Article 5 - Prélèvement exceptionnel sur l'excédent de la taxe dite "taxe sur les grandes surfaces"

Commentaire : Cet article vise à opérer un prélèvement exceptionnel de 680 millions de francs sur le fonds alimenté par la taxe sur les grandes surfaces.

L'article 3 (2°) de la loi du 13 juillet 1972 a mis en place au profit des artisans et commerçants âgés un régime dénommé initialement "aide spéciale compensatrice". Le financement de ce régime a été modifié à plusieurs reprises. Le système actuel repose sur une ressource unique, la taxe sur les grandes surfaces, et vise deux objectifs : financer l'indemnité de départ allouée aux artisans et commerçants âgés et subsidiairement alimenter le fonds d'intervention pour la sauvegarde, la transmission et la restructuration des activités commerciales et artisanales (FISAC) conformément aux dispositions de l'article 4 de la loi n° 89-1008 du 31 décembre 1989.

I. LA TAXE SUR LES GRANDES SURFACES ET LE FINANCEMENT DE L'INDEMNITÉ DE DÉPART DES COMMERÇANTS ET ARTISANS AGES

Instituée par la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972, la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat dite "taxe sur les grandes surfaces" a été réformée à plusieurs reprises. Elle est actuellement régie par les dispositions de l'article 86 de la loi de finances pour 1995 et par le décret d'application n° 95-85 du 26 janvier 1995.

? Le régime de la taxe

a) L'assiette : les locaux destinés à la vente au détail des établissements ouverts à partir du 1er janvier 1960 et dépassant 400 m 2 et dont le chiffre d'affaires annuel est au moins égal à 3 millions de francs.

b) La taxe : le montant de la taxe est lié au montant du chiffre d'affaires annuel hors taxes réalisé au cours de l'année civile précédente.

Il existe depuis le 1er janvier 1995, trois tranches :

moins de 10.000 francs, 24 francs par m 2 :

plus de 80.000 francs, 83,50 francs par m 2 ;

entre 10 et 80.000 francs, le taux est déterminé par une formule mathématique permettant une progression linéaire du taux ce qui a pour effet de supprimer les effets de seuil.

Deux réductions cumulables de taux sont prévues :

30 % pour les professions requérant des superficies de vente anormalement élevées (automobiles, matériaux de construction...) ;

20 % pour les établissements de 400 à 600 m 2 lorsque le chiffre d'affaires annuel est au plus égal à 25.000 francs.

La taxe est déductible du résultat fiscal

d) Les modalités de la perception

L'ORGANIC est chargé du recouvrement de cette taxe. A ce titre, cet organisme procède aux affiliations des entreprises et assure le recouvrement de la taxe.

Les fonds collectés sont versés chaque quinzaine sur un compte ouvert dans les écritures de la Caisse des dépôts et consignations. Ils sont employés en SICAV de trésorerie de la Caisse et sont donc rémunérés à un taux proche du marché monétaire soit, actuellement, entre 6 % et 7 %. Pour l'année 1994, le produit de la taxe s'établit à 720 millions de francs. Les revenus des placements génèrent une somme de plus de 35,5 millions de francs. Le régime de l'indemnité de départ a donc bénéficié en 1994 de 755 millions de francs de ressources.

? Les objectifs de la réforme de 1995

a) Elle visait tout d'abord à simplifier et à augmenter le rendement de la taxe.

La simplifier puisque le dispositif ne comporte plus que trois taux au lieu de quarante-deux taux fixes au m 2 .

Le rendement de la taxe étant lié à la superficie, le nouveau mode de calcul est plus équitable ; en effet, jusqu'alors, la pression de la taxe était plus forte pour les établissements dont le chiffre d'affaires était le plus faible.

Enfin, le champ d'application de la taxe a été étendu en prévoyant que l'établissement est assujetti "quelle que soit la forme juridique de l'entreprise qui l'exploite". Cette disposition permet d'assujettir à la taxe les sociétés en nom collectif. Ces dernières estimaient ne pas être redevables de cette taxe en application de l'article L. 651-1 du code de la sécurité sociale.

A ce jour, on peut estimer le surplus de recettes à 200 millions qui s'ajoutent ainsi à un produit de la taxe de l'ordre de 650/700 millions de francs.

Le produit de la taxe 1995 est estimé au mois de novembre à 920 millions de francs, produits financiers compris (20 millions de francs environ).

b) Par ailleurs, il s'agissait de financer la modification du régime de l'indemnité de départ des commerçants et artisans âgés.

Initialement prévu par l'article 87 de la loi de finances pour 1995 annulé par le Conseil constitutionnel (DC n° 94-351 du 29 décembre 1994), la réforme a trouvé sa place à l'article 36 de la loi n° 95-95 de modernisation de l'agriculture.

La loi Royer a créé une indemnité de départ versée aux artisans et commerçants quand ces derniers cessent définitivement toute activité après l'âge de soixante ans ; l'article 36 de la loi de modernisation de l'agriculture élargit ce dispositif.

En effet, le nouveau système vise à accorder l'indemnité de départ aux commerçants et artisans qui, à la suite d'une initiative locale tendant à favoriser les mutations professionnelles dans le secteur, seraient conduits à cesser volontairement leur activité à partir de cinquante-sept ans révolus, lorsque cette cessation ne porte pas préjudice à la couverture des besoins de la population locale.

Cela permettra soit d'anticiper le départ en cas de difficulté, soit de faciliter la transmission et la modernisation de l'entreprise (référence à l'article 4 de la loi du 31 décembre 1989 relative au développement des entreprises commerciales et artisanales).

Le coût de ce nouveau dispositif a été évalué à 40 millions de francs.

II. LA MESURE PROPOSÉE

Depuis 1990, les comptes relatifs au produit de la taxe sont les suivants :

Le tableau ci-dessus montre que le compte géré par l'ORGANIC est structurellement excédentaire depuis plusieurs années ; le niveau annuel des dépenses reste largement inférieur à celui des recettes ce qui a permis la constitution d'un fonds de réserve. Au 13 novembre 1995, les réserves étaient de 975,45 millions de francs, et ce, compte tenu de deux prélèvements effectués en 1991 (1 milliard de francs) et 1993 (200 millions).

Cette situation résulte de deux phénomènes : la faiblesse des demandes relatives à l'Indemnité viagère de départ (IVD) et l'augmentation tendancielle du prélèvement sur les grandes surfaces.

? L'indemnité viagère de départ (IVD) créée par la loi Royer et modifiée par les articles 106 de la loi n° 81-1160 de finances pour 1982 et 36 de la loi n° 95-95 de modernisation de l'agriculture présentait les hypothèses suivantes d'évolution, établies en 1993 par le ministère de l'Économie et des finances.

Hypothèse d'évolution du nombre des artisans et commerçants indemnisés

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Or, à ce jour, l' IVD n'a pas atteint en volume et en valeur les hypothèses retenues. En effet, en 1994 le nombre de dossiers traités a été de 5.272 pour une somme de 384,18 millions et en 1995, le nombre de dossiers traités au 30 septembre est de 3.257 pour une somme de 325,14 millions de francs. Tendanciellement, le nombre de dossiers et de crédits dépensés baissent de 3,4 % par an.

Le versement de l'IVD est conditionné par la vente ou la location de fonds de commerce ; la situation économique actuelle du secteur ne facilite pas ces opérations, d'autant plus qu'elles interviennent dans le cadre des opérations de restructuration de l'artisanat et commerce (ORAC) qui intéressent des zones qui par nature, sont déjà en situation de fragilité économique.

De plus, la réforme introduite par l'article 36 de la loi de modernisation de l'agriculture et qui a élargit le champ d'application de l'IVD ou en prévoyant la revalorisation des plafonds de ressources et du barème de l'IVD, n'a pas provoqué un surplus de demandes essentiellement pour des raisons administratives. Il s'agit soit de la sortie tardive du décret d'application n° 95-1035 du 14 septembre 1995 (JO du 21 septembre 1995, p. 13857) pour ce qui concerne la revalorisation du plafond de ressources pour l'attribution de l'IVD et de la composition de la commission compétente ; soit de la non parution de l'arrêté fixant le nouveau barème de l'IVD et organisant un système de rééchelonnement des dettes ; la publication dudit arrêté est prévue pour janvier 1996.

? Le produit de la "taxe sur les grandes surfaces" augmente en moyenne de 8 à 10 % par l'an. L'augmentation du nombre et de la taille des grandes surfaces en France depuis plusieurs années explique sans aucun doute cette évolution. Par ailleurs, la modification introduite par l'article 86 de la loi n° 94-1352 de finances pour 1995 a simplifié mais surtout augmenté le rendement de ladite taxe à hauteur de 200 millions de francs, dont 40 millions de francs devaient servir à financer l'élargissement du champ d'application de l'IVD.

Dans ces conditions, ce sont plus de 200 millions de francs qui se sont retrouvés, à ce jour, inemployés puisque les 160 millions de francs restant sont en attente de l'arrêté régissant la revalorisation du barème de l'IVD et de la mise en place du rééchelonnement des dettes des commerçants et artisans. Les sommes ainsi perçues au 1er février 1995 sont donc venues abonder les réserves du compte ORGANIC de la façon suivante :

Le prélèvement exceptionnel de 680 millions de francs au profit du budget de l'État interviendrait sur ce solde disponible qui se chiffrerait alors à 295,45 millions et permettrait ainsi de faire face au versement de la dotation complémentaire au FISAC prévu par la loi de finances pour 1996, soit 130 millions de francs.

En 1996, le produit attendu est de 925 millions de francs auquel s'ajouteront 30 millions de francs de produits financiers. Les dépenses certaines sont estimées à 450 millions de francs. La mesure prévue par l'article 5 n'obérera donc, en rien, les capacités d'action du FISAC et le versement de l'IVD.

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

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