EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
Élargissement des conditions d'accès au service civique,
amélioration des modalités d'encadrement des missions
et renforcement de l'attractivité du dispositif

Cet article fixe à 30 ans l'âge limite pour effectuer un service civique et élargit le périmètre des organismes d'accueil, renforce la formation civique et citoyenne et améliore l'attractivité financière du dispositif.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté plusieurs amendements qui visent notamment à abaisser le plafond d'âge à 27 ans, sauf pour les personnes en situation de handicap, fixer à trois le nombre de jours de formation et imposer qu'ils soient réalisés par des organismes spécifiquement agréés, prévoir une indemnité identique pour tous les volontaires sans distinction d'âge, ainsi qu'à sécuriser juridiquement la mise à disposition d'un jeune, avec son accord, sur des missions ponctuelles d'urgence. Elle a également supprimé l'allocation de fin de contrat.

I. Les conditions d'accès, d'organisation du service civique ainsi que d'indemnité dans le droit en vigueur

Créé par la loi n° 2010-241 du 10 mars 2010, le service civique est un engagement volontaire d'une durée continue de six à douze mois donnant lieu au versement d'une indemnité prise en charge par l'agence du service civique, ouvert aux personnes âgées de seize à vingt-cinq ans ou aux personnes en situation de handicap âgées de seize à trente ans, visant à exercer des missions d'intérêt général reconnues prioritaires pour la Nation.

L'article L120-1 du code du service national précise que le service civique doit être effectué auprès de personnes morales agréées. Celles-ci sont limitativement énumérées par cet article : il doit s'agir d'un organisme sans but lucratif de droit français, d'une personne morale de droit public, d'un organisme d'habitations à loyer modéré mentionné à l'article L411-2 du code de la construction et de l'habitation, d'une société d'économie mixte mentionnée à l'article L481-1 du même code ou d'une société publique locale mentionnée à l'article L1531-1 du code général des collectivités territoriales, d'une société dont l'État ou la Banque de France détient la totalité du capital ou à laquelle le ministre chargé de la culture a attribué un label en application de l'article 5 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, d'une organisation internationale dont le siège est implanté en France ou d'une entreprise solidaire d'utilité sociale agréée en application du II de l'article L3332-17-1 du code du travail.

En application de l'article L120-4 du code du service national, sont éligibles les jeunes de nationalité française, d'un État membre de l'Union européenne ou d'un pays membre de l'espace économique européen, ainsi que des jeunes de nationalité étrangère résidant dans certains pays tiers où les personnes de nationalité française sont éligibles à des dispositifs similaires au nom du principe de réciprocité. Cet article permet également aux étrangers disposant d'un des titres de séjour prévus par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile d'effectuer un service civique, le cas échéant sous conditions de durée minimale d'un an de séjour en France.

L'article L120-14 du code du service national prévoit pour le volontaire un accompagnement dans sa réflexion sur son projet d'avenir ainsi qu'une formation civique et citoyenne. Fixée actuellement à deux jours, elle doit être délivrée au moins pour la moitié de cette durée dans les trois mois suivant le début de l'engagement de service civique.

L'article L120-18 du code du service national prévoit le versement d'une indemnité mensuelle au volontaire. Le décret n° 2017-1821 du 28 décembre 2017 a fixé cette indemnité à 36,11 % de la rémunération mensuelle afférente à l'indice brut 244 de la fonction publique prévu par le décret du 23 décembre 1982. Cette indemnité peut être majorée lorsque les difficultés de nature sociale ou financière rencontrées par le volontaire le justifient.

Depuis le 1er janvier 2024, les missions de service civique sont indemnisées à hauteur de 620 euros net par mois3(*). L'indemnité est versée en partie par l'État, à hauteur de 505 euros par mois ; l'organisme d'accueil verse un complément de 115 euros. Une majoration de 115 euros sur critères sociaux est accordée aux boursiers des échelons 5 à 7 et aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) ou dont les parents en sont bénéficiaires.

Aux termes de l'article L120-31 du code du service national, les organismes sans but lucratif4(*) accueillant des volontaires peuvent percevoir une aide, à la charge de l'agence du service civique, aux fins de couvrir une partie des coûts relatifs à l'accueil, à la formation et à l'accompagnement du volontaire accomplissant son service. Actuellement, la seule modulation de cette prise en charge concerne le lieu de la mission et est d'un montant de 100 euros fixé par un décret en date du 12 mai 2010.

Pour faciliter le déploiement du service civique au sein de petites structures, la loi permet l'intermédiation : en application de l'article L120-3 du code du service national, un organisme sans but lucratif de droit français agréé par l'agence du service civique peut mettre à disposition un volontaire pour effectuer une mission auprès d'un ou, de manière successive, de plusieurs organismes sans but lucratif de droit français, personnes morales de droit public français, collectivités territoriales étrangères ou organismes sans but lucratif de droit étranger, non agréés, s'ils satisfont aux conditions d'agrément. L'organisme agréé est responsable du respect par l'organisme tiers non agréé des conditions d'accueil, de tutorat et de formation des volontaires.

Enfin, l'article L5151-9 du code du travail précise que la réalisation d'une mission de service civique permet au volontaire d'acquérir des droits inscrits sur son compte d'engagement citoyen (CEC). L'article D5151-14 du même code indique que la durée minimale nécessaire à l'acquisition de ses droits fixés à 240 euros est de 6 mois. Ces fonds peuvent être mobilisés dans les conditions définies à l'article L6323-6 du code du travail, notamment pour le financement du permis de conduire ainsi que pour des actions de formation de certifications professionnelles enregistrées au répertoire national, de validation de compétences, de bilan de compétences ou encore, d'accompagnement à la création ou reprise d'entreprises.

II. Les dispositions de la proposition de loi

Le 1° de l'article 1er élargit les conditions d'accès au service civique à tous les jeunes de 25 à 30 ans et permet aux assemblées parlementaires ainsi qu'aux juridictions administratives et financières d'être agréées pour accueillir des personnes en service civique.

Selon les informations transmises par Nadia Bellaoui, présidente de l'agence du service civique, la moyenne d'âge des volontaires est de 21 ans. Seuls 6 % des services civiques sont réalisés par des volontaires de 24 ans et 4 % par des volontaires de 25 ans ou plus.

Afin d'encourager davantage la mixité sociale dans le cadre de la réalisation de missions de service civique, le 1° précise que, lorsque la nature de la mission et de l'organisme le permet, le jeune est affecté à la réalisation d'une mission collective impliquant au moins deux volontaires.

Le 2° renforce la formation civique et citoyenne pour la porter à cinq jours. Elle reprend en cela une recommandation du conseil national de refondation (CNR) Jeunesse ainsi que de la mission d'information sénatoriale visant à renforcer la culture citoyenne.

Le 3° aligne le montant minimal de l'indemnité versée à un volontaire sur la rémunération perçue au même âge par un apprenti lors de sa première année de contrat d'apprentissage.

Le 4° exonère l'indemnité ainsi que les prestations complémentaires perçues par les volontaires de cotisations sociales et de l'impôt sur le revenu.

Le 5° renforce l'attractivité financière du service civique en créant une allocation de fin de contrat. Celle-ci permet, dans des conditions fixées par décret, au volontaire de financer au choix le permis de conduire, un projet de formation, de reprise d'études ou de création d'entreprise.

Le 6° élargit les possibilités de modularité d'une aide aux organismes sans but lucratif accueillant des volontaires, en prenant en compte leur niveau d'études, leur lieu de résidence ou une éventuelle situation de handicap. Il s'agit de les inciter à accueillir des jeunes au profil plus atypique nécessitant un accompagnement renforcé de la part du tuteur ou leur permettre de proposer aux volontaires une aide financière supplémentaire par exemple en termes d'aide au logement.

Le 7° étend à toute personne morale agréée par l'agence du service civique la possibilité de réaliser une intermédiation. Il ouvre par exemple la voie au portage d'une mission de service civique par une intercommunalité et à la mise à disposition du volontaire au profit d'une ou plusieurs communes de son ressort qui n'ont pas les moyens humains, financiers et administratifs de proposer seules une mission de service civique.

III. La position de la commission

Concernant le report de l'âge limite à 30 ans, la rapporteure a été alertée sur un risque d'éviction aux dépens des jeunes en situation de handicap - actuellement les seuls entre 25 et 30 ans à pouvoir effectuer un service civique - ainsi que de publics moins autonomes comme les mineurs ou les décrocheurs scolaires. En outre, pour reprendre l'expression de la direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative, le service civique est sur une « ligne de crête » entre dispositif de promotion de l'engagement et outil d'insertion sociale et professionnelle.

Or, l'élévation de l'âge maximal pour effectuer un service civique intensifie la confusion entre service civique, emploi et outil d'insertion sociale et accroit le risque d'une substitution à l'emploi pour les jeunes.

Pour toutes ces raisons, la commission a adopté, sur proposition de la rapporteure, un amendement COM-1 visant à fixer l'âge maximal pour effectuer un service civique à 27 ans, sauf pour les jeunes en situation de handicap pour lesquels l'âge plafond est maintenu à 30 ans. Par rapport au droit actuel, l'âge plafond est rehaussé de deux ans afin de tenir compte des parcours d'études moins linéaires qu'auparavant avec interruption ou réorientation en cours d'études.

La commission a également adopté, sur proposition de la rapporteure, un amendement COM-2 qui vise à permettre aux personnes accueillies en France au titre de la protection temporaire prévue à l'article L.581-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile d'effectuer un service civique. Celle-ci n'ouvrant pas droit à un titre de séjour, ses bénéficiaires ne peuvent actuellement pas postuler à un service civique. Ce dispositif de protection de populations victimes de conflits armés issu du droit européen a été utilisé pour la première fois en 2022 en faveur des ressortissants ukrainiens.

S'agissant de la formation civique et citoyenne, s'il existe un consensus sur l'utilité pour les volontaires d'une augmentation du nombre de jours de formation5(*), la rapporteure estime que certains volontaires n'ont pas besoin de 5 jours de formation. Elle a également été alertée sur le coût d'une telle mesure : le passage de deux à cinq jours de formation représenterait un coût supplémentaire de 150 euros par volontaire.

En revanche, la qualité et l'effectivité de cette formation doivent être mieux contrôlées : actuellement un quart des engagés n'en bénéficie toujours pas et seulement la moitié d'entre eux font deux journées effectives de formation.

C'est pourquoi la commission a adopté, sur proposition de la rapporteure, un amendement COM-15 prévoyant d'une part que la formation soit désormais délivrée par un organisme spécifiquement agréé pour le faire et, d'autre part, portant le nombre de jours de formation à trois. Par rapport au droit existant, la formation est renforcée d'un jour.

Compte tenu des spécificités d'engagement du service civique, la commission a également adopté un amendement COM-3 pour permettre à un volontaire, avec son accord, de pouvoir participer à des missions d'urgence en dehors de celles prévues par son contrat. Cet amendement, qui pourrait par exemple être amené à jouer lors d'une catastrophe naturelle, fait écho à l'une des recommandations du groupe de travail sectoriel au sein de la commission de la culture sur les conséquences de l'épidémie de Covid-19 sur la jeunesse et la vie associative présidé par notre ancien collègue Jacques-Bernard Magner en 20206(*). Lors de la covid, près de 50 000 volontaires s'étaient inscrits sur la plateforme gouvernementale « jeveuxaider.gouv.fr » pour aider dans diverses missions. L'agence du service national a été confrontée à des difficultés juridiques pour leur permettre d'agir en dehors des missions prévues par leur contrat.

En ce qui concerne l'indemnité perçue par le volontaire, la rapporteure se félicite qu'elle soit désormais calculée en référence au contrat d'apprentissage et donc au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC), lui permettant de faire l'objet de revalorisation plus régulière que le point d'indice de la fonction publique. En revanche, en faisant référence à l'âge du volontaire, la proposition de loi conduit à une diminution de l'indemnité perçue par les mineurs, qui représentent 10 % des volontaires engagés. Ces derniers toucheraient ainsi une rémunération mensuelle de 471 euros, contre 620 euros aujourd'hui. Par ailleurs, afin d'éviter que pour une même mission deux jeunes perçoivent une indemnité différente du seul fait de leur âge, mais aussi pour limiter le risque de substitution à l'emploi pour les volontaires les plus âgés7(*), la commission a adopté un amendement COM-4 qui fixe l'indemnité perçue par un volontaire du service civique par référence à la rémunération versée à un jeune majeur âgé de 18 à 20 ans lors de sa première année en contrat d'apprentissage. Cet amendement porte la rémunération mensuelle d'un jeune engagé dans un service civique à 43 % du SMIC quel que soit son âge, soit 751 euros. Cela représente une augmentation mensuelle de 131 euros.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a également adopté un amendement COM-5, supprimant l'allocation de fin de contrat introduite par l'article 1er. En effet, les volontaires du service civique bénéficient déjà du compte d'engagement citoyen (CEC), qui est abondé de 240 euros à la fin de leur contrat. Il a été indiqué à la rapporteure au cours de ses auditions que dans le contexte budgétaire actuel, la création de cette allocation risque d'entraîner par ricochet la diminution des droits ouverts au titre du compte d'engagement citoyen pour les volontaires du service civique. Or, le système actuel via l'acquisition de droits au titre du CEC participe à la connaissance par les jeunes volontaires de l'existence de ce dispositif. Il semble plus opportun à la rapporteure de s'appuyer sur un outil qui vise à favoriser l'engagement tout au long de la vie. Ce sont en effet 10 % d'une classe d'âge chaque année qui ont ainsi la possibilité de découvrir l'existence et le fonctionnement du CEC.

Enfin la commission a adopté un amendement COM-14 rédactionnel.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 1er bis (nouveau)

Élargissement des conditions d'utilisation des droits acquis
par les volontaires du service civique au titre du compte d'engagement citoyen

Cet article additionnel, adopté à l'initiative de la rapporteure, permet aux volontaires d'utiliser les droits acquis dans leur CEC au titre de leur service civique pour payer les droits d'inscription de leur formation initiale.

Les actions de formation éligibles au compte personnel de formation sont encadrées par l'article L6323-6 du code du travail.

Il s'agit notamment des actions de formation permettant une certification professionnelle enregistrée au répertoire national ainsi que celles sanctionnées par les attestations de validation de blocs de compétences au sens de l'article L6113-1 du même code et celles sanctionnées par les certifications et habilitations enregistrées dans le répertoire spécifique mentionné à l'article L6113-6 comprenant notamment la certification relative au socle de connaissances et de compétences professionnelles.

Sont également éligibles les actions permettant de faire valider les acquis de l'expérience, les bilans de compétences, la préparation aux épreuves théoriques et pratiques de toutes les catégories de permis de conduire d'un véhicule terrestre à moteur, les formations d'accompagnement et de conseil pour les créateurs ou repreneurs d'entreprises, les formations destinées à permettre aux bénévoles et aux volontaires en service civique d'acquérir les compétences nécessaires à l'exercice de leurs missions.

Parce que le compte d'engagement citoyen s'adosse sur le compte de formation professionnelle, celui-ci s'inscrit dans une démarche de formation continue. Le droit actuel ne permet ainsi pas son utilisation pour le paiement des frais d'inscription de certaines formations initiales de l'enseignement supérieur prévus à l'article L719-4 du code de l'éducation.

Or, du fait des caractéristiques propres au service civique, un nombre important de volontaires sont étudiants - l'âge moyen est de 21 ans - ou souhaitent reprendre leurs études à l'issue de leur mission.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté un amendement COM-6 permettant aux anciens volontaires du service civique d'utiliser les droits acquis à ce titre pour payer les droits d'inscription de leur formation initiale.

La commission a adopté cet article 1er bis ainsi rédigé.

Article 2
Valorisation du service civique dans le cadre des études supérieures

Cet article vise à mieux faire connaître le service civique auprès des jeunes ainsi qu'à faciliter sa réalisation et le valoriser dans le cadre des études supérieures.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté plusieurs amendements qui visent à inclure les dispositifs d'accompagnement ou d'insertion sociale et professionnelle parmi ceux qui peuvent être proposés à un volontaire à la fin de son contrat, sécuriser le droit à la réintégration dans sa formation d'origine de tout étudiant effectuant une césure ainsi qu'à supprimer l'obligation d'intégrer la réalisation d'un service civique parmi les critères qui doivent être pris en compte dans l'examen des candidatures dans les filières sélectives sur Parcoursup.

I. L'information et la valorisation du service civique dans le droit en vigueur

La proposition de loi sénatoriale de 2010 créant le service civique lui fixe un double objectif : d'une part, « recréer du lien social » et « permettre à des jeunes, parfois à la recherche de repères, de s'engager au service des autres, en faveur de l'intérêt général », et d'autre part offrir aux jeunes une « expérience humaine enrichissante qui viendra compléter leur cursus scolaire et/ou universitaire, avant d'entrer dans la vie active »8(*).

Conçu comme un dispositif « d'intégration citoyenne des jeunes » selon l'expression de Christian Demuynck, rapporteur pour le Sénat de la proposition de loi relative au service civique en 2009, le législateur a prévu une information et une sensibilisation des jeunes à plusieurs étapes de leur cursus scolaire et citoyen : à l'école, à travers les programmes d'enseignement moral et civique (EMC) comme le précise l'article L312-15 du code de l'éducation, lors de la Journée Défense et citoyenneté, obligatoire pour tous les Français (art. L114-3 du code du service national), ainsi que pendant leurs études supérieures : les établissements d'enseignement supérieur sont tenus d'informer leurs étudiants de l'existence de ce dispositif (art. L611-7 du code de l'éducation). Enfin, dans le cadre du stage de cohésion du service national universel, une information sur le service civique qui doit constituer sa troisième phase facultative est donnée.

Dans le cadre des études supérieures, le service civique est encouragé et valorisé par plusieurs biais. Ainsi, l'article L611-11 du code de l'éducation permet aux étudiants faisant un service civique en parallèle de leurs études de bénéficier d'aménagement dans l'organisation et le déroulement de celles-ci.

La loi de 2018 relative à l'orientation et à la réussite des étudiants consacre dans la loi le droit à une année de césure. L'article L611-12 du code de l'éducation prévoit la possibilité pour tout étudiant sur sa demande et avec l'accord du président ou directeur de l'établissement dans lequel il est inscrit de suspendre temporairement ses études. L'article D611-16 du même code prévoit que la césure peut notamment prendre la forme « d'un engagement de service civique ».

Enfin, l'article L611-9 du même code permet à un jeune en service civique de bénéficier d'une validation des compétences, connaissances et aptitudes acquises lors de celui-ci au titre de sa formation.

Outre la promotion de l'engagement des jeunes, le service civique revêt une dimension d'insertion professionnelle sur certains territoires comme le souligne l'étude de l'institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire de février 20249(*) : les départements dans lesquels la part de volontaires peu diplômés est élevée sont également les départements où les taux de réalisation du service civique sont les plus élevés. Elle constate également une corrélation entre taux de chômage territorial élevé et recours élevé à ce volontariat.

D'ailleurs, l'article L120-14 du code du service national prévoit un « accompagnement [du volontaire] dans sa réflexion sur son projet d'avenir » par l'organisme qui l'accueille, témoignant de cette vocation d'insertion sociale et professionnelle.

Conscient de ce rôle du service civique pour raccrocher des jeunes en voie de décrochage scolaire, l'article L114-1 du code de l'éducation inclut la participation à un service civique comme répondant à l'obligation de formation de 16 à 18 ans, au même titre que la poursuite de la scolarité, l'apprentissage ou le stage d'une formation professionnelle ainsi qu'un accompagnement dans le cadre d'un dispositif d'insertion sociale ou professionnelle.

En complément de cet article, et afin de lutter contre la sortie du système scolaire sans diplôme ni formation, l'article L122-3 du même code issu de la loi d'orientation sur l'école de 1989 prévoit que tout jeune y compris majeur doit se voir proposer une formation professionnelle avant sa sortie du système éducatif et quel que soit le niveau d'enseignement qu'il a atteint.

II. Les dispositions de la proposition de loi

Le 1° de cet article complète l'article L122-3 du code de l'éducation afin de prévoir comme alternative à la formation professionnelle proposée à tout jeune sortant du système éducatif, un service civique. Par ailleurs, il renforce l'accompagnement en fin de contrat en permettant au volontaire de se voir proposer une formation professionnelle ou la reprise de sa formation initiale.

Afin de développer le service civique, le 2° de cet article inclut dans les programmes d'enseignement moral et civique une information sur la possibilité de réaliser une année de césure après le baccalauréat pour effectuer un service civique.

Le 3° impose aux établissements d'enseignement supérieur d'informer leurs étudiants de la possibilité de césure pour accomplir un service civique et garantit à l'étudiant volontaire sa réinscription à l'issue du contrat dans la formation dans laquelle il avait été accepté.

Le 4° prévoit une prise en compte de la réalisation du service civique dans le cadre de l'inscription à une formation du premier cycle d'enseignement supérieur (licence, BTS, DUT notamment). Il impose aux établissements d'enseignement supérieur de prendre en compte celui-ci lors de l'examen des candidatures déposées via Parcoursup. Pour les filières sélectives, l'accomplissement d'un engagement de service civique devient un critère à prendre en compte au même titre que ses acquis et compétences au regard de la cohérence avec la formation demandée.

III. La position de la commission

La rapporteure partage la volonté de mieux faire connaître et valoriser le service civique. Sur sa proposition, la commission a adopté cinq amendements.

Compte tenu de la dimension d'insertion sociale que joue le service civique pour certains jeunes, l'amendement COM-7 inclut les dispositifs d'accompagnement ou d'insertion sociale et professionnelle parmi ceux qui peuvent être proposés à un volontaire à la fin de son contrat.

Par ailleurs, par un amendement COM-8, la commission a supprimé la modification du programme d'enseignement moral et civique. Comme elle a pu le rappeler à de nombreuses reprises sur de précédents textes, il ne revient pas au législateur de définir les contenus des programmes scolaires. Elle souligne d'ailleurs que l'article L312-5 du code de l'éducation inclut déjà une sensibilisation au service civique. Enfin, en ce qui concerne plus spécifiquement cet article du code de l'éducation, elle a récemment appelé à en simplifier sa rédaction afin de le recentrer autour d'objectifs concis, liés à la connaissance des valeurs de la République, des institutions françaises et européennes ainsi qu'à la compréhension des enjeux internationaux, sociétaux et environnementaux du monde contemporain10(*).

En ce qui concerne la réalisation d'une année de césure, dans un contexte d'augmentation du nombre d'étudiants pour un nombre de places dans l'enseignement supérieur quasi stable, par un amendement COM-9, la commission a sécurisé le droit à la réintégration dans sa formation d'origine de tout étudiant effectuant une césure.

L'amendement COM-10, adopté par la commission, substitue à l'obligation de prise en compte du service civique par les établissements d'enseignement supérieur la possibilité de le faire. Il s'inspire en cela de la possibilité offerte par l'amendement de Laurent Lafon voté par le Sénat lors de l'examen de projet de loi de programmation pour la recherche pour les années 2021 à 2030 afin de valoriser les dispositifs des cordées de la réussite.

En revanche, par l'amendement COM-11, la commission a supprimé toute mention du service civique dans la procédure de sélection pour les filières sélectives. En effet, selon les informations transmises à la rapporteure, il y a actuellement deux demandes pour une place de service civique. Ce ratio pourrait être amené à se dégrader puisque dans le cadre des coupes budgétaires annoncées début février près de 100 millions d'euros ont été annulés pour le service civique, ce qui représente l'équivalent de 50 000 missions. Dans sa décision n° 2018-763 DC, le Conseil constitutionnel a estimé conforme un système de départage entre les étudiants à la condition qu'il soit fondé sur des critères objectifs de nature à garantir le respect de l'exigence constitutionnelle d'égal accès à l'instruction. L'écart entre le nombre de places disponibles et le nombre de candidatures risque de créer une inégalité dans l'accès aux études supérieures.

Par ailleurs, l'âge moyen actuel des jeunes en service civique est de 21 ans, soit à la fin du premier cycle d'études universitaires ou au début du cycle de master. Introduire la réalisation d'un service civique dans les critères de sélection pour certaines filières risquerait d'une part de dénaturer la nature même de ce dispositif qui est avant tout un engagement au service de l'intérêt général, et d'autre part d'augmenter le nombre de candidatures post-bac au détriment de celles de jeunes à d'autres stades de leur parcours de formation.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 3
Prise en compte du service civique dans les concours de la fonction publique

Cet article vise à valoriser le service civique lors des concours externes de la fonction publique ainsi qu'à créer une voie d'accès au troisième concours pour les anciens volontaires du service civique.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a modifié cet article pour le concours externe en permettant aux statuts particuliers de déroger à l'obligation de diplômes ou titres pour se présenter à un concours au bénéfice des anciens volontaires du service civique et pour le troisième concours en substituant à la création d'une voie spécifique, la prise en compte du service civique dans la durée d'expérience professionnelle, d'engagement associatif ou politique nécessaire pour se présenter à celui-ci.

Cet article prévoit une valorisation du service civique dans les concours de la fonction publique.

En ce qui concerne le concours externe, le texte prévoit une prise en compte du service civique lors des procédures d'examen des candidatures et d'admissibilité dans les concours externes.

La mise en place de dispositions spécifiques au sein d'une même voie d'accès - en l'occurrence pour les épreuves d'admissibilité - interroge au regard du principe constitutionnel d'égal accès aux emplois publics découlant de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

En ce qui concerne le troisième concours, en application de l'article L325-7 du code général de la fonction publique, celui-ci est ouvert aux candidats justifiant l'exercice pendant une durée déterminée d'une ou plusieurs activités professionnelles, d'un ou plusieurs mandats d'élu local ou de responsable d'une association, y compris à titre bénévole. Ce délai minimal de service fixé par le statut particulier de chaque concours est dans la majorité des cas au minimum de 4 ans (par exemple pour le concours d'éducateur d'activités physiques et sportives - catégorie B) voire plus (5 ans de délai pour les concours d'accès aux instituts régionaux d'administration, 6 ans pour l'institut national du service public).

Or, en application de l'article L120-1 du code du service national, un contrat de service civique est d'une durée de 6 mois à 12 mois11(*). Comme l'a rappelé Nadia Bellaoui, présidente de l'agence du service civique, lors de son audition par la rapporteure, la durée moyenne d'un service civique est de 8 mois. Pour la commission, créer une voie d'accès spécifique au troisième concours pour les anciens volontaires d'un service civique risque de créer une inégalité entre les candidats se présentant à ses différentes voies dans la durée minimale d'expériences professionnelles, d'engagement associatif ou politique à justifier pour y accéder.

Pour cette raison, sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté un amendement COM-12 de réécriture globale de l'article.

Pour les concours externes, il ouvre la possibilité aux statuts particuliers et cadres d'emplois de prévoir une dérogation aux conditions de diplômes et de titres pour les anciens volontaires du service civique. Une dérogation similaire existe pour certaines catégories de candidats : elle est de droit pour les parents d'au moins trois enfants (art. L325-10 du code général de la fonction publique) et possible pour les sportifs de haut niveau (art. L325-12 du même code). En revanche, les épreuves et les modalités de notation restent les mêmes pour l'ensemble des candidats.

Pour le troisième concours, la durée du service civique est incluse dans la durée nécessaire d'expérience professionnelle, d'engagement bénévole ou politique demandée par les statuts particuliers de chaque concours, de manière identique à ce que l'article L325-8 du code général de la fonction publique prévoit pour la prise en compte des contrats d'apprentissage ou de professionnalisation. La rapporteure note que le service civique est valorisé de manière similaire dans le cadre des concours internes : l'article L.325-6 du code général de la fonction publique prévoit la prise en compte du temps effectif de service civique dans le calcul de l'ancienneté exigée pour accéder à ceux-ci.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 3 bis (nouveau)
Valorisation du service civique dans la validation des acquis de l'expérience

Cet article additionnel permet une reconnaissance du service civique dans le cadre de la procédure de validation des acquis de l'expérience.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté un amendement COM-13 visant à mieux valoriser le service civique dans la procédure de validation des acquis de l'expérience.

L'article L6412-1-1 du code du travail, relative aux activités pouvant être prises en compte dans le cadre d'une validation des acquis de l'expérience mentionne les stages, les périodes de formation initiale ou continue en milieu professionnel. En revanche, les périodes de service civique ne sont actuellement pas prises en compte.

Cette valorisation du service civique dans le cadre de la validation des acquis de l'expérience s'inscrit dans une démarche plus large souhaitée par le gouvernement de certification des compétences acquises dans le cadre d'un engagement. Un système de « badges de compétences numériques » porté par la Caisse des dépôts et la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle du ministère du travail est en cours de déploiement. Évoquée depuis plusieurs années, cette démarche a accéléré en 2024 bénéficiant d'un portage politique pour valoriser l'engagement des 45 000 volontaires sollicités dans le cadre des jeux olympiques et paralympiques. La rapporteure appelle à une reconnaissance des compétences acquises par les volontaires du service civique et souhaite que ceux-ci soient éligibles aux « badges de compétences numériques ».

La commission a adopté cet article ainsi rédigé.

Article 4
Recevabilité financière

L'article 4 de la proposition de loi assure la recevabilité financière de la proposition de loi au titre de l'article 40 de la Constitution.

La commission a adopté cet article sans modification.

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La commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.


* 3 Les volontaires peuvent également percevoir des prestations nécessaires à leur subsistance, leur équipement, leur transport et leur logement (article L120-19 du code du service national) qui peut être en nature (chèque restaurant) ou espèces.

* 4 Associations loi 1901 ou de droit local, union et fédérations d'association, mutuelles, syndicats, fondations reconnues d'utilité publique, fonds de dotation, établissements de santé privés d'intérêt collectif, ...

En revanche lorsque l'organisme d'accueil est une personne morale de droit public, il n'est pas éligible à cette aide. C'est le cas des collectivités territoriales et des établissements publics de toute nature : EPIC, chambres consulaires, établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, collèges et lycées (EPLE),...

* 5 Jeunesse et citoyenneté, une culture à réinventer, rapport n° 648, M. Henri Cabanel, rapporteur, M. Stéphane Piednoir, président, 2021-2022 ; préconisation du Conseil national de la refondation « Jeunesse ».

* 6 Culture, éducation, recherche, sport et communication : penser l'avenir malgré la crise sanitaire, rapport n° 667 de Mme Catherine Morin-Desailly, 2019-2020.

* 7 Un apprenti en première année âgé de 21 à 25 ans perçoit une rémunération égale à 53 % du SMIC (soit 926 euros). Cette rémunération est égale à 100 % du SMIC pour un apprenti en première année de 26 ans et plus.

* 8 Proposition de loi sur le service civique de M. Yvon Collin et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, n° 612, 2008-2009.

* 9 Service civique : des variations départementales liées au chômage des jeunes, INJEP, note n° 74, février 2024.

* 10 Cf. notamment rapport n° 101 de M. Bernard Fialaire sur la proposition de loi tendant à renforcer la culture citoyenne, 2023-2024.

* 11 Il peut également prendre la forme d'un volontariat associatif d'une durée de 6 à 24 mois.

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