II. LE CADRE DE L'INTERVENTION DE LA DÉLÉGATION DU BUREAU DU SÉNAT

La proposition de résolution qui nous est présentée fixe clairement le cadre de l'intervention de la délégation du Bureau : celle-ci pourrait apporter son assistance juridique sur des problèmes concernant l'application de la loi à l'occasion d'un contrôle de légalité.

Ce choix est parfaitement logique : le contentieux de la légalité soulève fondamentalement le problème de l'autonomie locale.

Dès lors que cette autonomie, principe posé par l'article 72 de la Constitution et réaffirmé solennellement par les lois de décentralisation, constitue un élément essentiel du statut des collectivités locales, il est normal que le Sénat, représentant parlementaire des collectivités locales, s'efforce d'en assurer la protection dans la limite de ses compétences propres.

Il ne s'agirait en aucune façon pour la délégation du Bureau d'empiéter sur les compétences des tribunaux ou de concurrencer les membres des professions juridiques et judiciaires, mais au contraire de fournir aux collectivités le dossier législatif et technique souvent difficile à rassembler.

La formule proposée permettrait tout simplement à une collectivité locale confrontée à un contentieux de la légalité de disposer d'un concours somme toute analogue à celui dont l'État lui-même dispose non seulement à travers ses services, mais également par ses facultés d'intervention dans les procédures.

Il faut à ce titre souligner que l'État n'est pas une partie ordinaire dans le contentieux de légalité : le préfet, par exemple, module ce contrôle en décidant de soumettre ou non tel ou tel acte à la juridiction administrative puis en précisant les points sur lesquels il conteste les actes des collectivités locales. De la même façon, les très nombreuses réponses aux questions écrites des parlementaires constituent une véritable source du droit. Ces réponses sont produites devant les juridictions administratives, et constituent des sortes de consultations officielles dont la prise en compte par le juge conditionne largement la solution des litiges opposant les collectivités locales et le représentant de l'État chargé du contrôle de la légalité de leurs actes.

La consultation que la délégation du Sénat serait conduite à délivrer dans le cadre de ce contrôle de légalité rétablirait ainsi plus d'équilibre en faveur de la partie la plus démunie, c'est-à-dire la collectivité locale.

Sans s'imposer aux juridictions qui conserveraient leur souveraineté d'appréciation, cette consultation serait par ailleurs revêtue de toute l'autorité souhaitable - au même titre que les réponses aux questions écrites - puisqu'elles émaneraient du Sénat.

En fait, il s'agirait moins d'une consultation au sens propre du terme - et il semble exclu qu'une chambre du Parlement telle que le Sénat puisse prendre le risque de se trouver engagé, par exemple, dans un conflit entre un maire ou un président de département ou de région et un membre de son personnel - qu'un avis fourni sur ce qu'a été l'intention du législateur, et en particulier du Sénat, au moment de l'élaboration de la loi.

En cas de difficulté dans l'application de la loi, qui pourrait en effet mieux apprécier la règle de droit que le Sénat qui participe à l'élaboration de la loi ?

Ainsi pourrait être combattue la tendance hélas trop fréquente de l'exécutif et de l'administration de l'État de reprendre soit dans les textes d'application soit dans les interprétations qu'ils en donnent la part d'autonomie parfois difficilement conquise au cours des débats.

Autant qu'une assistance juridique ponctuelle, il s'agirait donc là pour le Sénat de prolonger par d'autres voies le contrôle de l'application des lois que les commissions permanentes, sur les instructions du Bureau du Sénat, se sont appliquées à développer depuis 1972.

Cette fonction relève en fait de la mission générale de contrôle et de suivi de l'application de la loi, puisqu'elle permettrait au Sénat de vérifier comment la loi est effectivement mise en oeuvre dans des situations concrètes. Le cas échéant, cette procédure permettrait au Sénat de faire connaître son opinion sur les modalités de cette application.

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