4. Garantie des droits des contribuables et lutte contre la fraude

ARTICLE 75 Instauration d'un double degré de juridiction pour les contentieux fiscaux relevant du juge judiciaire

Commentaire : cet article vise à instaurer un double degré de juridiction pour les litiges fiscaux qui relèvent de la compétence des tribunaux de grande instance.

I - LE DISPOSITIF ACTUEL

A. UNE COMPÉTENCE EN MATIÈRE DE LITIGES FISCAUX REPARTIE ENTRE LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVE ET JUDICIAIRE

L'article L. 190 du livre des procédures fiscales dispose que " les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire ."

Toutefois, selon la nature de l'impôt, le litige est examiné par la juridiction administrative ou par la juridiction judiciaire. En effet, aux termes de l'article 199 du livre des procédures fiscales, "en matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif. Il en est de même pour les décisions intervenues en cas de contestation pour la fixation du montant des abonnements prévus à l'article 1700 du code général des impôts pour les établissements soumis à l'impôt sur les spectacles. "

En revanche, "en matière de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes ou contributions, le tribunal compétent est le tribunal de grande instance. "

Cette dualité de juridiction n'a pas d'autre justification que le partage de compétences opéré par la loi pendant la période révolutionnaire.

Toutefois, la répartition du contentieux fiscal entre le juge administratif et le juge judiciaire ne présente pas d'inconvénients significatifs dans la mesure où les règles de procédure fiscales ne donnent pas lieu à des divergences d'interprétation sensibles et durables. Notamment, en ce qui concerne les exigences de la procédure contradictoire de redressement prévues aux articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales, la position des deux ordres de juridiction semble converger au sujet de la portée de l'obligation de motivation de la notification de redressement imposée par l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.

B. UN DISPOSITIF PLUS PROTECTEUR POUR LES CONTRIBUABLES DEVANT LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE

L'unité des règles du contentieux de l'imposition connaît pourtant une exception importante qui rend la juridiction judiciaire moins protectrice des droits des contribuables. En effet, l'article L. 199 du livre des procédures fiscales dispose que "les jugements des tribunaux de grande instance sont sans appel et ne peuvent être attaqués que par la voie de la cassation." Les tribunaux de grande instance statuent donc en premier et dernier ressort. La Cour de cassation peut être saisie mais elle ne peut examiner que les règles de droit et non plus les faits.

En revanche, conformément à l'article R* 199-2 du livre des procédures fiscales, "les jugements des tribunaux administratifs peuvent faire l'objet des recours prévus par le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel". Ainsi, la loi du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif a entraîné la création de cinq cours administratives d'appel compétentes pour apprécier les recours portant sur les décisions des tribunaux administratifs en matière de contentieux fiscal.

Il est toutefois intéressant de noter que le contentieux administratif de l'impôt a toujours bénéficié d'un régime à double degré. Avant l'entrée en vigueur de cette loi, c'était le Conseil d'Etat qui pouvait être saisi en appel. Désormais, il intervient seulement en tant que juge de cassation, même s'il a le choix entre deux procédures pour statuer. Il peut, conformément à la définition traditionnelle du juge de cassation, juger, non pas le litige qui a été soumis à la juridiction qu'il contrôle, mais le jugement prononcé par elle sur le litige. S'il annule le jugement, l'affaire est renvoyée devant cette juridiction.

Mais il peut également, s'il estime que "l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie", rejuger lui-même l'affaire au fond.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. L'INSTAURATION D'UN DEUXIÈME DEGRÉ DE JURIDICTION POUR LES LITIGES RELEVANT DE LA COMPÉTENCE DES TRIBUNAUX DE GRANDE INSTANCE

Cet article propose d'instaurer un double degré de juridiction pour les contentieux fiscaux relevant du juge judiciaire.

Cette réforme implique la modification des articles L. 199 et L.199 C du livre des procédures fiscales.

Dans la dernière phrase de l'article L. 199 du livre des procédures fiscales, le principe selon lequel les jugements des tribunaux de grande instance sont sans appel et ne peuvent être attaqués que par voie de cassation est supprimé et remplacé par la disposition suivante : "les tribunaux de grande instance statuent en premier ressort".

En outre, l'article L. 199 C est modifié pour préciser que l'Administration et le contribuable ont la possibilité de faire valoir tout moyen nouveau non seulement devant le tribunal administratif, la cour administrative d'appel et le tribunal de grande instance, mais aussi devant la cour d'appel.

Un décret en Conseil d'Etat doit également être pris afin de préciser les règles de procédure devant la cour d'appel.

Cette réforme s'appliquera aux jugements rendus à compter du 1er mars 1998. Ce délai doit permettre aux cours d'appel de réorganiser leurs services pour pouvoir accueillir dans de bonnes conditions le contentieux fiscal.

B. UN DISPOSITIF QUI DOIT METTRE FIN A DE NOMBREUX INCONVÉNIENTS

Cette réforme met fin à une situation qui n'est guère satisfaisante à plusieurs égards.

D'une part, elle élargit le champ d'application du double degré de juridiction et satisfait ainsi le souci d'une bonne administration de la justice. En effet, l'appel est intimement lié à la conviction qu'un litige doit pouvoir être jugé deux fois : son jugement étant le fait, la seconde fois, de magistrats normalement plus expérimentés et qui disposent des éventuels éclaircissements que l'instruction devant les premiers juges a apportés sur les données de l'affaire.

D'autre part, cette réforme unifie les règles procédurales du contentieux fiscal et supprime l'inégalité qui frappait la garantie des droits des contribuables dans le règlement des litiges fiscaux.

Enfin, elle devrait améliorer le fonctionnement des juridictions de l'ordre judiciaire, handicapé jusqu'à présent par l'encombrement de la Cour de cassation. L'instauration d'un double degré de juridiction devrait en effet avoir pour conséquence de désengorger cette Cour. Toutefois, en fonction de l'importance du contentieux que cette réforme provoquera, de nouveaux besoins en formation et en personnel supplémentaire risquent de se faire sentir auprès des cours d'appel qu'il faudra prendre en compte pour que cette réforme soit véritablement efficace.

En 1995, 1.955 jugements ont été prononcés devant les tribunaux de grande instance. Le pourcentage de recours en cassation est d'environ 20 %, mais on peut supposer que cette proportion sera supérieure en appel puisque les recours peuvent aussi porter sur les faits.

Décision de la commission : votre commission propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 76 Suppression du droit de préemption de l'administration sur les immeubles et fonds de commerce

Commentaire : cet article vise à supprimer le droit de préemption de l'administration fiscale sur les immeubles et fonds de commerce

I. LE DISPOSITIF EXISTANT

A. UNE PRÉROGATIVE DE PUISSANCE PUBLIQUE QUI PORTE ATTEINTE AU DROIT DE PROPRIÉTÉ

L'article L. 18 du livre des procédures fiscales codifie les dispositions de la loi du 31 décembre 1941 et de l'ordonnance du 15 août 1945 et autorise l'Etat à exercer un droit de préemption sur "les immeubles, droits immobiliers, fonds de commerce ou clientèles, droit à un bail ou au bénéfice d'une promesse de bail portant sur tout ou partie d'un immeuble" lorsqu'il estime le prix de vente insuffisant.

L'Etat peut arguer de ce droit pendant un délai de six mois à compter de la date d'enregistrement ou de l'accomplissement de la formalité fusionnée. Toutefois, ce délai est ramené à trois mois lorsque la formalité a eu lieu au bureau de la situation des biens.

L'utilisation de ce droit est discrétionnaire et ne fait pas obstacle à la possibilité pour l'administration d'engager, s'il y a lieu, la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales et définie aux articles L. 57 à L. 61 :

- L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée.

- Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, soit de la commission départementale de conciliation.

- Après l'établissement du rôle ou l'émission de l'avis de recouvrement, le contribuable conserve le droit de présenter une réclamation.

Ce droit de préemption se caractérise par un régime exorbitant de droit commun puisqu'il porte atteinte au droit de propriété de l'acquéreur évincé en intervenant après l'enregistrement de la vente. La décision d'exercer le droit de préemption est simplement notifiée à l'acquéreur, au vendeur ou à leurs ayants droit par un acte d'huissier de justice et s'accompagne du versement à l'acquéreur ou à ses ayants droit du montant du prix de vente majoré d'un dixième.

Pour autant, cet article n'entre pas forcément en contradiction avec l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. En effet, la propriété est certes reconnue comme un droit inviolable et sacré dont nul ne peut être privé, mais celui-ci peut être limité "lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité". En définitive, il appartient au juge de vérifier si l'atteinte au droit de propriété portée par le droit de préemption est justifiée par la nécessité publique.

B. UNE MESURE REMISE EN CAUSE PAR LE JUGE

Or, l'évolution de la jurisprudence a remis en cause le droit de préemption.

Trois arrêts de la Cour de cassation du 16 juin 1987 ont fortement encadré les prérogatives de l'administration fiscale.

Dans les arrêts n° 148 et n° 151. La Cour de cassation a estimé que la décision d'exercer le droit de préemption constituait une sanction fiscale portant atteinte au droit de propriété de l'acquéreur évincé, entrant comme telle dans les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs.

Dès lors, la motivation de la décision d'exercice du droit de préemption par l'Etat doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, c'est-à-dire, dans ce cas précis, préciser les éléments sur lesquels elle se fonde pour estimer insuffisant le prix de vente stipulé entre les parties.

La motivation ne peut donc pas se borner à citer l'article 668 du code général des impôts (devenu l'article L. 18 du livre des procédures fiscales) et à reproduire la condition légale qu'il énonce. En outre, cet article ne permet en aucun cas à l'administration d'apprécier discrétionnairement si le prix de vente stipulé dans un acte est insuffisant (arrêt n° 149).

La décision de la Cour européenne des droits de l'homme du 22 septembre 1994 (Mme Hentrich c/ France) est encore plus radicale puisqu'elle constitue une condamnation implicite du droit de préemption.

La Cour a confronté cette pratique à l'article 1 du premier protocole additionnel à la Convention, qui dispose que :

"Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes".

Rappelant que la notion d'"utilité publique" est ample par nature et que les Etats disposent d'une certaine marge d'appréciation pour définir et organiser leurs politiques en matière fiscale et élaborer des mécanismes (tel le droit de préemption) pour assurer le paiement des impôts, la Cour reconnaît que la prévention de la fraude fiscale constitue un objectif légitime relevant de l'utilité publique. Le système du droit de préemption n'est donc pas remis en cause dans son principe. En revanche, les modalités de son exercice sont fortement critiquées.

D'une part, la Cour reproche à l'article 668 du code général des impôts son caractère "arbitraire, sélectif et guère prévisible" , qui l'empêcherait de satisfaire de manière suffisante aux exigences de précision et de prévisibilité qu'implique la notion de loi au sens de la Convention.

D'autre part, la Cour estime qu'une décision de préemption ne peut avoir de légitimité en l'absence d'un débat contradictoire, qui permette de discuter la question de la sous-évaluation du prix et, par voie de conséquence, la position de l'administration. La Cour prend acte de ce que le système juridique français a subi une modification sur ce point, avec désormais l'obligation de soumettre au principe du contradictoire la motivation de la décision administrative de préemption. Cependant, elle doit constater que cette évolution n'a pas profité en l'occurrence à l'intéressée.

Par ailleurs, la Cour considère que l'exercice du droit de préemption emporte des conséquences suffisamment sérieuses pour que la mesure atteigne un seuil de gravité certain : le seul remboursement du prix payé majoré de 10 % ne saurait suffire à compenser la perte d'un bien acquis sans intention frauduleuse.

En conséquent, la requérante a supporté une charge spéciale et exorbitante que seule aurait pu rendre légitime la possibilité, qui lui fut refusée, de contester la mesure prise à son égard. Il y a donc eu rupture du juste équilibre devant régner entre la sauvegarde du droit de propriété et les exigences de l'intérêt général et, par la même, violation de l'article 1 du premier protocole de la convention.

II. L'ABROGATION DU DROIT DE PRÉEMPTION DE L'ADMINISTRATION SUR LES IMMEUBLES ET LES FONDS DE COMMERCE

A. UNE CONSÉQUENCE LOGIQUE DES CRITIQUES ADRESSÉES PAR LE JUGE

L'évolution de la jurisprudence se caractérise par le renforcement de la protection des individus face aux prérogatives de l'administration fiscale. Ainsi, le droit de préemption tel qu'il avait été imaginé lors de sa création ne répond plus aux exigences de l'Etat de droit. La décision d'exercer le droit de préemption doit désormais être motivée et se soumettre au principe contradictoire.

En outre, pour être conforme à la Convention européenne des droits de l'homme, cette décision doit devenir prévisible et l'indemnité versée par l'administration fiscale doit être augmentée.

En définitive, le droit de préemption ne pourrait subsister qu'à condition de voir son régime profondément modifié.

Or, la mise en conformité de l'exercice du droit de préemption aux exigences formulées par la Cour de cassation et la Cour européenne des droits de l'homme conduirait à un allongement considérable des délais entre la notification par l'administration de la décision d'exercer le droit de préemption et sa réalisation.

Il en résulterait également une grande incertitude sur la désignation du véritable propriétaire. En outre, l'obligation de majorer l'indemnité versée par l'administration fiscale en cas d'exercice du droit de préemption risquerait de marginaliser l'utilisation effective de cette prérogative.

Conscient de ces inconvénients, le gouvernement propose donc d'abroger l'article L. 18 du livre des procédures fiscales relatif au droit de préemption.

B. UNE MESURE QUI N'AFFECTERA PAS LES PRÉROGATIVES DE L'ADMINISTRATION EN MATIÈRE DE CONTRÔLE FISCAL

En réalité, l'abrogation du droit de préemption n'affectera pas les prérogatives de l'administration fiscale en matière de contrôle fiscal.

En effet, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs qui a posé le principe de la motivation obligatoire des décisions administratives défavorables infligeant une sanction, l'exercice du droit de préemption est devenu très limité. Le tableau ci-après retrace son évolution et énumère le nombre de fois où le droit de préemption a été utilisé depuis 1980.

Source : Direction générale des impôts

Il apparaît que cette prérogative a même été abandonnée en raison de sa difficulté de mise en oeuvre depuis les trois arrêts de principe de la Cour de cassation rendus en 1987.

En outre, l'Etat dispose d'autres techniques pour décourager la fraude fiscale, quand il a des raisons sérieuses d'en soupçonner l'existence. Ainsi, l'article L. 55 du livre des procédures fiscales dispose que, lorsque l'administration fiscale constate une insuffisance, une exactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, elle peut effectuer les redressements correspondants suivant la procédure contradictoire définie aux articles L. 57 et L. 61 A.

Enfin, l'abrogation du droit de préemption met fin au particularisme du droit français souligné par la Cour européenne des droits de l'homme. Elle permet ainsi un renforcement de l'harmonisation des droits des pays membres de la Communauté européenne en faveur d'une meilleure protection des individus face aux prérogatives de l'administration.

La mesure proposée par le présent article s'avère donc légitime.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 77 Réduction du taux de l'amende fiscale pour défaut de vignette automobile

Commentaire : cet article vise à réduire de 200 à 80 % le taux de l'amende fiscale due en cas d'infractions en matière de taxe différentielle sur les véhicules à moteur.

I. LE DISPOSITIF EXISTANT

A. LE RÉGIME JURIDIQUE DE LA TAXE DIFFÉRENTIELLE SUR LES VÉHICULES A MOTEUR

La taxe différentielle sur les véhicules à moteur a été créée par la loi n°56-639 du 30 juin 156 portant institution du fonds national de solidarité.

Depuis le 1er janvier 1984, elle est perçue par les départements sauf pour la Corse, où elle a été transférée à la collectivité territoriale.

Son régime juridique est défini par les articles 1599 C à 1599 J du code général des impôts, les articles 317 nonies à 317 duodecies de l'annexe II du même code et les articles 155 C à 155 M de l'annexe IV. Ces articles précisent les catégories de véhicules exemptés de la taxe ainsi que les modalités de paiement de cette taxe et les conditions d'utilisation de la vignette.

Ainsi, l'article 155 C de l'annexe IV dispose que le paiement de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur est constaté au moyen de la délivrance d'une vignette mobile constituée d'un reçu et d'un timbre.

L'article 155 H de l'annexe IV ajoute que le reçu est conservé par le conducteur du véhicule pour être présenté à toute réquisition des agents et fonctionnaires compétents. Le timbre adhésif doit être directement fixé dans l'angle inférieur droit du pare-brise du véhicule automobile de manière que les mentions qu'il comporte soient lisibles de l'extérieur de ce véhicule.

B. LE RÉGIME DES SANCTIONS

Selon la nature des infractions commises à l'encontre de la législation relative à la taxe différentielle sur les véhicules à moteur, deux sortes de sanctions peuvent être appliquées :

- L'article 1731 du code général des impôts dispose que tout retard dans le paiement de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur donne lieu au versement de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 du même code (c'est-à-dire 0,75 % du montant des sommes mises à la charge du contribuable) et d'une majoration de 5 % de ce même montant.

- L'article 1840 N quater prévoit que toutes les autres infractions à l'encontre des règles régissant la taxe différentielle sur les véhicules à moteur sont sanctionnées par une amende fiscale égale au double de la taxe, appelée plus communément "double droit". Il s'agit des infractions :

- sur les tarifs fixés par les conseils généraux et la collectivité territoriale de Corse.

- sur l'exonération de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur appartenant à certaines catégories de personnes.

- sur le champ d'application de cette taxe, sur les conditions d'exonération, sur la période d'imposition ainsi que sur son exigibilité.

Dans la pratique, la principale infraction sanctionnée par le double droit concerne le non paiement de la vignette.

II. UNE RÉFORME DU DISPOSITIF JUGÉE NÉCESSAIRE

A. DES SANCTIONS JUGÉES EXCESSIVES

La sanction du double droit a été instaurée en même temps que la taxe différentielle sur les véhicules à moteur et n'a jamais été modifiée. Or, sa gravité tranche avec l'évolution générale du régime des sanctions caractérisée par une moindre sévérité et une plus grande graduation.

Ainsi, l'article 1728 du code général des impôts fixe à 80 % du montant des droits la majoration maximale mise à la charge de toute personne physique ou morale qui s'abstient de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts dans les délais impartis. En outre, cette majoration ne peut intervenir que trente jours suivant la réception de la deuxième mise en demeure.

De même, l'article 1729 du code général des impôts précise que lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable ne peut être majoré de 80 % qu'en cas de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit.

Conscient du décalage entre le double droit et les sanctions prévues pour les autres infractions, le Gouvernement propose de modifier l'article 1840 N quater du code général des impôts autre que le retard de paiement et de réduire de 200 à 80 % le taux de l'amende fiscale due en cas d'infraction en matière de taxe différentielle sur les véhicules à moteur.

B. UNE HARMONISATION DU RÉGIME DES SANCTIONS FISCALES

Cette réforme présente également l'avantage d'harmoniser le régime des sanctions. En effet, la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et douanières avait modifié l'article 1840 N septies du code général des impôts et ramené de 200 à 80 % le taux de l'amende fiscale due en cas d'infraction relative à la taxe sur les véhicules de société.

En outre, il convient de relativiser le montant de la perte engendrée par cette réforme. Alors que le produit de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur s'élevait à 12,4 milliards de francs en 1995, on estime à 80 millions de francs le montant perçu au titre de la pénalité de 5 % prévue en cas de retard pour le paiement de la taxe et au titre du double droit Par ailleurs, la sanction est rarement appliquée dans toute sa rigueur, l'administration utilisant son pouvoir gracieux pour accorder des remises partielles.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 78 Prorogation du délai de reprise de l'administration des impôts en cas d'activité occulte

Commentaire : cet article vise à porter à six ans, au lieu de trois, le délai de reprise en matière d'impôt sur le revenu, d'impôt sur les sociétés, de taxe professionnelle et de taxe sur le chiffre d'affaires lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce ou à un organisme consulaire.

I - LE DISPOSITIF EXISTANT

A. UN DÉLAI DE PRESCRIPTION DU DROIT DE REPRISE FIXÉ À TROIS ANS SAUF QUELQUES EXCEPTIONS

Le délai de reprise pendant lequel l'administration peut réparer les omissions totales ou partielles constatées dans l'assiette de l'impôt, les insuffisances, les inexactitudes ou les erreurs d'imposition, est précisé par l'article L. 168 du livre des procédures fiscales.

L'article L. 186 du même livre dispose que "dans tous les cas où il n'est pas prévu un délai de prescription plus court, le droit de reprise de l'administration s'exerce pendant dix ans à partir du jour du fait générateur de l'impôt".

1. Un délai fixé à trois ans

En réalité, cette disposition est très peu appliquée dans la mesure où le livre des procédures fiscales fixe les délais de reprise pour la plupart des impôts, droits et taxes assimilées. Ce délai est le plus souvent limité à trois ans.

L'article 169 du livre des procédures fiscales précise ainsi que "pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due".

Ce délai s'applique également (article L. 169 A) :

- à la retenue à la source sur les revenus de capitaux mobiliers,

- au prélèvement sur les produits de placement à revenu fixe.

- au précompte.

- à la taxe forfaitaire sur les plus-values de liquidation de certaines sociétés.

- à la taxe sur les encours de crédit.

- à la taxe sur les salaires.

- à la cotisation perçue au titre de la participation des employeurs à l'effort de construction,

- à tous les prélèvements et taxes qui tiennent lieu de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés.

De même, l'article L. 174 précise que "les omissions ou les erreurs concernant la taxe professionnelle peuvent être réparées par l'administration jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due".

En outre, le droit de reprise de l'administration pour les taxes sur le chiffre d'affaires (article L. 176 du livre des procédures fiscales) pour la taxe spéciale sur le prix de spectacles cinématographiques (article L. 177 A du même livre) ainsi que pour le droit de timbre sur les opérations de bourse et pour la taxe sur les conventions d'assurance (article L. 182 du même livre) s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle ces taxes sont devenues éligibles.

Par ailleurs, l'article 180 du livre des procédures fiscales dispose que "pour les droits d'enregistrement, la taxe de publicité, les droits de timbre, ainsi que les taxes, redevances et autres impositions assimilées, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle de l'enregistrement d'un acte ou d'une déclaration ou de l'accomplissement de la formalité fusionnée".

2. Quelques exceptions

Les délais peuvent être plus ou moins susceptibles de prolongation.

Ainsi, le deuxième alinéa de l'article L. 174 du livre des procédures fiscales prévoit que, "par exception aux dispositions du premier alinéa, lorsque le chiffre d'affaires ou la valeur ajoutée à raison desquels la situation du contribuable a été appréciée au regard des dispositions du I de l'article 1647 E du code général des impôts sont affectés ultérieurement par des rehaussements effectués en matière d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les bénéfices, les cotisations de taxe professionnelle correspondantes peuvent être établies et mises en recouvrement dans le même délai que l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les bénéfices correspondant aux rehaussements".

De même, le deuxième alinéa de l'article L. 173 du livre des procédures fiscales dispose que "lorsque le revenu imposable ou la cotisation d'impôt sur le revenu à raison desquels le contribuable a bénéficié d'un dégrèvement ou d'une exonération en application des articles 1391, 1414, 1414 A, 1414 B et 1414 C du code général des impôts fait ultérieurement l'objet d'un rehaussement, l'imposition correspondant au montant du dégrèvement ou de l'exonération accordés à tort est établie et mise en recouvrement dans le même délai que l'impôt sur le revenu correspondant au rehaussement".

Ils peuvent aussi être plus courts.

Aux termes de l'article L. 173 du livre des procédures fiscales, pour les impôts directs perçus au profit des collectivités locales et les taxes perçues sur les mêmes bases au profit de divers organismes, à l'exception de la taxe additionnelle et de ses taxes additionnelles, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de l'année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due.

B. UN DÉLAI JUGÉ TROP COURT MALGRÉ CERTAINES POSSIBILITÉS DE PROLONGATION

Si le délai de reprise de l'administration fiscale est en pratique fixé à trois ans, le livre des procédures fiscales contient certaines dispositions qui tendent à le prolonger.

Ainsi, aux termes de l'article L. 170 du livre précité, "même si les délais de reprise prévus à l'article L. 169 sont écoulés, les omissions ou insuffisances d'imposition révélées par une instance devant les tribunaux ou par une réclamation contentieuse peuvent être réparées par l'administration des impôts jusqu'à la fin de l'année suivant celle de la décision qui a clos l'instance et, au plus tard, jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due".

De même, l'article L. 175 du livre des procédures fiscales précise qu'" en ce qui concerne la taxe foncière sur les propriétés bâties, la taxe d'habitation et les taxes annexes établies sur les mêmes bases, les omissions ou les insuffisances d'imposition peuvent être réparées à toute époque lorsqu'elles résultent du défaut ou de l'inexactitude des déclarations des propriétés bâties mentionnées aux articles 1406 et 1502 du code général des impôts ".

Par ailleurs, "lorsque l'administration, ayant découvert qu'un contribuable se livrait à des agissements frauduleux, a déposé une plainte contre lui, elle peut procéder à des contrôles et à des rehaussements au titre des deux années excédant le délai ordinaire de prescription" (article L. 187 du livre des procédures fiscales).

En outre, si l'administration a, dans le délai initial de reprise, demandé à l'autorité compétente d'un autre Etat ou territoire, des renseignements concernant soit les relations d'un contribuable avec une entreprise, une société ou un groupement exploitant une activité ou établi dans cet Etat ou ce territoire, soit les biens, les avoirs ou les revenus dont un contribuable a pu disposer hors de France ou les activités qu'il a pu y exercer, soit ces deux catégories de renseignements, les omissions ou insuffisances d'imposition y afférentes peuvent être réparées, même si le délai initial de reprise est écoulé, jusqu'à la fin de l'année qui suit celle de la réponse à la demande et au plus tard jusqu'à la fin de la cinquième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due (article L. 188 A du livre des procédures fiscales).

Enfin, la prescription est interrompue par l'imposition d'office (article L. 76 du livre des procédures fiscales) et par la notification d'une proposition de redressement (article L. 189 du même livre).

Malgré ces aménagements du délai de reprise, celui-ci est plus court en France qu'à l'étranger car il s'applique indépendamment du comportement des contribuables : dans la plupart des pays de l'OCDE, les délais de prescription en matière d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés sont allongés en cas de comportement frauduleux. C'est le cas en Allemagne où ce délai passe alors de quatre à dix ans, de la Belgique où il passe de trois à cinq ans, l'allongement le plus long ayant lieu au Royaume-Uni où le délai de reprise de l'administration passe de six à vingt ans.

II - LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. UN DÉLAI DE REPRISE PROLONGÉ À L'ENCONTRE DES CONTRIBUABLES QUI DISSIMULENT LEUR ACTIVITÉ

1. Les conditions nécessaires à la prolongation

Le paragraphe I du présent article propose de porter de trois à six ans les délais de reprise de l'administration fiscale fixés :

- à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales qui prévoit que "pour l'impôt sur le revenu et sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due" ;

- à l'article L. 174 du même livre qui dispose que "les omissions ou les erreurs concernant la taxe professionnelle peuvent être réparées par l'administration jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due" :

Le paragraphe II modifie l'article L. 176 du livre des procédures fiscales et étend, pour les taxes sur le chiffre d'affaires, le droit de reprise de l'administration jusqu' à la fin de la sixième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue éligible.

Il s'agit de donner à l'administration plus de temps dans ses investigations relatives à la fraude fiscale et aux activités occultes. Cette prorogation des délais de reprise n'est donc pas générale et ne doit intervenir qu'en cas de dissimulation d'activités taxables, ce qui suppose la réunion de deux conditions cumulatives :

- "lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire",

- "et qu'il n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce ou à un organisme consulaire ".

a. L'obligation de déclaration

Le code général des impôts prévoit les modalités auxquelles est soumise chaque catégorie de déclaration.

En matière d'impôt sur le revenu, l'article 170 dispose que toute personne imposable audit impôt est tenue de souscrire et de faire parvenir à l'administration une déclaration détaillée de ses revenus et bénéfices et de ses charges de famille. L'avis d'imposition doit contenir le décompte détaillé du revenu imposable et doit faire apparaître notamment le montant des revenus catégoriels, à savoir les bénéfices industriels, commerciaux ou artisanaux, les bénéfices non commerciaux ou assimilés et les bénéfices agricoles (article 172 du code général des impôts).

En matière d'impôt sur les sociétés, l'article 223 prévoit que "les personnes morales et associations passibles de l'impôt sur les sociétés sont tenues de souscrire les déclarations prévues pour l'assiette de l'impôt sur le revenu en ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux. Toutefois, la déclaration du bénéfice ou du déficit est faite dans les trois mois de la clôture de l'exercice ou, si aucun exercice n'est clos au cours de l'année, avant le 1er avril de l'année suivante".

En matière de taxe professionnelle, l'article 1477 précise que les contribuables doivent déclarer les bases de taxe professionnelle avant le 1er mai de l'année précédant celle de l'imposition ou, en cas de création d'établissement ou de changement d'exploitant ou d'activité en cours d'année, avant le 1er mai de l'année suivant celle de la création ou du changement.

En matière de taxe sur le chiffre d'affaires, la déclaration correspond à la déclaration relative à la taxe sur la valeur ajoutée dont les modalités sont décrites à l'article 286 du code général des impôts. Toute personne assujettie à cette taxe doit, dans les quinze jours du commencement de ses opérations, souscrire au bureau désigné par un arrêté une déclaration conforme au modèle fourni par l'administration. Une déclaration est obligatoire en cas de cessation d'entreprise. Doivent en outre être fournis, sur un imprimé remis par l'administration, tous les renseignements relatifs à l'activité professionnelle.

b. Les autres formalités

Toutefois, l'absence de déclaration aux services fiscaux ne suffira pas pour proroger le délai de reprise. Il faut par ailleurs que le contribuable n'ait pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises, ou à un greffe du tribunal, ou à un organisme consulaire.

Les centres de formalités des entreprises (CFE) ont été créés par le décret du 18 mars 1981, abrogé par le décret du 19 juillet 1996. Il s'agissait de faciliter la tâche des entreprises en leur permettant de souscrire, au moyen d'un document unique, les déclarations intéressant divers services fiscaux et sociaux. Les entreprises doivent obligatoirement faire parvenir aux CFE le dossier comportant les déclarations relatives à leur création, aux modifications de leur situation ou à la cessation de leur activité qui est ensuite transmis à l'administration fiscale.

Sept catégories de CFE existent, gérés par les chambres de commerce et d'industrie, les chambres des métiers, la chambre nationale de la batellerie artisanale, les greffes des tribunaux de commerce ou des tribunaux de grande instance, les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF), les chambres d'agriculture et les centres des impôts.

2. Les coordinations indispensables

L'article 78 procède aussi à des coordinations de rédaction.

Ainsi, le paragraphe III modifie l'article L. 102 B relatif au délai de conservation des documents.

De même, le paragraphe IV modifie l'article L. 169 du livre des procédures fiscales qui concerne le délai de reprise applicable en matière de groupes de sociétés.

Par ailleurs, le paragraphe V vise à empêcher l'extension du délai de reprise aux prélèvements prévus par l'article L. 169 A du livre des procédures fiscales. Il s'agit de la retenue à la source sur les revenus de capitaux mobiliers, du prélèvement sur les produits de placement à revenu fixe, du précompte, de la taxe forfaitaire, des plus-values de liquidations de certaines sociétés, de la taxe sur les salaires, de la cotisation perçue au titre de la participation des employeurs à l'effort de construction ainsi que de tous les prélèvements et taxes qui tiennent lieu de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés.

Enfin, le paragraphe VI dispose que les dispositions des I et II qui prolongent le délai de reprise s'appliquent aux délais venant à expiration postérieurement au 31 décembre 1996.

B. UN DISPOSITIF QUI POURRAIT ENCORE ÊTRE AMÉLIORÉ

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de modification rédactionnelle. Elle a ainsi supprimé au paragraphe I et au paragraphe II de l'article 78 la référence à un organisme consulaire. Elle a en effet estimé que ce terme était redondant avec les centres de formalités des entreprises.

Votre commission prend acte de cette modification et souhaite en introduire une autre. L'article 78 a pour vocation de cerner des activités réellement clandestines et ne s'applique donc pas à des activités déclarées par erreur dans une mauvaise catégorie de revenus ou au titre d'un autre impôt. En effet, dans cette hypothèse, l'activité étant déclarée auprès du centre des impôts ou du centre de formalités des entreprises, une des deux conditions d'application du texte fait défaut même si la qualification fiscale de l'activité est inexacte. Le Gouvernement entendait apporter cette précision dans une instruction aux services fiscaux.

Afin d'éviter toute ambiguïté sur l'interprétation de l'article 78, votre commission vous propose un amendement excluant des causes de prolongation du délai de reprise les déclarations des contribuables dans lesquelles la qualification fiscale de l'activité se révèle inexacte.

Décision de la commission : votre commission propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 79 Modalités d'imposition en l'absence de déclaration lorsque le chiffre d'affaires est inférieur aux limites du forfait

Commentaire : cet article vise à étendre aux contribuables imposables selon le régime du forfait mais qui n'ont pas déposé leur déclaration annuelle la procédure d'imposition d'office qui existe déjà pour les professions non commerciales relevant du régime de l'évaluation administrative.

I. LE DISPOSITIF EXISTANT

A. LE REGIME DU FORFAIT

L'article 302 ter du code général des impôts définit le champ d'application du forfait.

1. Conditions d'éligibilité au régime du forfait

Sont soumises au régime du forfait les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 500.000 francs s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement, ou 150.000 francs s'il s'agit d'autres entreprises. Les chiffres d'affaires annuels de 500.000 et de 150.000 francs s'entendent tous droits et taxes compris.

2. Les catégories exclues

Sont exclues du régime du forfait :

- les sociétés ou organismes dont les résultats sont imposés selon le régime des sociétés de personnes défini à l'article 8 du code général des impôts, à l'exception des sociétés civiles soumises au régime du bénéfice forfaitaire agricole qui exercent une activité accessoire :

- les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés ;

- les opérations portant sur des immeubles, des fonds de commerce ou des actions ou parts de sociétés immobilières et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux ;

- les opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée :

- les opérations de location de matériels ou de biens de consommation durable, sauf lorsqu'elles présentent un caractère accessoire et connexe pour une entreprise industrielle ou commerciale ;

- les opérations réalisées sur les marchés à terme, les opérations d'options négociables et celles sur bons d'options.

3. Les caractéristiques du forfait

Les forfaits de chiffre d'affaire et de bénéfice sont établis par année civile et pour une période de deux ans ; les montants servant de base à l'impôt peuvent être différents pour chacune des deux années de cette période.

Les forfaits peuvent être modifiés en cas de changement d'activité ou de législation nouvelle.

Ils peuvent faire l'objet d'une reconduction tacite pour une durée d'un an renouvelable. Dans ce cas, le montant du forfait retenu pour l'application de l'impôt est celui qui a été fixé pour la seconde année de la période biennale.

Ces forfaits peuvent être dénoncés :

- par l'entreprise, avant le 16 février de la deuxième année qui suit la période biennale pour laquelle ils ont été conclus et, en cas de tacite reconduction, avant le 16 février de la deuxième année qui suit celle à laquelle s'appliquait la reconduction ;

- par l'administration, pendant les trois premiers mois des mêmes années.

B. LES PROCÉDURES DE DÉTERMINATION FORFAITAIRE

1. Les modalités de détermination du forfait

a. Une procédure contradictoire

L'article L. 5 précise les modalités de fixation du forfait.

L'administration des impôts adresse à l'exploitant placé sous le régime du forfait de bénéfice industriel et commercial et de chiffre d'affaires une notification mentionnant pour chacune des années de la période biennale, d'une part le bénéfice imposable et d'autre part les éléments qui concourent à la détermination des taxes sur le chiffre d'affaires.

L'intéressé dispose d'un délai de trente jours à partir de la date de réception de cette notification, soit pour faire parvenir son acceptation, soit pour formuler ses observations en indiquant les chiffres qu'il serait disposé à accepter.

En cas d'acceptation globale ou d'absence de réponse dans le délai fixé, les forfaits de bénéfice et de chiffre d'affaires notifiés servent de base à l'imposition. Si l'intéressé n'accepte implicitement ou tacitement que l'un des deux forfaits, celui-ci sert également de base à l'imposition correspondante.

Dans le cas où l'administration accepte les contre-propositions concernant les deux forfaits ou l'un des deux seulement, elle informe expressément le contribuable de son accord.

b. Une procédure de conciliation

Si l'intéressé n'accepte pas le forfait qui lui a été notifié et si l'administration ne retient pas les contre-propositions qu'il a faites, le forfait sur lequel porte le désaccord est fixé par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Le chiffre arrêté par cette commission selon la procédure suivie à l'article L. 60 sert de base à l'imposition.

Dans tous les cas, l'intéressé conserve la possibilité, après la fixation du forfait, de demander la réduction de l'imposition au moyen d'une réclamation contentieuse, dans les conditions fixées aux articles L. 190 à L. 198.

2. Les obligations auxquelles sont soumises les entreprises

a. L'obligation de déclaration

L'article 111 septies prévoit que les entreprises sont tenues de souscrire, avant le 16 février de chaque année, au titre de l'année précédente, une déclaration en triple exemplaire contenant les renseignements nécessaires à leur identification et à la fixation de leur forfait de bénéfice ou de chiffre d'affaires.

Aux termes de l'article 111 octies, l'administration procède, d'après les renseignements dont elle dispose et ceux qu'elle peut être amenée à demander à l'entreprise, à l'évaluation du bénéfice que celle-ci peut produire normalement et des éléments qui concourent à la détermination du montant de la taxe sur la valeur ajoutée et des taxes assimilées.

b. Les sanctions prévues

Le défaut de production des déclarations exigées n'est sanctionné que par l'amende fiscale prévue à l'article 1725 du code général des impôts.

Aux termes de celui-ci, "le défaut de production dans les délais prescrits de l'un des quelconques documents, tels que déclarations, états, relevés, extraits, pièces ou copies de pièces, qui doivent être remis à l'administration fiscale donne lieu à l'application d'une amende fiscale de 100 francs.

L'administration peut adresser, par pli recommandé avec avis de réception, une mise en demeure d'avoir à fournir les documents sus-mentionnés dans un délai de trente jours. A défaut de production dans ce délai, l'amende est portée à 1.000 francs. Sauf cas de force majeure, la non-production des documents susmentionnés dans un délai de trente jours après une nouvelle mise en demeure notifiée par l'administration, dans les mêmes formes, donnent lieu aux peines prévues par l'article 1726".

Cet article prévoit que, "sauf cas de force majeure, les omissions ou inexactitudes relevées dans les renseignements que doivent comporter les documents mentionnés à l'article 1725 ainsi que l'omission totale de ces renseignements donnent lieu à l'application d'une amende de 100 francs par omission ou inexactitude, avec un maximum de 1.000 francs pour chaque document omis, incomplet ou inexact".

Le troisième alinéa de l'article 1725 ajoute toutefois que, "sous réserve que l'infraction soit réparée spontanément ou à la première demande de l'administration, dans les trois mois suivant celui au cours duquel le document omis aurait dû être produit, l'amende n'est pas appliquée si le contribuable atteste, sous le contrôle de l'administration, n'avoir pas commis depuis au moins quatre ans d'infraction relative à un document de même nature ".

L'administration dispose donc de peu de moyens de pression pour obliger les contribuables à déposer leurs déclarations. Les sanctions ne sont guère dissuasives et leur application effective est assez rare.

En outre, devant la mauvaise volonté des contribuables, l'administration ne dispose d'aucune technique d'imposition d'office. Elle est obligée d'appliquer la procédure du redressement contradictoire.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. L'ARTICLE 79 PROPOSE D'ETENDRE LA PROCEDURE D'IMPOSITION D'OFFICE AUX CONTRIBUABLES IMPOSES SELON LE REGIME DU FORFAIT

Cet article vise à augmenter les pouvoirs de l'administration face aux contribuables forfaitaires qui ne lui ont pas transmis de déclaration. Il propose d'autoriser l'administration fiscale à avoir recours à l'imposition d'office afin de raccourcir les délais entre la constatation par l'administration de la non-déclaration et le recouvrement effectif de l'impôt résultant du forfait. En effet, l'administration fixe alors le montant de l'impôt dû sans que la procédure de redressement contradictoire s'applique. En outre, la preuve est à la charge du contribuable.

La procédure de taxation d'office s'applique déjà à l'impôt sur le revenu, à l'impôt sur les sociétés, aux taxes sur le chiffre d'affaires pour les entreprises soumises au régime simplifié d'imposition, aux droits d'enregistrement et aux taxes assimilées et, enfin, aux taxes assises sur les salaires.

B. LES AMENAGEMENTS A APPORTER AU DROIT EXISTANT

Le paragraphe I du présent article étend le champ de taxation d'office aux taxes sur le chiffre d'affaires, prévue au 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, au cas de l'absence de dépôt dans le délai légal de la déclaration des contribuables imposés selon le régime du forfait prévue dans l'article 302 sexies du code général des impôts.

Aux termes de l'article L. 76. "les bases ou les éléments servant de calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination. Cette notification est interruptive de prescription".

"La prescription de sanctions fiscales autres que celles visées au troisième alinéa de l'article L. 188 (amendes et confiscations prononcées par la juridiction pénale) est interrompue par la mention portée sur la notification de redressements qu'elles pourront être éventuellement appliquées".

Le paragraphe II du présent article étend l'évaluation d'office au bénéfice des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales et qui sont imposables selon le régime du forfait.

Jusqu'à présent, pouvaient être évalués d'office aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales :

- "le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales ou d'exploitations agricoles lorsque ces contribuables sont imposables selon un régime de bénéfice réel et que la déclaration annuelle des résultats n'a pas été déposée dans le délai légal" ;

- "le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés, quel que soit le régime d'imposition, lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 ou à l'article 101 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal" ;

- "les revenus fonciers des contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes de justification mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 16".

L'évaluation d'office n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure.

Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure si le contribuable change fréquemment son lieu de résidence ou de principal établissement, ou a transféré son activité à l'étranger sans déposer de déclaration de ses résultats ou de ses revenus non commerciaux, ou ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce ou d'un organisme consulaire, ou si un contrôle fiscal n'a pas pu avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers (article L. 68 du livre des procédures fiscales).

Le paragraphe III, enfin, complète le 5 de l'article 302 ter du code général des impôts par un alinéa qui dispose qu'en cas de taxation ou d'évaluation d'office, le chiffre d'affaires et le bénéfice sont fixés par année civile pour les périodes d'imposition correspondantes.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification

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