Article 25 - Modifications de la loi relative aux modalités des privatisations

Commentaire : le présent article modifie plusieurs dispositions de la loi relative aux modalités des privatisations. Il a un triple objet : il accroît certains droits attachés à l'action spécifique, il supprime la limitation des prises de participation étrangères, il étend aux opérations autres que de marché les avantages dont peuvent bénéficier les salariés.

I. LA MODIFICATION DES DROITS ATTACHÉS A L'ACTION SPÉCIFIQUE

L'article 10 de la loi du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations, modifiée par la loi de privatisation du 19 juillet 1993, a prévu que "si la protection des intérêts nationaux l'exige", une action ordinaire de l'État peut être transformée en une action spécifique, assortie de certains droits.

Cette transformation doit être prononcée par décret, celui-ci devant énumérer les droits attachés à l'action spécifique.

Les droits pouvant être attachés à une action spécifique sont, aux termes de l'article 10 de la loi du 6 août 1986, les suivants :

"1° L'agrément préalable par le ministre chargé de l'économie pour le franchissement, par une personne agissant seule ou de concert, d'un ou plusieurs des seuils fixés dans le décret mentionné au premier alinéa ci-dessus calculés en pourcentage du capital social ou des droits de vote ;

"2° La nomination au conseil d'administration ou de surveillance, selon le cas, d'un ou deux représentants de l'Etat désignés par décret et sans voix délibérative ;

"3° Le pouvoir de s'opposer, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, aux décisions de cession d'actifs ou d'affectation de ceux-ci à titre de garantie, qui sont de nature à porter atteinte aux intérêts nationaux. "

S'agissant de cette dernière catégorie, visée par le 1° du présent article, l'article premier du décret du 13 décembre 1993 pris pour l'application de la loi de privatisation du 19 juillet 1993, a prévu que "lorsque le décret instituant une action spécifique (...) attache à cette action le pouvoir de s'opposer aux décisions de cessions d'actifs ou d'affectation de ceux-ci à titre de garantie qui sont de nature à porter atteinte aux intérêts nationaux, ce décret détermine la liste des actifs concernés".

Or, à l'usage, il apparaît que certains actifs ne peuvent être facilement énumérés de manière exhaustive, alors qu'il est possible de les caractériser de manière générique.

C'est pourquoi, le présent article propose d'ajouter l'expression "certains types d'actifs" dans le texte du 3° du paragraphe I de l'article 10 de la loi du 6 août 1986.

En outre, il étend le contrôle de l'Etat aux actifs des filiales des sociétés concernées par l'action spécifique.

A ce jour, la seule action spécifique détenue par l'Etat est celle qui a été instituée par un décret du 13 décembre 1993 pour la Société Elf-Aquitaine. Dans ce décret, il est prévu qu' "il peut être fait opposition aux décisions de cession et d'affectation à titre de garantie des actifs dont la liste figure en annexe au présent décret". Cette liste énumère les actifs suivants : majorité du capital d'Elf-Aquitaine-Production, d'Elf-Antar-France, d'Elf-Gabon SA et d'Elf-Congo SA.

Dans la poursuite du programme de privatisation, l'institution d'une action spécifique au profit de l'Etat devrait intervenir pour des entreprises intervenant dans le domaine de l'armement. Les dispositions du présent article pourraient alors s'avérer très utiles.

II. LA SUPPRESSION DE LA LIMITATION DES PRISES DE PARTICIPATION ÉTRANGÈRES

Le 2° du présent article a pour objet de supprimer l'article 10-1 de la loi du 6 août 1986 qui limite les prises de participation étrangères -autres que communautaires- dans le capital des entreprises privatisées à un seuil de 20 % du capital de ces entreprises.

On rappellera que, dans le projet de loi de privatisation de 1993, il avait été prévu de supprimer cette limite de 20 %. Votre commission, saisie en premier lieu de ce projet de loi, avait alors approuvé cette mesure considérant qu' "aujourd'hui une telle limite parait assez artificielle, les moyens de la contourner étant nombreux". En outre, elle constatait que "l'internationalisation croissante des marchés en rend le maintien impossible" (1 ( * )) . Toutefois, l'Assemblée nationale avait ensuite souhaité rétablir cette limite.

Aujourd'hui, il apparaît avec évidence que cette limite doit être supprimée.

En effet, lorsque l'opération est réalisée selon les procédures du marché financier, la limite est inopérante dans la mesure où les investisseurs non communautaires peuvent acquérir librement les titres sur les marchés. Par ailleurs, lorsque l'opération a lieu de gré à gré, cette limite peut constituer un véritable handicap s'il n'y a qu'un petit nombre d'acquéreurs potentiels, pour l'essentiel non communautaires. Enfin, cette limite a fait l'objet de critiques répétées par les partenaires de la France au sein de l'OCDE.

Votre commission se félicite donc de cette mesure qu'elle avait déjà approuvée en 1993.

III. L'EXTENSION AUX OPÉRATIONS AUTRES QUE DE MARCHÉ DES AVANTAGES ACCORDÉS AUX SALARIÉS

Le 3° du présent article a pour objet d'étendre le système des avantages accordés aux salariés dans le cadre des opérations de privatisation.

En effet, conformément à l'article 11 de la loi du 6 août 1986, ces avantages ne peuvent actuellement s'appliquer que dans le cas de "cession d'une participation de l'État suivant les procédures du marché financier".

Or, les participations de l'Etat peuvent aussi être cédées hors marché, par appel d'offres ou de gré à gré, et, dans ce cas, les avantages dont peuvent bénéficier les salariés (attributions gratuites d'actions notamment) ne s'apppliquent pas.

Le présent article, amendé à l'initiative du gouvernement à Assemblée nationale, modifie cet état de fait et supprime la différence de traitement non justifiée dans l'association des salariés au processus de privatisation de leur entreprise.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 1 Rapport n°326 (1992-1993) de M. Claude Belot sur le projet de loi de privatisation.

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