CHAPITRE II LA POLITIQUE DE L'ÉNERGIE ET DES MATIÈRES PREMIÈRES

Les dotations affectées à l'énergie et aux matières premières dans le budget de l'industrie pour 1996 s'élèvent à 9,45 milliards de francs, en augmentation de près de 1 % par rapport au budget voté pour 1995.

La part de ces dépenses dans le budget de l'industrie est un peu supérieure à 55 % , au lieu de 33 % en 1995 et d'environ 60 % avant 1994. Cette évolution résulte, d'une part, des changements de périmètre du budget dans le présent projet de loi de finances et dans la loi de finances pour et, d'autre part, de la forte baisse en 1995 de la subvention à Charbonnages de France (- 2 milliards de francs).

I. LA POLITIQUE DE L'ÉNERGIE

Trois secteurs sont principalement concernés par les crédits de l'énergie : le nucléaire, le charbon et la maîtrise de l'énergie.

Par ailleurs, le ministère exerce la tutelle des établissements et grandes entreprises intervenant dans le domaine de l'énergie.

A. L'ÉNERGIE NUCLÉAIRE

Le maintien des acquis du programme nucléaire français est une priorité, tant du point de vue stratégique, afin de diminuer la dépendance énergétique française, qu'économique, pour réduire la facture énergétique extérieure, que du point de vue de l'environnement pour lutter contre l'effet de serre.

À cet égard, la sûreté, dont le niveau d'exigence est périodiquement relevé, le traitement et l'élimination des déchets, ainsi que la préparation du démantèlement des installations qui vont devenir obsolètes, représentent autant de sujets de réflexion et d'intervention que votre rapporteur considère comme majeurs pour les années à venir.

1. L'avenir du programme nucléaire

Trois séries de réflexions sont actuellement menées pour préparer les choix des années futures et assurer l'avenir de l'énergie nucléaire. Elles concernent :

- l'achèvement du cycle du combustible, avec notamment le choix du développement du retraitement, qui permet une réduction du volume des déchets et la réalisation d'économies tant en matière de combustible que de frais de stockage. D'importantes études concernent également les questions du conditionnement et du stockage en profondeur des déchets.

- la programmation future des centrales qui, plus que quantitative, doit désormais présenter un aspect qualitatif. En effet, la légère surcapacité temporaire du parc de centrales installé a expliqué qu'aucune tranche nouvelle n'ait été engagée pendant plusieurs années : depuis 1988, deux nouvelles tranches -Civaux 1 et Civaux 2- ont été lancées en 1991 et 1992, une autre est en préparation. Cette légère surcapacité a permis le développement des exportations d'électricité vers les pays limitrophes pour un montant annuel d'environ 15 milliards de francs.

À l'avenir, le lancement de nouvelles tranches doit permettre de faire face aux besoins prévisibles d'électricité tout en contribuant à la maîtrise de l'effet de serre.

En outre, pour maintenir la compétitivité du prix de l'électricité, ainsi que la compétence et l'avance de l'industrie nucléaire française, il deviendra également indispensable de remplacer progressivement les centrales existantes.

- la réflexion sur les filières à mettre en place, tant du point de vue technique que du point de vue industriel.

Actuellement, 75 % du parc nucléaire mondial est constitué par les réacteurs à eau légère. C'est donc sur ceux-ci qu'une large part des recherches et nouveaux développements se concentre. Dans ce but, et conformément aux souhaits des pouvoirs publics, un ensemble de partenaires français et allemands se sont unis (EDF, Framatome et Siemens au sein de NPI) pour créer le réacteur de nouvelle génération EPR (European Pressurized Water Reactor). Celui-ci devra répondre à des critères élevés en termes de sûreté et viser une meilleure compétitivité.

2. Le Commissariat à l'énergie atomique

- Un rôle et une organisation réaffirmés

En l'année du cinquantenaire du CEA, créé par ordonnance en date du 18 octobre 1945 pour "poursuivre les recherches scientifiques et techniques en vue de l'utilisation de l'énergie atomique dans divers domaines de la science, de l'industrie et de la défense nationale", un premier contrat d'objectifs a été signé avec l'État afin de définir les programmes de recherche civile pour la période 1995-1998.

Le contrat d'objectifs du CEA

Signé avec l'État le 1er mars 1995, le contrat d'objectifs définit les axes de développement des programmes de recherche civile 1 du CEA pour la période 1995-1998.

Un rappel : le nucléaire se situe au carrefour de politiques essentielles : les politiques énergétique, industrielle, internationale, de l'environnement, de la santé et de la défense.

Dans ce cadre, la mission centrale confiée au CEA est la recherche nucléaire et la maîtrise de l'atome au profit de chacune de ces politiques.

Les principaux axes de recherche concernent :


l'électronucléaire actuel avec la recherche à court et moyen terme sur les réacteurs REP, les combustibles et les usines de retraitement.


l'électronucléaire de nouvelle génération, avec la préparation du réacteur européen à eau sous pression EPR, des nouvelles générations de combustibles et des procédés d'enrichissement (procédé SILVA d'enrichissement par laser),


l'aval du cycle du combustible avec notamment les recherches sur la gestion des déchets radioactifs à vie longue et sur la consommation du plutonium dans les réacteurs à neutrons rapides.


la fusion thermonucléaire, une recherche à très long terme en lien avec Euratom et le programme mondial ITER.


la sûreté, la protection et la métrologie des rayonnements ionisants, grâce à une expertise technique de haut niveau.


la santé avec le développement de coopérations avec la recherche médicale française dans les domaines de la radiobiologie, de la radioprotection et de la médecine nucléaire pour l'aide au diagnostic et à la thérapeutique.

Enfin, le CEA doit contribuer à l'approfondissement des connaissances nationales en termes de recherche fondamentale (physique des infinis, systèmes complexes, biologie fondamentale, environnement).

Il doit également développer, en coopération avec les autres laboratoires publics, des recherches technologiques non nucléaires, en s'attachant à bien sélectionner ses domaines de recherche au regard des besoins stratégiques de l'industrie (microélectronique, optronique, génie des matériaux, ingénierie des protéines, technologies de l'environnement).

Le CEA doit enfin poursuivre sa démarche de diffusion technologique et de transmission du savoir en direction des PME-PMI (environ 1.000 par an bénéficient de conseils, de transferts et de prestations techniques ou technologiques).

1. Les activités du CEA dans le domaine de la défense sont régies par la loi de programmation militaire. Le rôle du CEA comme actionnaire de CEA-Industrie (Cogema, Framatome, Techmatome) ne figure pas dans le contrat d'objectifs.

Pour atteindre ces objectifs, le CEA doit poursuivre l'effort de modernisation de ses méthodes de gestion, de transformation de ses structures, notamment par un resserrement géographique, de rajeunissement et de renouvellement de son personnel.

- Un financement stabilisé

Le budget du CEA, alimenté pour un peu moins des trois quarts de son montant par des dotations budgétaires, et pour un peu plus d'un quart par des recettes externes, a augmenté jusqu'en 1989, mais diminué ensuite pour se stabiliser désormais à environ 19 milliards de francs.

Budget du CEA

La dotation civile du CEA comprend, d'une part, une subvention du budget de l'industrie, d'autre part, des crédits en provenance du budget de la recherche.

La subvention de fonctionnement inscrite au budget de l'industrie pour 1996 atteint 3.633,7 millions de francs, en augmentation de 1 % par rapport à la subvention votée pour 1995.

Elle est regroupée sur deux articles du chapitre 36-83, de façon à isoler les moyens destinés à l'Institut de protection et de sûreté nucléaire qui s'élèvent à 894,2 millions de francs, en augmentation de 3,1 % par rapport au budget de 1995.

Par ailleurs, 200 millions de francs sont inscrits au titre VI pour le financement des investissements civils du CEA. Ce chapitre n'avait pas été doté de crédits depuis 1991, la subvention d'investissement civil ayant été inscrite au budget de la recherche jusqu'en 1994 (les crédits du budget de la recherche affectés au CEA sont inscrits au titre III pour le fonctionnement et au titre VI pour les investissements), puis en grande partie "débudgétisée" dans le budget de 1995.

En effet, 1.044 millions de francs devaient être financés "hors budget" en 1995 par le recours aux mécanismes suivants :


• 200 millions de francs provenaient de la défense au titre de la recherche duale,


• 356 millions de francs devaient être issus du compte d'affectation spéciale alimenté par le produit des privatisations,


• 388 millions de francs étaient prélevés sur les ressources propres du CEA ou de ses filiales.

Votre rapporteur qui avait vivement critiqué la solution choisie en 1995, se félicite du retour à une meilleure orthodoxie budgétaire. Il considère en effet qu'un mécanisme aussi précaire n'est pas souhaitable pour le financement de programmes de recherche d'une telle importance.

B. LE CHARBON

La subvention à Charbonnages de France qui avait été réduite de 2 milliards de francs en 1995 s'établit à 4.550 millions de francs dans le projet de budget pour 1996, en augmentation de 1,3 % par rapport au budget voté de 1995.

Cette évolution s'inscrit dans le cadre plus général du "Pacte charbonnier" signé le 20 octobre 1994 et qui prévoit la fin de l'extraction charbonnière en France en 2005.

1. Une situation structurellement déficitaire

- Une production peu compétitive

En dix ans, la production nationale de charbon a diminué de près de moitié, passant de 16,3 millions de tonnes en 1985 à environ 9 millions de tonnes cette année. Or, malgré cette rationalisation, marquée notamment par l'arrêt de toute production dans le bassin du Nord-Pas-de-Calais à la fin de 1990, le coût d'extraction demeure très supérieur au prix moyen des charbons importés.

Cette différence de coût s'est en outre brutalement aggravée en 1994. Ainsi, en 1994, sur l'ensemble des houillères, le coût moyen des charbons nationaux s'élevait à 650 francs la tonne, contre 209 francs pour le charbon importé. La perte moyenne à la tonne atteignait 355 francs, au lieu de seulement 211 francs en 1993.

Par ailleurs, deux bassins présentent des coûts particulièrement élevés : La Mure avec 2.017 francs la tonne extraite et Carmaux avec 2.373 francs. Aussi, apparaît-il plus que raisonnable de prévoir la fermeture de ces deux sites en 1997.

On rappellera que dans son rapport public de 1994, la Cour des comptes relevait le caractère très déficitaire de l'exploitation de "la Grande Découverte" de Carmaux et "l'absence totale d'espoir de rentabilité de cet investissement effectué en pure perte". La Cour ajoutait : "décidée sur la foi d'études non pertinentes, son exploitation est financièrement désastreuse ; en l'arrêtant en 1991, l'État aurait économisé 4 milliards de francs au cours des quinze années suivantes".

Réponse fournie par le ministère de l'industrie aux observations de la Cour des comptes

Le gouvernement partage l'analyse de la Cour.

En effet, la Grande Découverte est le site le plus déficitaire par tonne et par agent. Avec une perte de 316 millions de francs (résultat courant 1994), il enregistre un résultat négatif de 2.112 F/t (355 F/t en moyenne pour l'ensemble de Charbonnages de France). Cette perte par tonne correspond à un coût de revient de 2.370 F/tonne qui n'est couvert qu'à hauteur de 11 % (260 F/t) par le prix de vente. Les études conduites ont montré qu'il n'existait pas de solution alternative économiquement viable. À l'heure où la résorption des grands déficits publics structurels est relancée, l'intérêt général réclame la fin d'une telle situation.

C'est pourquoi le gouvernement a approuvé en juillet 1995 la proposition de Charbonnages de France de procéder à l'arrêt de l'évacuation des terres de la Grande Découverte de Carmaux, dans la perspective d'un arrêt de l'extraction charbonnière en 1997. Cette décision est mise en oeuvre par les Houillères de Bassin du Centre-Midi dans le cadre du Pacte charbonnier du 20 décembre 1994, c'est-à-dire sans recours à des licenciements.

En effet, la moyenne d'âge relativement élevée de l'effectif, ainsi que la durée des travaux jusqu'à l'arrêt effectif de l'extraction, puis la remise en état au site (à savoir 2001) permettent de résorber progressivement les sureffectifs grâce aux mesures d'âge du Pacte charbonnier.

- Une situation structurellement déficitaire

Depuis le début des années 1980, à la seule exception de 1985, le résultat final après subvention de Charbonnages de France a été déficitaire.

Ce déficit a atteint un maximum de 5,4 milliards de francs en l991 et, malgré une légère amélioration, se maintient à un niveau proche de 3 milliards cette année.

Principaux indicateurs chiffrés sur la situation de Charbonnages de France

Cette situation provient de la dégradation des pertes d'exploitation (pour les activités d'extraction, le résultat d'exploitation est de - 3.180 millions de francs en 1994), mais également du poids des charges financières, reflet de l'endettement important de Charbonnages de France.

De fait, l'endettement à long et moyen terme de Charbonnages de France est aujourd'hui proche de 24 milliards de francs, les charges financières représentant 35 % du chiffre d'affaires de l'entreprise.

Toutefois, l'accord conclu avec EDF permet à Charbonnages de France d'obtenir quelques marges bénéficiaires dans l'activité électrique (770 millions de francs en 1994). En outre, on observera que 60% de son chiffre d'affaires est désormais réalisé avec EDF (vente de charbon et production d'électricité).

- Une subvention budgétaire allégée

En 1994, la dotation accordée à Charbonnages de France atteignait 6.490 millions de francs, dont 2.433 millions au titre de la subvention d'exploitation et 4.057 millions au titre de la couverture des charges spécifiques de l'entreprise.

En 1995, ces crédits ont connu une double et importante évolution :

ï ils ont été regroupés sur un seul chapitre, le chapitre 45-12 intitulé "Subvention à Charbonnages de France",

ï leur montant s'est établi à 4.490 millions de francs, en retrait de 2 milliards de francs.

En contrepartie, l'État donnait l'autorisation à Charbonnages de France d'emprunter à hauteur de 3 milliards de francs pour couvrir ses besoins de trésorerie. En outre, EDF entrait de façon minoritaire (19%) au capital d'une société nationale assurant la représentation du pôle électrique de Charbonnages de France (9 centrales assurant 2 % de la production d'électricité nationale et 26 % de la production d'origine thermique).

Il était alors prévu que cette économie de 2 milliards pour le budget de l'État reste ponctuelle, ainsi que cela avait été souligné à votre rapporteur :

"Cette contribution spécifique à l'allégement des charges de l'État, qui s'inscrit dans le cadre d'un exercice budgétaire exceptionnellement rigoureux, n'a pas vocation à être reconduite au cours des exercices ultérieurs. Par ailleurs, elle n'aura aucune conséquence sur le fonctionnement des Charbonnages de France qui seront autorisés à emprunter les crédits nécessaires pour équilibrer leur trésorerie".

Or, pour 1996, la subvention prévue s'établit à 4.550 millions de francs, soit pratiquement au même montant, en augmentation seulement de 1,3 %.

Votre rapporteur rappelle qu'en tout état de cause, la dette de Charbonnages de France deviendra à terme une dette de l'État.

Il souligne en outre que s'y ajoutent quelque 60 milliards de francs d'engagements hors bilan, imputables pour l'essentiel aux engagements vis-à-vis du personnel actif et en retraite, titulaire du statut du mineur.

C'est pourquoi, une gestion globale, aussi rationnelle et maîtrisée que possible du déclin des activités minières doit être impérativement organisée par les pouvoirs publics, dès maintenant et au cours des dix années qui viennent.

2. Un effort de reconversion en retrait

Depuis 1988, le chapitre 62-01 "Reconversion des zones minières" permet de couvrir les actions menées par les fonds d'industrialisation des bassins miniers.

Les programmes soutenus ne sont pas des aides directes aux entreprises mais ils visent à une action en profondeur pour créer ou améliorer les conditions d'environnement pour les activités nouvelles.

Ainsi, en 1994, les interventions soutenues ont concerné pour 44% l'immobilier d'entreprise, 35 % la formation et la recherche et 21% l'aide à la création d'entreprises et aux actions collectives.

Par région, la Lorraine et le Nord-Pas-de-Calais sont les principaux bénéficiaires des crédits.

Pour 1996, les dotations consacrées à la reconversion des zones minières s'élèvent à 180 millions de francs en autorisations de programme, soit une diminution de 10% des crédits, et à 94 millions de francs en crédits de paiement, en diminution de 46 % par rapport à 1995. Cette diminution s'explique essentiellement par la régression progressive de la dotation destinée au bassin minier du Nord-Pas-de-Calais.

C. LA MAÎTRISE DE L'ÉNERGIE

1. Les orientations de la politique de maîtrise de l'énergie

Au cours du débat parlementaire du 25 novembre 1993 sur l'énergie, le gouvernement a réaffirmé sa volonté de développer une politique d'utilisation rationnelle de l'énergie et de développement des énergies renouvelables.

Puis, en décembre 1993, le gouvernement a lancé un vaste débat national sur l'énergie et l'environnement.

À l'issue de ce débat et en écho aux propositions présentées par le rapport Souviron, le gouvernement a pris un certain nombre de mesures annoncées lors du Conseil des Ministres du 29 mars 1995.

Communication du Conseil des ministres du 29 mars 1995

Sur proposition des ministres chargés de l'énergie, de l'environnement et de la recherche, le gouvernement a décidé de mettre en oeuvre les mesures suivantes :

1. Renforcer la transparence et le caractère démocratique des grandes décisions publiques en matière d'énergie :

en retenant le principe d'un débat parlementaire quinquennal sur les orientations générales de la politique énergétique ;

en décidant d'améliorer et de mieux diffuser les connaissances techniques et économiques qui orientent les choix énergétiques. En particulier, les calculs des coûts de référence de l'électricité seront dorénavant transmis à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques ; le ministère de l'industrie publiera un nouveau livre blanc sur l'industrie nucléaire incorporant notamment le bilan environnemental et économique de l'aval du cycle nucléaire ; des scénarios de long terme sur l'énergie seront élaborés et des études relatives à l'énergie nucléaire lancées, spécialement dans le domaine du démantèlement, du cycle du combustible et des déchets ;

en aménageant les procédures liées aux lignes électriques et aux grands équipements nucléaires, afin d'améliorer la concertation, et de rendre plus claires les décisions publiques. Le Gouvernement engagera la codification du droit de l'énergie nucléaire.

2. Engager un nouvel effort en faveur des économies d'énergie dans les transports, dans les bâtiments publics et les logements neufs dont les coûts de consommation devront être affichés à partir du 1er janvier 1996. Cet effort va au-delà du programme national de prévention du changement climatique rendu public en février 1995.

3. Favoriser le développement des énergies renouvelables qui bénéficieront d'ici la fin de l'année d'une révision des conditions d'achat de l'électricité produite. En outre, dans les régions insulaires (DOM, Corse), l'ADEME et EDF engageront un programme de développement de 20 000 chauffe eau solaires.

Ces mesures devraient permettre de mieux concilier l'efficacité de notre dispositif énergétique avec le respect de notre environnement et les exigences de transparence de notre société. Elles complètent le programme national de prévention du changement climatique arrêté par le Premier Ministre en février 1995 et qui permettront à la France de ramener en l'an 2000 ses émissions de gaz à effet de serre à leur niveau de 1990.

Ainsi, le gouvernement estime-t-il indispensable de poursuivre la politique de maîtrise de l'énergie, initiée il y a 20 ans. À cet effet, il prévoit d'infléchir les politiques énergétiques nationales pour lutter contre l'effet de serre grâce au développement conjoint de la conservation de l'énergie, des énergies renouvelables (hydroélectricité, biomasse, géothermie, solaire), du nucléaire et, dans une moindre mesure du gaz naturel, plus faiblement émetteur de gaz carbonique que les autres énergies fossiles.

2. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME)

L'ADEME a été créée au début de 1992 par la fusion de l'Agence française pour la maîtrise de l'énergie (AFME), l'Agence nationale pour la récupération et l'élimination des déchets (ANRED) et l'Agence pour la qualité de l'air (AQA).

Les difficultés apparues au fur et à mesure de la mise en place de cette nouvelle agence ont conduit les pouvoirs publics à modifier la structure de la direction de l'ADEME.

Désormais, aux termes du décret du 2 novembre 1993, le président du conseil d'administration soumet au conseil les orientations générales de la politique de l'Agence et veille à l'application de ces orientations. Le directeur général prépare les réunions du conseil d'administration, met en oeuvre ses décisions et lui rend compte de leur exécution, il assure également la direction des services et a, à ce titre, autorité sur le personnel.

- Les missions de l'ADEME

Quatre programmes prioritaires ont été définis et figurent dans le contrat d'objectifs signé entre l'État et l'Agence le 5 mai 1995 pour la période 1995-1998.

Le contrat d'objectifs de l'ADEME

Le contrat rénove les relations entre l'État et l'ADEME en vue d'une meilleure efficacité. Il met en perspective les missions et les priorités d'intervention de l'Agence selon quatre grands axes :

1. Renforcer l'efficacité de l'économie, notamment dans les secteurs des transports et du résidentiel-tertiaire, en diffusant spécialement la maîtrise de la demande d'électricité en zone rurale, dans les DOM et en Corse.

2. Développer les énergies renouvelables au-delà de leur contribution actuelle de 15% au bilan énergétique national, selon trois voies principales : les bio combustibles, la production décentralisée d'électricité (éolien, microhydraulique, photovoltaïque) avec 1.500 sites équipés en métropole en 1998, et le solaire thermique, avec 20.000 chauffe-eau dans les zones insulaires.

3. Prévenir les pollutions et les atteintes à l'environnement, et en maîtriser les conséquences.

L'ADEME mettra en oeuvre un grand programme de réhabilitation des sites et sols pollués. Elle gérera pour le compte de l'État les taxes sur les déchets ménagers et industriels, sur les huiles, sur le bruit et sur la pollution atmosphérique.

4. Préparer l'avenir, par l'accueil de thésards et par le pilotage de recherches fondamentales sur l'effet des pollutions sur l'homme et les écosystèmes et sur les technologies énergétiques.

Le contrat d'objectifs précise les modalités générales d'intervention de l'ADEME. Il prévoit l'établissement d'un programme de travail triennal élaboré par l'ADEME en étroite concertation avec l'ensemble des partenaires concernés, notamment les ministères de tutelle. L'Agence conduira également une politique permanente d'évaluation interne de ses interventions. La mise en réseau de ses délégations régionales sera organisée en vue de généraliser les échanges d'expériences et le transfert des connaissances.

Pour chacun de ces programmes, trois cibles ont été déterminées : les entreprises, les collectivités territoriales et le grand public, avec un accent plus particulier sur les questions liées aux transports, à l'habitat et à l'industrie.

Ces missions font de l'ADEME l'outil principal du gouvernement pour la mise en oeuvre de la politique de maîtrise de l'énergie, qui repose sur deux orientations majeures :

? le développement de la recherche dans les filières jugées les plus prometteuses pour l'avenir,

? l'encouragement des économies d'énergie et des énergies renouvelables dans les domaines où elles présentent, à terme, une rentabilité.

- Les moyens budgétaires de l'ADEME

Le tableau ci-après fournit le détail de la subvention du ministère de l'industrie à l'ADEME. Celle-ci bénéficie en effet également de subventions de ses deux autres ministères de tutelle : la Recherche et l'Environnement.

La diminution globale des moyens de paiement (dépenses ordinaires et crédits de paiement) affectés en 1996 à l'ADEME, soit - 17,2 %, s'explique essentiellement par le souci du gouvernement de faire participer l'ensemble des administrations et organismes subventionnés à la maîtrise des dépenses de l'État.

Votre rapporteur estime toutefois nécessaire de souligner l'importance de la politique de maîtrise de l'énergie. Il constate que les bons résultats obtenus par la France dans ce domaine ne pourront être maintenus que grâce à une politique active et diversifiée, qui prendra place dans un contexte général plus difficile, avec des marges de manoeuvre plus étroites.

Aussi, la forte baisse des moyens d'intervention de l'ADEME (inférieurs de moitié à ceux de 1990) doit-elle être interrompue, les modalités d'action de l'ADEME et d'évaluation de ses interventions étant désormais clairement précisées dans le contrat d'objectifs signé avec l'État.

D. LA POLITIQUE DE L'ÉNERGIE HORS CRÉDITS BUDGÉTAIRES

La politique énergétique représente environ 53 % des crédits inscrits au budget de l'Industrie en dépenses ordinaires et crédits de paiement, principalement en raison de l'importance des subventions à Charbonnages de France et au Commissariat à l'énergie atomique.

Cependant, la politique du gouvernement en ce domaine ne saurait se restreindre aux crédits budgétaires.

Elle concerne également la tutelle sur les établissements et grandes entreprises du secteur, ainsi que la participation au marché unique de l'énergie.

1. La situation des principaux opérateurs

- Electricité de France

Le contrat de plan signé le 5 janvier 1993 entre l'État et EDF pour la période 1993-1996 a défini les relations entre les pouvoirs publics et EDF.

Le double objectif de diminution du prix de l'électricité (- 1,25 % par an) et de désendettement de l'entreprise (- 40 milliards de francs en quatre ans) a pour objet de permettre à EDF de proposer un prix du Kwh durablement compétitif, ainsi que d'aborder la période de redémarrage des investissements, après l'an 2000, avec une capacité d'endettement restaurée.

Les autres objectifs fixés par le contrat de plan concernent les domaines de l'environnement, de l'international (prises de participation, conseils et services, exportations) du développement commercial et de la politique sociale.

À la fin de 1994, le désendettement cumulé a atteint 37,2 milliards de francs, dont 18,3 milliards au titre de 1994, ce qui représente 7 milliards de plus que l'objectif du contrat de plan. Ce résultat positif s'explique notamment par des investissements en baisse par rapport aux prévisions, en raison de reports d'équipements de production et de retards dans les procédures d'autorisations de lignes de transport.

Situation financière d'Électricité de France

Votre rapporteur se félicite du maintien du résultat bénéficiaire d'EDF, du désendettement continu de l'entreprise et de la très nette diminution de ses charges financières, désormais sensiblement inférieures à 10 % du chiffre d'affaires.

Toutefois, il regrette que, compte tenu de cette bonne situation, l'État ait choisi d'opérer cette année encore plusieurs prélèvements sur la trésorerie d'EDF. Il estime que de telles ponctions devraient pour le moins être programmées à l'avance et, en tout état de cause, ne pas gêner EDF dans son effort de désendettement, nécessaire pour préparer le remplacement et le démantèlement des centrales nucléaires en cours de fonctionnement.

Aussi, votre rapporteur souhaite vivement que la négociation du nouveau contrat de plan entre l'État et EDF permette de clarifier la situation et de fixer les règles des relations financières entre l'État et l'entreprise.

De même, ce nouveau contrat de plan devra préciser la politique d'EDF dans le domaine international (augmentation ou non des exportations et des prises de participation) et vis-à-vis des grands industriels français (accord récemment conclu avec Elf-Aquitaine, prises de participation au capital d'Usinor-Sacilor, de Péchiney, éventuellement de Renault). Enfin, ce contrat devra permettre à EDF de s'adapter aux évolutions européennes et mondiales du marché de l'électricité et préparer la mise à jour des textes et structures qui régissent l'entreprise depuis 1946.

- Gaz de France

Un contrat d'objectifs a également été signé avec Gaz de France pour la période 1994-1996. Il marque la volonté de l'État et de l'établissement de poursuivre dans la voie initiée par le premier contrat d'objectifs. En ce sens, il a une double ambition : faire de GDF l'un des premiers opérateurs mondiaux et, parallèlement, renforcer la qualité du service public en France.

Ses objectifs sont la poursuite du désendettement, à hauteur de 8,4 milliards de francs, l'amélioration de la productivité et le développement des investissements internationaux.

On rappellera qu'au cours de la période 1991-1993, l'endettement de Gaz de France s'est réduit de 7 milliards de francs, soit un montant supérieur à l'objectif de 4 milliards de francs du premier contrat d'objectifs signé avec l'État.

En 1994, le désendettement s'est poursuivi. Il a été de 2,6 milliards de francs, au lieu du montant de 2,8 milliards inscrit dans le contrat d'objectifs, principalement du fait de la baisse du chiffre d'affaires de 2 milliards enregistrée en 1994.

Cependant, depuis 1991, Gaz de France connaît un résultat bénéficiaire et, en conséquence, depuis 1992, l'État perçoit un dividende sur ce résultat. En outre, Gaz de France s'est acquitté pour la première fois en 1994 de l'impôt sur les sociétés.

Situation financière de Gaz de France

La part du gaz dans le bilan énergétique de la France a progressé lentement au cours des dernières années, s'établissant à environ 13 % aujourd'hui, soit à un niveau moindre que dans les autres pays d'Europe de l'Ouest où elle atteint en moyenne 20 %.

La poursuite de cette progression paraît souhaitable en raison, d'une part, des qualités environnementales du gaz et, d'autre part, du nécessaire rééquilibrage de la part relative de l'électricité et des autres énergies.

En outre, certains nouveaux débouchés, encore peu développés, apparaissent favorables au gaz : la cogénération, les centrales à cycles combinés et les véhicules au gaz naturel.

On observera toutefois qu'une évolution de la demande de gaz naturel se heurte à un double obstacle :

? l'incertitude qui pèse actuellement sur l'offre et notamment sur la stabilité politique et la capacité d'investissement des principaux fournisseurs (Russie et Algérie),

? la faible densité de peuplement du territoire français qui rend la desserte en gaz de certaines zones impossible à des prix compétitifs.

Votre rapporteur se félicite que, dans ce contexte, la situation financière de Gaz de France se soit sensiblement améliorée. Il constate cependant qu'elle reste en grande partie liée à l'évolution incertaine de ses principaux fournisseurs et des perspectives de déréglementation du marché européen.

Par ailleurs, comme pour EDF, bien que dans une moindre mesure, votre rapporteur regrette les ponctions supplémentaires opérées par l'État sur Gaz de France. Il souhaiterait qu'à tout le moins, ces prélèvements soient programmés et les relations financières avec l'État plus précisément définies.

Les prélèvements de l'État sur EDF et GDF

Les règles qui régissent la rémunération de l'État par EDF et GDF

Le décret n° 56-443 du 14 mai 1956 modifié relatif aux dotations en capital attribuées à EDF et à GDF fixe le principe du versement à l'État d'un intérêt sur les dotations en capital et d'un dividende, dont les taux et montants sont fixés par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie, du budget et de l'industrie.

Le montant maximal du taux d'intérêt fixé à 8 % en 1986 est déterminé chaque année par arrêté interministériel.

Le dividende est prélevé sur les bénéfices nets de chaque exercice et peut faire l'objet de versements d'acomptes sur la base des résultats prévisionnels.

Le contrat de plan signé entre EDF et l'État et le contrat d'objectifs entre GDF et l'État fixent à 5 % le taux d'intérêt sur les dotations en capital et conviennent que la rémunération complémentaire sera déterminée en fonction des résultats de l'entreprise. Le taux de cette rémunération n'est pas précisé dans les contrats. La tendance a, jusqu'à présent, conduit à se rapprocher de la pratique de la plupart des sociétés cotées qui, en France, distribuent jusqu'à 30 % du bénéfice réalisé, après impôt sur les sociétés. Toutefois ce taux peut être modulé chaque année.

Les niveaux des prélèvements pour les années 1993 et 1994 s'établissent comme indiqué dans le tableau ci-après :

Ainsi, EDF et GDF sont des entreprises qui gagnent de l'argent, paient des impôts (pour l'impôt sur les sociétés, seul GDF a épuisé son report à nouveau négatif) et rémunèrent leur "actionnaire" avec des taux s'établissant entre 30% et 56% pour les exercices 1993 et 1994.

Les prélèvements exceptionnels décidés en 1994

Au cours de 1994. diverses décisions ont accru le poids des prélèvements sur EDF et dans une moindre mesure, sur GDF :

- création d'une nouvelle taxe hydraulique pour financer un fonds d'infrastructures de transports (1 milliard de francs) ;

- participation d'EDF à une société destinée à financer la réalisation du canal Rhin-Rhône,

- majoration des dividendes d'EDF et de GDF pour compenser des exonérations de charges publiques sur La Poste et le CNES.

- majoration de TVA sur les abonnements compensée par une baisse correspondante des tarifs hors taxes (2 milliards de francs pour EDF et 500 millions pour GDF),

- mobilisation d'EDF pour financer des aménagements hydrauliques d'intérêt énergétique accessoire (450 millions de francs au profit de Voies navigables de France) .

Par ailleurs, les projets de loi de finances rectificative pour 1995 et de loi de finances pour 1996, actuellement en cours de discussion, prévoient chacun un prélèvement supplémentaire sur EDF, de l'ordre de 500 millions de francs.

Les politiques de diversification d'EDF et de GDF

Le cadre des politiques de diversification

Un protocole d'accord conclu en janvier 1990 avec l'État et le contrat de plan 1993-1996 ont défini le cadre dans lequel EDF peut diversifier ses activités, c'est-à-dire pri ncipalement à condition que "ce développement s'effectue dans le respect de l'environnement industriel et que les activités correspondantes soient gérées de façon transparence et sans subvention en provenance de l'activité principale".

Pour GDF, le contrat d'objectif 1994-1996 prévoit "le développement par GDF de services adaptés à l'évolution de la demande des consommateurs, dans le cadre d'un dispositif garantissant qu'il ne bénéficiera pas, face à la concurrence, d'avantages indus liés à sa mission de service public, aux droits exclusifs qui y sont affectés et au statut d'établissement public" .

Deux difficultés sont survenues dans l'application de ces dispositions.


• Une difficulté juridique liée à la compatibilité entre la diversification et le principe de spécialité attaché à l'activité de l'établissement public,


• Une difficulté relative à l'exercice de la concurrence, les entreprises de certains secteurs (traitement des déchets, éclairage public, cartographie, télésurveillance, réseaux câblés et ingénierie) s'étant élevées contre des pratiques jugées déloyales.

L'action du ministère de l'Industrie

Pour faire face aux difficultés et répondre aux préoccupations exprimées par les entreprises des secteurs concurrentiels, le ministère de l'Industrie a entrepris plusieurs démarches :

- il a demandé à l'inspection générale de l'Industrie et du commerce un rapport sur la politique de diversification d'EDF et de GDF, rendu public en février 1994 ("rapport Guillet") ;

- il a saisi le Conseil d'État d'une demande d'avis sur la conformité des activités de diversification aux dispositions législatives et réglementaires régissant les établissements et notamment au principe de spécialité ;

- il a demandé la saisine du Conseil de la Concurrence, afin de préciser les principes à respecter par EDF et GDF dans la mise en oeuvre de leur diversification, pour que le jeu normal de la concurrence dans les secteurs concernés soit préservé ;

- une "table ronde" s'est tenue le 3 mars 1994 avec les organisations professionnelles qui avaient exprimé leur préoccupation, suivie d'une deuxième réunion, le 19 juillet, qui a permis de faire la synthèse des avis du Conseil de la Concurrence et du Conseil d'État, ainsi que des propositions faisant l'objet d'un rapport de la Cour des Comptes ;

- -enfin, le Ministre a installé, le 3 février 1995, un "Observatoire de la diversification", qui a reçu pour fonction d'examiner les conditions d'intervention des deux établissements et de leurs filiales sur les marchés concurrentiels. Cet observatoire comprend quatre représentants de l'administration, huit représentants des professions et deux représentants d'EDF et de GDF. Un haut fonctionnaire du ministère de l'Industrie a reçu mission d'en assurer le secrétariat général.

Les grandes orientations qui se dégagent des avis émis par le Conseil d'État et le Conseil de la Concurrence peuvent être résumées ainsi :

- le principe de spécialité ne s'oppose pas à ce que l'établissement se livre à d'autres activités économiques, moyennant toutefois deux conditions : d'une part, que ces activités soient "le complément normal de sa mission statutaire principale ; d'autre part, qu'elles soient à la fois d'intérêt général et directement utiles à l'établissement" ;

- les difficultés principales de la diversification résident dans le risque de distorsion de concurrence, du fait de l'existence de liens étroits entre l'établissement et ses services et filiales, qui sont susceptibles de bénéficier, pour les activités de diversification, de conditions propres à l'exercice de la mission du service public. Afin d'éviter de telles difficultés, une "séparation étanche entre activités liées au monopole et celles relatives à la diversification s'impose".

La situation actuelle

Dans le respect de ces principes, le retrait d'EDF des secteurs identifiés par le Conseil d'État comme incompatibles avec le principe de spécialité a été engagé : ceci concerne la télésurveillance, la cartographie, la domotique, la collecte et la mise en décharge des déchets.

Dans le cas de GDF, la holding COFATECH est appelée à regrouper toutes les filiales exerçant leur activité principale dans le domaine thermique et climatique.

La mise en forme des engagements généraux d'EDF et de GDF et des engagements particuliers, pour ce qui concerne les secteurs à intervention limitée, a été discutée avec les organisations professionnelles, sous l'égide de l'administration. Un document de cadrage a ainsi été établi pour chaque établissement et une lettre d'accompagnement de ce document, signée des Ministres chargés de l'économie et de l'industrie, a été adressée le 26 avril 1995 aux présidents des deux entreprises. Ces documents sont destinés à être intégrés au sein des prochains contrats de plan et d'objectifs, respectivement, d'EDF et de GDF.

Le Ministre de l'Industrie a réuni l'Observatoire de la diversification en septembre 1995, et a dressé à cette occasion un premier bilan des engagements des établissements. Il a pris acte d'une évolution positive du dossier et fixé un certain nombre d'objectifs complémentaires qui devront être concrétisés d'ici à la prochaine réunion l'observatoire, qui doit se tenir en mars 1996.

2. La déréglementation du marché unique de l'énergie.

L'énergie est devenue un enjeu de la construction européenne à partir de 1987. Afin de tirer le meilleur parti des complémentarités des différents systèmes énergétiques européens, la Commission des communautés européennes a alors engagé des travaux visant à développer les échanges énergétiques en s'appuyant sur les opérateurs. Cette première approche a abouti à l'adoption de trois directives relatives d'une part, à la transparence des prix de l'électricité et du gaz et, d'autre part, au transit sur les grands réseaux.

Depuis 1991, la Commission a adopté une deuxième approche visant à appliquer plus fermement les règles de concurrence communautaires et donc à s'attaquer aux monopoles du secteur énergétique. C'est à cette fin qu'ont été présentées, le 22 janvier 1992, deux propositions de directives, qui prévoient :

- la suppression des monopoles de production, de transport et de distribution de l'électricité et du gaz ;

- l'introduction de la séparation comptable entre ces trois activités ;

- - l'accès des tiers aux réseaux électriques et gaziers (ATR). Ce système serait, dans un premier temps, réservé aux grands consommateurs de gaz et d'électricité, afin de leur permettre de se fournir auprès du producteur de leur choix, à charge pour le réseau d'acheminer l'énergie moyennant péage.

Or, ce dispositif se heurte aux grands acquis de la politique énergétique française, et notamment à la sécurité des approvisionnements, à l'obligation de fourniture, à la protection du consommateur et à l'efficacité des systèmes électriques et gaziers.

C'est pourquoi, la France a fermement manifesté son opposition à ces textes. Elle a été soutenue par l'Espagne, l'Italie et les pays du Bénélux.

Un rapport adopté par le Parlement européen à l'automne 1993 a alors conduit la Commission à modifier les directives. Toutefois, ainsi que les résolutions adoptées par le Sénat et l'Assemblée nationale l'ont montré, ces propositions de directives restent inacceptables.

Au premier semestre 1994, une proposition alternative au système de l'ATR a été élaborée. Elle repose sur le concept d'"acheteur unique", selon lequel l'opérateur chargé du monopole du réseau organise la concurrence pour les nouveaux producteurs d'électricité qui ne peuvent contracter directement avec les consommateurs.

Ce concept permet d'ouvrir les marchés nationaux à plus de concurrence tout en excluant l'ATR et en préservant les missions d'intérêt général que les États confient aux opérateurs du secteur électrique, telles que la sécurité d'approvisionnement, la péréquation tarifaire, l'obligation de fourniture et la protection de l'environnement.

Votre rapporteur a soutenu cette nouvelle proposition et rappelle qu'il estime fondamental de maintenir la qualité et la sécurité du système électrique et gazier français. Aussi, il s'est félicité des positions prises par le gouvernement face aux autorités communautaires sur ce sujet.

Le Conseil des ministres de l'énergie du 1er juin 1995 a permis une avancée significative. Il a admis le principe de la coexistence de l'ATR avec le système de l'acheteur unique. Il a également reconnu la légitimité des obligations de service public et de la programmation à long terme dans le secteur électrique, dans le respect du principe de subsidiarité.

Votre rapporteur souhaite vivement que la prochaine réunion des ministres de l'énergie, le 14 décembre 1995 à Madrid, permette de consolider cette avancée et que la conception du service public à la française serve de guide à une évolution progressive et maîtrisée du cadre énergétique européen.

II. LA POLITIQUE DES MATIÈRES PREMIÈRES

A. LES ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE FRANÇAISE DES MATIÈRES PREMIÈRES

La politique du gouvernement dans le domaine des matières premières part du constat selon lequel la France est un pays pauvre en ressources minérales.

Elle dépend en effet des importations pour 55 % de ses besoins, la production nationale en couvrant seulement 15 % et le solde étant assure par le recyclage.

En outre, les industries françaises sont souvent dépendantes d'un très petit nombre de fournisseurs, situés dans des zones dont la stabilité politique et économique est incertaine.

Dans ce contexte, le principal atout de la France réside dans l'existence d'opérateurs miniers et métallurgiques performants, pourvoyeurs de nombreux emplois.

Les orientations de la politique française des matières premières comportent trois aspects :

- Le développement des industries des matières premières et des matériaux de construction.

L'action des pouvoirs publics vise essentiellement à réunir les conditions d'un développement compétitif de ces industries. À cet effet, trois priorités ont été définies :

? la promotion de règles de commerce international loyales, en particulier dans le cadre de la politique de défense commerciale communautaire ;

? la valorisation du sous-sol national dans le respect de l'environnement, qui a pour effet de créer des richesses et des emplois et de fixer sur le territoire national les industries transformatrices, notamment grâce à la Promotion de l'économie et du recyclage ;

? le soutien de la recherche-développement et de la normalisation, les moyens nationaux de la recherche publique étant complétés par les fonds du Programme communautaire de recherche et de développement.

- La gestion des risques d'approvisionnement

La constitution d'un stock national de précaution fut décidée dans son principe en 1975, la vocation de ce stock étant de prendre temporairement le relais d'approvisionnements extérieurs défaillants et d'autoriser ainsi la poursuite de l'activité des secteurs industriels prioritaires au regard de la vie économique de la Nation ou de sa sécurité.

En 1980, un dispositif complet a été mis en place avec la création de la Caisse française des matières premières (CFMP) chargée de la gestion du stock.

Or, l'évolution rapide des marchés internationaux des métaux et des relations entre les consommateurs et les producteurs, les remarques formulées par les industriels concernés et le coût budgétaire de la gestion du stock, soit environ 100 millions de francs par an, ont montré l'inadaptation du mode de fonctionnement de la CFMP et du stock national de précaution.

Aussi, il a été décidé à la fin de 1992 :

? de confier progressivement aux industriels la responsabilité des approvisionnements en métaux en cas de crise ;

? de recentrer le rôle du ministère sur les travaux de vigilance et d'alerte par le biais de l'Observatoire des matières premières ;

? de céder peu à peu le stock de la CFMP afin d'en réduire le coût budgétaire.

Par la suite, à la fin de 1993, il a été décidé que l'ensemble du stock serait cédé.

- La coopération bilatérale et multilatérale

La particularité des matières premières minérales résulte du fait que, souvent, elles constituent une source essentielle de richesse, d'emploi et de développement pour les pays du Sud, et plus récemment de l'Est.

Une politique de coopération avec ces pays peut avoir plusieurs effets bénéfiques : contribuer durablement à leur développement, fiabiliser les approvisionnements des industries françaises, stabiliser les marchés.

À cet effet, la politique menée par le gouvernement comporte un double aspect :

? bilatéral, notamment sous forme d'assistance technique, pour la formation et l'expertise géologique ;

? multilatéral , dans le cadre des accords et organismes qui oeuvrent pour la stabilisation et la transparence des marchés et par le biais de formations spécialisées dans les Ecoles des mines.

B. LES MOYENS BUDGÉTAIRES

Jusqu'à cette année, les crédits consacrés aux matières premières concernaient, pour l'essentiel, deux organismes : le Bureau de recherches géologiques et minières, à la fois organisme de recherche, bureau d'étude et opérateur minier, et la Caisse française des matières premières, chargée de la gestion du stock stratégique.

Dans le projet de loi de finances pour 1996, seul le BRGM est doté de crédits.

1. Le Bureau de recherches géologiques et minières

Ayant des compétences et des missions très diversifiées, le BRGM a dû se restructurer. Il a commencé par regrouper ses activités autour de quatre pôles :

- la recherche scientifique , en particulier dans le domaine de l'environnement et des eaux souterraines (une centaine de chercheurs travaillent, actuellement, sur un peu plus de 50 projets relevant de 8 grands domaines, la plupart des projets étant financés par des organismes extérieurs).

- le service public , avec notamment la charge du service géologique national, mais également la responsabilité de missions en matière de pollution du sol et du sous-sol et de traitement des sites et des déchets ;

- le groupe minier , qui permet à la France de conserver une compétence en matière de prospection et d'exploitation minière ;

- les activités commerciales et de services , destinées en particulier à développer l'expérimentation sur le terrain des résultats de l'activité scientifique.

Puis, conformément au rapport conjoint du conseil général des mines et de l'Inspection générale des finances sur la réorganisation des activités du BRGM, deux évolutions nouvelles ont été engagées :

- la finalisation des activités commerciales pour les services rendus aux collectivités locales et aux industriels : la création dune filiale à 100 % dénommée ANTEA en a été la traduction ; au mois de juillet 1995, un accord a été signé avec la société hollandaise Heidemij qui a pris une participation de 35 % du capital et pourra prendre la majorité d'ici 3 à 5 ans ;

- la constitution d'une société indépendante dénommée La Source chargée de la gestion des activités minières, en association avec un partenaire de référence : aucune société française ne s'étant montrée intéresse, des négociations avec des groupes miniers étrangers ont été engagées. Un accord a été signé avec le groupe minier australien Normandy Poseidon Limited qui de 40 % du capital aujourd'hui, devrait porter sa participation à 60 % dans les prochains mois.

Dans ce contexte, les crédits budgétaires inscrits pour le BRGM en 1996 s'élèvent à 352,2 millions de francs dont 207,2 au titre de la recherche, 110 au titre de sa mission de service public et 35 pour encourager ses investissements miniers.

Votre rapporteur constate que cette dotation poursuit en 1996 son mouvement progressif de diminution. Il se félicite que cette évolution se soit accompagnée d'une véritable réforme en profondeur du BRBM dont les derniers aspects lui paraissent très positifs.

2. La Caisse française des matières premières

Aucune dotation budgétaire n'est affectée à la CFMP en 1996 alors que ces crédits s'élevaient à 49 millions de francs en 1995 et 75 millions de francs en 1994.

Cette suppression des crédits traduit l'achèvement de la nouvelle orientation adoptée pour le stockage des matières premières stratégiques.

Toutefois, votre rapporteur rappelle que l'endettement de la Caisse, bien qu'en forte diminution, reste important, de l'ordre de 750 millions de francs. La disparition éventuelle de la CFMP au cours des prochains mois entraînera inévitablement une reprise de cette dette par l'État.

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