Article 49 bis (nouveau) - Disposition relative au tableau d'amortissement des offres de prêts immobiliers

Commentaire : Inséré à l'initiative du rapporteur général de la commission des finances, M. Philippe Auberger, le présent article a pour objet de valider les offres de prêts au logement des particuliers dans la mesure où elles seraient contestées pour n'avoir pas mentionné l'échéancier des amortissements.

L'article L 312-8 du code de la consommation prévoit qu'une offre de prêt à un particulier doit préciser "la nature, l'objet, les modalités du prêt notamment celles qui sont relatives aux droits et conditions de mise à disposition des fonds ainsi qu'à l'échéancier des amortissements".

A propos de l'échéancier, la loi prescrit seulement que l'offre doit en préciser les modalités. Elle ne dit pas nécessairement qu'à ce stade, l'échéancier lui-même doive être mis à disposition.

Cependant, le texte de l'article L.312-8 paraît dans ces conditions difficile à appliquer, car que peut-on entendre par "modalités relatives à l'échéancier des amortissements" ? Cette expression peut signifier que l'établissement doit préciser, au stade de l'offre, si les remboursements seront mensuels ou trimestriels ou selon toute autre périodicité, mais aussi la répartition des paiements en capital et en intérêt selon ces périodes.

La plupart des établissements de crédit n'ont retenu que la première idée : les offres de prêt ont donc le plus souvent comporté la durée. la périodicité, le montant de l'échéance, sans préciser quelle serait la répartition des échéances en capital et en intérêts, et son évolution.

Ce n'est pas cette interprétation qu'a retenue la Cour de cassation dans deux arrêts de 1994 : l'un du 16 mars et le second du 20 juillet. La Cour a estimé le 16 mars que l'offre devait préciser "pour chaque échéance, la part de l'amortissement du capital par rapport à celle couvrant les intérêts." Selon cette interprétation, les établissements doivent, et auraient dû, produire dès le stade de l'offre un échéancier, détaillant pour chaque échéance, la répartition de la charge entre capital et intérêts.

Confirmant son interprétation le 20 juillet, la Cour a alors considéré que la loi était d'ordre public et que par conséquent son interprétation devrait s'appliquer à tous les prêts accordés depuis la loi "Scrivener" n° 79-596 du 13 juillet 1979. Le non-respect de cette disposition est une cause de nullité du contrat, et surtout entraîne la "déchéance du droit aux intérêts pour le prêteur"

L'immense majorité des emprunteurs n'a pas considéré que cette absence d'échéancier au moment de l'offre a pu leur provoquer un grief qui justifierait de leur part que soit mis un terme à leur contrat, que l'établissement doive leur rembourser les intérêts et qu'en contrepartie ces emprunteurs doivent rembourser le capital.

Cependant, dès lors que cette jurisprudence existe, elle peut intéresser des emprunteurs qui, proches ou non de l'échéance de leur prêt, pourraient le rembourser par anticipation sans pénalité, éventuellement pour en contracter un autre à un taux plus bas.

Les établissements de crédit font état d'une somme très élevée qui pourrait être en jeu, 2.000 milliards de francs, dont environ 1.600 milliards de francs de crédits à l'habitat. Il est en réalité très peu probable que des millions d'emprunteurs se précipitent dans un contentieux, pour obtenir, au bout d'une durée plus ou moins longue, un gain hypothétique.

Le risque ne doit cependant pas être négligé : le grief qui serait alors fait au système bancaire serait sans commune mesure avec celui subi par les emprunteurs.

L'Assemblée nationale a donc souhaité valider les prêts, uniquement dans la mesure où ils n'auraient pas respecté le 2° de l'article L.312-8 tel qu'interprété par la Cour de cassation.

Votre rapporteur n'est pas hostile à cette validation. Il ne serait en effet pas opportun que des emprunteurs qui n'ont pas subi d'inconvénients réels s'en découvrent subitement à la suite de cette jurisprudence.

Cependant, deux difficultés surgissent.

D'une part, la rédaction retenue par l'Assemblée nationale ne paraît pas opérante. Conformément à une réponse ministérielle publiée au J.O. du 5 avril 1982, il y est question d'échéances annuelles (or, les prêts à la consommation ou au logement ne comportent pas cette périodicité), du capital restant dû en fin d'année et du montant des intérêts et frais accessoires sur ensemble de la période du prêt. En réalité, la plupart des prêts accordés de 1979 à 1994 ne comportaient pas tout ou partie de ces trois éléments.

D'autre part, il convient de s'assurer, au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel en matière de validation législative, que l'intérêt général peut commander une telle validation. Il y a en effet d'un côté l'intérêt du système bancaire, de l'autre celui des emprunteurs, souvent des accédants à la propriété.

Afin de résoudre ces deux difficultés, votre commission préfère surseoir à sa décision.

Décision de la commission : votre commission a décidé de reporter à une date ultérieure sa décision sur le présent article.

Page mise à jour le

Partager cette page