II. LES RÉFORMES DÉCIDÉES PAR LE GOUVERNEMENT

A. LES MESURES STRUCTURELLES

1. L'intégration des régimes spécifiques de prestations familiales

Outre celui des agents de l'État il existe un certain nombre de régimes dits "d'employeurs" : historiquement, ce turent les premiers régimes de prestations familiales constitués lorsque certains employeurs ont établi des systèmes de protection sociale propres à leurs secteurs d'activité. L'article L. 212-1 du code de la sécurité sociale définit la dérogation au régime général qui autorise ces régimes spécifiques à se perpétuer.

Les employeurs gestionnaires de ces régimes versent à la CNAF une contribution calculée par différence entre les prestations séries à ces Personnels et les cotisations qu'ils auraient normalement versées à la CNAF après déduction des dépenses d'action sanitaire et sociale et des frais de gestion supportés pour le service de ces prestations.

Depuis le 1er janvier 1994 la dérogation de l'article L. 212-1 est limitée aux seules administrations de l'État à la SNCF, à l'EDF-GDF et à la RATP La période transitoire avant réintégration dans le régime général ouverte à compter du 1er janvier 1991 pour quelques établissements publics (notamment le CEA et la Banque de France) a expiré le 31 décembre 1993.

Pour achever l'universalité des modalités de gestion et de versement des prestations familiales, le Gouvernement a décidé d'aligner les taux de cotisation de l'État et de ces entreprises publiques sur les taux applicables à l'ensemble des entreprises, et de transférer progressivement la gestion des prestations familiales à la CNAF.

Cette mesure s'appliquera dès 1996 aux entreprises publiques et à Partir de 1997 à l'État. Son rendement par la branche famille est évalué à 700 millions de francs en 1996 et 1.7 milliards de francs en 1997.

2. La rationalisation des modalités d'attribution des prestations familiales

Les prestations familiales sous conditions de ressources sont aujourd'hui attribuées sans tenir compte de l'ensemble des revenus de remplacement, notamment les indemnités versées en cas de maternité, et les rentes d'accidents du travail. Un récent rapport du Comité central d'enquête sur le coût et le rendement des services publics (2 ( * )) a souligné les incohérences et finalement, les injustices liées à la variété des modes de calcul des ressources.

Le Gouvernement a donc décidé d'intégrer ces revenus de remplacement dans l'évaluation des ressources des ménages bénéficiaires de ces prestations, à compter du 1er juillet 1996.

Par ailleurs, les plafonds de ressources de ces prestations seront revalorisés, à compter du 1er janvier 1996 dans les mêmes conditions que la base mensuelle des allocations familiales.

Enfin, le délai de prescription pour l'attribution des prestations familiales, qui varie actuellement en fonction des prestations servies, sera fixé de façon uniforme à six mois.

Le rendement de cette mesure est estimé à 600 millions de francs en 1996 et à 1,1 milliard de francs en 1997.

Votre rapporteur estime que cette harmonisation des règles d'attribution des prestations familiales devra également s'accompagner de la simplification de celles-ci. Actuellement, la CNAF doit servir 24 prestations différentes, dont certaines sont redondantes, et gérer pour ce faire un ensemble de 15.000 règles de droit.

3. La fiscalisation des allocations familiales

Les prestations familiales sous conditions de ressources se sont beaucoup développées depuis deux décennies. Toutefois, les prestations sans condition de ressources, dont les plus importantes sont les allocations familiales servies à toutes les familles en fonction du nombre d'enfants, représentent encore 57,2 % du total des prestations familiales.

Le Gouvernement, dans un souci d'équité, a décidé de soumettre ces prestations familiales sans conditions de ressources à l'impôt sur le revenu en 1997. Cette mesure modifie sensiblement la logique des allocations familiales en les assimilant à des revenus de remplacement, alors qu'il semble plus exact de les considérer comme des compensations de charges.

Elle est toutefois acceptable dans la mesure où le Gouvernement a veillé à l'assortir d'une triple condition :

- la fiscalisation des prestations familiales sans condition de ressources s'intégrera dans une réforme d'ensemble de l'impôt sur le revenu qui l'adaptera plus justement aux capacités contributives réelles ;

- des dispositions spécifiques en faveur des familles modestes et des familles nombreuses seront prises dans le cadre de cette réforme de l'impôt :

- le solde des recettes supplémentaires générées par cette fiscalisation sera intégralement affecté à la branche famille.

Le produit attendu de cette mesure pour 1997 est estimé à 6,9 milliards de francs.

Politique familiale et redistribution

Le double jeu des prestations familiales et du quotient familial modifie, de façon significative le revenu disponible des familles. Mais leur combinaison introduit aussi un certain nombre de distorsions.

Impact de la politique familiale sur le revenu disponible (en francs)

Salaire net annuel (en F)

Source : Direction de la Prévision, bureau des études fiscales

Le graphique ci-dessus montre l'impact de la politique familiale (prestations et quotient) sur le revenu disponible dans plusieurs cas de figure. La partie en gras sur les courbes correspond à la zone de revenu où se situent 80 % des familles.

Le graphique se lit de la façon suivante une personne seule avec un enfant et percevant un salaire net annuel de 227 745 francs va bénéficier d'un revenu disponible "supplémentaire" d'environ 20.000 francs (sous forme de prestations familiales ou d'un allégement d'impôt dû au quotient).

Cette somme est pratiquement la même que celle dont bénéficie une personne seule avec un enfant, percevant un revenu annuel net de 40.665 francs. Dans le premier cas ces 200.000 francs correspondent à l'application du quotient familial Dans le second cas ils proviennent du versement des prestations familiales,

Ce graphique fournit plusieurs enseignements


• la politique familiale apporte une aide qui augmente de façon significative avec le nombre d'enfants.


•à salaire net équivalent, la politique familiale a davantage d'impact sur le revenu disponible d'une personne seule avec un enfant que sur celui d'un couple marié avec un enfant. C'est là l'effet de la demi-part supplémentaire dont bénéficient les personnes seules avec un enfant ;


•quel que soit le nombre d'enfants, le montant de l'aide commence par diminuer au fur et à mesure que le revenu s'élève (aides sous condition de ressources), puis augmente (effet du quotient familial) et enfin se stabilise (plafonnement de ce même quotient).

On peut ainsi identifier trois grandes catégories de familles


•celles à revenus modestes, qui perçoivent des prestations soumises à conditions de ressources ;


•celles à revenus élevés, qui bénéficient fortement du quotient familial et de la non imposition des prestations familiales non soumises à condition de ressources (allocations familiales. AGED, APE) ;


•celles ont revenus intermédiaires, pour lesquelles les effets du quotient familial et des prestations familiales s'équilibrent globalement

B. LES MESURES D'ÉCONOMIES

1. Le gel de la base mensuelle des allocations familiales en 1996

La situation lourdement déficitaire de la branche famille rend nécessaire de stabiliser en 1996 le montant des prestations familiales à leur niveau de 1995.

La base mensuelle qui sert de référence à leur calcul ne sera donc pas revalorisée l'an prochain.

Il s'agit d'une mesure provisoire de sauvegarde de la branche famille. Au 1er janvier 1997 les prestations familiales seront à nouveau revalorisées en fonction de l'évolution prévisionnelle des prix.

L'économie induite par cette mesure est estimée à 2.6 milliards de francs en 1996 et 2.8 milliards de francs en 1997.

2. Le recentrage de l'allocation pour jeune enfant

L'allocation pour jeune enfant (APJE) dont le montant s'élève à 955 francs par mois, est actuellement versée, à compter du premier jour du mois civil suivant le troisième mois de la grossesse :

- jusqu'au troisième mois après la naissance à l'ensemble des ménages, quel que soit leur revenu.

- jusqu'aux trois ans de l'enfant, si les ressources du foyer ne dépasse pas un plafond déterminé en fonction de la situation familiale.

Cette allocation, principalement destinée à aider les familles modestes à faire face aux frais d'accueil d'un nouvel enfant, sera désormais réservée aux ménages dont le faible niveau de revenus rend nécessaire une telle aide.

Ainsi, pour les ménages ayant deux enfants à charge, l'allocation sera accordée à ceux dont les revenus n'excèdent pas 172.000 F par an.

L'économie résultant de cette mesure est estimée à 600 millions de francs en 1996 et 1.2 milliards de francs en 1997.

3. La rationalisation des aides au logement

La CNAF assure le versement de l'allocation de logement familial et contribue au financement des aides personnalisées au logement versées par le Fonds National de l'Habitat.

Ces allocations sont aujourd'hui calculées sans tenir compte de l'ensemble des revenus de remplacement, notamment les indemnités versées en cas de maternité, les rentes d'accidents du travail et certains abattements liées à des exonérations fiscales.

Ces différents abattements conduisent à des situations inéquitables dans la mesure où à des niveaux de ressources identiques, les allocataires perçoivent des prestations différentes.

Ces revenus seront intégrés dans le calcul de ces allocations à compter du 1er juillet 1996, tandis que, parallèlement, la participation minimale à l'effort de logement demandée aux familles sera réévaluée.

L'économie liée à cette mesure est estimée à 1.2 milliards de francs en 1996 et 1.2 milliards de francs en 1997.

Tableau récapitulatif des mesures d'effet immédiat pour la branche famille

* (2) "Les modes d'évaluation des conditions de ressources appliquées pour l'attribution de certaines prestations sociales" CCERSP - août 1995

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page