EXPOSE GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi de la proposition de loi (n° 38, 1996-1997) relative au contrat de concession du Stade de France à Saint-Denis, présentée par nos collègues Jean-Jacques Hyest, François Lesein et par votre rapporteur lui-même.

Cette proposition de loi tend à lever, par une mesure de validation, l'insécurité juridique qui, à la suite d'une décision juridictionnelle récente, pourrait affecter ce contrat de concession et par là-même mettre en cause la bonne préparation de l'organisation de la coupe du monde de Football par la France.

Dans un peu plus d'un an, notre pays accueillera cette grande manifestation sportive. L'effet que la qualité de l'organisation d'une telle manifestation aura sur l'image internationale de la France justifie pleinement que, dans le respect des principes constitutionnels, tous les moyens juridiques soient réunis, notamment pour réaliser le grand stade de 80 000 places implanté à Saint-Denis.

Telle fut la démarche de notre Haute Assemblée lorsqu'elle examina, sur le rapport de notre regretté collègue Bernard Laurent, le projet qui aboutit à la loi n° 93-1435 du 31 décembre 1993 relative à la réalisation d'un grand stade à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) en vue de la coupe du monde de football de 1998.

Le présent rapport, après avoir rappelé brièvement le cadre général dans lequel est préparée l'organisation de la coupe du monde de Football, exposera les motifs qui fondent la présente proposition de loi et vous rendra compte des travaux de votre Commission des Lois.

I. RAPPEL DU CADRE GÉNÉRAL DE L'ORGANISATION DE LA COUPE DU MONDE DE FOOTBALL

A. LE CONTEXTE LÉGISLATIF ET RÉGLEMENTAIRE

1. La loi n° 93-1435 du 31 décembre 1993 : la levée des obstacles juridiques entourant la construction d'un grand stade

La construction d'un grand stade à Saint-Denis a justifié l'intervention préalable du législateur pour lever certains obstacles juridiques -parfaitement analysés dans le rapport de notre regretté collègue Bernard Laurent (n° 145, 1993-1994)- qui tenaient à la non compatibilité de cet équipement avec les documents d'urbanisme en vigueur, aux délais requis pour la mise en oeuvre éventuelle de procédures d'expropriation et aux conditions de réalisation de l'équipement lui-même.

Pour remédier à ces obstacles juridiques, la loi n° 93-1435 du 31 décembre 1993 s'est inspirée de solutions mises en oeuvre avec succès, notamment pour les XVIème jeux olympiques d'hiver d'Albertville et de la Savoie, organisés en 1992, ainsi que pour les Xème jeux olympiques d'hiver de Grenoble en 1968.

Composée de quatre articles, la loi du 31 décembre 1993 autorise l'opération d'aménagement -dont elle définit le périmètre- nonobstant les dispositions contraires du schéma directeur de la région d'Île-de-France et des autres documents d'urbanisme ( article premier ).

L'opération comprend :

- d'une part, la création d'un grand stade -qualifié d' équipement sportif d'intérêt national- à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) sur le site dit du « Cornillon Nord » qui est délimité par les autoroutes A1 et A 86 et par le canal de Saint-Denis ;

- d'autre part, comme l'avait souhaité le Sénat, l'édification d'infrastructures de sécurité nécessitées par la création et l'utilisation du grand stade sur le terrain « caserne de Rose » à Dugny (Seine-Saint-Denis).

La loi permet, en outre, l'utilisation de la procédure d'extrême urgence, en matière d'expropriation ( article 2 ). Cette procédure et en principe utilisable pour les travaux intéressant la Défense nationale ( article L. 15-6 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique) ou pour la construction de voies rapides, routes nationales, voies de chemins de fer et oléoducs ( article L. 15-9 ).

La loi du 31 décembre 1993 étend à ces opérations d'expropriation les dispositions du code de l'urbanisme qui prévoient des mesures de protection des occupants ( article 3 ).

Enfin, elle lève tout doute sur l'autorité concédante en précisant que l'État pourra concéder sur les terrains dont il aura la disposition, la construction et l'exploitation du grand stade ( article 4 ).

2. L'état d'application de la loi du 31 décembre 1993

Deux décrets, pris en 1994 et en 1995, ont précisé le contenu de l'opération d'aménagement :

- Le décret n° 94-1138 du 23 décembre 1994 a concerné la réalisation du grand stade sur le site dit du « Cornillon nord » à Saint-Denis

L'opération doit comporter un programme d'équipements sportifs comprenant un grand stade d'une capacité d'environ 80 000 places ainsi que des locaux utilisés pour son exploitation et son animation, un stade annexe et ses locaux d'exploitation, environ 6 000 places de stationnement.

Elle comporte également un programme immobilier comprenant des constructions à usage de logements, de bureaux, d'activités économiques, commerciales et de loisirs ainsi que leurs aires de stationnement et leurs équipements d'accompagnement.

Enfin, sont prévus la réalisation d' espaces verts et paysagers ainsi que les voies et les réseaux nécessaires à l'opération.

- Le décret n° 95-587 du 6 mai 1995 a, pour sa part, précisé le contenu de l'opération d'aménagement en ce qui concerne l'édification d'infrastructures de sécurité nécessitées par la création et l'utilisation du grand stade sur le terrain « caserne de Rose » à Dugny (Seine-Saint-Denis).

L'article 2 de la loi du 31 décembre 1993 n'a, en revanche, pas été appliqué, la procédure d'expropriation n'ayant en définitive pas été nécessaire. La cession des terrains s'est réalisée à l'amiable par la conclusion de trois actes de cessions :

- la cession par la Ville de Paris à l'État du terrain d'assise du stade de France et de ses équipements annexes (stades d'échauffement, parkings et voiries internes) ;

- la cession par la Ville de Paris à la Société anonyme nationale d'économie mixte d'aménagement de la zone d'aménagement concerté du Cornillon Nord, des terrains d'assise du programme immobilier adjacent au stade de France, ainsi qu'aux espaces verts et paysagers, voies et réseaux nécessaires à l'opération ;

- la cession (en cours) par le Conseil général de Seine-Saint-Denis d'une parcelle de terrain située au nord-ouest du Cornillon Nord.

La Société d'économie mixte d'aménagement de la zone d'aménagement concerté du Cornillon Nord a, par ailleurs, été créée le 2 novembre 1994.

La création de cette société avait, au préalable, fait l'objet de quatre décrets tous en date du 18 août 1994 (n os 94-705, 94-706, 94-707, 94-708) ayant respectivement pour objet d'autoriser le département de la Seine-Saint-Denis et la commune de Saint-Denis à participer au capital de cette société, de fixer le nombre des représentants des salariés dans le conseil d'administration, d'approuver les statuts de la société et, enfin, d'autoriser la participation financière de l'État au capital.

Cette société est dotée d'un capital de 30 millions de francs réparti entre l'État (51 %), la Caisse des dépôts et consignations (26 %), la Ville de Paris (5 %), le Conseil général de Seine-Saint-Denis (5 %), EDF (5 %), GDF (5 %), la Chambre de commerce et d'industrie de Paris (2 %) et la Société Centrale pour l'Équipement du Territoire (1 %).

Enfin, à la suite d'une procédure de consultation engagée avec l'insertion d'un appel à candidatures au Journal officiel des Communautés européennes du 10 décembre 1993, le contrat de concession -qui fait l'objet de la présente proposition de loi- pour le financement, la conception, la construction, l'entretien et l'exploitation du Stade de France à Saint-Denis a été attribué à la société Consortium Grand Stade le 29 avril 1995.

Ce contrat a fait l'objet d'un avis inséré au Journal officiel du 22 juin 1995 et a été publié au Bulletin officiel du ministère de la jeunesse et des sports (numéro spécial, juin 1995).

B. L'ÉTAT D'AVANCEMENT DE LA PRÉPARATION DE LA COUPE DU MONDE

1. L'état d'avancement de la construction du stade de France

Après la signature du contrat de concession, le 29 avril 1995, et la délivrance du permis de construire le 30 avril 1995, les travaux de construction ont débuté dès le 2 mai 1995.

Après dix-huit mois de chantier, 55 % des travaux avaient été réalisés, la date d'achèvement de l'ouvrage étant fixée au 30 novembre 1997.

Le montant total de l'investissement est contractuellement fixé à 2,664 milliards de francs. Au 30 octobre 1996, les dépenses payées (1,424 milliard de francs) ou engagées (250 millions de francs) s'élèvent à 1,674 milliard de francs environ.

Sur 2,664 milliards de francs d'investissements, plus de un milliard de francs sont ou seront confiés à des entreprises sous-traitantes, en particulier, pour plus de 250 millions de francs, à des entreprises locales de Seine-Saint-Denis. Sur la durée totale du chantier, plus de 200 entreprises différentes sont appelées à intervenir.

Votre rapporteur soulignera, par ailleurs, que le chantier du Stade de France a permis la création de plus de 200 emplois au profit de la population du bassin d'emplois de Saint-Denis.

Il n'est, enfin, pas inutile d'apporter des précisions sur les perspectives d'exploitation de ce grand équipement.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, outre l'accueil, chaque année, de 40 à 50 grandes manifestations sportives, parasportives ou musicales, le Stade de France aura vocation à assurer quotidiennement des activités de congrès, séminaires, colloques et salons destinées aux entreprises. Il proposera, en outre, un ensemble d'activités commerciales ou de services.

En année courante d'exploitation, la société d'exploitation du Stade de France devrait réaliser un chiffre d'affaires d'environ 300 millions de francs.

Votre rapporteur relève également que l'exploitation de cet équipement sera créatrice d'emplois à raison d'une centaine d'emplois permanents et de plus de 1 000 emplois ponctuels et à temps partiel pour le déroulement de manifestations exceptionnelles qui réuniront plus de 50 000 spectateurs.

Les jeunes des quartiers environnants devraient être prioritairement concernés par ces emplois qui constitueraient ainsi une première étape en vue de leur insertion professionnelle et sociale.

2. L'aménagement des autres sites d'accueil de la coupe du monde

Huit villes (Bordeaux, Lens, Lyon, Marseille, Montpellier, Nantes, Saint-Etienne, Toulouse), ainsi que Paris en ce qui concerne le Parc des Princes, ont engagé des opérations de rénovation et, souvent, d'agrandissement de leurs stades pour accueillir les matches de la coupe du monde.

Le programme des travaux pour chaque stade et leur coût prévisionnel ont été définis à partir des propositions de la ville, maître d'ouvrage. Les conventions entre l'État et les villes concernées ont été signées le 6 juin 1996.

Le coût global des travaux s'élèvent à 847 millions de francs dont 321 millions de francs font l'objet d'un financement de l'État. Chaque ville a, en outre, bénéficié des concours financiers du département et de la région. Les communautés urbaines de Bordeaux et Lyon, les districts urbains de Lens et de Montpellier ont également participé à ces opérations.

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