EXAMEN EN COMMISSION

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MERCREDI 13 MARS 2024

M. François-Noël Buffet, président. - Nous terminons nos travaux par l'examen du rapport et de la proposition de loi rendant obligatoires les « tests PME » et créant un dispositif « Impact Entreprises », déposé par Olivier Rietmann, auquel je souhaite la bienvenue.

M. Olivier Rietmann, auteur de la proposition de loi. - C'est un plaisir de vous retrouver ce matin, et je suis honorée que Elsa Schalck soit la rapporteure de ce texte, issu d'un rapport d'information élaboré pendant le premier semestre 2023 par la délégation aux entreprises, que je préside désormais.

Au sein de cette délégation, nous souhaitons donner plus d'oxygène à nos entreprises, et surtout à nos petites et moyennes entreprises (PME), pour les transformer en entreprises de taille intermédiaire (ETI) : elles seront ainsi beaucoup plus fortes et auront davantage la capacité d'exporter. Elles portent depuis trop longtemps des boulets aux pieds, à cause de l'excès de normes notamment.

En plus des nombreuses auditions menées, notre délégation s'est déplacée dans plusieurs pays étrangers : Belgique, Pays-Bas, Allemagne, Suisse, Grande-Bretagne, et nous avons eu des entretiens à la Commission européenne. Nous ne pouvons pas dire que nos entreprises souffrent d'une concurrence déloyale, mais certaines entreprises européennes ont beaucoup plus de facilités et moins de charges administratives que les nôtres, ce qui explique leur relative avancée.

Ce rapport a été adopté à l'unanimité par notre délégation, et nous nous en sommes inspirés pour rédiger cette proposition de loi.

Généralement, lorsqu'on veut simplifier, on annonce toujours le grand soir de la simplification, alors que cela nécessite un travail de fond et de long terme. Et, depuis les années 1990, quatre structures ont été créées, mais elles ne travaillent que sur les stocks. Or la machine à produire de la norme et de la complexité continue de fonctionner à plein régime.

Mme Françoise Gatel. - Nous y contribuons !

M. Olivier Rietmann. - Nous avons souhaité rédiger une proposition de loi qui instaure un système interministériel souple, léger, qui permette d'intervenir rapidement sur la complexité de la norme législative, réglementaire ou européenne. Le système, assez simple, est appliqué aux Pays-Bas. Il leur aurait fait économiser 2,5 milliards d'euros par an de charges financières. L'Allemagne annonce 12 milliards d'euros d'économies annuelles en moyenne. La Suisse applique ce dispositif depuis plus de dix ans, et le Royaume-Uni l'utilisait aussi, ce qui a permis à ses entreprises d'être très compétitives. Mais depuis le Brexit, ce pays doit retraduire le droit communautaire et la norme européenne en norme britannique, ce qui crée plus de complexité. L'Italie a suivi le mouvement de simplification des normes. Les Pays-Bas et l'Allemagne sont impatients que la France le suive à son tour, pour que l'Espagne et le Portugal l'imitent ensuite. En tant que pays de culture protestante, les Pays-Bas et l'Allemagne estiment faire preuve de davantage de rigueur que leurs voisins latins. Ensemble, tous ces pays auraient un poids plus important pour demander plus de simplifications à la Commission européenne.

La France est peu présente auprès des services administratifs de la Commission européenne. Nous comptons beaucoup sur l'intervention politique du Président de la République et de nos ministres, alors que les Allemands y sont bien plus présents au plan administratif : à Bruxelles, pour un fonctionnaire français, il y a dix fonctionnaires allemands.

Il faut créer un système interministériel simple passant en revue toutes les dispositions législatives, réglementaires et européennes pour examiner, grâce à un test PME, leurs charges administratives et financières, afin d'aboutir à un avis : favorable ou défavorable si la disposition est jugée trop complexe pour les entreprises.

Mme Elsa Schalck, rapporteure. - La proposition de loi, déposée en décembre dernier par notre collègue Olivier Rietmann, reprend les recommandations formulées par la délégation aux entreprises lors de sa mission d'information relative à la sobriété normative.

Je rappellerai le contexte dans lequel s'inscrit cette proposition de loi, avant de vous exposer les différentes lacunes auxquelles elle vise à répondre, puis d'examiner le dispositif précis qui intéresse notre commission, à savoir la création d'un conseil chargé d'effectuer les « tests PME », qui seraient obligatoires.

Le constat dressé par la délégation aux entreprises est sans appel, et nous reconnaissons unanimement que nos entreprises sont soumises à un nombre croissant de normes législatives et réglementaires, tant nationales qu'européennes. Un chiffre est particulièrement éloquent : le code de commerce ne comporte pas moins de 7 000 articles, et ce nombre croît d'année en année !

L'inflation législative et la complexité normative pèsent lourdement sur l'activité et la compétitivité des entreprises françaises. Le Gouvernement a évalué le coût macro-économique correspondant à ce poids des normes à 3 % du PIB, soit 60 milliards d'euros par an. Régulièrement, des chiffres compris entre 75 milliards et 110 milliards d'euros annuels sont avancés.

Devant ce constat, le Gouvernement a successivement mis en place plusieurs instances, notamment le commissaire à la simplification, ainsi que le Conseil de la simplification pour les entreprises. Toutefois, aucune de ces fonctions ou de ces instances n'a été pérennisée ni n'a permis d'atteindre les objectifs fixés.

En matière d'évaluation, l'obligation faite au Gouvernement par la révision constitutionnelle de 2008 d'assortir une étude d'impact à tout projet de loi était également pleine de promesses. Quinze ans après, force est de constater que l'exercice touche à ses limites.

Sur le plan de la méthode, les études d'impact servent davantage à justifier après-coup des projets voulus par le Gouvernement. Des questions relatives à leur impartialité et à leur objectivité se posent régulièrement.

En pratique, comme la plupart des études d'impact comportent une sous-rubrique relative aux impacts du projet de loi sur les entreprises, on peut se demander à quelles fins réaliser des « tests PME ». Toutefois, les évaluations faites par les études d'impact sont souvent très perfectibles du point de vue tant qualitatif que quantitatif.

Un exemple est revenu lors des auditions que j'ai menées : celui de la transposition, dans le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en date de novembre 2022, de la directive sur la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises, dite CSRD. L'étude d'impact associée à ce projet de loi indiquait qu'« aucun impact n'[était] attendu », comme si les obligations déclaratives ne seraient pas renforcées. Les coûts de cette transposition sont toutefois avérés, ce qui inquiète nombre d'entreprises.

L'évaluation des conséquences attendues d'une norme sur les entreprises mérite donc d'être renforcée. Cette nécessité a déjà bien été perçue par la Commission européenne ainsi que par certains de nos voisins européens. Depuis de très nombreuses années, l'Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas pratiquent des « tests PME », c'est-à-dire l'analyse a priori de l'impact d'une disposition normative sur les PME.

Élisabeth Borne, alors Première ministre, avait elle-même annoncé en novembre dernier devant la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) que ces tests étaient une mesure de bon sens et que le Gouvernement les mettrait en place. Ils n'ont toujours pas vu le jour depuis, malgré le fait que les entreprises les appellent de leurs voeux.

J'en viens au deuxième point de mon exposé, à savoir les objectifs de la proposition de loi.

Cette dernière vise à remédier à une double lacune : d'une part, nous ne disposons pas d'une instance spécifiquement chargée de l'évaluation et de la simplification des normes pour les entreprises ; d'autre part, nous ne menons pas de « tests PME ». Le présent texte tend ainsi à créer un conseil de surveillance et d'évaluation de la simplification pour les entreprises, qui serait notamment chargé d'effectuer les « tests PME », et qui serait présidé par un haut-commissaire à la simplification pour les entreprises.

Il est en effet nécessaire de disposer d'outils adaptés à la réalité de la vie économique et de desserrer l'étau normatif.

Je souscris donc à l'instauration d'un conseil chargé de la simplification des normes pour les entreprises. Bien sûr, nous ne souhaitons pas multiplier les comités, à plus forte raison lorsque l'objectif poursuivi est celui d'une simplification, mais en l'espèce cette création semble indispensable. Ce conseil constituerait le pendant, pour les entreprises, du Conseil national d'évaluation des normes (CNEN), qui existe depuis 2013. Son portage politique serait renforcé de manière transversale dans les ministères. Pour une plus grande simplicité, nous proposons d'intituler ce conseil « Haut Conseil à la simplification pour les entreprises ».

À présent, je souhaite entrer plus précisément dans le détail des dispositions de cette proposition de loi, et en particulier le statut du conseil, du rôle du haut-commissaire, et des pouvoirs du nouveau conseil.

La proposition de loi tend à doter ce conseil du statut d'autorité administrative indépendante (AAI). Une AAI est définie par un ensemble de critères. Elle doit notamment disposer de pouvoirs de décision ou de contrainte à l'égard des tiers, et exercer des missions relatives à la régulation de secteurs économiques essentiels ou à la protection des droits des citoyens.

Or, la nouvelle instance aurait davantage des missions de conseil et d'expertise au bénéfice du Gouvernement et du Parlement. C'est pourquoi le statut d'AAI ne me semble pas pleinement adapté.

Dans le même temps, je partage l'avis de l'auteur de la proposition de loi, qui estime indispensable de garantir l'indépendance de cette instance à l'égard du pouvoir exécutif, car il s'agit d'un gage de réussite de ces « tests PME ». Or le statut d'AAI ne constitue pas le seul moyen d'atteindre cette indépendance.

Je proposerai donc de doter le Haut Conseil du statut de commission administrative, tout en renforçant son expertise et en modifiant légèrement sa composition. Ce statut semble davantage adapté à la nature des missions qui lui sont confiées, car il aura en outre besoin de l'appui de l'administration pour mener à bien ses travaux en toute indépendance. Il convient de lui garantir un portage politique de haut niveau, à l'échelle interministérielle : je vous propose de rattacher cette commission directement au Premier ministre, et non à un ministre en particulier, à la différence du CNEN, rattaché au ministre délégué chargé des collectivités territoriales et de la ruralité, et donc au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Nous ne reprendrions donc pas le rattachement au Président de la République envisagé par l'auteur de la proposition de loi.

En ce qui concerne la composition, il est souhaitable de conforter la représentation des entreprises en son sein. Tout d'abord, les dirigeants d'entreprises seraient remplacés par des représentants d'organisations professionnelles représentatives des entreprises. De plus, un représentant des grandes entreprises y siégerait également - et ce afin de tenir compte du « ruissellement » entre les différentes catégories d'entreprises s'agissant de l'application des normes. Enfin, le Haut Conseil comprendrait un représentant supplémentaire des petites et moyennes entreprises. Nous proposons de lui conserver une composition assez restreinte, afin de lui permettre d'être flexible et facilement mobilisable - il serait en effet saisi de tous les textes comportant des dispositions concernant les entreprises.

Concernant le rôle et le positionnement du président du Haut Conseil, la nomination du Haut-commissaire en Conseil des ministres proposée par le texte, vise à favoriser le choix de personnalités de premier plan et à donner à ce dernier une solide assise institutionnelle. Il paraît néanmoins important de veiller à la bonne articulation entre cette modalité de nomination et certaines des attributions du Haut-commissaire.

Tout d'abord, dès lors qu'il occupe un emploi à la décision du Gouvernement, le Haut-commissaire ne peut pas être irrévocable, contrairement à ce que la proposition de loi indique. De plus, il ne lui est pas possible de participer au Conseil des ministres. En outre, il ne peut pas non plus avoir un pouvoir de désignation au sein des services de l'administration.

En revanche, il serait tout à fait pertinent que le Haut-commissaire anime un réseau de correspondants à la simplification des normes, afin que, dans chaque administration centrale, une personne travaille à cet objectif essentiel de simplification.

Afin d'éviter la confusion consécutive à la multiplication des dénominations, je vous propose par ailleurs d'abandonner le titre de « Haut-commissaire » ; le président du Haut conseil à la simplification pour les entreprises ne porterait donc pas de titre particulier.

J'en viens à présent au dernier aspect de ce texte, sans aucun doute le plus important : les pouvoirs du Haut Conseil. La proposition de loi envisage un dispositif ambitieux, en confiant à ce dernier un rôle d'évaluation tant en amont qu'en aval de la production normative. Ainsi qu'Olivier Rietmann l'indiquait, il faut s'attaquer non seulement au stock de dispositions normatives, mais également à leurs flux, tant l'inflation normative est importante.

La visibilité des travaux du Haut Conseil serait assurée non seulement par le caractère public de ses avis, mais également par la remise d'un rapport public annuel au Premier ministre et aux présidents des deux assemblées parlementaires, afin qu'un débat soit possible au Parlement. Je suis persuadée qu'il deviendra de plus en plus difficile pour le Gouvernement de ne pas tenir compte de ses avis, ce qui l'incitera à proposer des études d'impact de meilleure qualité.

La priorité du Haut Conseil serait de jouer un rôle a priori sur le « flux » normatif. La proposition de loi vise tout d'abord à prévoir que le conseil serait « associé par le Gouvernement à la préparation des projets de loi et des textes réglementaires créant ou modifiant des normes ou procédures qui sont applicables aux entreprises, ainsi qu'à l'élaboration des politiques publiques ayant un impact sur elles ». Cette obligation d'association me paraît problématique en ce qu'elle risquerait de méconnaître la prérogative d'initiative législative reconnue conjointement au Gouvernement et au Parlement par l'article 39 de la Constitution.

Le texte vise ensuite à assurer que le conseil « contrôle la qualité des études d'impact ». L'octroi de cette compétence semble comporter un risque d'inconstitutionnalité, dans la mesure où il revient exclusivement au Parlement et au Conseil constitutionnel d'effectuer ce contrôle.

Enfin, la proposition de loi tend à préciser que le conseil « pilote l'élaboration de l'analyse de l'impact des normes et politiques publiques, en associant les représentants des microentreprises, des petites et moyennes entreprises ou des entreprises de taille intermédiaire ». Cette définition des « tests PME » nous semblant insuffisamment précise, c'est pourquoi nous l'avons clarifiée.

Je vous propose de sécuriser juridiquement et de clarifier les nouvelles procédures consultatives confiées au Haut Conseil. En particulier, ce dernier serait obligatoirement consulté par le Gouvernement pour trois types de projets de texte, dès lors qu'ils ont une incidence sur les entreprises : les projets de loi assortis de leur étude d'impact, les projets de textes réglementaires, ainsi que les projets d'acte de l'Union européenne, car la surtransposition pose également des problèmes. En outre, le Haut Conseil pourrait être consulté, dans certaines conditions, par les présidents des assemblées parlementaires sur des propositions de loi ayant un impact sur les entreprises.

L'ensemble des avis du Haut Conseil comporteraient obligatoirement un « test PME », que je vous propose de définir comme « une analyse de l'impact attendu des normes concernées sur les petites et moyennes entreprises ».

Conformément aux attentes du milieu économique, ces avis pourraient également prévoir des mesures d'application des normes différées dans le temps selon les catégories d'entreprises. Cela permettrait à une entreprise de disposer d'un peu plus de temps pour se préparer à une évolution législative.

Le rôle d'évaluation a posteriori confié au Haut Conseil au sujet du stock normatif est également important. Mais comme ce stock est vaste, son action doit être ciblée et progressive pour être efficace. Le texte tendait à demander au conseil de réaliser « une revue régulière des normes ». Afin d'obéir au principe de réalité, je suggère de recentrer cette disposition sur « l'évaluation de normes applicables ».

Nous partageons tous l'ambitieux objectif de cette proposition de loi. Nous voulons apporter une réponse juridique opérationnelle à l'aide d'un dispositif innovant et attendu, afin qu'à l'avenir, les études d'impact des projets de loi ayant des incidences sur les entreprises soient suffisamment complètes, pour que les « tests PME » n'aient in fine plus de raison d'être.

M. Mathieu Darnaud. - Je remercie l'auteur de cette proposition de loi, ainsi que la rapporteure qui a apporté des modifications essentielles au texte. Ne pas placer cette autorité sous l'égide du Président de la République me semble relever du bon sens et être conforme à l'esprit de nos institutions.

Il est pertinent de revenir sur le caractère irrévocable de la nomination du Haut-commissaire, car il faut un outil agile pour avancer tant sur les stocks que sur les flux. Ne tombons pas dans la caricature : il faut distinguer les normes qui protègent les entreprises des autres, qu'il convient de retravailler parce qu'elles constituent des contraintes et des charges.

Cela étant, je vous propose un retour d'expérience au sujet de ce combat que je mène depuis des années aux côtés de Françoise Gatel. Des structures ont déjà vocation à travailler sur les normes, comme le CNEN ou le Conseil national d'évaluation des normes agricoles que la proposition de loi tendant à répondre à la crise agricole déposée par Laurent Duplomb au mois de janvier dernier vise à créer. Cela risque de faire beaucoup de structures. Françoise Gatel et moi-même avons eu l'honneur d'assister à quelques séances du CNEN : ces instances ne peuvent s'attaquer au stock et au flux normatifs que si elles en ont les moyens. Mes chers collègues, la meilleure manière de s'attaquer à l'inflation normative, c'est tout de même de faire oeuvre commune afin de ne pas favoriser cette dernière dans la législation.

Ce comité ne doit pas être une structure de plus. Pour être efficace, elle doit être dotée de moyens et ses membres doivent avoir la capacité d'agir positivement. Les séances du CNEN nous ont pour le moins frustrés : rien de concret n'est sorti des échanges entre l'administration et les élus locaux. Cela risque d'être la même chose demain entre l'administration et les entreprises...

Voilà pourquoi, au cours de l'examen du projet de loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (3DS), nous avons défendu l'ambition d'Alain Lambert, président du CNEN, pour s'attaquer efficacement et directement au stock et au flux de normes.

Cette structure peut avoir un intérêt certain, à condition qu'elle ait les moyens de s'attaquer efficacement au problème et une portée suffisante pour qu'il ne s'agisse pas d'un énième comité Théodule.

Je suis convaincu que ce texte aborde un véritable problème, à savoir le poids économique des normes, mais la structure envisagée doit être agile et efficace, et non un énième lieu où l'on bavarde !

Mme Françoise Gatel. - Selon moi, cette proposition est une bonne idée.

En France, la culture de la norme est invasive. Tout le monde est coproducteur de normes, au nom de la sécurité, notamment. Il faut tempérer ce trait de caractère !

Le CNEN a été créé sur l'initiative du Sénat, compte tenu du coût de la norme pour les collectivités territoriales - près de 2,5 milliards d'euros entre 2017 et 2022 -, et de ses effets parfois contreproductifs.

Il faut améliorer les études d'impact en amont. Il faut également contrôler les décrets d'application, lesquels contreviennent souvent à l'esprit des lois que nous avons votées. À cette fin, les rapporteurs des textes doivent être associés.

Le président de ce nouvel organisme doit donc être, si j'ose dire, un moine-soldat, comme l'a été Alain Lambert !

Avec Rémy Pointereau, dans notre rapport d'information relatif aux normes applicables aux collectivités territoriales d'avril dernier, nous avons parlé de « harcèlement textuel ». D'ailleurs, le Sénat a signé avec le Gouvernement le 4 avril 2023 une charte d'engagement pour limiter la production de la norme.

M. Christophe Chaillou. - Je salue le travail de la rapporteure, qui se situe dans l'esprit de la proposition de loi : elle a simplifié l'objet de cette proposition de loi de simplification !

Cela étant dit, nous accueillons ce texte avec perplexité. La question des normes revient très fréquemment, nous le constatons dans nos discussions avec les entrepreneurs et dans nos collectivités. Pour autant, la norme est indispensable. D'ailleurs, la France a largement influencé les normes européennes, ce que nous reprochent certains collègues européens.

La norme est nécessaire, car elle nous protège dans nombre de domaines. Dans mon département, les entrepreneurs mettent en exergue non pas la quantité des normes, mais leur instabilité. Les normes évoluent sans cesse, et l'on se perd dans tous les nouveaux dispositifs.

Or nous contribuons nous-mêmes à amplifier ce phénomène : au fil des travaux parlementaires, nous contribuons à l'inflation normative. C'est d'ailleurs souvent au nom de la simplification que nous complexifions !

Par exemple, cette proposition, nettement simplifiée, vise à créer une instance ; c'est propre à notre culture nationale. Cela entre en contradiction avec l'objet de la proposition de loi. En réalité, il s'agit non pas tant de rendre les tests PME obligatoires, que de créer une instance pour mettre en oeuvre ces tests dans le cadre d'une procédure d'évaluation. Nous ne sommes pas contre les tests PME ; les travaux de la délégation sénatoriale aux entreprises ont montré combien ils peuvent être intéressants.

Je serais surpris que l'entrée de la France dans le dispositif ait un effet d'entraînement sur d'autres pays.

On peut par ailleurs s'interroger sur les modèles qui viennent des Pays-Bas.

Nous n'avons pas d'hostilité de principe à l'égard de ce dispositif : le stock de normes est un véritable problème. En revanche, nous regrettons que le sujet de la simplification des normes soit abordé seulement sous le prisme des entreprises ; il faudrait qu'il soit le plus large possible.

Nous sommes donc réservés sur cette proposition de loi, car elle soulève nombre de questions.

M. André Reichardt. - En France, la culture de la norme est très prégnante, comme cela a été rappelé. Créer un Haut Conseil pour répondre au problème de la simplification des normes ne me semble pas une bonne idée ; c'est une usine à gaz en devenir !

Si le CNEN était un succès, cela se saurait ! Alain Lambert déplorait être saisi la veille d'un texte qui devait paraître le lendemain. Quelle sera l'efficacité de cette nouvelle instance ?

Comme Mathieu Darnaud, je pense qu'il ne sera pas possible de le rattacher au Président de la République, vu qu'il sera déjà difficile de le rattacher au Premier ministre. À cet égard, je rappelle que depuis que la commission du droit local d'Alsace-Moselle est rattachée au Premier ministre et non plus au garde des Sceaux, il ne se réunit plus ! On ne sait toujours pas comment il va fonctionner.

Madame la rapporteure, je vous remercie également d'avoir transformé le poste de haut-commissaire en poste de président.

Ancien président d'une chambre de métiers et de l'artisanat en Alsace, je connais le poids des normes. En revanche, je ne suis pas sûr qu'une telle structure permette de régler le problème dans un pays où la culture de la norme est très prégnante.

Mme Elsa Schalck, rapporteure. - Nous partageons tous le constat d'une culture de la norme trop forte, de l'inflation normative et de son impact. Cette proposition de loi vise à y remédier, en s'appuyant sur des conseils passés, à l'instar du Conseil de la simplification, qui a existé de 2014 à 2017. Faute de volonté politique, le conseil s'est arrêté en 2017, au grand regret des entreprises.

Je partage votre souhait de rendre le dispositif plus agile et plus souple. Aussi avons-nous souhaité qu'il ne s'agisse pas d'une AAI, structure qui aurait été trop lourde et complexe dans ce cas. Nous avons veillé à ce que le conseil conserve une composition réduite, afin que ce soit le plus souple possible.

J'ai entendu les remarques sur le besoin de stabilité normative. L'objectif est non pas de s'attaquer aux normes en elles-mêmes - certaines sont utiles, notamment dans le domaine environnemental ou dans celui de la sécurité -, mais de lutter contre l'inflation normative et de réaliser des études d'impact et des analyses plus approfondies. Tel est l'objet de la proposition de loi.

M. Mathieu Darnaud. - Fut un temps où des études d'impact accompagnaient utilement la fabrique de la loi...

On gagnerait à faire de réelles études d'impact, qui éclaireraient le législateur et qui permettraient de mieux produire des normes contraignantes, afin d'éviter un travail d'évaluation a posteriori. Selon moi, le travail a priori est plus utile que le travail a posteriori !

M. François-Noël Buffet, président. - Concernant le périmètre de ce projet de loi, en application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer que ce périmètre comprend les dispositions relatives à l'évaluation de l'incidence sur les entreprises des projets de normes et des normes existantes comportant des dispositions les concernant, et à la simplification des normes ayant une incidence sur les entreprises.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement COM-9 vise à réécrire l'article 1er, afin de redéfinir la composition et les règles du fonctionnement du Haut Conseil à la simplification pour les entreprises.

L'amendement COM-9 est adopté. En conséquence, les amendements COM-6, COM-7 et COM-8 deviennent sans objet.

L'article 1er est ainsi rédigé.

Après l'article 1er

Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement  COM-10 vise à définir les compétences du Haut Conseil à la simplification pour les entreprises.

L'amendement COM-10 est adopté et devient article additionnel.

Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement  COM-11 prévoit la dotation destinée à couvrir les frais de fonctionnement du haut conseil. Il faut allouer des moyens à cette structure pour qu'elle puisse accomplir son objectif ambitieux.

L'amendement COM-11 est adopté et devient article additionnel.

Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement  COM-12 vise à préciser les modalités d'application de la proposition de loi.

L'amendement COM-12 est adopté et devient article additionnel.

Article 2

Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement  COM-13 vise à supprimer l'article 2.

L'amendement COM-13 est adopté.

L'article 2 est supprimé.

Après l'article 2

L'amendement  COM-17 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

Article 3

Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement  COM-14 vise à supprimer l'article 3.

L'amendement COM-14 est adopté.

L'article 3 est supprimé.

Article 4

Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement  COM-15 tend à supprimer l'article 4.

L'amendement COM-15 est adopté.

L'article 4 est supprimé.

Après l'article 4

Les amendements  COM-3 rectifié bis, COM-4 rectifié ter, COM-2 rectifié bis, COM-1 rectifié bis et COM-5 rectifié bis sont déclarés irrecevables en application de l'article 45 de la Constitution.

Intitulé de la proposition de loi

Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement  COM-16 vise à simplifier l'intitulé de la proposition de loi, qui deviendrait : « proposition de loi rendant obligatoires les tests PME ».

L'amendement COM-16 est adopté.

L'intitulé de la proposition de loi est ainsi modifié.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort de l'amendement examiné par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1er

Mme SCHALCK, rapporteure

9

Rédaction globale de l'article 1er, recentré sur la composition et les règles de fonctionnement du Haut Conseil à la simplification pour les entreprises

Adopté

M. GONTARD

6

Suppression de la mission confiée au Conseil de surveillance et d'évaluation de la simplification pour les entreprises de lutte contre les transpositions des directives européennes 

Satisfait ou sans objet

M. GONTARD

7

Ajout de deux représentants des organisations syndicales dans le Conseil de surveillance et d'évaluation

Satisfait ou sans objet

M. GONTARD

8

Exclusion du champ de compétence du Conseil de surveillance et d'évaluation de certaines normes

Satisfait ou sans objet

Article(s) additionnel(s) après Article 1er

Mme SCHALCK, rapporteure

10

Compétences du Haut Conseil à la simplification pour les entreprises

Adopté

Mme SCHALCK, rapporteure

11

Dotation destinée à couvrir les frais de fonctionnement du Haut Conseil

Adopté

Mme SCHALCK, rapporteure

12

Modalités d'application de la loi

Adopté

Article 2

Mme SCHALCK, rapporteure

13

Suppression de l'article

Adopté

Article(s) additionnel(s) après l'article 2

M. SAUTAREL

17

Exemption de la déclaration des honoraires dite « DAS 2 » pour les TPE et PME

Irrecevable au titre de
l'article 45
de la Constitution

Article 3

Mme SCHALCK, rapporteure

14

Suppression de l'article

Adopté

Article 4

Mme SCHALCK, rapporteure

15

Suppression de l'article

Adopté

Article(s) additionnel(s) après l'article 4

M. CANÉVET

3 rect. bis

Mise en place d'un contrôle pour éviter les adhésions multiples des entreprises à une même organisation professionnelle

Irrecevable au titre de
l'article 45
de la Constitution

M. CANÉVET

4 rect. ter

Mise en place d'un contrôle pour vérifier le respect par les organisations professionnelles représentatives des critères relatifs à l'objet social

Irrecevable au titre de
l'article 45
de la Constitution

M. CANÉVET

2 rect. bis

Modification des critères de répartition des sièges ou des voix dans les organismes paritaires

Irrecevable au titre de
l'article 45
de la Constitution

M. CANÉVET

1 rect. bis

Modification des modalités du droit d'opposition de la part des organisations d'employeurs à l'extension d'un accord réservé

Irrecevable au titre de
l'article 45
de la Constitution

M. CANÉVET

5 rect. bis

Précisions des données devant figurer dans l'arrêté du ministre chargé du travail dressant la liste des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives

Irrecevable au titre de
l'article 45
de la Constitution

Intitulé de la proposition de loi

Mme SCHALCK, rapporteure

16

Simplification de l'intitulé de la proposition de loi

Adopté

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