II. LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Les conclusions de votre commission s'ordonnent autour de trois orientations principales :

* Votre commission vous propose de retenir le principe qui est au centre de la proposition de loi : la garantie, dans tous les cas, d'une possibilité d'appel des avis conformes faisant intervenir une instance régionale où l'État ne soit pas le seul à faire entendre sa voix.

Ce principe présente en effet deux avantages décisifs :

- il contribuera, même dans le cadre de la police des abords, où ne s'appliquent aucunes prescriptions particulières, à éclaircir les motifs des décisions contestées, qu'elles soient ou non confirmées, voire à dégager une « jurisprudence » : il tendra, en somme, à dissiper le mystère pour beaucoup impénétrable qui entoure les décisions des architectes des bâtiments de France, et par conséquent le soupçon d'arbitraire qui empoisonne, particulièrement dans le cas de la police des abords, la procédure de l'avis conforme ;

- il incitera, en tant que de besoin, les architectes des bâtiments de France à s'attacher à convaincre plutôt que de céder à la tentation d'imposer, ce qui replacera la procédure dans une perspective plus pédagogique et réduira les risques d'incompréhension et de conflit.

* Afin de renforcer ces avantages, votre commission vous propose de créer une unique « commission régionale du patrimoine et des sites », qui exercera l'ensemble des compétences actuellement dévolues à la COREPHAE et au collège régional du patrimoine et des sites créé par la loi de 1983, et sera également consultée en cas d'appel des avis conformes rendus dans le cadre des procédures instituées par les lois de 1913 et de 1962.

* Enfin, votre commission vous propose de ne pas modifier - sous réserve de l'intervention de la nouvelle commission régionale du patrimoine et des sites - la procédure prévue par la loi de 1983 pour le réexamen des avis conformes sur les demandes de travaux dans les ZPPAU, et de compléter par un dispositif identique les textes applicables aux abords et aux secteurs sauvegardés.

Ce choix la conduit :

- à laisser au préfet de région compétence pour émettre, éventuellement, un nouvel avis : l'attribution à la commission régionale de compétences à la fois consultatives et décisionnelles paraît peu indiquée, et le souci d'ouvrir un débat « régional » sur la politique de protection du patrimoine ne doit pas non plus conduire à substituer à la politique nationale du patrimoine 23 politiques régionales ;

- à ne pas ouvrir « l'appel » au pétitionnaire. Trois raisons conduisent en effet à écarter cette solution : la première est qu'elle contraindrait à allonger la procédure d'autorisation en ouvrant un nouveau délai de recours entre la transmission de l'avis et la décision de l'autorité compétente ; la deuxième est que l'éventuelle transformation, sur appel du pétitionnaire, d'un avis négatif en avis positif risquerait de retirer au maire, en fait, tout pouvoir d'appréciation sur l'opportunité d'accorder ou de refuser le permis ; la troisième, et la plus importante, est qu'il paraît préférable de ne pas créer d'exception au principe qui veut que seule une décision faisant grief ouvre droit à recours.

- à donner au ministre un pouvoir d'évocation qu'il paraît en tout état de cause difficile de lui dénier.

En fonction de ces orientations, le texte adopté par la commission comporte cinq articles :


• L'article premier
propose la création, auprès du préfet de région, d'une unique commission consultative compétente en matière de patrimoine et de sites.

Le rattachement de l'architecture au ministère de la culture rend en effet inutile la dualité d'instances consultatives qui répondait au partage antérieur des compétences entre le ministère chargé de la culture et celui chargé de l'équipement.

Les commissions régionales du patrimoine et des sites auraient donc vocation à se substituer :

- aux commissions régionales du patrimoine historique, archéologique et ethnographique (COREPHAE). Créées par le décret n° 84-1007 du 15 novembre 1984 pour correspondre, au niveau régional, aux quatre instances de conseil scientifique placées auprès du ministre de la culture en matière de patrimoine (la commission supérieure des sites, le conseil supérieur de la recherche archéologique, la commission nationale de l'inventaire et le conseil du patrimoine ethnologique), les COREPHAE sont notamment chargées de donner un avis sur les propositions de classement et d'inscription à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques et, plus généralement, « sur toute question intéressant l'étude, la protection et la conservation du patrimoine » .

Elles sont composées de 30 membres, dont dix fonctionnaires de l'État, seize personnalités qualifiées (dont 8 élus nationaux ou locaux) et quatre représentants d'associations.

- aux collèges régionaux du patrimoine et des sites (CRPS), créés auprès du préfet de région par l'article 69 de la loi 83-8 du 7 janvier 1983, pour exercer les compétences consultatives prévues aux articles 70 et 71 de la même loi, c'est-à-dire pour rendre des avis sur les créations de ZPPAUP et sur les « recours » contre les avis conformes des architectes des bâtiments de France. Le collège est composé de 12 à 18 membres, et comprend en nombre égal des personnalités qualifiées, des professionnels de la construction, de l'architecture et de l'urbanisme et des représentants d'associations.

Ce regroupement permettra de confier à une seule instance l'ensemble des compétences consultatives relatives à la définition et à l'application dans la région des politiques de protection du patrimoine : à cet effet, votre commission vous proposera, aux articles 2 et 3, de prévoir que la nouvelle commission régionale sera consultée sur les recours contre les avis des architectes des bâtiments de France rendus dans le cadre des procédures prévues par la loi de 1913 et celle de 1962.

Il est précisé que la commission régionale du patrimoine et des sites devra comporter des représentants de l'État, des élus nationaux et locaux et des personnalités qualifiées : sa composition devrait en effet, dans l'esprit de votre rapporteur, être plus proche de celle de la COREPHAE que de celle du CRPS.

L'article renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de préciser la composition et le mode de fonctionnement de la commission, qui devra notamment lui permettre de rendre les avis qui lui seraient demandés dans le cadre des procédures « d'appel » contre les avis conformes des architectes des bâtiments de France dans des délais suffisamment brefs pour ne pas allonger les procédures d'octroi des autorisations.


• L'article 2
complète l'article 13 bis de la loi du 31 décembre 1913 par deux alinéas nouveaux permettant d'introduire dans la procédure d'octroi des autorisations de travaux dans le champ de visibilité des édifices classés ou inscrits une possibilité d'appel des avis des architectes des bâtiments de France symétrique de celle prévue, pour les ZPPAUP, par l'article 71 de la loi du 7 janvier 1983.


• L'article 3
modifie l'article L. 313-2 du code de l'urbanisme pour introduire la même possibilité dans la procédure d'instruction des autorisations de travaux effectués dans les secteurs sauvegardés.


• L'article 4
prévoit l'intervention de décrets en Conseil d'État pour fixer les conditions d'application des articles 2 et 3, notamment les délais « d'appel », et ceux au terme desquels les appels seront considérés comme ayant été tacitement rejetés.


• L'article 5
prévoit les mesures de coordination rendues nécessaires par la substitution de la commission régionale du patrimoine et des sites au collège régional du patrimoine et des sites.

Enfin, votre commission vous propose de préciser l'intitulé de la proposition de loi.

Au bénéfice des observations qui précèdent, votre commission vous demande d'adopter la proposition de loi dans le texte résultant de ses conclusions, et qui figure ci-après.

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