par un recul des dispositifs liées à la situation sanitaire et l'incidence de la réforme de la taxe d'habitation et de la réforme des impôts de production sur la structure des ressources des collectivités. La dernière souligne l'impact budgétaire, proportionnellement important, de la tempête « Alex » sur le programme 122.

A. UN RECUL PROGRESSIF DES DISPOSITIFS LIÉS À LA CRISE SANITAIRE MAIS DES DISPOSITIFS DE RELANCE QUI PERDURENT

Le programme 119 comprend des dotations d'investissement de droit commun : il s'agit principalement de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation politique de la ville (DPV), la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et d'une part de la dotation de soutien à l'investissement des départements (part « projet » de la DSID). À ces dotations attribuées à enveloppe fermée, et au sein desquelles l'État flèche certains projets plutôt que d'autres, s'ajoutent des dotations ponctuelles, visant à répondre à une politique publique sur un territoire donné. C'est dans ce dernier cadre que s'inscrivent des opérations comme le plan Marseille ou la « dotation exceptionnelle Seine-Saint-Denis ».

En crédits de paiement, les dépenses ont augmenté, à la fois en raison de l'augmentation des dotations de droit commun mais aussi sous l'effet d'une extension des dispositifs « ponctuels » comme le plan Marseille.

En revanche, en valeur absolue, les autorisations d'engagement concernant ces deux types de dépenses ont diminué en 2022. On peut par exemple constater en 2022 une moindre consommation de DSIL exceptionnelle (383 millions d'euros en dessous du niveau 2021). Cette tendance, comme le souligne la Cour des comptes dans sa note d'exécution budgétaire, « n'est qu'en partie compensée par une forte progression de la DSIL classique, à la suite d'un abondement exceptionnel » (environ 295 millions d'euros). C'est en partie lié au tarissement progressif des dispositifs de soutien aux collectivités face à la crise sanitaire.

La mission Relations avec les collectivités territoriales a, en effet, donné lieu à la mise en place de mesures de soutien aux collectivités, lors de la crise sanitaire, en partie intégrées au plan de relance. Force est de constater que ces dispositifs se tarissent progressivement.

Il ne s'agit toutefois pas des seules mesures de soutien à destination des collectivités locales, d'autres sont intervenues par des prélèvements sur recettes de l'État ou encore par des avances comme ce fut le cas pour la dotation exceptionnelle à la collectivité territoriale de Corse.

Plusieurs dispositifs d'accompagnement des collectivités face à un contexte exceptionnel se sont achevés ou sont en cours d'achèvement en 2022.

Certaines mesures de soutien relatives à la crise sanitaire se sont achevées fin 2021. C'est le cas de la contribution de l'État aux achats de masques, qui n'a pas été reconduite en 2022, s'est élevée en tout à 227,9 millions d'euros en AE comme en CP, répartis entre 134,2 millions d'euros d'AE et 129 millions d'euros en 2020, puis 93,7 millions d'euros d'AE et 98,8 millions d'euros de CP en 2021.

C'est également le cas du fonds de stabilisation des départements qui n'a pas été reconduit en 2022. Créé par la loi de finances initiale pour 2019, il a permis un soutien ponctuel aux départements connaissant une situation financière dégradée du fait du revenu de solidarité active (RSA), de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH). Doté annuellement de 115 millions d'euros de 2019 à 2021, il a été surabondé en 2021 de 85 millions d'euros dans le cadre de l'accord de méthode conclu entre l'État et les départements le 14 décembre 2020, en raison du contexte sanitaire.

D'autres mesures d'accompagnement des collectivités, tout en ayant encore un impact probable sur plusieurs exercices à venir, ont probablement atteint leur apogée en 2022. C'est le cas de l'enveloppe nationale d'un milliard d'euros (la « DSIL » exceptionnelle) ouverte en 2020-2021, afin d'accompagner les communes et leurs groupements, par la troisième loi de finances rectificative pour 2020. Comme l'indique la Cour des comptes dans sa note d'exécution budgétaire, « compte tenu du profil de consommation des dotations de soutien à l'investissement, cette mesure continuera à avoir des effets budgétaires sur les exercices à venir. Fin 2022, le reste à payer s'élève encore à 591 millions d'euros de CP, après 781 millions d'euros à fin 2021. »

Sur l'exercice 2022, le programme 119 n'a connu qu'une seule mesure nouvelle liée au contexte économique, en l'espèce la situation d'inflation : il s'agit de la dotation exceptionnelle de 33 millions d'euros, en AE comme en CP, ouverte par la loi de finances rectificative de décembre 2022, au profit de la collectivité territoriale de Corse, afin de contribuer au financement des délégations de service public maritime et aérienne, dans le contexte de forte inflation. Cette dotation a été intégralement consommée en 2022.

Les rapporteurs spéciaux, tout en se réjouissant de l'amélioration du contexte sanitaire qui permet de mettre progressivement un terme aux dispositifs d'accompagnement, notent que la situation des collectivités, notamment au regard de l'inflation, n'en est pas devenue appréciable pour autant. C'est d'autant plus vrai qu'à l'inflation s'ajoute l'incertitude liée aux réformes en cours.