EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 19 novembre 1997, la commission a procédé, sur le rapport de M. Jacques Rocca Serra, rapporteur pour avis , à l'examen des crédits relatifs à la mer dans le projet de loi de finances pour 1998.M. Jacques Rocca Serra, rapporteur pour avis , a, d'abord, déclaré que les crédits inscrits au titre de la marine marchande pour 1998, en dotations ordinaires et crédits de paiement s'établissent à 5,619 milliards de francs, soit une légère baisse de 0,2 % par rapport au budget voté pour 1997.

Puis il a apporté les précisions suivantes :

- les moyens de fonctionnement du titre III augmentent de 7,6 % ;

- les dépenses d'intervention du titre IV diminuent de 0,5 % ;

- au titre V les autorisations de programme progressent de 23,8 % et les crédits de paiement de 3,8 % ;

-  au titre VI, les autorisations de programme enregistrent une réduction de 2,9 % tandis que les crédits de paiement sont en baisse de 2,14 %.

M. Jacques Rocca Serra, rapporteur pour avis , a, ensuite, ventilé les dotations en fonctions des agrégats :

- les crédits affectés à l'administration générale de la marine marchande (8 % de ce budget) enregistrent une progression de 11 % par rapport à 1997 ;

- les crédits consacrés aux " gens de mer " (2,4 % du budget) sont en diminution de 14 % ; la dotation de la formation professionnelle maritime passant, quant à elle, de 5,6 à 7 millions de francs pour les écoles nationales de la marine marchande ;

- la subvention d'équilibre à l'établissement national des invalides de la marine (ENIM) (82 % du budget) reste stable par rapport à l'année dernière ;

- les crédits consacrés à la signalisation et à la surveillance maritime (2 % du budget) sont en diminution de 6 % ;

- la subvention à la société nationale de secours en mer (SNSM) (4 millions de francs en fonctionnement et 9,6 millions en équipement) demeure stable par rapport à l'année dernière ;

- les crédits consacrés à la protection et à l'aménagement du littoral (0,3 % du budget) augmentent de 21 % en crédits de paiement ;

- enfin, les crédits consacrés à la flotte de commerce (6 % du budget) diminuent de 10 % en crédits de paiement (283 millions de francs) et de 4 % en autorisations de programme (190 millions de francs).

Abordant ensuite le budget des ports maritimes, M. Jacques Rocca Serra, rapporteur pour avis , a indiqué que les crédits inscrits à ce titre s'élèveraient à 592,7 millions de francs, en hausse de 1 % par rapport au budget de 1997.

Il a signalé que les dépenses d'intervention de ce budget -qui en représentent à elles seules les deux tiers- sont consacrées à l'entretien courant des six grands ports de la métropole.

En conclusion, le rapporteur pour avis a présenté trois observations.

En premier lieu, il a souligné que la marine marchande et les ports maritimes constituaient pour la France, riche d'une façade maritime exceptionnelle, un outil stratégique de première importance, au regard notamment de son indépendance nationale et que les budgets successifs n'avaient certainement pas pris la mesure de cette situation dans la période récente.

M. Jacques Rocca Serra, rapporteur pour avis, a ajouté qu'il importait de redonner à la France une grande ambition maritime en rappelant que le Président de la République était " particulièrement et personnellement attaché à une grande politique de la mer ", considérée par lui comme " une chance pour notre pays ".

M. Jacques Rocca Serra, rapporteur pour avis , a enfin regretté que le projet de budget -qui reconduit grosso modo les crédits votés l'année dernière- soit dépourvu de ce " souffle " qui avait fait naître l'an dernier beaucoup d'espoir.

En second lieu, M. Jacques Rocca Serra, rapporteur pour avis , a vivement dénoncé la décision du Gouvernement de supprimer le régime fiscal des quirats qui avait pour objectif de relancer l'investissement sous pavillon national et d'enrayer le déclin de la flotte de commerce française.

Après seulement un an d'existence, a-t-il ajouté, le nouveau dispositif fiscal a eu des effets extrêmement encourageants : 10 % de la flotte française ont été renouvelés, l'investissement maritime a plus que doublé (5 milliards de francs contre une moyenne annuelle de 2,2 milliards de francs précédemment) et 550 emplois de navigants et sédentaires ont été créés, alors que 300 pertes d'emplois de navigants avaient été enregistrées chaque année entre 1990 et 1995. Selon les estimations, a-t-il poursuivi, les commandes induites par la réforme des quirats ont permis de maintenir 4.700 emplois dans la construction navale.

Le rapporteur pour avis a encore indiqué que 16 navires neufs avaient été agréés au titre de la loi sur les quirats dont six seront construits dans les chantiers français (pour une valeur de 2,331 milliards de francs, contre 2,296 milliards de francs pour les 10 bâtiments construits dans les chantiers étrangers). Au mois de novembre 1996, a souligné le rapporteur pour avis, 3 navires français étaient en construction dans les chantiers français : il y en a 9 aujourd'hui.

M. Jacques Rocca Serra, rapporteur pour avis , a jugé en conséquence " gravissime " la décision du Gouvernement et de l'Assemblée nationale qui réduit à néant, selon lui, l'espoir de voir notre pays doté à nouveau d'une flotte de commerce digne de son rang dans le monde.

En troisième lieu, le rapporteur pour avis, s'exprimant aussi, à cet égard, en tant que président du groupe sénatorial d'études sur le canal Rhin-Rhône a mis l'accent sur l'intérêt économique, commercial et touristique d'un projet qui avait été souhaité par tous les présidents de la Cinquième République et fait l'objet d'un consensus des groupes parlementaires lors du vote de la loi d'orientation sur l'aménagement et le développement du territoire de 1995 qui avait retenu le principe de son achèvement et de son financement.

Le rapporteur pour avis a considéré, d'autre part, que la décision gouvernementale constituait un détournement de financement dans la mesure où la loi de 1995 avait doté le projet d'une ressource pérenne. Il a encore jugé que l'abandon du projet de canal mettait gravement en péril l'avenir des ports fluviaux de Strasbourg, Mulhouse et Lyon, les perspectives de développement pour Marseille et son " hinterland " mais aussi la renaissance de " l'arc latin " ainsi que la politique méditerranéenne de la France. Le rapporteur pour avis a encore déploré que la parole de l'Etat soit ainsi remise en cause.

En conclusion, M. Jacques Rocca Serra, rapporteur pour avis , a proposé à la commission de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur les crédits de la mer pour 1998.

M. Fernand Demilly a dénoncé, à son tour, la suppression du régime fiscal des quirats en rappelant qu'un dispositif de cette nature avait existé, avec succès, durant une vingtaine d'années en Allemagne et dans les pays scandinaves. Il a relevé que l'Allemagne, par exemple, possédait 1.500 navires en occupant le cinquième rang mondial pour sa flotte de commerce, la France n'en possédant que 350 dont 210 sous pavillon français et occupant aujourd'hui le vingt quatrième rang seulement dans le monde. D'autre part, a-t-il ajouté, 300 navires sont actuellement en construction en Allemagne contre 20 en France.

Soulignant enfin qu'un emploi créé en mer induisait la création de 3 emplois sur terre, M. Fernand Demilly a appelé de ses voeux une grande politique nationale de la marine marchande.

Il a encore souhaité que s'engage une réflexion d'ensemble entre les différents acteurs sur la protection du littoral en évoquant plus particulièrement le cas de la Somme et de la Haute-Normandie.

M. Fernand Demilly a estimé qu'il y avait là une lacune de la décentralisation.

M. Jean Peyrafitte a estimé que les critiques du rapporteur pour avis sur le projet de budget de la mer étaient excessives avant de souligner que les commissaires de son groupe émettraient un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

M. Louis Minetti s'est interrogé sur les conséquences exactes du régime des quirats sur l'emploi.

M. Georges Gruillot a dénoncé à son tour l'abandon du projet de mise à grand gabarit du canal Rhin-Rhône. Il a estimé que la décision gouvernementale remettait en cause l'avenir du midi français en laissant se développer un axe de communications reliant l'Europe du nord au Danube et débouchant dans la Méditerranée par le détroit du Bosphore et non par la vallée du Rhône.

Puis, la commission a décidé à la majorité d'émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mer dans le projet de budget du ministère de l'équipement des transports et du logement pour 1998, le groupe socialiste ayant voté en faveur de ces crédits, le groupe communiste s'étant abstenu, et le rapporteur pour avis confirmant qu'il s'en remettait à la sagesse du Sénat.

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