CHAPITRE PREMIER - LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE L'ÉNERGIE

Deux volets essentiels de la politique européenne dans le secteur de l'énergie méritent un développement particulier cette année. Il s'agit :

- de la construction du marché intérieur de l'électricité et du gaz ;

- de projets communautaires en matière d'environnement (écotaxe et programme Save II).

I. LE MARCHÉ INTÉRIEUR DE L'ÉLECTRICITÉ ET DU GAZ

A. LA DÉRÉGULATION DOIT S'ACCOMPAGNER DE LA RECONNAISSANCE DES MISSIONS DE SERVICE PUBLIC

L'ouverture à la concurrence de secteurs jusqu'ici réservés à des monopoles (qu'il s'agisse de l'électricité, du gaz, mais aussi des services postaux, etc..) ne peut se concevoir que si l'Europe préserve la notion même de service public.

Or jusqu'ici, la commission européenne a surtout affirmé la primauté de la concurrence.

Elle a récemment fait un pas dans la bonne direction en approuvant, le 11 septembre dernier, une « communication » dans laquelle elle propose d'inscrire parmi les actions de la Communauté énumérées dans le Traité de Maastricht : « une contribution à la promotion des services d'intérêt général ».

Cette avancée est cependant modeste et les commissaires ont décidé de revenir sur ce sujet à l'occasion des travaux de la Conférence intergouvernementale sur la réforme institutionnelle de l'Union.

A l'occasion du Conseil européen extraordinaire qui s'est réuni à Dublin le 5 octobre dernier, le Gouvernement français a proposé d'intégrer les services publics dans le Traité de l'Union (en complétant son article 90) et d'y stipuler notamment que « la Communauté tient compte à l'égard des organismes ou entreprises chargés d'assurer des missions d'intérêt général des conditions dans lesquelles ils interviennent et des contraintes auxquelles ils sont soumis ».

Votre commission attache la plus grande importance à ce que la définition et les attributs des missions de service public soient clairement précisés dans le Traité.

Dans ce contexte, quel est l'état d'avancement des projets de directives sur le marché intérieur de l'électricité et du gaz ?

B. LE MARCHÉ INTÉRIEUR DE L'ÉLECTRICITÉ

1. Un bref historique

Rappelons tout d'abord brièvement l'historique de ce débat qui a donné lieu à neuf années de négociations difficiles, avant d'aboutir à une position commune du Conseil extraordinaire des ministres de l'énergie le 20 juin 1996, position qui tient compte des thèses défendues par la France.

- Mai 1987 : début du processus de concertation enclenché avec les États membres sur le marché intérieur de l'électricité.

- Février 1992 : la commission européenne propose une directive donnant le droit à tous les clients et compagnies de distribution de choisir leur fournisseur d'électricité à partir de 1996, et imposant la séparation comptable et de gestion des activités production, transport et distribution. Ce projet proposait également un système d'accès de tiers au réseau automatique et tarifé, ignorant les notions de service public et de planification à long terme.

- Mai 1992 : le Conseil des ministres refuse le projet de directive et invite la commission à revoir son texte en tenant compte des positions des ministres de l'Énergie et de l'avis du Parlement.

- Novembre 1993 : le Parlement européen amende le projet de directive en prenant en compte la nécessité de concilier l'introduction de la concurrence et le respect des missions d'intérêt économique général confiées aux entreprises du secteur électrique. Il reconnaît également la possibilité aux pays européens de maintenir une planification des investissements à long terme. Enfin, il introduit la substitution d'un accès des tiers au réseau négocié à l'accès des tiers au réseau obligatoire préconisé par la commission.

- Février 1994 : un nouveau projet de directive tenant compte de ces suggestions est élaboré.

- Avril 1994 : la Cour de Justice rend l'arrêt Almelo. Les missions d'intérêt économique général sont reconnues pour le secteur électrique.

- Septembre 1994 : la France demande que chaque État puisse choisir le système le mieux adapté à ses spécificités nationales et propose son propre système : l'Acheteur unique.

- Novembre 1994 : le Conseil invite la commission à examiner la coexistence de systèmes différents en Europe.

- Mars 1995 : la commission prend position sur le système d'Acheteur unique.

Les aménagements qu'elle propose conduisent à dénaturer le modèle proposé par la France. - Juin 1995 : le Conseil des ministres de l'Énergie reconnaît le droit aux États qui le souhaitent de confier des missions d'intérêt économique général aux entreprises du secteur électrique.

- 7 mai 1996 : le Conseil des ministres de l'Énergie définit les principes et la structure de la proposition de directive.

- 20 juin 1996 : position commune au Conseil extraordinaire des ministres de l'Énergie réunis à Luxembourg.

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