N° 107

SÉNAT

PREMIÈRE SESSION ORDINAIRE DE 1990-1991

Annexe au procès-verbal de la séance du 28 novembre 1990.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de la législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale(1) sur la proposition de résolution de MM. Jacques GENTON, Hubert d'ANDIGNE, Guy CABANEL, Henri COLLARD, Gérard DELFAU, Jacques GOLLIET, André JARROT, Jean-Pierre MASSERET, Paul MASSON, Daniel MILLAUD, Michel MIROUDOT, Jacques OUDIN, Michel PONIATOWSKI, Robert PONTILLON, André ROUVIERE, René TREGOUET et Xavier de VILLEPIN tendant à modifier l'article 29 du Règlement du Sénat et tendant à insérer dans celui-ci, après l'article 83, une division relative aux questions orales européennes avec débat.

Par M. Daniel HOEFFEL,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; Louis Virapoullé, François Giacobbi, Charles de Cuttoli, Michel Darras, vice-présidents ; Charles Lederman, Germain Authié, René-Georges Laurin, Marcel Kudloff, secrétaires', Guy Allouche, Alphonse Arzel, Gilbert Baumet, Pierre Biarnes, Christian Bonnet, Philippe de Bourgoing, Raymond Bouvier, Jean Chamant, Raymond Courrière, Étienne Dailly, André Daugnac, Luc Dejoie, Michel Dreyfus-Schmidt, Mme Jacqueline Fraysse-Cuzalis, MM. Jean-Marie Girault, Paul Graziani, Hubert Haenel, Daniel Hoeffel, Charles Jolibois, Lucien Lanier, Bernard Laurent, Paul Masson, Daniel Millaud, Lucien Neuwirth, Charles Ornano, Georges Othily, Robert Pagès, Claude Pradille, Albert Ramassamy, Roger Romani, Michel Rufin, Jacques Sourdille, Jacques Thyraud, Jean-Pierre Tizon, Georges Treille.

Mesdames, Messieurs,

La Haute assemblée est saisie d'une proposition de résolution tendant, d'une part, à compléter l'article 29 de son Règlement et, d'autre part, à insérer dans celui-ci, après l'article 83, une division relative aux « questions orales européennes avec débat »,

Signée, sous réserve du représentant du groupe communiste, par l'ensemble de nos collègues membres de la délégation du Sénat pour les Communautés européennes à la date de son dépôt, cette proposition de résolution est présentée par ses auteurs comme la mise en oeuvre de l'une des propositions formulées par notre excellent collègue M. Jacques Genton, président de la délégation, dans le rapport qu'il a remis, le 12 avril 1990, à M. le Président du Sénat, à l'issue de la mission de réflexion dont il avait été chargé par le Bureau au vu des recommandations formulées par nos collègues MM. Henri de Raincourt, Guy Allouche et Gérard Larcher sur la réforme du fonctionnement du Sénat.

Cette proposition de résolution a pour objet d'introduire dans le Règlement du Sénat une procédure nouvelle de questions orales avec débat portant sur des sujets européens. Le débat, pour être plus efficace, serait ainsi centré sur un thème précisément déterminé et les intervenants, soit le Gouvernement, un représentant de la délégation pour les Communautés européennes, un représentant de la commission permanente compétente, un représentant du Parlement européen et un représentant de chaque groupe politique, seraient tenus de respecter des temps de parole strictement délimités afin que la durée du débat n'excède pas deux heures.

Après avoir retracé les grandes lignes du contexte dans lequel s'inscrit cette proposition de résolution et précisé les modalités de mise en oeuvre de la nouvelle procédure de questions orales avec débat qu'elle envisage, la commission des Lois vous suggérera de retenir le dispositif proposé, sous réserve de certaines précisions et compléments.

1. L'INTÉRÊT CROISSANT DU SÉNAT POUR LES QUESTIONS EUROPÉENNES

Depuis plusieurs années déjà, le Parlement, - et singulièrement le Sénat -, a pris la pleine mesure tant des enjeux de la construction européenne à laquelle il entend participer, que la « concurrence » dont il fait l'objet de la part des institutions européennes.

Cet intérêt s'est plus particulièrement manifesté au Sénat, d'une part, dans le cadre des travaux conduits par la délégation pour les Communautés européennes, d'autre part, à l'occasion de la transcription de règles communautaires en droit interne, enfin, au cours des débats consacrés au suivi des questions européennes.

a) La délégation pour les Communautés européennes

En dépit du réflexe quelque peu défensif qui présida à leur création, les délégations parlementaires pour les Communautés européennes instituées en application de la loi n° 79-564 du 6 juillet 1979 ont finalement été toute autre chose qu'un instrument de protection du domaine de compétence du législateur national contre les empiètements des instances communautaires. Depuis plus de dix ans en effet, elles ont grandement contribué à l'information et à la « sensibilisation » de leur assemblée respective.

La relance et l'accélération de la construction européenne depuis l'adoption de l'Acte unique ont hâté la prise de conscience des parlementaires de l'importance croissante des questions européennes, d'autant que, de plus en plus souvent, les projets de loi soumis à leur examen ont pour objet la mise en oeuvre de directives communautaires tandis que certains secteurs entiers échappent dorénavant à la compétence des parlements nationaux.

C'est dans ce contexte qu'un certain nombre d'initiatives ont été prises dans la période récente pour renforcer le rôle des délégations ; ainsi la récente modification de la loi de 1979 par la loi n° 90-385 du 10 mai 1990, qui a permis, notamment, - d'augmenter leurs effectifs, - trente-six membres, au lieu de dix-huit -, et d'assurer, en leur sein, une représentation plus équilibrée des commissions permanentes.

La redéfinition des missions des délégations, - organes privilégiés de centralisation des informations et documents que le Gouvernement est tenu de leur faire parvenir, elles procèdent à leur examen le plus tôt possible au cours du processus d'élaboration des politiques européennes et des projets de textes communautaires et formulent des conclusions à destination des commissions compétentes -, l'inscription dans la loi des conditions de déroulement de leurs travaux et des modalités de publicité de ces travaux, enfin l'accroissement de leur rythme d'activité, devraient leur permettre de jouer, auprès des parlementaires, le rôle de source privilégiée d'information et de réflexion en matière communautaire, voire même de « signal d'alarme » le plus en amont possible dans le processus décisionnel européen.

b) La transcription des règles communautaires en droit interne

À l'occasion des travaux qu'elles conduisent, les commissions permanentes sont amenées à s'intéresser de manière croissante aux aspects européens des questions qu'elles examinent, soit qu'il s'agisse de transcrire en droit interne des obligations communautaires résultant d'une directive, soit qu'il s'agisse d'un secteur à forte « connotation » communautaire.

C'est ainsi, par exemple, qu'au cours des dernières sessions, la commission des Lois a eu l'occasion, pour ce qui concerne la transcription en droit interne, d'examiner plusieurs projets de loi importants comme la loi n° 88-1201 relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières et portant création des fonds communs de créances ou la loi n° 89-1014 du 31 décembre 1989 portant adaptation du code des assurances à l'ouverture du marché européen.

De même, au cours de la présente session, plusieurs projets de loi actuellement en discussion ont également pour objet, au moins partiel, d'assurer une telle transcription ; ainsi le projet de loi tendant à améliorer la transparence et la régularité des procédures de marchés et soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de mise en concurrence, ou la proposition de loi relative aux marques de fabrique, de commerce ou de service.

c) Des débats à thèmes européens

Soucieux de débattre des orientations générales de la politique communautaire, l'Assemblée nationale et le Sénat ont par ailleurs consacré un certain nombre de débats aux questions communautaires. Ces débats ont été organisés soit à l'initiative du Gouvernement, - ainsi le débat sur l'avenir de la Communauté européenne et son contrôle démocratique, à partir d'une déclaration du Gouvernement, qui s'est déroulé à l'Assemblée nationale le 10 octobre dernier ou encore le débat de politique générale qui s'est tenu au Sénat, le 27 juin 1990-, soit à l'initiative de la Conférence des présidents qui, regroupant plusieurs questions orales avec débat consacrées à des problèmes européens, a par exemple organisé au Sénat, le 27 avril 1989, un débat sur « la préparation de la France aux prochaines échéances européennes », soit enfin dans le cadre du débat budgétaire à l'occasion de l'examen du projet de budget du ministère des affaires européennes.

Dans l'ensemble, ces initiatives ont certes permis des échanges de vue intéressants mais les débats ont trop souvent présenté un caractère très général qui n'a pas permis aux ministres d'apporter des réponses précises à des questions précises. C'est ainsi que la lecture des intitulés des questions orales regroupées lors de la séance du 27 avril 1989 laisse songeur. En quelques heures de temps, les orateurs ont en effet abordé des sujets aussi divers que les enjeux et le contenu de la présidence française, la réalisation du marché européen des capitaux et des services financiers, le contenu de l'Europe sociale, l'harmonisation fiscale européenne, la négociation des accords de Schengen, les zones éligibles aux aides structurelles versées par le Feder, la politique commerciale extérieure de la France, l'information de l'opinion française sur les conséquences pratiques de l'échéance européenne de 1992, enfin, la reconnaissance et la définition communautaire des appellations d'origine fromagères.

Il résulte de cet évident ecclectisme un débat quelque peu disparate qui se présente plus comme une succession d'observations auxquelles le ministre répond de façon nécessairement générale en reprenant les propos de chacun des orateurs, que comme un véritable échange de vues sur des points précis.

C'est la formulation de ce constat qui a conduit les membres de la délégation pour les Communautés européennes et, plus particulièrement son président, notre excellent collègue M. Jacques Genton, à concevoir une formule nouvelle de débats à thèmes européens qui fait l'objet de la proposition de résolution qu'ils ont tous signée, sous réserve du représentant du groupe communiste.

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