EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
Création des infractions d'homicide et blessures routiers

L'article 1er crée au sein au sein du titre II du code pénal relatif aux atteintes à la personne humaine un nouveau chapitre regroupant les atteintes du fait du conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, désormais dénommées homicide routier et blessures routières.

Il reprend sous ces nouvelles dénominations l'homicide involontaire aggravé et les atteintes involontaires aggravées à l'intégrité des personnes causés par un conducteur. Il préserve tant leur caractérisation que les peines encourues.

Il énumère également les éléments spécifiques susceptibles de constituer ces infractions, complétés par rapport au droit existant.

La commission a adopté cet article en :

- spécifiant que l'homicide et les blessures du fait d'une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement constituent respectivement un homicide par mise en danger et des blessures par mise en danger ;

- élargissant les notions d'homicide routier et de blessures routières pour inclure tous les cas où une vie a été perdue ou des blessures causées par le fait d'un conducteur ;

- modifiant l'insertion des dispositions proposées dans le code pénal afin de respecter les distinctions existantes entre les atteintes à la vie et les atteintes à l'intégrité physique ;

- adaptant les éléments constitutifs de l'infraction à l'état des technologies en matière de contrôle et de prudence.

1. Mieux prendre en compte la perception des drames de la route par les victimes et leurs familles

L'article 1er du projet de loi répond à l'orientation donnée par Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) réuni en juillet 2023, destinée, à la suite de plusieurs drames ayant choqué l'opinion publique, à apporter des réponses aux demandes des associations de victimes d'accidents de la route.

La 10ème recommandation de ce comité réuni par l'ancienne Première ministre Élisabeth Borne est rédigée en ces termes : « Créer une qualification d'homicide routier » avec pour objectif de « renforcer la valeur symbolique de l'infraction d'homicide dit involontaire commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur et permettre une meilleure acceptation sociale d'une telle qualification ». Tel est l'objet de l'article 1er.

a) Faire apparaître, sans atténuation, l'impact des infractions commises

Plusieurs évolutions récentes du droit pénal résultent de la difficulté, semble-t-il accrue, pour l'opinion publique à admettre ce qui peut être perçu comme une atténuation de la responsabilité de l'auteur d'une infraction. La loi du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure a ainsi créé une infraction réprimant les atteintes à la vie du fait d'une intoxication volontaire4(*), car la reconnaissance par la justice de l'irresponsabilité pénale de l'auteur de tels actes semble aujourd'hui insupportable. Le législateur a cherché à répondre à la demande de sanction sans porter atteinte aux principes du droit pénal en matière de responsabilité : la nouvelle infraction tend donc à permettre une réponse pénale dans le cas où l'état mental de l'auteur d'un homicide résulte de sa propre volonté. Elle permet de saisir les faits condamnables sans porter atteinte au principe de l'irresponsabilité pénale au moment des faits.

De manière analogue, les rapporteurs de l'Assemblée nationale notent que « la terminologie d'homicide involontaire est insupportable pour les familles des victimes. Pour reprendre les termes de M. Yannick Alléno, président de l'association Antoine Alléno, cette terminologie est même « insupportable, injuste et injustifiée ». » Le texte adopté par l'Assemblée nationale entend donc apporter une réponse aux familles sans modifier les fondements de la responsabilité en droit pénal ni l'échelle des peines.

1.1. Effacer le caractère involontaire des infractions commises

Les terminologies d'homicide routier et de blessures routières inscrites dans le code pénal par l'article 1er visent les cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement. C'est-à-dire les circonstances dans lesquelles, même s'il n'y a pas eu de volonté de tuer ou de blesser, l'auteur des faits s'est délibérément placé dans une situation dont il savait qu'elle pouvait conduire à ces drames.

Alors que le code pénal distingue traditionnellement entre les infractions volontaires et les infractions involontaires, le caractère volontaire de l'état dans lequel s'est mis le conducteur du véhicule rend inaudible pour les victimes et les familles l'application abstraite des catégories du droit.

L'article 1er tend donc à identifier les cas qui, relevant des catégories d'homicide ou de blessures involontaires, impliquent un niveau de responsabilité individuelle tel que l'absence de volonté de l'auteur de commettre l'infraction disparaît derrière les conséquences de ces actes.

À cette fin il supprime dans les articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 du code pénal, visant respectivement les homicides et les blessures ayant entrainé une incapacité totale de travail (ITT) supérieure ou inférieure à trois mois causés par un conducteur, les alinéas relatifs à l'aggravation de peines encourue en cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement.

Ces alinéas sont repris dans quatre nouveaux articles du code.

L'article 222-18 nouveau vise l'homicide routier, défini comme le fait d'avoir causé la mort d'autrui sans intention de la donner mais en ayant violé de manière manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement. La notion d'intention ainsi que le renvoi à l'article 121-3 du code pénal qui fonde l'infraction sur la volonté marquent que l'homicide routier demeure, du point de vue des catégories du droit, comme une infraction involontaire. Mais, contrairement au premier alinéa de l'article 221-6-1, cette notion n'apparaît plus.

L'article 222-18 énumère également une série de circonstances dont chacune est susceptible d'entrainer la qualification d'homicide routier. Cette énumération est elle aussi issue de l'article 221-6-1 du code pénal actuel. Elle a cependant été complétée.

Enfin, ainsi que le prévoit l'article 221-6-1, le cumul de deux circonstances entraine une aggravation des peines encourues à dix ans de prison et 150 000 euros d'amende.

L'article 222-19 reprend la même structure pour qualifier et réprimer les blessures routières ayant entrainé une incapacité totale de travail supérieure à trois mois.

L'article 222-20 procède de même pour qualifier et réprimer les blessures routières ayant entrainé une incapacité totale de travail inférieure à trois mois.

L'article 222-21 vise pour sa part les circonstances aggravantes applicables aux infractions d'homicide et de blessure routiers.

1.2. Créer un chapitre dédié aux violences routières dans le code pénal

Ces nouveaux articles prennent place au sein d'un chapitre consacré aux « homicides et blessures routiers ». Cette insertion modifierait l'esprit de la structure du code pénal, qui catégorise les infractions selon le type d'atteinte qu'elles portent aux personnes ou aux biens, et non selon les circonstances.

Les infractions en matière routière sont aussi actuellement réparties dans le code pénal au sein de différents chapitres, selon qu'elles constituent une atteinte à la vie ou une atteinte à l'intégrité physique des personnes. Cette répartition est commune à l'ensemble des politiques publiques ayant une dimension pénale. Il en est ainsi pour les atteintes à la vie et pour les atteintes à l'intégrité physique des personnes commises par un chien, qui ont été conçues sur le modèle de la responsabilité du fait de la conduite d'un véhicule, ou pour les violences intra-familiales.

Cette restructuration du code est animée par le double souhait de visibilité des mesures liées à la sécurité routière, qui rejoint la dimension symbolique et de ce texte, et de lisibilité. Elle permet de fait de lier les peines complémentaires susceptibles d'être imposées à l'ensemble des infractions en matière routière et de renforcer, dans les textes, la cohérence entre peines complémentaires et peines principales, qui incombe en pratique au juge.

b) Conserver l'échelle des peines actuelles

L'homicide routier, de même que les blessures routières, demeure un délit. Le quantum de peine de prison encouru ne peut donc être supérieur à dix ans. Le maintien de cette distinction avec l'homicide volontaire fait partie de l'équilibre du texte tel que présenté par ses auteurs. L'Assemblée nationale a cependant souhaité compléter les circonstances de ces infractions.

1.1. Le maintien des peines délictuelles actuellement prévues

Le quantum des peines prévues demeure celui actuellement fixé pour les infractions que l'article 1er renomme homicide routier et blessures routières.

L'homicide routier est puni, comme l'est actuellement le manquement délibéré à une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement par un conducteur à l'article 221-6-1, de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende.

Quand deux circonstances aggravantes ou plus sont réunies, les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende.

Les blessures routières ayant entrainé une ITT de plus de trois mois sont punies de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende, et lorsque deux ou plusieurs des circonstances prévues par l'article 221-19 sont présentes, la peine est portée à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende. Ces peines sont celles prévues dans les mêmes conditions par l'article 222-19-1 actuel.

Enfin l'article 222-20 reprend les peines prévues par l'article 222-20-1 actuel s'agissant des atteintes aux personnes ayant entrainé une ITT de moins de trois mois.

1.2 Compléter les circonstances aggravantes

Si les peines ont été maintenues, les circonstances susceptibles de constituer un homicide routier ont été complétées par rapport au droit existant.

Ces circonstances sont les suivantes :

- le délit de fuite avec non-assistance à personne en danger ;

- la consommation volontaire, de façon détournée ou manifestement excessive, de substances psychoactives figurant sur une liste déterminée par décret en Conseil d'État ;

- l'utilisation par le conducteur d'écouteurs ou du téléphone à la main ;

- le refus d'obtempérer ;

- les « rodéos » urbains.

On peut noter que certaines de ces circonstances sont préalables à l'homicide ou aux blessures, ainsi en est-il du rodéo, du refus d'obtempérer, de l'utilisation du téléphone ou des écouteurs ou de la consommation de substances psychoactives. Le lien de causalité entre la circonstance prévue et l'atteinte aux personnes devra être établi, ce qui pourra être difficile si la causalité est distante dans le temps. À l'inverse, le délit de fuite avec non-assistance à personne en danger est postérieur à l'homicide ou aux blessures.

L'Assemblée nationale a également rendu plus stricte la circonstance de dépassement de la vitesse maximale autorisée, en abaissant le seuil de dépassement de 50 kilomètres à l'heure à 30 kilomètres à l'heure.

Ces nouvelles circonstances sont également prévues pour les violences routières, à l'exception du refus d'obtempérer, supprimé en séance pour les blessures ayant entrainé une ITT de moins de trois mois.

2. La position de la commission : consacrer la nouvelle forme de responsabilité résultant des évolutions du code pénal, mieux inscrire l'homicide et les blessures routières dans la structure actuelle

La commission des lois approuve la volonté de créer l'homicide routier et les blessures routières, car ce choix paraît cohérent au regard des évolutions de la société et des attentes des familles, mais aussi à l'évolution du droit pénal.

À l'initiative du rapporteur, la commission a adopté l'amendement COM-4 tendant à réécrire de l'article 1er afin de compléter le dispositif proposé mais aussi de préserver son insertion dans la logique du code pénal.

a) Reconnaître dans le code pénal une nouvelle forme d'atteinte aux personnes par mise en danger

Il apparait important à la commission tout d'abord d'aller au bout de la logique qui a marqué l'évolution du droit de la responsabilité pénale depuis trente ans. Le principe posé à l'article 121-3 du code pénal selon lequel il n'y a pas point de crime ou de délit sans intention de le commettre a été complété pour prendre en compte des situations dans lesquelles si l'acte lui-même n'était pas voulu, les conditions qui l'ont rendu possible résultent des actions délibérées de l'auteur.

La mise en danger de la personne d'autrui, même indépendamment de tout dommage, a ainsi été prise en compte au sein de l'article 121-3 du nouveau code pénal entré en vigueur au 1er mars 1994. C'est ensuite le manquement à une obligation particulière de prudence ou de sécurité5(*) qui a pu constituer une infraction. Enfin, le manquement délibéré à une obligation de prudence ou de sécurité a pu constituer un crime ou un délit6(*).

La meilleure prise en compte des victimes et de leurs familles n'émerge pas seulement de l'émotion liée à un drame, mais s'inscrit dans l'approfondissement du droit pénal depuis trente ans.

La commission consacre donc, au-delà de l'homicide et des blessures routières une nouvelle forme d'atteinte à la personne humaine, par mise en danger. À cette fin, la rédaction adoptée insère dans le chapitre du code pénal relatif aux atteintes à la vie des personnes une nouvelle section relative à l'homicide par mise en danger, et dans le chapitre relatif aux atteintes à l'intégrité physique ou psychique des personnes une section relative aux atteintes à l'intégrité de la personne par mise en danger.

Dans les deux cas, la définition de ces infractions reprend celle de la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ayant conduit respectivement à un homicide et à des blessures, ainsi que le quantum de peines afférent.

Ces nouvelles catégories permettent de fonder l'homicide routier par mise en danger et les blessures routières par mise en danger, qui correspondent aux catégories initialement proposées par le projet de loi.

b) Inclure dans le champ de l'homicide et des blessures routières toutes les atteintes aux personnes du fait d'un conducteur

La rédaction adoptée par la commission élargit les notions d'homicide routier et de blessures routières pour y inclure tous les cas où des morts ou blessures sont survenues par le fait d'une personne. Il fait donc entrer dans le champ de la proposition de loi les homicides et blessures involontaires, qui seraient demeurés en l'état en application du texte proposé par l'Assemblée nationale, qui maintient pour partie les articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 du code pénal relatifs aux homicides et blessures involontaires causés par un conducteur.

La rédaction transmise au Sénat, qui aboutirait à établir une distinction entre homicide routier et homicide involontaire du fait d'un accident de la route, paraît en effet difficile à justifier, notamment pour les familles des victimes.

Par ailleurs, la rédaction de la commission revient sur plusieurs des circonstances ajoutées par l'Assemblée nationale et écarte celle liée à l'usage du téléphone ou à la consommation de substance psychoactive qui, en l'état, ne semblent pas pouvoir être établies avec certitude. Elle précise également que le refus d'obtempérer devra avoir été délibéré et ne pourra résulter d'une simple erreur.

Enfin la rédaction proposée ne conserve que les peines complémentaires spécifiques aux homicides et blessures routiers et renvoie au juge la responsabilité de déterminer au cas par cas si celles qui sont susceptibles en l'état du droit de s'appliquer à toutes les atteintes aux personnes doivent également s'appliquer.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article 1er bis
Assimilation, au regard de la récidive, de plusieurs infractions relatives notamment aux restrictions du droit de conduire et au refus de se soumettre aux opérations de dépistage d'un état alcoolique ou de l'usage de stupéfiants

L'article 1er bis est issu d'un amendement des rapporteurs adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale. Il tend à élargir la liste des délits pouvant être considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction afin de réprimer plus sévèrement la conduite sans permis et le refus de se soumettre à un dépistage d'un état alcoolique ou de l'usage de stupéfiants.

La commission a adopté cet article sans modification

1. Faciliter la répression des comportements les plus dangereux en assimilant plusieurs infractions routières au regard de la récidive

L'article 1er bis tend à modifier le deuxième alinéa de l'article 132-16-2 du code pénal qui assimile plusieurs infractions au code de la route au regard de la récidive.

Il ajoute à la liste préexistante cinq délits sanctionnés par le code de la route :

- le fait de refuser de se soumettre à l'injonction de remettre son permis de conduire au préfet de son département de résidence en cas de retrait de la totalité des points (article L. 223-5) ;

- le fait pour toute personne, malgré la notification qui lui aura été faite d'une décision prononçant à son encontre la suspension, la rétention, l'annulation ou l'interdiction d'obtenir la délivrance du permis de conduire, de conduire un véhicule à moteur pour la conduite duquel une telle pièce est nécessaire (article L. 224-16) ;

- le fait, pour toute personne ayant reçu la notification d'une décision prononçant à son encontre la suspension ou l'annulation du permis de conduire, de refuser de restituer le permis suspendu ou annulé à l'agent de l'autorité chargé de l'exécution de cette décision (article L. 224-17) ;

- le fait pour toute personne, pendant la période pour laquelle une décision de rétention du permis de conduire a été prise par les officiers et agents de police judiciaire, de refuser de restituer le permis de conduire (article L. 224-17) ;

- le fait de refuser de se soumettre aux opérations de dépistage d'un état alcoolique (article L. 234-8) ;

- le fait de contrevenir à l'interdiction de conduire un véhicule qui ne soit pas équipé par un professionnel agréé ou par la construction d'un dispositif homologué d'antidémarrage par éthylotest électronique (article L. 234-16) ;

- le fait de refuser de se soumettre aux opérations de dépistage de l'usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants (article L. 235-3).

Il ajoute aussi trois infractions prévues par l'article 434-41 du code pénal :

- la violation des obligations ou interdictions résultant des peines complémentaires prononcées par le juge, comme la suspension, l'annulation du permis de conduire ou l'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur ;

- le fait de détruire, détourner ou tenter de détruire ou de détourner un véhicule immobilisé ou un véhicule, une arme, tout autre bien, corporel ou incorporel, ou un animal confisqué ;

- le fait, par une personne recevant la notification d'une décision prononçant à son égard, en application des articles précités, la suspension ou l'annulation du permis de conduire, le retrait du permis de chasser ou la confiscation d'un véhicule, d'une arme, de tout autre bien corporel ou incorporel ou d'un animal, de refuser de remettre le permis suspendu, annulé ou retiré, le bien ou l'animal confisqué à l'agent de l'autorité chargé de l'exécution de cette décision.

2. La position de la commission : une disposition utile dans la lutte contre les comportements les plus dangereux

La commission s'interroge sur l'inclusion dans la liste des infractions assimilables au titre de la récidive de l'article 434-41 du code pénal dans son intégralité, et non seulement pour ce qui concerne les infractions relatives au permis de conduire et à la conduite d'un véhicule. Celle-ci pourrait en effet conduire à assimiler des infractions sans lien avec la lutte contre les violences routières.

Elle estime néanmoins utile de compléter la liste des infractions assimilables afin de mieux lutter contre les comportements dangereux.

La commission a adopté l'article 1er bis sans modification.

Article 1er ter A (nouveau)
Peine plancher de deux ans de prison pour les homicides routiers par mise en danger

À l'initiative du rapporteur, la commission a adopté un amendement créant un article additionnel afin de prévoir une peine minimale obligatoire de deux ans de prison dans les cas d'homicide routier par mise en danger.

La commission a adopté cet article ainsi rédigé.

L'article 1er bis A est issu de l'amendement COM-5 du rapporteur adopté par la commission. Il tend à prévoir le prononcé d'une peine minimale de deux ans de prison pour les homicides routiers par mise en danger.

Il marque la volonté d'agir sur le prononcé des peines et de conduire le juge à se poser systématiquement la question de l'incarcération. À cette fin, il rétablit l'article 132-19-1 du code pénal, qui visait les peines planchers en matière délictuelle.

Toutefois, conformément au principe constitutionnel de l'individualisation de la peine, l'article 1er bis A permet au juge de prendre en compte les circonstances de l'affaire et de déroger au seuil fixé. Il doit alors se prononcer par une décision spécialement motivée.

Ainsi que le prévoyait le régime initial des peines planchers, la dérogation ne sera pas possible en cas de récidive légale.

La commission a adopté l'article 1er ter A ainsi rédigé.

Article 1er ter
Allongement de la durée maximale de l'annulation ou de la suspension du permis de conduire encourues en tant que peines complémentaires pour les atteintes volontaires

L'article issu d'un amendement des rapporteurs adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale tend à prévoir qu'en cas d'atteintes volontaires, la durée de la suspension et de l'annulation du permis de conduire pouvant être prononcée par le juge au titre de peine complémentaire est de dix ans au plus.

La commission a adopté cet article en prévoyant qu'au-delà de cinq ans, seule l'annulation du permis de conduire pourra être prononcée.

1. Unifier et augmenter les peines complémentaires d'annulation ou de suspension du permis de conduire

Parmi les différentes peines complémentaires prévues par l'article 222-44 du code pénal en cas d'atteinte à l'intégrité physique ou psychique des personnes, le juge peut prononcer la suspension ou l'annulation du permis de conduire.

Le 3° de l'article prévoit que cette suspension ou annulation peut être prononcée pour une durée de cinq ans au plus. En revanche, en cas d'homicide involontaire ou d'atteinte involontaire ayant entraîné une ITT, commis par un conducteur avec une ou plusieurs circonstances aggravantes telles que prévues par les articles 222-19-1 et 222-20-1, la suspension peut être prononcée pour une durée de dix ans au plus.

Hors circonstances aggravantes, un auteur d'atteintes volontaires ou involontaires à l'intégrité de la personne encourt donc la même durée de suspension ou d'annulation du permis de conduire. Mais ainsi que le notent les rapporteurs de l'Assemblée nationale : « En cas de circonstances aggravantes, un conducteur auteur d'une atteinte involontaire ayant entraîné une ITT encourt même une durée de suspension ou d'annulation de permis plus longue qu'un conducteur auteur d'une atteinte volontaire ».

La nouvelle rédaction des 3° et 4° de l'article 222-44 tend à aligner la durée des peines complémentaires de retrait ou d'annulation du permis de conduire dans les cas d'homicide volontaire et d'homicide ou de blessures involontaires aggravés. Il fixe cette durée à dix ans.

Les durées de suspension ou d'annulation du permis de conduire encourues du fait de l'article 1er ter seraient les suivantes :

- 5 ans au plus pour un homicide ou une atteinte involontaire (quelle que soit la durée de l'ITT engendrée) ;

- 10 ans au plus pour une atteinte volontaire (quelles que soient les ITT) ;

- 10 ans au plus pour un homicide involontaire ou des blessures involontaires aggravés.

2. La position de la commission : mettre fin à une incohérence dans l'échelle des peines complémentaires

La commission des lois a approuvé l'objectif de rétablir la cohérence entre la gravité de l'infraction et le quantum de peines encourues. Elle a cependant adopté l'amendement COM-6 du rapporteur afin de prévoir que pour les atteintes volontaires à l'intégrité physique des personnes, seule l'annulation du permis de conduire sera possible. Il paraît en effet difficile de suspendre le permis de conduire d'un conducteur pendant plus de cinq ans sans l'obliger à passer à nouveau les épreuves de conduites.

La commission a adopté l'article 1er ter ainsi modifié.

Article 1er quater (supprimé)
Prévention de la récidive des violences routières et des conduites addictives dans le cadre du parcours de réinsertion des personnes détenues condamnées en raison d'un homicide ou de blessures routiers

L'article 1er quater issu d'un amendement des rapporteurs adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale tend à créer un module spécifique de lutte contre la récidive en matière de violence routière.

La commission a supprimé cet article qui relève du domaine règlementaire.

1. Renforcer l'action des services pénitentiaires d'insertion et de probation dans la lutte contre la récidive en matière routière

Issu d'un amendement des rapporteurs, l'article 1er quater inséré par l'Assemblée nationale entend prévoir à la suite des missions du service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP) définies à l'article L. 421-1 du code pénitentiaire un article L. 421-2 précisant que, lorsqu'une personne détenue a été condamnée pour un homicide routier ou des blessures routières, le SPIP met en place un module visant à prévenir le risque spécifique de récidive des violences routières et, le cas échéant, un module sur l'addiction aux substances psychotropes.

2. La position de la commission : une disposition n'entrant pas dans le domaine de la loi

Bien qu'elle comprenne la volonté exprimée par cet article, la commission a estimé que l'organisation des modules par les SPIP relève du domaine règlementaire.

Elle a en conséquence adopté l'amendement COM-7 de suppression de cet article présenté par le rapporteur.

La commission a supprimé l'article 1er quater.

Article 1er quinquies
Délictualisation de l'infraction de dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h

L'article 1er quinquies issu d'un amendement des rapporteurs adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale tend à transformer en délit la contravention de cinquième classe sanctionnant le fait, pour tout conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, de dépasser de 50 km/h ou plus la vitesse maximale.

La commission a adopté cet article sans modification

1. Réprimer plus sévèrement les excès de vitesse

L'article L. 413-1 du code de la route dispose que « tout conducteur d'un véhicule à moteur qui, déjà condamné définitivement pour un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h, commet la même infraction en état de récidive » encourt une peine de trois mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende. Il s'agit d'une application particulière du principe général posé par l'article 132-11 du code, selon lequel la récidive d'une contravention de cinquième classe est plus sévèrement réprimée et peut constituer un délit.

En effet, l'excès de vitesse de 50 km/h ou plus au-delà du maximum autorisé est puni d'une contravention de cinquième classe en application de l'article R. 413-14-1 du code de la route.

L'article 1er de la proposition de loi renforce la pénalisation de l'excès de vitesse, qui devient constitutif d'un homicide routier dès qu'il atteint 30 km/h au-dessus de la vitesse maximale autorisée. Au regard de ce renforcement, l'article 1er quater entend faire de la première infraction d'excès de vitesse, et non seulement de sa récidive, un délit.

Pour cela, il modifie le I de l'article L. 413-1 du code de la route et adapte en outre la peine complémentaire de confiscation du véhicule, afin de prévoir que la confiscation n'est obligatoire qu'en cas de récidive. Il complète en outre les peines complémentaires encourues, pour permettre au juge de prononcer l'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant trois ans au plus.

L'article rend également cette infraction éligible à la procédure de l'amende forfaitaire délictuelle (AFD), le montant prévu était de 300 euros. Le montant de l'amende forfaitaire minorée est de 250 euros et le montant de l'amende forfaitaire majorée est de 600 euros.

L'article procède également à une coordination à l'article L. 121-6 du code de la route. Par ailleurs, le II prévoit une entrée en vigueur différée de ces dispositions, pour permettre l'adaptation technique de la chaîne de traitement de ces infractions. Cette entrée en vigueur interviendra au plus tard le 31 décembre 2025.

2. La position de la commission

La commission des lois a approuvé cet article qui participe de la logique de renforcement de la répression des comportements les plus dangereux sur la route.

La commission a adopté l'article 1er quinquies sans modification.

Article 1er sexies
Systématisation de la suspension par le préfet du permis de conduire en cas de conduite sous l'emprise de l'alcool ou après usage de stupéfiants et allongement de la durée de suspension encourue pour les professionnels chargés du transport de personnes

L'article 1er sexies, issu de deux amendements des rapporteurs adoptés par la commission des lois de l'Assemblée nationale, tend à prévoir l'obligation pour le préfet de suspendre le permis de conduire de l'auteur d'une infraction routière particulièrement dangereuse.

La commission a adopté cet article sans modification

1. Renforcer la lutte contre les comportements les plus dangereux en matière routière

L'article L. 224-2 du code de la route prévoit la possibilité pour le préfet de suspendre le permis de conduire dans un certain nombre de cas.

Le présent article rend obligatoire la décision de suspension par le préfet lorsque le conducteur conduisait sous l'emprise d'un état alcoolique ou après usage de stupéfiants, ou lorsque le conducteur a refusé de se soumettre au dépistage de ce type de consommation.

Par ailleurs, l'article prévoit le doublement des durées de la suspension du permis de conduire prononcée par le préfet en application de l'article L. 224-2 lorsque le conducteur est un professionnel chargé du transport de personnes.

2. La position de la commission 

La commission estime que cette obligation imposée au préfet participe de la volonté de prévention des comportements les plus dangereux.

La commission a adopté l'article 1er sexies sans modification.

Article 1er septies
Renforcement de la sanction des infractions de conduite sous l'empire d'un état alcoolique, de conduite après usage de stupéfiants et de conduite sous l'empire d'un état alcoolique et après usage de stupéfiants

L'article 1er septies, issu de deux amendements des rapporteurs adoptés par la commission des lois de l'Assemblée nationale, tend à accroître les peines encourues en cas de conduite sous l'empire d'un état alcoolique, de conduite après usage de stupéfiants et de conduite sous l'empire d'un état alcoolique et après usage de stupéfiants.

La commission a adopté cet article sans modification

1. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article sanctionne plus sévèrement la conduite sous l'emprise de l'alcool et la conduite après usage de stupéfiants. Il modifie à cette fin le code de la route.

Infraction

Peine actuellement prévue

Peine prévue par l'article 1er septies

Conduite sous l'emprise de l'alcool, délit prévu par l'article L. 234-1 du code de la route

Deux ans d'emprisonnement et 4 500 euros d'amende

Trois ans d'emprisonnement et 9 000 euros d'amende

Conduite après usage de stupéfiants, délit prévu par l'article L. 235-1 du code de la route

Deux ans d'emprisonnement et 4 500 euros d'amende

Trois ans d'emprisonnement et 9 000 euros d'amende

Peines complémentaires pouvant être prononcées par le juge en cas de conduite après usage de stupéfiants ou sous l'emprise de l'alcool

Trois ans de suspension du permis de conduire

Trois ans avant de pouvoir solliciter la délivrance d'un nouveau permis en cas d'annulation du permis de conduire

Cinq ans de suspension du permis de conduire

Cinq ans avant de pouvoir solliciter la délivrance d'un nouveau permis en cas d'annulation du permis de conduire

Conduite après usage de stupéfiants cumulée avec l'emprise d'un état alcoolique, délit prévu par l'article L. 235-1 du code de la route

Trois ans d'emprisonnement et 9  000 euros d'amende

Cinq ans d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende

Peines complémentaires pouvant être prononcées par le juge en cas de conduite après usage de stupéfiants et sous l'emprise de l'alcool

Trois ans de suspension du permis de conduire

Trois ans avant de pouvoir solliciter la délivrance d'un nouveau permis en cas d'annulation du permis de conduire

Possibilité de confiscation du véhicule

Cinq ans de suspension du permis de conduire

Cinq ans avant de pouvoir solliciter la délivrance d'un nouveau permis en cas d'annulation du permis de conduire

Obligation de confiscation du véhicule

Perte de points de plein droit résultant d'une condamnation pour le délit de conduite après usage de stupéfiants cumulé avec l'emprise d'un état alcoolique

6 points

9 points

2. La position de la commission 

La commission a approuvé cette aggravation des sanctions qui est cohérente avec l'objectif de lutte contre les comportements les plus dangereux sur la route.

La commission a adopté l'article 1er septies sans modification.

Article 1er octies
Systématisation de l'immobilisation et de la mise en fourrière, à titre provisoire, du véhicule ayant servi à commettre l'infraction en cas de conduite après usage de stupéfiants aggravée par un état alcoolique

L'article 1er octies issu d'un amendement des rapporteurs adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale tend à systématiser l'immobilisation et la mise en fourrière, à titre provisoire, du véhicule ayant servi à commettre l'infraction en cas de conduite après usage de stupéfiants aggravée par un état alcoolique.

La commission a adopté cet article sans modification

1. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article propose de compléter l'article L. 325-1-2 du code de la route, qui prévoit les cas dans lesquels sont possibles l'immobilisation et la mise en fourrière d'un véhicule ayant servi à commettre une infraction, en en faisant une mesure de plein droit en cas de conduite après usage de stupéfiants aggravée par un état alcoolique.

2. La position de la commission 

La commission a approuvé cet article, considérant que l'immobilisation du véhicule est une mesure particulièrement utile et adaptée en matière de lutte contre la violence routière.

La commission a adopté l'article 1er octies sans modification.

Article 2
Coordinations découlant des dispositions de l'article 1er

L'article 2 procède à des coordinations.

La commission a adopté cet article en procédant à de nouvelles coordinations.

1. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Tirant les conséquences des dispositions de l'article premier, le présent article procède à plusieurs coordinations législatives.

2. La position de la commission 

La commission a adopté l'amendement COM-8 du rapporteur tendant à tirer les conséquences des modifications qu'elle a apportées à la proposition de loi.

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Article 3 (supprimé)
Examen médical obligatoire pour tout conducteur impliqué dans un accident de la route ayant causé un homicide routier ou des blessures routières avec une ITT supérieure à trois mois

L'article issu d'un amendement d'Élodie Jacquier-Laforge adopté en commission à l'Assemblée nationale tend à prévoir un examen médical obligatoire en cas d'accident de la route ayant causé un homicide routier ou des blessures routières avec une ITT supérieure à trois mois

La commission a supprimé cet article considérant que l'obligation de visite médicale relève du pouvoir règlementaire.

1. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article instaure un examen médical obligatoire en cas d'accident de la route ayant causé un homicide routier ou des blessures routières avec une ITT supérieure à trois mois.

Lorsqu'il est impliqué dans un tel accident, le conducteur doit se soumettre à « un examen ou une analyse médicale, clinique, biologique et psychotechnique ». Celui-ci est effectué à ses frais ; il a pour objectif d'évaluer son aptitude à la conduite et doit se tenir dans un délai de 72 heures après la survenance de l'accident.

À la suite de cet examen, l'avis médical est transmis au préfet et celui-ci décide de l'éventuelle suspension des droits à conduire de la personne concernée.

Si le conducteur refuse de se soumettre à cet examen médical, le présent article prévoit en outre qu'il encourt une peine de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 euros d'amende, ainsi que les peines complémentaires prévues au IV de l'article L. 223-5 du code de la route.

2. La position de la commission 

La commission s'interroge sur le caractère législatif de la mesure proposée par cet article. En effet l'article R. 412-6 du code de la route prévoit le principe selon lequel « tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manoeuvres qui lui incombent ».

Sur ce fondement, deux arrêtés du 21 décembre 2005 puis du 18 décembre 2015 fixent la liste des affections médicales incompatibles avec l'obtention ou le maintien du permis de conduire ou pouvant donner lieu à la délivrance de permis de conduire de durée de validité limitée.

Le conducteur atteint par l'une de ces pathologies doit se soumettre à un contrôle médical d'aptitude à la conduite auprès d'un médecin agréé. Il semble donc que l'obligation de se soumettre à un examen médical en cas d'accident routier ou de blessures routières pourrait être prévue par voie réglementaire.

La commission a considéré que même si elle est ici complétée par des sanctions pénales il ne paraît pas nécessaire d'élever l'obligation d'examen médicale au niveau législatif. Elle a en conséquence adopté l'amendement COM-9 de suppression présenté par le rapporteur.

La commission a supprimé l'article 3.

Article 4
Application de l'article dans les outre-mer

L'article 4 est issu d'un amendement adopté en séance publique à l'Assemblée nationale tend à prévoir l'application outre-mer du texte

La commission a adopté cet article sans modification

L'article 4 tend à rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis et Futuna les dispositions de la présente proposition de loi qui modifient le code pénal ou le code de procédure pénale.

La commission a adopté l'article 4 sans modification


* 4 Loi n°2022-52 créant l'article 221-5-6 du code pénal

* 5 Loi n° 96-393 du 13 mai 1996 relative à la responsabilité pénale pour des faits d'imprudence ou de négligence.

* 6 Loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000 tendant à préciser la définition des délits non intentionnels.

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