III. LES POUVOIRS PUBLICS FACE AU SATELLITE

A. LE MARCHÉ SUR ORBITE

1. Le marché français

En quinze ans, l'offre télévisuelle française est passée de trois chaînes à 85 (sans compter les 74 canaux locaux du câble). Habitués depuis plusieurs années aux sept chaînes hertziennes généralistes, les Français ont adopté le câble pour 2 200 000 d'entre eux et ont fait de leur pays le premier marché européen de la télévision satellitaire numérique tant en termes de bouquets que d'abonnés.

Le premier semestre 1997 aura été l'occasion d'une accélération de cette explosion de l'offre. Tous les supports en auront profité : numérisation du câble, numérisation du satellite, expérience du MMDS numérique - à Felletin .

La présence de trois bouquets, fait unique en Europe, gage de concurrence, est à l'origine d'une guerre commerciale qui explique le fort développement de la demande.

Les chaînes hertziennes terrestres

Chaînes

Genre

Financement

Diffusion

Publiques

 
 
 

France 2

Généraliste

Redev., Pub.

Hertz, Câble, Sat

France 3

Généraliste

Redev., Pub.

Hertz, Câble, Sat

Arte

Culturelle

Redev.

Hertz, Câble, Sat

La Cinquième

Educative

Redev., Pub.

Hertz, Câble, Sat

RFO 1

Général. + locale

Redev., Pub.

Hertz, Câble

RFO 2

Généraliste

Redev.

Hertz, Câble

Commerciales

 
 
 

TF1

Généraliste

Pub., Parrainage

Hertz, Câble, Sat

Canal +

Sport, cinéma

Péage, Pub.

Hertz, Câble, Sat

M6

Généraliste

Pub., parrainage

Hertz, Câble, Sat

Aqui TV (Périgord)

Proximité

Pub., parrainage

Hertz, Câble

TLT (Télé Toulouse)

Proximité

Pub., parrainage

Hertz, Câble

TLM (Télé Lyon Métrop.)

Proximité

Pub., parrainage

Hertz, Câble

TMC (Télé Monte Carlo)

Généraliste

Pub., péage sur Sat.

Hertz, Câble, Sat

Antenne Réunion

Proximité

Pub., parrainage

Hertz

TV4 (Réunion)

Proximité

Pub., parrainage

Hertz

TV Sud (Réunion)

Proximité

Pub., parrainage

Hertz

ATV (Antilles Télévision)

Proximité

Pub., parrainage

Hertz, Câble

ACG (Antenne Créole Guyane)

Proximité

Pub., parrainage

Hertz, Câble

Canal Antilles

Sport, cinéma

Péage

Hertz, Câble

Canal Guyane

Sport, cinéma

Péage

Hertz

Canal Réunion

Sport, cinéma

Péage

Hertz

Canal Calédonie

Sport, cinéma

Péage

Hertz

Canal Polynésie

Sport, cinéma

Péage

Hertz

Les bouquets satellitaires numériques

Bouquet

Offre

Financement

Diffusion

AB Sat

20 chaînes thématiques

Péage : de 49 à 139 francs

Satellite Eutelsat Hot Bird (13° Est)

CanalSatellite

Basic : 25 chaînes
Options : cinéma, musique, Disney Channel...
C: : jeux et logiciens
C+ : 3 versions

Péage : à partir de 98 francs

Options : de 30 à 50 francs
Publicité

Satellite
Astra 19,2° Est

TPS

Cinéma : 3 chaînes
Thématiques : 16 chaînes
Option Arabesque : 7 chaînes

Péage : de 90 à 150 francs

Satellite
Eutelsat Hot Bird
13° Est

Les chaînes thématiques françaises du câble et du satellite

Chaîne

Thème

Financement

Diffusion

AB Cartoons

Dessin animé

Péage

Câble, sat

AB 1

Famille

Péage

Câble, sat

Action

Fiction/Cinéma

Péage

Câble, sat

AB Animaux

Animaux

Péage

Câble sat

AB Sports

Sport

Péage

Câble, sat

Automobile

Automobile

Péage

Câble, sat

Fit TV-Vive la vie

Santé, beauté, forme

Péage

Satellite

Bloomberg TV

Finances

Basic, gratuit

Câble, sat

Canal Assemblées

Parlememntaire

Basic, gratuit

Câble, sat

Canal Auto

Automobiles

Péage option

Câble, sat

Canal Course

Hippisme

Péage

Satellite

Canal J

Jeunesse

Péage, Pub.

Câble, sat

Canal Jimmy

Fictions

Péage, Pub.

Câble, sat

Cartoon Network

Dessins animés

Péage, Pub.

Câble, sat

Chasse et pêche

Chasse, pêche

Péage, Pub.

Câble, sat

Ciné-Cinéfil

Ciné-Club

Péage option

Câble sat

Ciné-Cinéma

Cinéma

Péage option

Câble, sat

Ciné-Palace

Cinéma

Péage option

Satellite

Cinéstar 1 & 2

Cinéma

Péage option

Câble, sat

Cinétoile

Cinéma

Péage option

Câble, sat

Contact TV

Petites annonces

Péage

Câble, Sat

C :

Jeux, logiciels

Péage option

Satellite

Disney Channel

Enfants

Péage option

Câble, sat

Encyclopedia

Documentaires

Péage

Câble, sat

Escales

Découvertes

Péage

Câble, Sat

Les chaînes thématiques françaises du câble et du satellite

Chaîne

Thème

Financement

Diffusion

Euronews

Information

Péage

Câble, sat

Eurosport

Sports

Péage, Pub

Câble, sat

Evasion

Loisirs, voyages

Péage, pub

Câble, sat

Fashion TV

Mode

Péage, pub

Satellites

Festival

Fiction

Péage

Câble, sat

France-Courses

Hippisme

Péage

Satellite

France Supervision

Spectacles 16/9

Péage

Câble, sat

Fun TV

Musique

Péage, pub

Câble, sat

La Chaîne Histoire

Histoire

Péage

Câble, sat

Histoire

Histoire

Péage

Câble, sat

Kiosque

PPV cinéma, sport

Option à la séance

Satellite

LCI

Information

Péage

Câble, sat

La Chaîne Météo

Météorologie

Péage

Câble, sat

MCM

Musique

Péage, pub

Câble, sat

Monte Carlo TMC

Généraliste

Péage, pub

Câble, sat

Multivision

PPV cinéma, sport, spectacle

Option à la séance

Câble, sat

Musique Classique

Musique class.

Péage

Satellite

Muzzik

Musique class., jazz

Péage option

Câble, sat

Nostalgie la Télé

Musique

Péage

Câble, sat

Odyssée

Documentaire

Péage, pub

Câble, sat

Paris Première

Culture

Péage, pub

Câble, sat

Planète

Documentaire

Péage, pub

Câble, sat

Polar

Fictions/Cinéma

Péage

Câble, sat

Rendez-vous

Spectacles

Péage

Câble, sat

Rire

Fictions/Cinéma

Péage

Câble, sat

Romance

Fictions/Cinéma

Péage

Câble, sat

RTL 9

Généraliste

Péage, pub

Câble, sat

Seasons

Chasse, pêche

Péage option

Satellite

Série Club

Séries

Péage

Câble, sat

Spectacle

TV Achat culturel

Péage

Câble, sat

Télétoon

Dessins animés

Péage, pub

Câble, sat

Télézoom

Fictions

Péage, pub

Satellite

Téva

Femmes

Péage, pub

Câble, sat

TV5

Généraliste

Gratuit

Câble, sat

Voyage

Loisirs

Péage

Câble, sat

VH-I

Musique

Péage

Satellite

XXL

Érotisme

Péage

Câble, sat

Source : les opérateurs AB Sat, CanalSatellite et TPS, septembre 1997

En complément de ces données, on peut citer, pour évaluer le potentiel à court terme du marché de la télévision numérique, une étude par sondage selon laquelle :

- 71 % des Français se contentent d'une installation hertzienne de base,

- 25 % possèdent en plus un abonnement à un système de télévision à péage (19 % pour Canal +, 9 % pour le câble et 3 % pour le satellite).

On note que, selon cette enquête, 4 % des foyers français ne possèdent pas de téléviseur. A partir de ces chiffres, il était possible d'estimer à 800 000 foyers le marché potentiel, pour les prochains mois, de la télévision numérique.

A l'heure actuelle, les deux principaux bouquets, Canal + et TPS, affichent des résultats encourageants. TPS, qui compte déjà 230 000 abonnés, en espère au moins 300 000 pour la fin de l'année et se fixe comme objectif le million d'abonnés pour l'an 2000. Son concurrent, CanalSatellite, revendique de son côté quelque 400 000 abonnés et affirme pouvoir atteindre le nombre de 600 000 abonnements fin 1997.

Un autre fait significatif est l'annonce par le troisième bouquet français, AB Sat, de son articulation sur le dispositif technique de CanalSatellite. Les abonnés pourront effectivement recevoir les deux bouquets sur le même décodeur.

Cette initiative s'explique par des raisons politiques pour Canal + et économiques pour AB Sat. Le premier démontre ainsi qu'il est ouvert à la concurrence, tandis que le second se donne les moyens d'éviter le handicap résultant de sa petite taille avec ses seuls 20 000 abonnés.

Les deux sociétés restent concurrentes, mais ont considéré qu'elles progresseront plus vite, chacune de leur côté, en utilisant le même matériel de réception. Peut-être veulent-elles aussi encourager les pouvoirs publics à accélérer la mise en place d'accords permettant la mise en place de décodeurs, sinon uniques du moins compatibles, à travers toute l'Europe ?

A moyen terme, les perspectives de la télévision payante en France apparaissent particulièrement florissantes. Une étude récente fait état d'une croissance rapide du chiffre d'affaires de ce secteur, qui passerait de plus de 15 milliards de francs en 1997 à plus de 23 milliards de francs en 2001.

La TV payante en France *

 

1997

1998

1999

2000

2001

Câble

3 518 040

3 705 000

3 823 560

3 915 900

3 975 180

Satellite

2 145 840

3 379 680

4 750 320

6 166 560

7 582 800

Canal +

9 702 090

10 187 195

10 696 554

11 231 382

11 792 951

Total

15 365 970

17 271 875

19 270 434

21 313 842

23 350 931

* Chiffre d'affaires en francs

2. Le contexte européen

Pour placer dans leur contexte ces données, on peut faire état d'une dernière étude, publiée à l'occasion du MIPCOM de Cannes, qui analyse le développement de la télévision numérique en Europe.

Selon celle-ci, le marché européen de la télévision, du câble et du satellite " dépasse celui des États-Unis ".

L'Europe compte, en effet, 80 millions de foyers 35( * ) équipés pour recevoir le câble et le satellite contre 70 millions aux États-Unis. Cependant relève l'étude, " la pénétration du câble et du satellite est moins importante en Europe avec un taux de 33 % comparé aux 73 % du marché nord américain ", ce qui fait espérer un important potentiel de croissance.

L'offre télévisuelle a fortement progressé sur le vieux Continent avec 400 chaînes en 1996 - contre 303 l'année précédente - qui se répartissent en 7 bouquets numériques. Sur ces 400 chaînes, 111 sont publiques et 40 sont des chaînes payantes, tandis que 25 sont paneuropéennes. Contrairement à ce qui se passe en Amérique où les chaînes leaders en terme d'audience sont privées, en Europe, la chaîne de tête dans 16 des 33 pays observés reste une chaîne publique, et, quand ce n'est pas le cas, celle-ci reste dans les toutes premières places du palmarès. En ce qui concerne les chaînes paneuropéennes, l'enquête montre que les chaînes les plus regardées sur le câble et le satellite, sont Eurosport avec 72,1 millions de foyers, CNN (62,2 millions), NBC (47,6) et MTV Europe (43,5).

Le marché de la télévision payante représente 4 milliards de dollars (environ 20 milliards de francs), en Europe, où l'on dénombre 15 millions de foyers abonnés à au moins une chaîne de télévision payante. Enfin pour la télévision numérique, l'étude note que " 1996 restera comme une année de transition car la télévision elle-même est entrée dans l'ère du numérique mais pas encore les téléspectateurs ". Le marché du numérique en Europe devrait atteindre 1 milliard de dollars de chiffre d'affaires d'ici 2001.

B. LA PARTICIPATION DU SECTEUR PUBLIC AUX BOUQUETS NUMÉRIQUES

Un simple regard sur les évolutions en cours et, plus encore, sur les évolutions à venir, conduit à considérer que, sauf à accepter de perdre progressivement son audience - à mesure que la multiplication de l'offre numérique réduira l'écoute des chaînes hertziennes analogiques - et par voie de conséquence, de voir s'éroder ses sources de financement et mettre en cause sa légitimité, la télévision publique doit être présente sur le marché de la télévision numérique.

1. Exclusivité ou libre accès au service public?

Même si la question semble aujourd'hui tranchée par le Gouvernement en faveur du libre accès, il n'est pas inutile de rappeler en quels termes se pose le problème et en particulier les arguments de ceux qui défendaient le principe d'une participation active aux bouquets numériques.

Si les chaînes publiques se cantonnent dans un rôle d'éditrices de programmes, elles deviennent dépendantes des opérateurs de bouquets pour la diffusion de ces programmes . A terme, les distributeurs pourraient même estimer que les programmes des chaînes publiques n'ont plus leur place sur un bouquet qu'ils ne valorisent pas suffisamment. Certains, dès lors, admettent une prise de participation - mais minoritaire - au sein de sociétés avec des opérateurs privés.

A cet égard, quelques principes fondamentaux nous paraissent devoir être retenus :

- il y a place pour une offre spécifique de programmes publics sur le satellite . Il est d'abord normal que les citoyens aient accès au progrès technologique apporté par le satellite à la diffusion des programmes des télévisions publiques. Par ailleurs, le multiplexage devrait permettre aux chaînes publiques une programmation décalée et diversifiée de toute la gamme d'émissions de leur grille. En outre, avec le satellite, les programmes des chaînes publiques pourraient couvrir un territoire plus étendu que le seul territoire national, contribuant ainsi à une meilleure diffusion des programmes français hors de l'Hexagone, et donc au renforcement de la présence française à l'étranger ;

- D'une façon générale, il est clair que, conformément aux principes du service public, ceux d'entre eux qui reprennent les chaînes publiques existantes devront, à terme, être gratuits et librement accessibles grâce à un système ouvert de décodage.

- enfin, ainsi que l'a souligné à juste titre le rapport Chazal, les objectifs ambitieux assignés à la télévision publique impliquent, eu égard à l'importance des moyens à engager, une nécessaire coordination des moyens techniques, artistiques (notamment les programmes) et commerciaux propres à assurer à la fois des économies d'échelle et une plus forte efficacité des actions.

Or jusqu'ici, en dépit de certaines coopérations ponctuelles, les initiatives publiques sont le plus souvent dispersées, les opérateurs du secteur public mettant le plus souvent en avant leurs intérêts particuliers d'entreprise.

2. La chaîne Histoire et le problème de la participation du secteur public au montage de chaînes thématiques

Après des mois d'hésitations, la chaîne " Histoire " a enfin vu le jour. Les premières émissions ont été diffusées depuis juillet 1997 sur les réseaux de Paris de la Lyonnaise Câble et depuis septembre sur TPS.

· Le montage juridique et financier

Après l'échec d'un premier projet comprenant Pathé, un nouveau schéma a pu être monté. Par arrêté du 27 mai 1997, l'Institut National de l'Audiovisuel a été autorisé " à prendre une participation financière de 1 440 000 francs représentant 16 % du capital de la société anonyme à créer, chargée d'acquérir 60 % du capital, fixé à 15 000 000 francs, de la société d'édition du programme thématique de télévision consacré à l'histoire et destiné à être distribué sur les réseaux câblés et les satellites de diffusion en direct ".

Ce texte décrit avec précision la démarche de l'opération qui se développe avec la participation de PATHÉ à deux niveaux :

- Mise en oeuvre d'une holding, dénommée " holding histoire ", regroupant les intérêts des organismes publics ;

- Création d'une société d'édition, dite " chaîne Histoire ".

La holding histoire

Créée en juin 1997, la " holding histoire ", société anonyme à conseil d'administration, a permis de constituer dans l'opération un pôle public fort. L'apport financier des différents actionnaires de la holding a été fixé à 9 millions de francs, représentant 60 % du capital de la société d'édition de la chaîne Histoire (fixé à 15 millions de francs). Cet apport financier est réparti comme suit :

- France Télévision : 42 %, soit 3 780 000 francs,

- La Sept Arte : 42 %, soit 3 780 000 francs,

- l'INA : 16 %, soit 1 440 000 francs.

La société d'édition

La chaîne "Histoire" est également une société anonyme à conseil d'administration. Son objet social est la production et l'édition d'un programme consacré à l'histoire, destiné à être diffusé par les réseaux câblés et les satellites.

Son capital, fixé à 15 millions de francs, a été souscrit à hauteur de :

- 60 % (soit 9 millions) par la holding décrite ci-dessus, constituée par France Télévision, la Sept-Arte et l'INA,

- 20 % (soit 3 millions de francs) par ARCHIMEDIA, fonds de placement constitué par le GAN et le CIC,

- 10 % (soit 1,5 million de francs) par France Télécom Multimédia,

- 10 % (soit 1,5 million de francs) par la Lyonnaise de Communication.

Un financement complémentaire est prévu sous la forme d'avances d'actionnaires, pour un montant total de 35 millions de francs, versées au cours des années 2 à 4, à raison de :

- 20 millions de francs en année 2,

- 12 millions de francs en année 3,

- 3 millions de francs en année 4.

Ces avances, rémunérées au prix du marché, sont remboursables par tranche, en trois ans, à partir de l'année 5. Elles sont versées par les actionnaires au prorata de leur participation au capital de la chaîne "Histoire", soit 9,6 % pour l'INA (16 % de 60 %).

Enfin, la chaîne "Histoire" est dotée de moyens en personnels limités comportant, outre un président-directeur général et un responsable de la promotion à temps partiel, un effectif (directeur général y inclus) de six agents permanents.

· Le programme de la chaîne "Histoire"

Son lancement a eu lieu le 12 juillet 1997 dans le bouquet satellitaire de TPS, dans l'option thématique des réseaux de la Lyonnaise de Communication et, avec une montée en charge progressive, dans ceux de France Télécom.

Les distributeurs rémunèrent le programme histoire au prix de 3 francs par mois et par abonné desservi (quel que soit le support, câble ou satellite).

La chaîne "Histoire" diffuse tous les jours 12 heures de programmes. Ceux-ci commencent à midi pour s'achever autour de minuit. La chaîne propose au moins 14 heures nouvelles par semaine.

La grille ne comporte pas de direct. Il est prévu une montée en charge progressive des programmes, avec en septembre, si les conditions économiques le permettent, la mise en place d'un rendez-vous quotidien.

Dans la construction de la grille, les responsables de la chaîne ont eu le souci d'offrir aux téléspectateurs des rendez-vous simples, faciles à identifier et à mémoriser.

Ainsi, tous les programmes sont proposés en première diffusion, entre 20 heures 30 et 22 heures 30 et sous forme de modules de deux heures soit thématiques, soit composés de deux rendez-vous.

Chaque module, ensuite, est multidiffusé six fois en quinze jours maximum.

La multidiffusion est organisée selon un système simple et unique quel que soit le genre du programme ou le module.

Tous les rendez-vous sont aujourd'hui hebdomadaires. Il est prévu par la suite d'installer un ou deux rendez-vous quotidiens. Les programmes sont, autant que possible, choisis pour répondre aux exigences de l'actualité et au calendrier des anniversaires historiques.

· La question de principe

Les uns estiment qu'en tant qu'entreprises, les chaînes publiques doivent être libres de valoriser leurs atouts et leur savoir-faire en développant les chaînes thématiques de leur choix et en assurant les collaborations correspondant à leurs meilleurs intérêts commerciaux, dès lors qu'elles se financent sur leurs ressources propres et ne bénéficient pas à ce titre d'un financement public.

Le secteur public étant de loin le plus grand détenteur de droits sur des programmes fort recherchés, à savoir les programmes de patrimoine, on peut considérer effectivement comme normal que ce soit lui qui exploite cette richesse en éditant lui-même des programmes et services thématiques 36( * ) .

Les autres se demandent si le lancement de chaînes thématiques rentre bien dans les missions de service public.

Le rôle du secteur public est avant tout de diffuser des programmes généralistes, dont on a souligné l'importance du point de vue de ce renforcement du lien social dans une société menacée, si ce n'est d'éclatement, du moins de fragmentation.

Il n'est pas évident de ce point de vue, qu'il soit dans la vocation de service public de prendre l'initiative de chaînes thématiques, ce qui est certes mettre en valeur un capital de compétence mais aussi prendre un risque entrepreneurial, d'autant plus contestable qu'il ne peut être pris qu'en association avec des partenaires privés. On se retrouve alors face aux risques de pertes qu'encourt inéluctablement toute société publique cherchant à commercialiser directement des produits dérivés, alors qu'elle pourrait se contenter simplement d'être prestataire de services ou vendeur de droits.

Au surplus, on peut faire remarquer que le financement de ce type d'initiative sur les fonds propres du secteur public ne constitue pas une règle claire dans la mesure où les ressources publiques ne sont ni définies ni affectées à l'avance à un certain type de dépense. Car c'est seulement dans ce cas que l'on pourrait considérer que l'entreprise publique a le droit de conserver le bénéfice de ses gains de productivité ou celui de ses efforts de commercialisation.

En définitive, on s'oriente vers la superposition de deux logiques : celle du service public, satisfaisante sur le plan des principes, pour les chaînes généralistes, celle d'entreprise, à l'évidence porteuse de dynamisme, pour les chaînes thématiques.

Une telle dichotomie est-elle parfaitement cohérente ? Sans doute pas, notamment au regard de l'objectif d'indépendance vis-à-vis du secteur privé qui conduit à proscrire tout lien d'exclusivité avec un bouquet numérique particulier.

D'une part, la position des éditeurs publics pourrait se révéler à terme fragile, dès lors qu'ils ne sont pas eux-mêmes actionnaires de l'opérateur du bouquet. Les opérateurs devraient normalement demander au service public de payer leur diffusion.

C'est d'ailleurs ce qui devrait se produire d'ores et déjà puisque la remise en cause de l'exclusivité conférée à TPS devrait, selon les réponses fournies à votre rapporteur spécial, conduire les chaînes publiques à financer leur canal de diffusion.

D'autre part, le lancement de chaînes thématiques suppose une mise de fonds dont le secteur public ne trouve que laborieusement les moyens ce qui pourrait le condamner à être "à la remorque" de ses partenaires privés, surtout si les recettes escomptées se font attendre.

A cet égard, les perspectives à cinq ans définies par France Télévision apparaissent relativement optimistes : les recettes pour les trois chaînes considérées, Festival 37( * ) , Histoire et Euronews, passeraient de 10 millions de francs en 1998 à plus de 40 millions de francs en 200/2001, moment où le petit équilibre devrait être atteint. Tant pour Festival que pour Histoire, le grand équilibre devrait être atteint en 2003. Pour Euronews un processus a été enclenché du fait, notamment, de sa commercialisation par CanalSatellite, pour que cette chaîne devienne payante. Le tableau ci-dessous précise, en l'état actuel des plans d'affaires, les besoins de financement des chaînes thématiques à couvrir par France Télévision.

 

Festival (1)

Euronews (2)

Histoire (3)

 

Participation de France Télévision

56 %

14,8 %

25,2 % (4)

 

dont France 2

28 %

7,4 %

12,6 %

 

France 3

28 %

7,4 %

12,6 %

 

Évolution de la distribution
(en nombre d'abonnés)

 


diffusion

 
 

1997

350 000

européenne

300 000

 

1998

467 000

câble,

696 000

 

2000

992 000

satellite,

1 302 000

 

2002

1 501 000

hertzien

1 864 000

 

Date du petit équilibre

2000

 

2000

 

Date du grand équilibre

2003

 

2003

 

Besoin de financement (5) :

 
 
 

Totaux

1997 : capital

-

-

3,8

 

comptes courants

5,6

1,7

-

26,4

1998 : capital

-

4,5

-

 

comptes courants

7,7

17

4,7

33,9

1999 : capital

-

-

-

 

comptes courants

4,3

17

2,8

24,1

2000 : capital

-

-

-

 

comptes courants

-

17

0,6

17,6

2001 : capital

-

-

-

 

comptes courants

-

-

-

0

TOTAUX

17,6

72,5

11,9

102

(1) source : plan d'affaires (juin 97)

(2) source : plan de développement Euronews

(3) source : plan d'affaires de référence (avril 97)

(4) France Numérique Télévision

(5) en millions de francs

Depuis le 27 juin 1996, le groupe France Télévision est associé avec France Télécom au sein du holding France Télévision Entreprises, dont France Télécom détient 66 % et France Télévision Numérique 34 %, le holding détenant 25 % du capital de TPS.

Selon le pacte d'associés, les actionnaires doivent investir 1,5 milliard de francs dans une première phase de 18 mois au plus suivant le démarrage commercial de l'offre, dont 750 millions de francs en capital et compte courant et 750 millions de francs en garantie d'emprunt. Une phase 2 prévoit un financement complémentaire de 1 milliard de francs dont 500 millions de francs en compte courant et 500 millions de francs en garantie d'emprunt.

Certes, les besoins d'investissements sont plus faibles que ceux exigés de l'actionnaire d'un bouquet numérique. Mais on peut craindre qu'ils restent suffisamment importants pour que le principe d'autofinancement des chaînes thématiques ne manifeste tôt ou tard ses limites, contraignant les pouvoirs publics à trouver des ressources publiques ou à systématiser les "joint ventures" avec le secteur privé, au risque d'affaiblir la position de principe prise pour les chaînes généralistes.

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