2. LES DIFFICULTÉS RENCONTRÉES

Ainsi, certains étrangers, " protégés " contre une mesure d'éloignement, bénéficient par ailleurs de plein droit d'une carte de résident ou d'une carte de séjour temporaire.

Il reste des étrangers qui ne peuvent être éloignés du territoire, conformément à l'article 25 de l'ordonnance, et qui n'entrent pas dans les catégories bénéficiant de plein droit d'un titre de séjour.

Il en résulte des situations paradoxales où un étranger peut être ni éloignable ni bénéficiaire de plein droit d'un titre de séjour.

L'étude d'impact du projet de loi explique en ces termes ces situations :

" En 1993, les catégories d'étrangers bénéficiant de plein droit d'une carte de résident ont été modifiées pour éviter des fraudes et pratiques abusives et faire en sorte que des étrangers ne puissent pas bénéficier de dispositions dérogatoires alors même qu'ils ne remplissent manifestement pas les conditions pour s'en prévaloir.

Toutefois, il s'avère qu'en maintenant dans sa rédaction ancienne l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 qui donne la liste des étrangers protégés contre une mesure d'éloignement, la loi a favorisé l'émergence de situations complexes. "

Votre rapporteur relève que si le titre de séjour n'est pas attribué de plein droit, les préfets ont néanmoins toujours la faculté d'attribuer ce titre, notamment au vu de la situation personnelle et familiale de l'intéressé.

Mais, ainsi que le relève l'étude d'impact :

" Actuellement, pour toutes ces catégories, les préfectures sont placées dans une situation délicate. Des refus de séjour peuvent être opposés aux intéressés sur le fondement d'une interprétation stricte des dispositions de l'ordonnance de 1945, en ayant sous-estimé parfois les conséquences que peuvent avoir de telles décisions dans certains cas particuliers dignes d'intérêt sur un plan familial voire simplement pratique, en raison du fait que les personnes en cause ne peuvent être éloignées du territoire français. "

Ces difficultés ont notamment motivé la circulaire prise, dès 1994, par M. Charles Pasqua, ministre de l'Intérieur, qui a donné des recommandations aux préfets pour régler la situation des conjoints de Français, mariés depuis plus d' un an (circulaire du 8 février 1994).

De même, plusieurs circulaires du ministre de l'Intérieur (5 mai et 13 juin 1995, 9 juillet 1996) ont facilité le règlement des situations paradoxales dans lesquelles se trouvaient des parents d'enfants français.

Pour autant, comme l'ont mis en évidence certains cas récents ayant donné lieu à l'occupation de l'église Saint-Bernard à Paris, les préfectures restent confrontées à des situations extrêmement complexes .

Saisi par le ministre de l'Intérieur, le Conseil d'Etat a rendu, le 22 août 1996, un avis suggérant certains principes pouvant guider l'action du Gouvernement en la matière.

Notons d'emblée que le Conseil d'Etat a considéré qu'il ne peut exister un droit à la régularisation ou au séjour. L'autorité administrative peut y procéder, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, en raison de la situation particulière dans laquelle se trouve le demandeur.

Néanmoins le pouvoir d'appréciation de l'administration est plus limité lorsque le demandeur peut faire valoir le droit à une vie familiale normale, lui-même reconnu par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme. En outre, si l'administration prend sa décision en opportunité, elle ne peut refuser le séjour et, par voie de conséquence prendre une mesure d'éloignement, lorsque sa décision pourrait avoir des conséquences d'une gravité exceptionnelle sur la situation personnelle du demandeur, notamment lorsque l'état de santé de celui-ci est sérieusement en cause.

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