AVIS n° 88 Tome V - PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998 ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE - DEFENSE GENDARMERIE


M. Michel ALLONCLE, Sénateur


COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES DE LA DEFENSE ET DES FORCES ARMEES - AVIS N° 88 TOME V - 1997/1998

Table des matières






N° 88

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME V

DÉFENSE - GENDARMERIE

Par M. Michel ALLONCLE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Yvon Bourges, Guy Penne, Jean Clouet, François Abadie, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jacques Genton, vice-présidents ; Michel Alloncle, Jean-Luc Mélenchon, Serge Vinçon, Bertrand Delanoë, secrétaires ; Nicolas About, Jean Arthuis, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart,  Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
MM. Charles-Henri de Cossé-Brissac, Pierre Croze, Marcel Debarge, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Philippe de Gaulle, Daniel Goulet , Jacques Habert, Marcel Henry, Roger Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune, Maurice Lombard, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Alain Peyrefitte, Bernard Plasait, Régis Ploton, André Rouvière, André Vallet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 230 , 305 à 310 et T.A. 24 .

Sénat : 84 et 85 (annexes n° s 43 et 44 ) (1997-1998).

Lois de finances.

PRINCIPALES OBSERVATIONS ET CONCLUSIONS
DE LA COMMISSION SUR LE BUDGET DE LA DEFENSE
POUR 19981( * )

1/- L'enveloppe globale des crédits du titre III du ministère de la défense inscrits dans le projet de loi de finances pour 1998, qui s'élève à 103,7 milliards de francs, traduit la priorité affichée en faveur de la professionnalisation des armées.

Toutefois, la compression des dépenses de fonctionnement (hors rémunérations et charges sociales) est préoccupante et menace, avec l'insuffisance des crédits d'entretien programmé des matériels, l'entraînement et l'activité des forces .

La période de transition est par ailleurs fragilisée par les conséquences potentielles, particulièrement pour l'armée de terre, des dispositions adoptées en matière de reports d'incorporation pour les jeunes gens titulaires d'un contrat de travail qui rendront nécessaire l'adoption de mesures de compensation.

2/- La brutale diminution des crédits du titre V (- 8,7% en francs courants, -9,9% en francs constants), qui sont réduits à 81 milliards de francs dans le projet de loi de finances pour 1998, donne à penser que les crédits d'équipement militaire ont joué le rôle de " variable d'ajustement " du budget de l'Etat . Il s'agit là d'un signal négatif adressé à la nation dans son ensemble .

Au sein même des crédits d'équipement militaire, les crédits consacrés au nucléaire subissent une amputation encore supérieure de 13 % (alors que la programmation ne prévoyait qu'une diminution de 1,4%), évolution qui représente un motif d'inquiétude pour l'avenir.

3/- Cette réduction des crédits d'équipement constitue un mauvais signal adressé aux industries de la défense en raison :

- du coût de ces réductions budgétaires en matière d' emplois ,

- du surcoût des équipements faisant l'objet de mesures d'étalement ou de moratoires,

- de la perte de " lisibilité " que la loi de programmation avait précisément pour objet d'apporter aux industriels,

- et de l'affaiblissement qui en résultera pour les industriels français dans la perspective des restructurations indispensables de l'industrie européenne de l'armement.

4/- Le projet de budget de la défense pour 1998 constitue surtout un signal très négatif adressé à nos armées au moment même où un effort d'adaptation exceptionnel leur est demandé.

Les orientations de ce budget, si elles n'étaient pas corrigées après 1998, poseraient deux interrogations majeures pour l'avenir :

- ne risquent-elles pas de compromettre la cohérence de la réforme entreprise dans son ensemble ?

- ne risquent-elles pas de remettre en cause le futur modèle d'armée professionnelle lui-même ?

5/- Si les économies imposées à la Défense pour 1998 avaient - comme il est annoncé - un caractère exceptionnel , leurs conséquences, pour regrettables et dommageables qu'elles soient, seraient peut-être surmontables.

Si, en revanche, la Défense ne retrouvait pas à partir de 1999 le niveau de ressources prévu par la loi de programmation militaire 1997-2002, l'ensemble de l'édifice et la loi de programmation elle-même se trouveraient remis en cause .

Or, la loi de programmation - contrairement à ses devancières - comportait déjà une forte réduction des crédits d'équipement militaire et constituait la traduction d'une réforme d'ensemble devant aboutir à la mise en place d'un nouveau modèle d'armée. Son non respect ou - a fortiori - son abandon ne pourrait donc conduire qu'à l'affaiblissement progressif de notre défense ou à la révision à la baisse de ce modèle d'armée .

La commission réaffirme en conséquence son ferme attachement à l'exécution intégrale de la loi de programmation pour les années 1997-2002.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des Affaires étrangères, de la Défense et des forces armées a émis un avis défavorable à l'adoption de l'ensemble des crédits du ministère de la Défense pour 1998.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Contrairement à l'image traditionnelle d'une gendarmerie principalement tournée vers les campagnes, l'Arme apparaît aujourd'hui en prise avec tous les grands problèmes que connaît la société française : phénomènes d'exclusion en particulier dans les quartiers difficiles, développement de nouvelles formes de criminalité (trafic de stupéfiants, menaces terroristes, atteintes à l'environnement...), intensification de la circulation des personnes aux frontières...

Avec le plan d'action " gendarmerie 2002 ", présenté au début de l'année 1997, la gendarmerie a su prendre la mesure de ces évolutions et se doter d'un projet ambitieux et mobilisateur. Ce plan n'emporte aucun bouleversement des missions exercées par l'Arme, il s'inscrit dans la continuité des priorités tracées par la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité de 1995 et de la loi de programmation militaire de 1996. Ainsi la gendarmerie s'assigne quatre grands objectifs :

- assurer davantage de proximité et de professionnalisme dans la sécurité de la population ;

- favoriser la cohésion des personnels au sein de l'institution ;

- organiser une coopération accrue avec les autres forces chargées de la sécurité en France et à l'étranger ;

- enfin, devenir un modèle de réforme de l'Etat.

Pour satisfaire ces grands objectifs, la gendarmerie envisage une série d'actions concrètes qui peuvent se ranger sous quatre volets : la rénovation des missions traditionnelles, le renforcement des missions nouvelles, l'adaptation de l'organisation et, enfin l'intensification de la coopération.

La gendarmerie aura-t-elle les moyens de mettre en oeuvre ces adaptations au moment même où les moyens financiers lui sont comptés ?

Votre rapporteur souhaiterait apporter son soutien aux grandes orientations adoptées par la gendarmerie sans éluder cependant les difficultés que soulève la volonté d'obtenir de meilleurs résultats dans un contexte budgétaire très contraint.

I. UN BUDGET EN STAGNATION

Les crédits destinés à la gendarmerie progresseront de 3,5 %, passant de 21 320 millions de francs en 1997 à 22 071,4 millions de francs dans le projet de loi de finances soumis aujourd'hui au Parlement.

Cette évolution pourrait surprendre au regard de la contraction du budget de la défense pour 1998 de 3,3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997 (de 190,9 milliards de francs à 184,7 milliards de francs) si elle n'était pour une large part due à un simple effet d'optique : l'inscription en loi de finances des crédits budgétaires destinés au financement de dépenses précédemment supportées par les fonds de concours autoroutiers.

A structure constante, la croissance des crédits dévolus à la gendarmerie est ramenée à une plus juste et modeste proportion : 0,9 %.

La progression des crédits de la gendarmerie en 1998 recouvre en fait deux évolutions contrastées : une hausse de 4 % des dépenses ordinaires et une contraction de 3,05 % des dépenses en capital (titres V et VI).

A. L'AUGMENTATION EN TROMPE-L'OEIL DES DÉPENSES ORDINAIRES

1. Un titre III sous contrainte


Titre III

Crédits 1997

Crédits 1998

Variation

31.03 Rémunérations

14 066,9

14 720,4

4,6 %

33.90 Cotisations socialese

963,3

989,2

2,7 %

33.91 Prestations sociales

504,4

472,8

- 6,2 %

34.06 Fonctionnement dont :

3 159,2

3 309,2

4,7 %

art. 10 Fonctionnement des for-mations

1 632,9

1 707,4

4,5 %

art. 20 Locations immobilières

1 342,9

1 418,4

5,6 %

art. 30 Frais généraux du service du Génie

9,1

9,1

-

art. 41 Dépenses centralisées de soutien

133,2

133,2

-

art. 50 Dépenses informatiques

41,1

41,1

-

34.07 Indemnités journalières d'absence temporaire

266,1

268,7

0,9 %

34.10 Alimentation

199,7

212,1

6,2 %

Total

19 159,6

19 972,4

4,2 %

a) Les rémunérations et les charges sociales : une progression très réduite

Les rémunérations et charges sociales représentent 81 % du titre III. Les dotations progressent de 4,2 % mais de 1,4 % si l'on ne tient pas compte de la budgétisation de 2 200 emplois de sous-officiers et de 400 emplois d'appelés sur les autoroutes, soit une charge proche de 353 millions de francs assumée les années précédentes, par le biais des fonds de concours, par les sociétés concessionnaires d'autoroutes.

En fait la hausse, somme toute réduite, de ce poste, repose principalement sur la création de 230 emplois d'officiers, soit un coût de 70 millions de francs. En revanche, les mesures de revalorisation indiciaire touchent, cette année, à leur terme (11 millions de francs au titre d'une tranche tardive de la bonification indiciaire arrêtée pour l'année 1994...). Quant aux requalifications des emplois, elles se traduisent en fait par des économies budgétaires : ainsi la création de 565 emplois de soutien en contrepartie de la suppression équivalente d'emplois de sous-officiers de gendarmerie se solde par une réduction des dépenses de rémunération de 17 millions de francs.

b) L'insuffisance des ressources destinées au fonctionnement des unités

Les crédits de fonctionnement de la gendarmerie s'élèvent à 3 790 millions de francs pour 1998 (chapitres 34-06, 34-07, 34-10), soit une hausse de 4,5 % par rapport au budget voté de 1997. Si l'effort n'est pas négligeable, il demeure insuffisant pour résorber les déficits structurels liés aux dépenses de maintien de l'ordre.

L'augmentation de la dotation permet seulement, en effet, de couvrir, en premier lieu, une part des dépenses liées à la suppression des fonds de concours autoroutiers et, ensuite, les besoins liés aux locations immobilières. Ce dernier poste de dépenses laisse en effet apparaître, depuis plusieurs années, un déficit structurel. Même si une meilleure maîtrise des loyers avait permis de stabiliser le déficit en 1994 et 1995, celui-ci demeurait à un niveau élevé de l'ordre de 300 millions de francs. C'est pourquoi les budgets 1996 et 1997 avaient prévu une mesure d'ajustement aux besoins (respectivement 171,2 millions de francs et 120,9 millions de francs). Le projet de loi de finances pour 1998 continue dans cette voie avec une mesure de 75,7 millions de francs.

Les crédits-loyers ont-ils pour autant retrouvé un niveau suffisant ? On peut en douter. Certes, la rationalisation des emplois de soutien conduira à terme à une diminution du parc de logements dans la mesure où les personnels intégrés dans le nouveau corps ne sont pas logés par la gendarmerie. Cependant, dans l'immédiat deux facteurs pèseront sur ce poste de dépenses : d'une part le paiement des redevances locatives pour l'occupation de certains sites sur lesquels sont implantés les relais du réseau de télécommunications Rubis, d'autre part, la nécessité de prendre à bail temporairement des locations externes pour répondre aux mouvements de personnels consécutifs aux réformes en cours.

Ce sont toutefois les dépenses de maintien de l'ordre hors indemnités journalières d'absence temporaire qui posent aujourd'hui le problème le plus préoccupant. En effet la dotation pour ce poste a été reconduite d'année en année au même niveau alors que son montant -133 millions de francs- apparaît très en-deçà des besoins constatés : 230 millions de francs en 1996 et, sans doute, 300 millions de francs en 1997.

Par ailleurs, la dotation en carburants et combustibles pour la gendarmerie a été évaluée au plus juste (255 millions de francs) : elle assurera le maintien de l'activité opérationnelle des unités au niveau atteint en 1997. La poursuite de la diésélisation du parc automobile permet, dans une certaine mesure, d'atténuer les conséquences d'une dotation très serrée.

2. Les graves incertitudes liées à la budgétisation des fonds de concours alimentés par les fonds de concours autoroutiers

Une décision du Conseil d'Etat du 30 octobre 1996 a remis en cause le principe de financement d'une partie des dépenses de fonctionnement des formations de gendarmerie en service sur le réseau autoroutier concédé par les sociétés d'exploitation.

a) Une ressource importante pour l'Arme

La contribution des sociétés d'autoroutes sous la forme de fonds de concours -autorisés par les deux décrets des 7 février 1992 et 18 septembre 1992- n'était pas négligeable. Au titre du budget 1997 elle couvrait ainsi le financement des deux tiers des effectifs appartenant aux unités d'autoroutes (soit 2 200 sous-officiers d'active sur 2 632 et 400 gendarmes auxiliaires sur 1 139).

Le Conseil d'Etat, saisi d'un recours pour excès de pouvoir, a toutefois estimé ce dispositif incompatible avec le caractère régalien des missions accomplies par la gendarmerie : " l'exercice par la gendarmerie nationale des missions de surveillance et de sécurité des usagers qui, par nature, incombent à l'Etat, donne par là même, lieu à des dépenses qui sont étrangères à l'exploitation du réseau concédé ".

L'importance des montants concernés -une ressource de 554,5 millions de francs était attendue en 1997- imposait que soit trouvé au plus tôt un mécanisme de substitution . C'est pourquoi par un décret n° 97-606 du 31 mai 1997, le gouvernement a adopté le principe d'une redevance due par les sociétés concessionnaires d'autoroutes pour occupation du domaine public. Conformément aux règles de la comptabilité publique, cette ressource est directement versée au budget général.

Ce nouveau dispositif, s'il répond mieux à l'orthodoxie juridique, n'est toutefois pas sans présenter un danger pour la gendarmerie. En effet la suppression du lien entre la contribution des sociétés autoroutières et le budget de l'arme met fin à la garantie de financement dont disposait la gendarmerie en contrepartie des charges assumées sur le réseau autoroutier.

b) Un lien désormais rompu entre une charge accrue et les moyens d'y faire face

Il n'a guère fallu de temps pour mesurer les conséquences du nouveau dispositif : les crédits destinés à se substituer au fonds de concours ne couvrent par la totalité du montant apporté les années passées par ce mode de financement. Ainsi, la dotation ne dépasse pas 503 millions de francs (371 millions de francs pour les rémunérations et charges sociales et 132 millions de francs pour le fonctionnement), alors que la contribution des fonds de concours, si elle avait été maintenue, aurait dû rapporter 620 millions de francs en 1998.

Cette évolution est d'autant plus préoccupante dans le contexte de l'extension régulière, observée chaque année, du réseau autoroutier et des voies rapides (300 km supplémentaires en moyenne annuelle). Les fonds de concours autoroutiers permettaient la prise en charge de la création des emplois de sous-officiers nécessaires (31 emplois en 1996, 74 en 1997). Ces créations s'ajoutaient aux effectifs prévus par la loi de programmation. Qu'en sera-t-il à l'avenir ? La suppression des fonds de concours fait peser une lourde hypothèque sur la capacité opérationnelle de la gendarmerie pour la surveillance du réseau autoroutier.

B. LES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT : UNE ENVELOPPE RESSERRÉE ET FRAGILE

Resserrée, la dotation prévue pour les équipements apparaît également fragile car d'année en année elle demeure la cible privilégiée des annulations et des gels de crédits.

1. L'impact amplifié de toute nouvelle mesure d'économie sur une dotation déjà modeste

a) Une évolution préoccupante

Les crédits de paiement s'élèvent à 2 099 millions de francs (soit une baisse de 2,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997). La contraction des crédits apparaît cependant moins sévère que pour les autres armes (- 8,7 % en moyenne pour l'ensemble de la défense). Il est vrai que l'enveloppe dévolue à la gendarmerie apparaît étroite et se concentre sur un nombre d'équipements très limités : toute mesure de restriction présente donc un impact amplifié.

Par ailleurs les autorisations de programme quant à elles, progressent de 3 % par rapport à 1996.

GENDARMERIE NATIONALE

Dépenses en capital

Ventilation des crédits du projet de budget 1998


(en millions de francs 98)


Chapitres et articles d'imputations budgétaires


CP


AP

Variation CP 97/98

Variation AP 97/98

1997

1998

1997

1998

53-70 FABRICATIONS-GENDARMERIE

53-70/71 - Electronique - Rubis inclus

477

473

481

411

- 0,8

- 14,5

53-70/72 - Transport

306

309

306

427

+ 0,9

+ 39

* dont provisions pour cdes pluriannuelles

30

53-70/73 - Armement, munitions, optique

47

44

45

47

- 6,3

+ 4,4

53-70/74 - Matériels techniques

40

45

46

47

12,5

+ 2,1

53-70/75 - Moyens informatiques

107

147

123

163

37,3

+ 32,5

53-70/76 - Matériels réalisés par la DGAé

26

24

25

32

- 7,6

+ 28

53-70/77 - Habillement

109

114

124

131

4,5

+ 5,6

53-70/78 - Couchage, ameublement

50

53

60

72

6

+ 20

53-70/79 - MCO Rubis

34

63

40

54

85

+ 35

53-70/81 Maintien en condition opéra-tionnelle - moyens informatiques

50

-

52

-

SOUS-TOTAL 53-70 - GENDARMERIE

1 246

1 272

1 302

1 384

+ 2

+ 6,2

54-40 INFRASTRUCTURE

54-40/81 - Infrastructure

880

782

790

767

- 11

- 2,9

54-40/82 - Acquisitions immobilières

5

-

10

-

SOUS-TOTAL 54-40-INFRASTRUCTURE

885

782

800

767

- 11,6

- 4

TOTAL TITRE V - GENDARMERIE

2 131

2 054

2 102

2 151

- 3,6

+ 2,3

66-50 - SUBVENTIONS D'INVESTIS-SEMENT ACCORDÉES PAR L'ETAT

30

45

25

38

+ 50

+ 52

TOTAL TITRES V et VI - GENDARMERIE

2 161

2 099

2 127

2 189

- 2,8

+ 2,9

b) Les infrastructures sacrifiées

L'évolution des dépenses en capital appelle trois observations principales :

- comme les années passées, l'effort se concentre sur la mise en place du principal programme d'équipement de la gendarmerie, le réseau de télécommunications Rubis dont l'achèvement est prévu pour l'an 2000 (le matériel nécessaire à l'équipement de quinze groupements est commandé et 17 groupements ont été équipés en 1998) ;

- les programmes d'infrastructure apparaissent comme les principales cibles des contractions budgétaires, les crédits qui leur sont destinés enregistrent un nouveau recul (de 885 millions de francs en 1997 à 782 millions de francs dans le projet de loi de finances) même si par ailleurs, les subventions d'investissements accordées par l'Etat progressent et passent de 30 millions de francs en crédits de paiement à 45 millions de francs ; aujourd'hui le renouvellement du parc immobilier intervient en moyenne tous les 75 ans ; les réductions budgétaires ont été encore amplifiées par les conséquences des annulations de crédits intervenues au cours de l'année 1997 ;

- la stagnation des autres postes de dépenses conduit à ralentir le renouvellement et la modernisation des matériels au risque, à terme, d'affecter durablement les conditions d'exécution des missions de sécurité publique.

2. Des crédits vulnérables

a) La récurrence des annulations de crédits

Comme par le passé, l'année 1997 a donné de nouveau l'exemple d'annulations ou de gels de crédits. Les régularisations ont porté sur 4,3 % des crédits d'équipement (soit un montant de 93 millions de francs) et 4,4 % des autorisations de programmes.

Ces annulations se traduisent immédiatement par l'arrêt des programmes d'équipement ou de rénovation.

b) Les conséquences des mesures de régulation budgétaire

Il convient ainsi de citer au chapitre des fabrications qui supportent une annulation de 49 milliards de francs, la remise en cause des programmes suivants :

- 188 véhicules de brigade et de police de route

- 1 vedette de 11 mètres

- 30 PABX (autocommutateurs) de moyennes et grandes capacités

- sécurisation de 60 serveurs de communication

- 480 configurations de bureautique des unités.

L'annulation de 44 millions de francs au chapitre des infrastructures conduira par ailleurs à arrêter ou différer plusieurs opérations suivantes :Versailles-Satory : construction d'un collectif de 6 logements, Paris Ecole militaire : restructuration du centre d'enseignement supérieur de la gendarmerie, etc).

II. UNE ORGANISATION PLUS ADAPTÉE, SEULE RÉPONSE À DES CHARGES ACCRUES ?

La gendarmerie est confrontée à une double contrainte : d'une part, des missions dont le poids s'accroît, d'autre part, des moyens financiers limités, voire érodés.

Dès lors, le choix de la rationalisation de son organisation s'impose désormais. Cependant, la logique de l'adaptation, si elle apparaît indispensable, ne suffira pas, à elle seule, à répondre aux nouveaux défis que l'Arme est appelée à relever dans les années à venir.

Le double impératif de sécurité et de proximité assigné à la gendarmerie par le plan d'action "gendarmerie 2002" trouve une fois encore sa manifestation la plus éloquente dans le bilan d'activité de la gendarmerie pour l'année 1997.

En effet cette activité se caractérise par la prépondérance des missions liées à la sécurité des personnes et des biens et par la part importante dévolue aux services externes.

Chargée d'assurer seule la surveillance de 96 % du territoire où vit la moitié de la population, la gendarmerie consacre plus de 90 % de son activité à la sécurité des personnes et des biens (38,6 % pour la police judiciaire, 33,6 % pour les actions préventives de sécurité publique, 16,7 % pour la police de la route, 2 % pour les missions de secours).

En outre l'essentiel de cette activité se déploie dans le cadre des services extérieurs (soit 69,5 % de l'activité globale, dont 56,79 % pour les services de jour et 12,45 % pour les services de nuit).

La gendarmerie répond ainsi au besoin de sécurité quotidien exprimé par nos concitoyens.

A. DES MISSIONS PLUS EXIGEANTES

1. L'évolution des missions traditionnelles

a) La police judiciaire

L'activité de police judiciaire a connu trois types d'évolutions révélatrices des adaptations et des changements auxquels la gendarmerie sera nécessairement conduite dans les années à venir : une réorganisation des structures, une modernisation des équipements, un renforcement de la formation.

. La poursuite de le réorganisation des structures

La direction générale de la gendarmerie nationale a mis en oeuvre à compter du 1er novembre 1995 une réforme des unités de recherche spécialisées destinée à assurer une meilleure coordination de moyens jusque là trop dispersés et de mieux lutter ainsi contre la délinquance juvénile.

Ces objectifs se sont traduits par le renforcement des unités de recherche à vocation départementale (celles installées dans l'arrondissement où se trouve également le groupement de gendarmerie) et des unités implantées au siège du tribunal de grande instance. Elles ont entraîné en contrepartie la suppression de toutes les autres unités à l'exception de celles dont le maintien se justifie par des circonstances locales, une délinquance importante ou l'isolement géographique.

Les effectifs ainsi libérés ont été redéployés vers les autres unités de recherche.

Une première phase de réorganisation permettant quelque 201 opérations -créations, transformations ou suppressions- a, dans l'ensemble, donné satisfaction. Aussi, les restructurations se sont-elles poursuivies en 1997 sur les mêmes principes et ont conduit aux modifications suivantes :

- renforcement en effectif de 23 brigades de recherche,

- renforcement en effectif d'une section de recherche,

- transformation de 13 équipes de recherche en autant de brigades de recherche,

- création de 2 brigades de recherche,

- suppression d'une dernière équipe de recherche,

- suppression de 5 brigades de recherche de la petite couronne parisienne dans le cadre de regroupements.

Au terme de ces différentes opérations, l'organisation des unités de recherche en métropole se présente de la façon suivante :

Catégorie

Nombre

Effectifs

Implantation

Officiers

Sous-officiers

GA

Section de recherches (SR)

30

63

626

3

Chef-lieu cour d'appel

Brigades de recherches (BR)


300


31


2 309

Chef-lieu de département (97)

ou d'arrondissement (203)

Brigades départementales de renseignements judiciaires (BDRJ)

91

424

178

Chef-lieu de département ou d'arrondissement 1

Total

94

3 359

181

1 en région parisienne, une seule unité, le service centralisateur et d'organisation des recherches (SCOR), assure les missions dévolues aux BDRJ.

En outre dix-huit nouveaux groupements de gendarmerie départementale ont été dotés en 1997 d'un officier adjoint supplémentaire plus particulièrement chargé du suivi de la police judiciaire. Au total, soixante-sept départements ont bénéficié de cette mesure.

La gendarmerie, il convient de le souligner, a cherché à limiter les conséquences de cette réforme sur la situation familiale et professionnelle des militaires par trois types de garanties :

- maintien en unité de recherche au sein de la légion d'appartenance ;

- maintien dans la même résidence ;

- autre affectation en fonction des demandes des intéressés.

La réorganisation des unités de recherche s'est également accompagnée d'une modernisation sensible des instruments et des méthodes d'investigation..

. La modernisation des méthodes d'investigation et l'utilisation d'Internet

Parmi les nombreuses actions de modernisation, votre rapporteur soulignera en particulier la priorité accordée aux méthodes d'investigation.

En effet un dispositif novateur , destiné à l'analyse criminelle opérationnelle, a été déployé dans toutes les sections de recherche et brigades de recherches départementales : il permet la gestion et la visualisation automatisée sous forme graphique de certaines informations recueillies par les enquêteurs. Ces nouveaux outils informatiques particulièrement efficaces dans la lutte contre les réseaux de distribution de la drogue bénéficient d'un soutien financier de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie.

En outre, il convient de signaler la mise en oeuvre progressive d'une chaîne d'informations cohérentes dans le domaine de la police judiciaire grâce à la généralisation de la " base départementale de délinquance ". Ce système, fondé sur la décentralisation des informations relatives aux affaires judiciaires et aux auteurs d'infraction permet de faciliter la prise en compte de la criminalité dans le temps et dans l'espace et d'adopter ainsi une riposte appropriée. A ce jour quarante-sept groupements ont été équipés.

Enfin, la gendarmerie a pris la mesure du risque et de la chance que représente le réseau Internet : risque, certes, par les nombreuses possibilités de contournement de la loi qu'il offre, mais chance aussi à travers les nouvelles perspectives ouvertes par ce système pour les enquêtes judiciaires.

Ainsi, afin d'assurer la surveillance du réseau, la gendarmerie envisage d'installer prochainement au sein du service technique de recherches judiciaires et de documentation à Rosny-sous-bois un site Internet sécurisé, utilisé par un personnel spécialisé pour déceler les infractions à la loi pénale commise sur le réseau ou par son truchement. Cette " police du réseau " d'ailleurs destinée à se généraliser à l'ensemble des sections de recherche apparaît aujourd'hui indispensable pour faire face au phénomène inquiétant lié à la diffusion des messages à caractère illicite (atteinte aux personnes et notamment aux mineurs, stupéfiants, terrorisme, incitation à la haine raciale...).

La gendarmerie exécute d'ores et déjà des commissions rogatoires, dont elle est saisie par la justice, relatives au réseau Internet.

Par ailleurs, le site Internet, à l'instar de la presse écrite ou audiovisuelle, pourra également être mis au service de la police judiciaire pour collecter auprès des témoins éventuels des informations relatives à une affaire judiciaire tout en respectant le secret de l'enquête.

. La formation : un effort particulier pour prendre en compte les nouvelles formes de criminalité

Les besoins en formation de police judiciaire continueront de croître dans les années à venir sous l'effet d'un double phénomène : la technicité requise dans certains domaines spécifiques (trafic de stupéfiants, environnement), la volonté manifestée par la gendarmerie de doter les futurs volontaires du service national de la qualié d'agent de police judiciaire adjoint.

Dès lors, le plan d'action " gendarmerie 2002 " a inscrit au rang de ses priorités l'augmentation de la capacité d'accueil du centre national de formation à la police judiciaire (CNFPJ).

Depuis le début de la présente décennie, le souci de donner une formation adaptée aux militaires de la gendarmerie pour faire face au développement de formes de criminalité particulières s'est traduit par trois types d'action :

- une action spécifique de formation à la lutte contre le travail illégal par l'intermédiaire de sous-officiers " formateurs-relais " dans le cadre d'un stage initial d'une durée de cinq jours et d'un stage annuel de recylage ; chaque compagnie de gendarmerie départementale ainsi que les unités de gendarmerie spécialisées disposent d'un formateur-relai (au 30 juin 1997, 738 formateurs-relais travail illégal ont été formés, parmi lesquels 650 ont déjà été recyclés) ;

- les stages de formation à la lutte contre les atteintes à l'environnement dans le cadre du centre national de formation de police judiciaire au profit des sous-officiers de la gendarmerie départementale et maritime ; depuis 1996, chaque groupement dispose de deux formateurs-relais environnement/écologie ; en 1997, 21 formateurs-relais ont suivi, à l'école de défense nucléaire bactériologique et chimique de l'armée de terre à Bretteville-sur-Odon, un stage sur les risques majeurs (industriels, chimiques, nucléaires) qui sera d'ailleurs reconduit en 1998 ;

- l'intensification de la formation pour la lutte contre la toxicomanie sous deux formes : développement, d'une part, du dispositif existant des " formateurs-relais antidrogue " (FRAD) 2( * ) dans les régions les plus sensibles en matière de drogue et au sein des gendarmeries spécialisées (90 FRAD ont été formés à ce titre au cours des années 1995-1996), d'autre part, la formation des enquêteurs des unités de recherche (214 sous-officiers supplémentaires ont bénéficié de ce dispositif en 1995 et 1996) et en particulier le renforcement de la formation dispensée en matière d'observation et de traitement du volet financier des trafics à travers un allongement de la durée du stage portée de deux à trois semaines.

b) La gendarmerie mobile

L'amélioration des capacités opérationnelles de la gendarmerie mobile prend place parmi les mesures prioritaires inscrites dans le plan d'action " gendarmerie 2002 ". En effet, les escadrons de gendarmerie mobile sont de plus en plus sollicités tandis que les effectifs n'ont pas augmenté faute de moyens d'active supplémentaires.

. L'augmentation croissante des jours de déplacement des unités de 1990 à 1996

Années

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Nombre moyen de jours de déplacement des E.G.M.

171

172

175

173

193

208

199

Cette tendance ne devrait pas se démentir en 1997 avec 114 jours de déplacement pour les six premiers mois de l'année. Pareille sollicitation s'explique par la conjonction, au cours des derniers mois, de trois facteurs :

- le concours apporté par la gendarmerie mobile aux unités de gendarmerie départementale situées dans les zones périurbaines les plus sensibles ;

- la participation au plan Vigipirate ; la réactivation des mesures gouvernementales à partir du 4 décembre 1994 a pu, au moment de plus forte mobilisation, nécessiter la réquisition de 12 escadrons de gendarmerie mobile et l'engagement quotidien moyen de 14 750 gendarmes.

- le renforcement du dispositif mis en place en Corse (avec 7 escadrons déplacés contre trois unités habituellement) dans le cadre de la lutte antiterroriste.

Il convient de le souligner une fois de plus, l'augmentation continue du nombre moyen de jours de déplacement des unités n'a pas été sans conséquence sur le temps consacré par les unités à une formation , pourtant indispensable (en principe quatre semaines de neutralisation pour la formation à la résidence ou en camp entre mi-septembre et fin mai, et, pour le tiers des unités, un stage de 15 jours à Saint-Astier, consacré au recyclage et maintien de l'ordre et précédé d'une semaine de préparation à la résidence). La formation des escadrons dans trois légions de gendarmerie mobile (Bordeaux, Rennes, Villeneuve-d'Ascq) pour l'année d'instruction n'a pas dépassé quinze jours.

. La mise en place des pelotons légers d'intervention : une expérience à poursuivre


Depuis février 1997, chaque escadron de gendarmerie mobile dispose d'un peloton léger d'intervention (PLI) destiné à doter l'unité de capacités tactiques supplémentaires.

Le PLI offre en effet un module d'intervention plus étoffé, capable notamment de participer à un dispositif de surveillance ou de contrôle des zones sensibles. Faute d'un engagement significatif, jusqu'à présent, de ce type de formation, il n'est guère possible de se prononcer sur la portée de cette initiative. Force est de constater toutefois qu'elle s'inscrit dans une orientation plus générale marquée par la mise en place d'instrument d'intervention plus souple et plus adapté au contexte local.

La création en 1997 à Strasbourg d'un peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie renforcé s'inspire en effet d'une même démarche. L'adjonction de cinq sous-officiers à l'effectif du PSIG existant permettra de donner à cette structure des moyens plus adaptés à l'activité de la compagnie au sein de laquelle s'exerce son action. A terme, dans le souci de mieux satisfaire les besoins réels des unités, chaque PSIG pourrait bénéficier d'une formation renforcée. Cette perspective apparaît aujourd'hui subordonnée à la poursuite des redéploiements d'effectifs présents dans les brigades situées en zone de police d'Etat.

2. Les nouvelles missions : l'ouverture sur l'extérieur

L'ouverture sur l'extérieur constitue l'une des évolutions les plus remarquables des missions de la gendarmerie. A cet égard, la priorité reconnue dans le plan d'action " gendarmerie 2002 " au développement de la coopération internationale en particulier en Europe consacre une orientation imprimée depuis déjà plusieurs années à l'Arme plus qu'elle n'ouvre une voie nouvelle.

a) Une coopération policière européenne appelée à se renforcer

La coopération policière européenne couvre trois volets distincts : la participation aux diverses instances de l'Union européenne et de la convention d'application de l'accord de Schengen, la coopération transfrontalière sous l'égide du comité de coordination de la politique européenne de sécurité intérieure, enfin la coopération avec les autres gendarmeries européennes dans le cadre d'une convention quadripartite liant la gendarmerie à ses homologues italien, espagnol et portugais.

Votre rapporteur avait déjà regretté à plusieurs reprises que la gendarmerie ne soit pas suffisamment associée aux instances de coopération européenne. La participation de la gendarmerie se renforce peu à peu même s'il est possible d'aller encore plus loin dans cette voie.

. Le renforcement nécessaire de la participation au sein des instances de l'Union européenne.

La participation de la gendarmerie au sein des instances de l'Union européenne revêt deux aspects :

- la présence aux différents groupes de travail prévus dans le cadre du " troisième pilier " du traité consacré à la sécurité intérieure et la justice (groupe directeur I sur le droit d'asile et l'immigration, groupe directeur II sur la coopération policière et douanière, groupe directeur III sur la coopération judiciaire).

- la présence d'un officier de gendarmerie en qualité d'officier de liaison à l'Unité " drogue " Europol basée à Amsterdam.

Les officiers de liaison, il convient de le rappeler, représentent les intérêts de leurs Etats respectifs au sein de cette structure. Ils prennent part à l'échange de renseignements entre les Quinze Etats membres dans les domaines qui relèvent d'Europol dont le champ de compétence a d'ailleurs été étendu successivement aux matières nucléaires et radioactives, aux filières d'immigration clandestine, aux véhicules volés et, depuis décembre 1996, à la traite des êtres humains ainsi qu'aux organisations criminelles impliquées dans ces trafics et aux activités de blanchiment s'y rapportant. En outre ces officiers de liaison participent, avec les agents d'Europol, aux analyses d'activité criminelle à partir d'informations fournies par les Etats membres de l'Union européenne ou provenant d'autres sources. La convention Europol dont la procédure de ratification, au sein du chaque Etat-membre, devrait pouvoir être conduite à son terme au cours de l'année 1998, conférera une assise juridique plus solide à cette structure. Elle lui permettra en particulier de disposer d'un système informatisé relatif aux personnes soupçonnées d'avoir commis une infraction, ainsi que des fichiers automatisés créés à des fins d'analyse. Le rôle d'Europol devrait donc s'accroître dans les années à venir et la représentation de la France -assurée aujourd'hui par cinq officiers de liaison- se développer. Ainsi, dans cette perspective, la gendarmerie devrait-elle compter au moins deux de ses membres dans cette institution.

Aux côtés d'Europol, le dispositif de concertation lié aux accords de Schengen constitue l'autre composante éventuelle de la coopération policière multilatérale en Europe.

. Une participation plus équilibrée aux instances de concertation de Schengen.

La gendarmerie paraît mieux représentée au sein des structures associées à la mise en oeuvre de la libre circulation des personnes dans l'" espace Schengen ".

En effet, à titre d'exemple, " SIRENE 3( * ) France ", cellule opérationnelle du système national d'information Schengen, se compose à hauteur du tiers de ses effectifs du personnel de l'Arme (1 officier et 10 sous-officiers).

Sur la base des informations fournies par ses unités ou des signalements étrangers introduits dans le système d'information Schengen, pas moins de 4 776 personnes ont été interpellées et 2 568 véhicules retrouvés depuis mars 1995.

L'ouverture des frontières dans le cadre de la convention d'application de l'accord de Schengen n'impose pas seulement le développement d'une coopération multilatérale (en particulier pour l'harmonisation du dispositif de contrôle aux frontières extérieures), elle constitue également un puissant aiguillon pour la coopération transfrontalière dont la gendarmerie apparaît l'un des acteurs majeurs.

. Un rôle éminent à jour dans la coopération transfrontalière.

En effet, le maintien de la sécurité aux frontières relève principalement de la gendarmerie. Plus de 5 000 gendarmes assurent ainsi la surveillance des frontières extérieures de l'espace Schengen. Les frontières intérieures ne requièrent pas un effort moindre : 137 brigades territoriales assurent ainsi la responsabilité exclusive de la sécurité publique sur 93 % des 458 kilomètres de frontières communes avec l'Allemagne.

Certes, la gendarmerie participe directement aux échanges concernant la coopération transfrontalière grâce, notamment, aux points de contacts constitués par les centres opérationnels de groupement (COG) de gendarmerie départementale ; en outre l'Arme prend part aux travaux du comité de coordination de la politique de sécurité constituée au sein du SGCI (secrétariat général du Comité interministériel pour les questions de coopération économique européenne). Cependant, la participation de l'Arme dans ces enceintes n'est pas encore à la mesure de sa présence et de son rôle dans la surveillance de nos frontières.

La coopération transfrontalière peut trouver un appui utile dans les liens noués par la gendarmerie avec les forces de sécurité comparables italienne et espagnole.

. Le développement souhaitable des liens avec les forces de police à statut militaire ou assimilé.

A la suite de la réunion tripartite de Paris en 1993 entre la France, l'Italie et l'Espagne, une coopération -élargie au Portugal depuis 1996- fructueuse s'est mise en place. Les différentes actions conduites dans ce cadre ont principalement pris trois formes :

- l'échange de personnels : affectation d'un colonel des carabiniers italiens à la division des relations internationales au sein de la Direction générale de la gendarmerie nationale, d'un capitaine de la Guardia civil espagnole à l'Ecole des officiers de la gendarmerie nationale, présence d'un sous-officier italien, espagnol ou français dans les écoles de formation des trois pays (Montluçon pour la France, Florence pour l'Italie et Ubeda pour l'Espagne 4( * ) ).

- des exercices communs de maintien de l'ordre impliquant un escadron de chaque pays, à l'exemple de ceux organisés du 24 au 28 juin 1996 au centre de perfectionnement de la gendarmerie mobile de Saint-Astier ;

- des contacts réguliers dans les domaines de l'organisation des forces, des ressources humaines et des nouvelles technologies ; en novembre 1997, les directeurs et commandants généraux des quatre forces ont défini à Lisbonne les grandes lignes de la coopération à venir.

Il faut également signaler, dans le cadre des contacts noués avec les forces de sécurité de statut militaire, les liens tissés avec les forces des pays d'Europe centrale et orientale : cinq stagiaires (un Albanais, deux Tchèques, un Roumain, un Bulgare) formés dans les écoles de gendarmerie en 1996, huit stagiaires prévus pour l'année scolaire 1997/1998.

En effet, ces pays ouvrent un vaste champ à la coopération -champ laissé encore en partie en jachère par les pouvoirs publics français, il faut le reconnaître-. Or la mise en place, dans ces Etats, de forces de l'ordre intérieures représente un jalon important de la construction d'un Etat de droit. La gendarmerie apparaît toute désignée pour assurer cette tâche et constituer un vecteur de l'influence française dans cette partie de l'Europe.

Nous touchons du reste ici à l'un des enjeux essentiels de l'ouverture internationale de la gendarmerie : le rayonnement de l'Arme mais aussi la défense de nos intérêts nationaux dans le monde.

b) Une meilleure utilisation de l'atout international

967 gendarmes affectés ou en mission à l'étranger : ce chiffre, seul, suffirait à traduire l'importance de la présence internationale de la gendarmerie. L'action de l'Arme à l'extérieur de nos frontières revêt quatre aspects distincts mais parfois complémentaires.

. La sécurisation de nos ambassades.

A ce titre il convient de souligner une fois de plus la disponibilité de l'Arme pour assumer des missions de sécurité dans des contextes très difficiles, comme en Algérie (140 détachés) ou lorsque l'urgence le commande comme au Congo (31 détachés).

. La présence d'officiers de gendarmerie, attachés de défense.

Votre rapporteur accorde une importance particulière au renforcement de la présence d'officiers de gendarmerie comme attachés de défense au sein de nos ambassades. Il y a là en effet un moyen de nouer des contacts très utiles pour la coopération policière (l'affectation d'un officier de gendarmerie au poste de Madrid se justifie ainsi) mais aussi mettre en valeur l'exemplarité de l'Arme.

Ce n'est d'ailleurs pas seulement le rayonnement de la gendarmerie qui est ici en jeu mais aussi la diffusion d'un modèle d'organisation et d'équipement. Faut-il le rappeler, l'accréditation au Chili de l'attaché gendarmerie de Buenos-Aires en 1996 a permis, notamment, de promouvoir le réseau de transmission Rubis pour lequel les carabiniers chiliens ont confirmé leur vif intérêt. Il convient donc de se réjouir que l'Etat-major des armées ait donné des directives pour attribuer à l'institution les postes suivants :

- en 1998, les postes d'attachés de gendarmerie en Belgique et en Allemagne ;

- en 1999, les postes d'attachés de défense en Colombie et à Madagascar et d'attaché de gendarmerie au Royaume-Uni ;

. L'assistance militaire technique .

L'assistance sous forme de détachés permanents ou temporaires (60 officiers et 80 sous-officiers à la date du 1er juillet 1997) bénéficie plus particulièrement aux pays traditionnels du champ de la coopération. Ce n'est pas seulement affaire de liens historiques : l'Afrique, en particulier, confrontée à une instabilité politique fréquente, se doit de mettre en place des forces de l'ordre capables d'assurer une sécurité respectueuse des principes de l'Etat de droit. La gendarmerie peut ainsi très utilement faire partager son expérience et ses compétences.

A titre d'exemple, la gendarmerie conduit un important projet au Mali , financé sur les crédits du Fonds d'aide et de coopération (FAC) et soutenu par une équipe de huit militaires placés sous l'autorité de l'attaché de défense, un lieutenant-colonel de la gendarmerie, également chef de la mission de coopération militaire.

En Haïti, la gendarmerie largement engagée au sein de la mission d'appui des Nations unies (MITNUH) dont le terme échoit au mois de novembre 1997, a vocation à jouer un rôle dans le développement futur des forces de sécurité intérieures haïtiennes.

La coopération recouvre un autre volet : la formation de nombreux stagiaires étrangers dans les écoles ou centres de formation de l'Arme (256 stagiaires étrangers formés en 1996 dans les écoles de la gendarmerie nationale, 301 prévus en 1997).

Même si la gendarmerie doit veiller à ne pas disperser ses moyens, elle peut tirer le meilleur parti d'une analyse attentive du choix des lieux où sa présence paraît la plus utile. A ce titre, la mise en place d'un officier de liaison de la gendarmerie à Key West en Floride afin de participer à la lutte contre les narcotrafiquants dans les Caraïbes, répond à un réel besoin déjà exprimé par nos départements d'Outre-mer.

. Une présence importante au sein des opérations de maintien de la paix.

Votre rapporteur ne reviendra pas en détail sur le dispositif de la gendarmerie dans le cadre des opérations de maintien de la paix présenté l'an passé dans son rapport pour avis sur le budget 1997. Il soulignera toutefois la pérennité de la présence de l'Arme en Bosnie-Herzégovine après que la Force de stabilisation de la paix (SFOR) eut pris le relais de la Force de mise en oeuvre des accords de paix (IFOR).

Votre rapporteur s'est rendu sur place dans le cadre d'une mission de la commission des Affaires étrangères et de la Défense nationale et a pu apprécier l'efficacité de la gendarmerie dans l'exercice d'une mission délicate. L'Arme se trouve engagée dans les différents états-majors nationaux ou multinationaux, ainsi que la prévôté des bataillons et dans la chaîne des actions civilo-militaires (ACM). A ce titre, outre les brigades prévôtales classiques, de nouvelles unités ont été créées pour participer aux missions ACM (pelotons de gendarmerie de surveillance et d'intervention, brigade de gendarmerie d'investigations). Ces unités contribuent à la sécurité publique générale sur la zone de déploiement de la division française et assurent l'interface avec les autorités de police locale et les unités de police militaire alliées.

Au total, l'institution comporte 7 officiers et 77 sous-officiers en Bosnie-Herzégovine répartis comme suit :

- Etats-majors : 7 officiers, 2 sous-officiers;

- Prévôté des bataillons : 19 sous-officiers ;

- Prévôté élargie (ACM) : 52 sous-officiers ;

- Gendarmerie de l'air : 4 sous-officiers.

B. LA RECHERCHE D'UNE ORGANISATION PLUS ADAPTÉE

Confrontée à une délinquance dont les formes n'ont cessé d'évoluer et au souci de sécurité manifesté par nos concitoyens, la gendarmerie a toujours dû relever le défi de l'adaptation de son organisation et de ses méthodes. Cette nécessité n'est pas moins pressante aujourd'hui au moment où la contrainte budgétaire condamne la gendarmerie à satisfaire des besoins accrus avec des moyens limités. Les mêmes impératifs justifient une utilisation optimale des forces et donc une coopération étroite entre la gendarmerie et la police.

1. L'adaptation de l'Arme entre rationalisation et déconcentration

L'adaptation de la gendarmerie se poursuite à travers la rationalisation de ses structures et la déconcentration des mécanismes de décision.

a) La rationalisation des structures

. Une nouvelle répartition des compétences entre échelons de commandement.

L'histoire a légué à la gendarmerie une organisation territoriale échelonnée sur plusieurs niveaux (circonscription, légion, groupement, compagnie, brigade). Ces niveaux sont-ils trop nombreux ? Ils présentent en tout cas le risque de redondance d'attributions en particulier entre l'échelon circonscription et l'échelon légion.

Plutôt que de procéder à une révision générale des compétences entre les différents niveaux de commandement, la direction générale de la gendarmerie nationale a préféré conduire une réforme plus modeste, limitée à la définition des attributions entre la circonscription et la légion. Au premier échelon reviendra la fonction du commandement opérationnel, le second conservant les domaines du contrôle des activités des unités, de la gestion des personnels, de la communication et du soutien administratif et technique. La nouvelle répartition des compétences est mise en oeuvre progressivement, d'abord de façon expérimentale à Bordeaux en 1997 avant d'être étendue à la circonscription d'Orléans.

. La départementalisation des unités d'autoroute ?

La départementalisation des unités d'autoroute répond au souci d'inscrire l'action de la gendarmerie dans le cadre d'un échelon territorial cohérent. Elle vise en effet à créer dans chaque groupement un escadron départemental de sécurité routière regroupant les pelotons d'autoroute et les brigades motorisées du département sous le commandement d'un officier. Les pelotons conserveraient leurs missions traditionnelles mais les exerceraient dans le cadre délimité par les départements d'implantation. Les brigades rapides d'intervention garderaient quant à elles leur vocation interdépartementale tout en dépendant directement du chef du bureau de la circulation routière de la circonscription de gendarmerie.

Cette réforme fera l'objet d'une décision définitive après l'évaluation de l'expérimentation conduite du 3 mars au 31 décembre 1997 dans les circonscriptions de gendarmerie de Dijon et d'Orléans.

. Les interrogations liées au coût des restructurations .

Si la réflexion sur les attributions des compétences mérite de se poursuivre, il n'est pas sûr en revanche que les mesures de restructuration -dont le coût n'est pas négligeable pour l'Arme- s'accordent complètement avec l'objectif de rationalisation.

Les mesures de restructuration s'inscrivent dans le cadre des objectifs définis par la loi de programmation : elles visent en général à donner une contrepartie aux décisions de dissolution ayant affecté les autres armes.

Ainsi, le 30 août 1996 le ministère de la défense a décidé de délocaliser à Lure un escadron de gendarmerie mobile en provenance de la région parisienne à la suite de la dissolution du premier régiment de dragons installé dans cette ville. L'opération dont l'achèvement est prévu en septembre 1998 concerne quelque 120 personnes et exigera la construction de nouvelles infrastructures.

Par ailleurs, le service de diffusion de la gendarmerie actuellement installé à Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) sera transféré à Limoges (Haute-Vienne) à la suite de la fermeture, en 1997, de la base-entrepôt de Romanet. Les travaux nécessaires représenteront un coût estimé à 25 millions de francs.

Le service, en mesure de fonctionner à partir de 1998, comprendra 79 personnels civils et militaires.

Au-delà de 1998, les restructurations se traduiront par trois opérations de transfert :

- transfert au Mans (Sarthe) du service des télécommunications et de la télématique actuellement installé à Rosny-sous-Bois soit un coût estimatif de 135 millions de francs (104 personnels civils et militaires concernés) ;

- transfert à Dijon du commandement des écoles de la gendarmerie actuellement implanté à Maisons-Alfort (Val de Marne) -110 personnels civils et militaires concernés- ;

- transfert au Blanc (Indre) du laboratoire photographique central actuellement installé à Rosny-sous-Bois (54 personnels civils et militaires concernés).

Ces deux dernières opérations de transfert ne pourront toutefois intervenir avant que les moyens financiers nécessaires aient été dégagés.

b) La nécessaire déconcentration

S'il apparaît indispensable de préserver l'unité et la cohérence du commandement militaire, les procédures de décision pourraient cependant être davantage déconcentrées. Aujourd'hui, votre rapporteur a déjà eu l'occasion de le souligner, la plus grande partie des décisions même sur des points relativement mineurs -l'agrandissement des locaux, etc.- remontent à la direction générale. Ces procédures ne favorisent naturellement pas toujours la rapidité et l'efficacité. C'est pourquoi il convient de se féliciter de deux expérimentations récentes destinées précisément à encourager la déconcentration des pouvoirs.

. La création d'un centre administratif et logistique au niveau de la circonscription.

Ce nouvel organisme mis en place à titre expérimental à Orléans depuis le ler septembre 1995 vise à prendre en charge certaines compétences attribuées jusqu'à présent à l'administration centrale (soutien des personnels, des matériels, de l'infrastructure ; gestion comptable et vérification des comptes des formations). Cette expérimentation sera étendue à Bordeaux à partir de 1998.

. Les commissariats résidents : un échelon déconcentré de vérification des comptes et de surveillance administrative.

Mis en place depuis le ler septembre 1997 à Dijon, Lille, Marseille et Rennes, les commissaires résidents affectés à l'inspection technique de la gendarmerie nationale assureront les fonctions suivantes :

- pour le compte du ministre, la vérification des comptes des formations administratives implantées sur le territoire de la circonscription ;

- par délégation du directeur général de la gendarmerie nationale, la surveillance administrative et technique de ces mêmes formations ;

- le conseil du commandement dans les domaines administratif, logistique et financier ;

- l'ordonnancement secondaire des dépenses des centres de responsabilité.

2. Les rapports police-gendarmerie : le chantier de la répartition des compétences reste à ouvrir

La coordination entre la police et la gendarmerie a progressé, il faut s'en réjouir, mais la répartition des compétences entre les deux forces reste au point mort et c'est regrettable.

a) Les progrès de la coordination

La coordination entre la police et la gendarmerie peut se prévaloir des travaux utiles du Conseil supérieur de la police technique et scientifique et des plans départementaux de sécurité.

. Les avancées dans le domaine de la documentation criminelle

Créé par un décret du 25 mars 1992, le conseil supérieur de la police technique et scientifique, présidé par le ministre de l'intérieur, comprend douze membres dont trois représentants du ministère de la défense (le directeur général de la gendarmerie nationale, le chef du service des opérations et de l'emploi et le directeur de l'institut de recherche criminologique de la gendarmerie nationale).

Les groupes de travail réunis sous l'égide du conseil ont porté notamment sur la documentation criminelle. Les ministères de la défense et de l'intérieur se sont accordés sur le principe d'une centralisation harmonisée de l'information qui la rende simultanément accessible aux services opérationnels de police et de gendarmerie. Outre la mise en place d'un groupe de travail chargé de prévenir et de régler les litiges, les efforts ont porté en 1997 sur la diffusion électronique des circulaires de recherche ou d'information et également sur la rapidité et la qualité des échanges d'information par télégramme.

Par ailleurs, la consultation réciproque du système de traitement de l'information criminelle -exploitation judiciaire (STIC-Judex) et l'échange de terminaux au niveau central pouvaient se concrétiser avant la fin de l'année 1997.

Enfin, l'harmonisation se traduit aussi par des mesures ponctuelles dont l'utilité ne fait pas de doute au regard de l'efficacité des enquêtes : formalisation des procédures d'alimentation de la base objets-Schengen par les unités, adaptation de l'application "objets volés bien identifiés" aux contraintes des échanges Schengen et au lancement de l'application judex-objets en mars 1997.

. Les plans départementaux de sécurité : un dispositif désormais indispensable

Institués à la suite de la circulaire interministérielle du 9 septembre 1993, les plans départementaux de sécurité ont permis, en particulier dans le cadre des cellules techniques de coordination opérationnelle, de renforcer la concertation entre le commandant de groupement de gendarmerie départementale et le directeur départemental de la sécurité publique.

La circulaire du 2 janvier 1997 a ajouté de nouvelles orientations aux priorités retenues dans le cadre des plans départementaux : la lutte contre les violences scolaires, contre les exactions commises à l'occasion de troubles à l'ordre public, l'extension de la lutte contre la petite et moyenne délinquance aux aspects économiques et financiers.

La circulaire affirme plus clairement la place de la gendarmerie au sein du dispositif et fait apparaître en particulier aux côtés des responsabilités, fondamentales, du commandant de groupement, la contribution des autres échelons de commandement à une organisation concertée de la sécurité.

b) Une répartition des compétences au point mort

Comme votre rapporteur a déjà eu l'occasion de le souligner à plusieurs reprises, le maillage territorial de la gendarmerie doit être préservé car il ne constitue pas seulement un élément important de l'aménagement du territoire mais aussi une garantie de sécurité essentielle, car il doit permettre d'assurer une intervention dans un délai maximal de vingt minutes en cas de besoin.

La pérennité du réseau territorial des brigades constitue à ce titre l'une des forces essentielles du système de sécurité français.

Dès lors, les redéploiements supposent, d'une part, l'application effective de loi d'orientation relative à la sécurité de 1994 et, d'autre part, un allégement du dispositif de la gendarmerie dans les zones de police d'Etat.

La loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité avait posé les principes d'une répartition des compétences entre gendarmerie et police à partir du nombre d'habitants : au-dessus de 20 000 habitants, la commune relève de la police, en-deçà de ce seuil, la gendarmerie assure la plénitude des missions de sécurité. L'adoption, plus d'un an après, d'un décret d'application (n°96-827 du 19 septembre 1996), relatif aux attributions entre gendarmerie et police avait laissé espérer, enfin, une mise en oeuvre des procédures d'étatisation ou de désétatisation.

Or, que constate-t-on ? Rien n'a vraiment bougé depuis cette date.

En effet, les procédure de transfert de compétences se sont limitées en 1997 à l'étatisation des communes de Furiani et de Ville de Pietrabugno et la désétatisation de la circonscription de Corte.

La paralysie plus ou moins avouée du processus, liée à des résistances administratives et des pressions locales, n'est guère admissible au regard des principes posés par le législateur. Aussi, importe-t-il aujourd'hui de relancer les opérations de transfert afin d'alléger la charge de la gendarmerie dans certaines zones et de concentrer les effectifs dans les unités les plus "sensibles".

L'allégement du dispositif de la gendarmerie dans les zones de police d'Etat constitue une autre orientation prioritaire. En effet, dans ces zones, la police assure l'exclusivité des missions liées à la sécurité publique. Il existe encore 188 brigades de gendarmerie en zone de police d'Etat. Or l'exécution des missions de défense ou des missions judiciaires (assistance aux enquêteurs déplacés, exécution des délégations des magistrats, transfèrements) pourrait se concentrer en un nombre d'unités nettement plus réduit. La remise en cause des unités a rencontré beaucoup d'oppositions de sorte que, sur l'ensemble des suppressions, très peu, trop peu en fait, se sont effectivement réalisées (19 brigades territoriales ont été supprimées en 1996 et 12 en 1997). L'intérêt de la sécurité publique sur notre territoire impose de poursuivre et d'intensifier les redéploiements et de libérer des effectifs au profit des zones où des renforcements apparaissent désormais indispensables.

III. LES PERSONNELS : LES CONTRAINTES D'UNE ÉVOLUTION DIFFÉRENTE DE LA LOGIQUE DE PROFESSIONNALISATION

L'évolution des effectifs de la gendarmerie doit s'apprécier au regard de l'accroissement prévisible des charges lié à la conjonction de trois facteurs :

- l'augmentation de la population (7,7 millions d'habitants supplémentaires) dans les zones périurbaines placées sous la responsabilité exclusive de la gendarmerie ;

- l'extension des réseaux autoroutiers : 1 843 km supplémentaires pour les autoroutes concédées et 455 km pour les liaisons assurant la continuité du réseau autoroutier (LACRA) à l'horizon 2002 ;

- enfin, l'apparition de nouvelles formes de délinquance et la multiplication des flux de circulation de personnes aux frontières.

C'est pourquoi la loi de programmation a retenu trois orientations ;

- l'augmentation des effectifs de 93 669 en 1996 à 97 884 en 2002, soit une progression de 4,5 % imputable principalement aux personnels civils (de 1 258 à 2 260, soit + 79,65 %) et surtout aux volontaires du service national (de 12 017 à 16 232, soit + 35 %) ;

- l'amélioration du taux d'encadrement par les officiers dont le nombre progressera de 52 % (de 2 066 à 4 055) alors que les effectifs de sous-officiers de gendarmerie se contracteront de 7,5 % (de 77 079 à 71 302) ;

- la création de nombreux emplois militaires à caractère administratif et technique destinés à intégrer des personnels par voie de changement d'arme (les sous-officiers en substitution des personnels d'active de la gendarmerie atteindront un effectif de 4 035 en 2002).

L'augmentation des effectifs prévue dans le projet de loi de finances pour 1998 apparaît conforme aux objectifs de la loi de programmation. Il n'en reste pas moins que cette orientation plutôt favorable s'accompagne de plusieurs incertitudes. En effet, elle repose exclusivement, pour les personnels militaires, sur le recrutement des volontaires et exigera donc de l'Arme un effort d'adaptation et de formation considérable. Ainsi, la proportion des non professionnels est appelée à progresser (de 12,8 % à 16,5 % entre 1997 et 2002) contrairement aux évolutions observées dans les autres armées. Certes, le volontariat constituera une ressource utile. Mais la gendarmerie disposera-t-elle des moyens nécessaires non seulement pour obtenir le nombre de volontaires prévu mais disposer d'une ressource d'une qualité comparable à celle des gendarmes auxiliaires actuels ?

A. LA POURSUITE DE LA DYNAMIQUE IMPRIMÉE PAR LA LOI DE PROGRAMMATION

1. La croissance des effectifs

Les effectifs s'accroîtront de 815 emplois en 1998 (752 emplois militaires, 63 emplois civils)

a) Les effectifs militaires

Cette évolution résulte de trois facteurs principaux :

- la création de 212 postes d'officiers de gendarmerie (10 colonels, 76 lieutenants-colonels et chefs d'escadron, 124 capitaines, lieutenants et sous-lieutenants) dans le cadre du programme de requalification des emplois ;

- la création de 21 postes d'officiers technico-administratifs et de 553 postes de sous-officiers technico-administratifs (21 majors, 93 adjudants-chefs, 117 adjudants, 120 sergents-chefs, 202 sergents) liés à la montée en puissance du corps militaire de soutien ; en contrepartie 571 postes de sous-officiers de gendarmerie sont supprimés ;

- la création de 104 postes de sous-officiers liés à l'extension du réseau autoroutier concédé.

- l'ouverture de 433 emplois de gendarmes auxiliaires.

EVOLUTION DES EFFECTIFS MILITAIRES

OFFICIERS

Grades

Effectifs

1997

Emplois

créés

Emplois supprimés

Solde

Effectifs

1998

Officiers de gendarmerie

Général de division

7

1

8

Général de brigade

16

1

17

Colonel

192

10

10

202

Lieutenant colonel

et chef d'escadron

943

73


73

1016

Capitaine, lieutenant et sous-lieutenant

1 713

124


124

1 837

Total

2.871

209

209

3.080

Officiers du corps militaire de soutien

Lieutenant-colonel et chef d'escadron

7

7


7

14

Capitaine, lieutenant et sous-lieutenant

14

14


14

28

Total

21

21

21

Appelés

Sous-lieutenant

20

20

Total

2.912

230

230

3.142

SOUS-OFFICIERS

Grades

Effectifs 1997

Emplois créés

Emplois supprimés

Solde

Effectifs 1998

Sous-officiers de gendarmerie

Aspirant

70

70

Major

1 505

15

15

1 520

Adjudant-chef

3 473

28

28

3 501

Adjudant

8 529

21

21

8 550

Maréchal des logis chef

8 265

39

39

8 304

Gendarme

54 746

- 570

- 570

54 176

Total

76 588

103

- 570

- 467

76 121

Sous-officiers du corps militaire de soutien

Major

18

21

21

39

Adjudant-chef

124

93

93

217

Adjudant

181

117

117

298

Sergent-chef

304

120

120

424

Sergent

587

202

202

789

Total

1 214

553

553

1 767

Sous-officiers du contingent

Aspirant

153

5

5

158

Gendarme auxiliaire MDL

431

14

14

445

Total

584

19

19

603

Total sous-officiers

78 386

675

- 570

105

78 491

MILITAIRES DU RANG DU CONTINGENT

GA brigadier chef

773

27

27

800

GA auxiliaire brigadier

1 557

56

56

1 613

GA auxiliaire 1ère classe

1 274

46

46

1 320

GA auxiliaire

8 003

285

285

8 288

Total

11 607

414

414

12 021

Total général

92 905

1 319

570

749

93 654

b) Les emplois civils

Au terme de la loi de programmation, les effectifs civils augmenteront de 1 002 emplois (de 1 258 emplois en 1996 à 2 260 en 2002) et compenseront la déflation globale des militaires d'active. En principe, les personnels civils sont affectés dans la gendarmerie soit par concours (fonctionnaires), soit par embauchages (ouvriers), soit par mutations internes au ministère de la défense. Ce dernier procédé prévaudra désormais car les nouveaux effectifs seront principalement recrutés parmi les personnels des établissements restructurés.

La création des nouveaux emplois n'obéira pas à un rythme régulier sur toute la durée de la loi de programmation : c'est pourquoi le nombre de postes supplémentaires créés en 1998 (63) apparaît en retrait du chiffre retenu cette année (271 en 1997) et pour les quatre années suivantes (167 chaque année de 1999 à 2002).

Au 1er août 1997, 163 postes sur 271 étaient pourvus (60 %) dont seulement 47 postes sur les 120 emplois réservés aux ouvriers (39 %). En effet, la perspective de changer de lieu de travail représente pour les personnels concernés un facteur dissuasif. C'est pourquoi il convient de prendre toutes les mesures nécessaires pour favoriser l'accueil des personnels civils au sein des unités conformément aux dispositions du plan " formation-mobilité ".

2. Les effets contrastés de la revalorisation

La requalification des emplois présente des effets très positifs pour le déroulement des carrières. En revanche les mesures de revalorisation indiciaire apparaissaient très limitées dans le projet de budget pour 1998.

a) L'indispensable requalification des emplois

L'augmentation du nombre d'officiers emportera trois conséquences principales : l'amélioration du déroulement de la carrière des officiers, l'ouverture de promotion pour les sous-officiers et enfin la possibilité d'intégration au sein de la gendarmerie de militaires provenant des autres armées.

. L'augmentation du nombre d'officiers met fin à la situation anormale de blocage des carrières.

Votre rapporteur avait déjà souligné les années précédentes les décalages entre les fonctions exercées et le grade détenu par leur titulaire. Il avait également manifesté son inquiétude à propos du nombre d'officiers " hors créneaux d'avancement ", en particulier les capitaines et les lieutenants-colonels qui ont dépassé l'ancienneté nécessaire (9 ans pour les premiers, 7 ans pour les seconds) pour bénéficier d'une promotion normale, limitée dans leur cas à 5 % et 2 % du contingent des promotions annuelles.

Cette situation difficilement acceptable trouvait son explication dans la faiblesse du taux d'encadrement de la gendarmerie en personnel officier.

Les perspectives ouvertes par la loi de programmation devraient permettre, du moins de façon transitoire, de stabiliser le nombre des officiers hors créneaux (entre 25 et 30 pour les capitaines, entre 45 et 50 pour les lieutenants-colonels). La part des officiers hors créneaux peut paraître encore excessive au regard des mérites des personnels concernés, cependant elle se serait accrue inexorablement en l'absence d'une progression des postes d'officiers.

Ainsi, sans la création de 10 postes de colonel par an de 1997 à 2002, l'effectif des lieutenants-colonels hors créneaux (28 en 1995, 43 en 1997) aurait rapidement dépassé la centaine. Au-delà de 2002, le problème risque toutefois de se poser de nouveau.

L'annuité 1997 du programme de requalification des emplois a permis l'évolution suivante :

Grade

1996

1997

Variation

Colonel

182

192

+ 10

Lieutenant-colonel

490

513

+ 23

Chef d'escadron

380

430

+ 50

Capitaine

995

1 037

+ 42

Lieutenant et sous-lieutenant

596

676

+ 80

Tableau d'avancement 1996

Tableau d'avancement 1997

Tableau d'avancement 1998

(prévisions)

Inscrits

% de sélection

Inscrits

% de sélection

Inscrits

% de sélection

Colonel

28 1

10,2

32 2

11,3

38 à 42

13,5

Chef d'escadron

100

23

132

29,4

145 à 150

33

1 + 1 inscription à titre conditionnel

2 + 3 inscriptions à titre conditionnel

. La prédominance du recrutement interne pour les officiers

Dans le souci de valoriser le niveau de recrutement des officiers, la part du recrutement interne (70 % jusqu'en 1993), jugée excessive, avait été ramenée à 50 %.

Ce niveau ne pourra toutefois être maintenu sur la durée de la loi de programmation compte tenu d'une part de l'augmentation importante du nombre d'officiers et d'autre part de la volonté légitime de requalification des emplois des sous-officiers. L'année 2003 devrait connaître un retour à l'équilibre.

Dès 1996, les officiers recrutés au choix parmi les gradés de gendarmerie sont passés d'une trentaine par an depuis 1991 à 100. De façon générale, en 1997, les volumes de tous les types de recrutement sur concours ou au choix, hormis le recrutement sur titre (faute d'une ressource suffisante tant en nombre qu'en qualité) ont été multipliés par trois en moyenne. La ressource en candidats officiers de réserve ou sous-officiers de gendarmerie restant globalement stable, la sélectivité a diminué entre 1996 et 1997.

Enfin, la création d'emplois d'officier contribuera également à l'intégration des militaires issus des autres armées à la suite de la déflation générale des effectifs de la défense. Ainsi, 55 officiers subalternes ont été admis en 1997 au concours d'admission au cours supérieur de l'école des officiers de la gendarmerie nationale (53 de l'armée de terre, 1 du service de la santé, 1 de la délégation générale pour l'armement).

. Maintien de certaines difficultés pour l'avancement au sein du corps des sous-officiers

A la suite des propositions du contrôleur général des armées Sandras en novembre 1995, un programme de requalification des emplois a été mis en oeuvre en 1996 et 1997 par transformation d'emplois d'un grade donné en emplois du grade supérieur.

Mesures de requalification d'emploi adoptées en 1996, 1997, 1998

Grade

1996*

1997

1998

Major

+ 60

+ 25

Adjudant-chef

+ 250

+ 123

+ 50

Adjudant

- 250

+ 356

+ 70

Maréchal des logis-chef

+ 650

+ 265

+ 85

Gendarme

- 650

- 804

- 230

*Budgétisation des mesures du plan Sandras grâce à une provision de 20 millions de francs.

Malgré ces mesures de repyramidage, quelques difficultés demeurent. En particulier, il faut seize ans en moyenne à un gendarme départemental pour accéder au grade de maréchal des logis-chef. Ces délais tendent à s'allonger chaque année (12 ans 5 mois en 1993, 13 ans 3 mois en 1996).

La poursuite du programme de requalification des emplois permettrait seule de lever ces difficultés.

Ancienneté moyenne dans le grade précédent

1994

1995

1996

Concours

Major

Choix

03a-03m

07a-10m

03a-05m

06a-10m

03a-07m

07a-01m

Adjudant-chef

05a-06m

05a-05m

05a-05m

Adjudant

06a-08m

06a-02m

06a-06m

Maréchal des logis-chef

12a-09m

13a-03m

13a-03m

Même si le programme de revalorisation des emplois permettra, pour un temps, de favoriser le déroulement des carrières, il ne réglera pas, à lui seul, toutes les situations de blocage. C'est pourquoi des solutions complémentaires doivent être apportées à travers les incitations au départ. Or l'attribution du pécule destiné, dans le cadre de la professionnalisation des armées, à favoriser le départ anticipé des militaires concernés par les transformations d'emploi, a reçu, pour la gendarmerie, une application limitée.

. Le pécule : une application limitée pour la gendarmerie

La logique même de la loi n° 96-1111 du 19 décembre 1996 conduisait la gendarmerie à accorder en priorité le pécule aux sous-officiers employés jusqu'à présent à des missions de soutien et remplacés, aux termes de la loi de programmation, par des militaires servant sous un autre statut et par des personnels civils. Compte tenu des conditions d'éligibilité fixées par la loi du 19 décembre 1996, 249 candidatures furent présentées, parmi lesquelles 78 sous-officiers (73 gradés et 5 gendarmes spécialistes), seulement ont pu être retenus. Cette sélection sévère imposée par l'étroitesse de l'enveloppe budgétaire réservée à la gendarmerie au titre de l'attribution du pécule, a visé prioritairement les gradés spécialistes à moins de six ans de la limite d'âge, notamment les adjudants-chefs et les adjudants servant dans les spécialités auto-engins blindés, affaires immobilières, armurerie et administration.

Le nombre de candidatures traduit les réticences des sous-officiers spécialistes -en tout cas pour les plus anciens- à s'engager sur des postes dits " opérationnels " à la suite de la mise en place du nouveau corps de soutien. Les perspectives ouvertes par le projet de budget pour la gendarmerie ne permettront sans doute pas d'élargir, l'an prochain, le nombre des bénéficiaires du pécule.

C'est pourquoi les départs anticipés continueront de reposer en partie encore sur des formules traditionnelles comme l'avancement conditionnel . Ce système, d'abord réservé aux officiers et étendu ensuite aux sous-officiers depuis 1984, permet une promotion au grade supérieur avec pour contrepartie l'engagement de l'intéressé de partir à la retraite dans les six mois qui suivent cet avancement (afin de prendre en compte le risque présenté par l'accroissement des lieutenants-colonels hors créneaux au-delà de l'an 2000, la gendarmerie a d'ailleurs décidé d'étendre dès 1998 les règles de l'avancement conditionnel pour l'accession au grade de colonel). Cependant, il convient de le rappeler, l'attrait de cette mesure ne joue guère pour les gendarmes souhaitant accéder au grade de maréchal des logis-chef dont l'indice demeure inférieur en fait, à l'indice terminal de gendarme classé à l'échelon exceptionnel.

b) Le ralentissement des mesures de revalorisation indiciaire

Les militaires de la gendarmerie en activité perçoivent, à l'instar des autres militaires, la solde de base, l'indemnité de résidence, le supplément familial de solde lié aux charges de famille, l'indemnité pour charges militaires et, le cas échéant, une prime de service et une prime de qualification. Les gendarmes bénéficient en outre de l'indemnité de sujétion spéciale de police.

L'évolution des rémunérations appelle trois observations.

. En premier lieu, la transposition aux militaires des dispositions du protocole d'accord de la fonction publique (" protocole Durafour ") est parvenue à son terme en 1996.

Pendant six ans le protocole Durafour a constitué le principal moteur de la revalorisation des rémunérations des gendarmes. Les mesures applicables jusqu'en 1996 ont continué de produire leurs effets en 1997 du fait de l'extension en année pleine de la tranche 1996. Le projet de budget pour 1998 se limite à budgétiser les crédits relatifs à la tranche 1994 de la nouvelle bonification indiciaire.

Ensuite, la revalorisation de l'indemnité pour charge militaire (+ 0,542, soit un coût de 5 millions de francs) apparaît en retrait par rapport à l'an passé (+ 1,36 %, soit un coût de 12,3 millions de gendarmes).

Les autres mesures générales et catégorielles inscrites au projet de budget pour 1998 ont une portée limitée.

Elles peuvent se présenter sous trois rubriques :

Les mesures d'ajustement technique

- revalorisation de l'indemnité compensatoire pour frais de transport en Corse 0,140 MF

- aménagement des rémunérations à l'étranger 0,424 MF

- revalorisation du prêt des appelés (+ 1 %) 1,591 MF

Les mesures d'ordre général

- augmentation du contingent de primes de qualifica tion des officiers brevetés (+ 5 %) 0,165 MF

- revalorisation des crédits d'indemnité journalière de présence temporaire 2,660 MF

- crédits de reconversion 0,235 MF

Les mesures de transfert avec la revalorisation de la prime de qualification des officiers brevetés (26 % au lieu de 23 %) 1,642 MF

. La situation des retraités de la gendarmerie

Les retraités de la gendarmerie ont bénéficié d'une mesure favorable dans la période récente avec la révision de la pension de retraite des adjudants-chefs (9e échelon).

En effet, le décret n° 96-990 du 13 novembre 1996 (J.O. du 16 novembre 1996, p. 16.754), modifiant le décret portant statuts particuliers des corps des sous-officiers de gendarmerie, a créé, à compter du 1er août 1996, un 9e échelon attribué aux adjudants-chefs réunissant 25 ans de services.

En application des dispositions des articles L15 et L16 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les adjudants-chefs retraités avant l'intervention de ce décret, totalisant au moins 25 ans et 6 mois de services, peuvent prétendre, sans intervention de leur part, à la révision de leur pension de retraite sur la base de ce nouvel échelon à compter du 1er août 1996.

Il en est de même de la pension allouée aux ayants cause des adjudants-chefs ayant réuni avant leur admission à la retraite la condition de durée de services ci-dessus.

Les opérations relatives à la révision de ces pensions sont entreprises par le service des pensions des armées depuis le mois de janvier 1997.

En revanche, d'autres demandes des retraités de la gendarmerie n'ont pas trouvé satisfaction. C'est le cas en particulier pour la majoration pour pension dès l'âge de 50 ans.

Conformément aux dispositions de l'article 131 susvisé, la jouissance de la majoration pour pension résultant de l'intégration de l'ISSP est différée jusqu'à l'âge de 55 ans.

Ce texte législatif dispose toutefois que les militaires de la gendarmerie radiés des cadres ou mis à la retraite pour invalidité et les ayants cause des militaires de la gendarmerie décédés avant leur admission à la retraite peuvent prétendre immédiatement à cette majoration de pension.

Un avantage identique est également servi aux personnels du ministère de l'intérieur (loi de finances pour 1983 - n° 82-1126 du 29 décembre 1982) qui, cependant, peuvent bénéficier dès 50 ans d'une pension majorée de l'intégration de l'ISSP.

L'ensemble des interventions et questions des parlementaires en vue de la mise en oeuvre d'une identité de situation entre fonctionnaires de police et militaires de la gendarmerie n'ont pas, à ce jour, débouché sur la modification des dispositions de l'article 131 de la loi du 29 décembre 1983 précitée.

B. UN EFFORT ACCRU DEMANDÉ AUX PERSONNELS

La mise en place des réformes inscrites dans le cadre de la loi de programmation met à l'épreuve le sens de l'adaptation de l'Arme. Dans le même temps, les incertitudes liées à l'avenir du volontariat en gendarmerie et à l'organisation d'une nouvelle force de réserve ne laissent pas d'inquiéter sur les charges qui pèseront sur les militaires d'active.

1. Le poids cumulé des réformes

a) La mise en oeuvre délicate du nouveau corps de soutien

La première année de mise en oeuvre du nouveau corps de soutien n'a pas permis de lever toutes les interrogations dont votre rapporteur avait fait état dans son précédent rapport sur le budget de la gendarmerie pour 1997. L'esprit de la réforme ne donnait guère de prise à la critique : ne s'agissait-il pas, en effet, de recentrer les militaires de la gendarmerie sur les emplois de terrain ? Près de 4 500 postes occupés par des sous-officiers employés à des tâches de soutien devaient ainsi, d'ici 2002, être pourvus par des militaires régis par un autre statut (134 officiers et 3 386 sous-officiers " non gendarmes ") et par l'augmentation du nombre de personnels civils affectés à ces tâches (+ 1002), ces deux catégories de personnels présentant un coût moindre pour le budget de l'Etat.

Aujourd'hui les conditions de recrutement des personnels du corps de soutien comme les modalités de transfert des militaires de la gendarmerie vers les unités constituent deux sujets de préoccupation.

. L'intégration des militaires issus des autres armes au sein du corps de soutien apparaît comme un demi-succès.

En 1997, première annuité de la loi de programmation, le recrutement pour les 21 postes d'officier et les 565 emplois de sous-officiers ouverts dans la spécialité " emplois administratifs et de soutien de la gendarmerie " 5( * ) reposait principalement sur l'intégration de militaires provenant des autres armées -à la suite de la réduction du format des forces militaires-. Si la totalité des postes d'officiers (21) ouverts a pu être pourvue par des officiers du corps administratif et technique de l'armée de terre (15), de l'armée de l'air (6) -soit 4 lieutenants-colonels, un commandant, 14 capitaines et deux lieutenants-, le recrutement des postes de sous-officiers donne lieu à un bilan plus contrasté. En effet, seuls 47 % des besoins ont pu être couverts par l'intégration de militaires des autres armées. Les autres postes ont été pourvus par 213 engagements initiaux souscrits par des gendarmes auxiliaires -les 20 autres emplois, dans la branche " santé " demeurant réservés à des personnels infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées.

Le refus de nouvelles affectations géographiques et l'inadéquation entre les compétences des intéressés et les besoins de la gendarmerie constituent les deux principales raisons des difficultés rencontrées pour intégrer les militaires des autres armées.

Le bilan global est le suivant :

Dossiers déposés

Dossiers retenus

Taux de sélection

Armée de terre

420

231

(dont 120 sous-officiers de carrière)

55 %

Armée de l'air

90

57

(dont 21 sous-officiers de carrière)

63 %

Marine

197

44

22 %

TOTAL

707

332

47 %

La mise en place de cette réforme supposait en parallèle un important effort de formatio n. Ainsi tous les officiers et sous-officiers appartenant à la spécialité " emplois administratifs et de soutien de la gendarmerie " ont reçu une formation d'adaptation de quatre semaines à l'Ecole des officiers de la gendarmerie nationale de Melun ou à l'Ecole des sous-officiers de gendarmerie de Chaumont. En outre, un dispositif d'accueil permet de procurer aux intéressés les renseignements nécessaires à leur adaptation professionnelle et familiale.

Aujourd'hui, cependant, l'intégration des militaires ne pourra être jugée satisfaisante tant que ces personnels demeurent placés sous des régimes transitoires, dans l'attente d'un statut définitif qui reste à définir.

. Le statut du corps de soutien reste à définir

Les officiers et les sous-officiers servent provisoirement dans la spécialité " emplois administratifs et de soutien de la gendarmerie " créée au sein du corps technique et administratif de l'armée de terre. Le décret (n° 76-1227) portant statut particulier des officiers des corps techniques et administratifs, du 24 décembre 1976, doit recevoir les modifications nécessaires pour permettre la création du corps technique et administratif de la gendarmerie. Les intéressés conservent leur ancienneté de grade. Au moment de l'inscription au tableau d'avancement, la promotion au grade supérieur intervient dans des conditions de délai comparables à celles de leur corps d'origine.

Aujourd'hui, au regard de l'importance de la réforme engagée par la gendarmerie et de ses enjeux, la définition d'un nouveau statut ne saurait être plus longtemps différée.

. Les conditions de transfert des militaires de la gendarmerie requièrent une adaptation parfois difficile

Même si la gendarmerie a prévu les mesures d'accompagnement nécessaires, la réforme impose un effort important aux militaires employés à des tâches de soutien. 565 postes ont été transformés en 1997. Les sous-officiers âgés de plus de quarante-huit ans seront maintenus dans leur poste s'ils le souhaitent. Pour les autres, les possibilités de choix demeurent limitées : les mesures de départ volontaire (en particulier l'attribution de pécules destinés en priorité aux sous-officiers spécialistes) restent d'une portée limitée, tandis que l'intégration, sur une base volontaire -dans le corps militaire de soutien- implique des sacrifices importants. En effet, la remise en cause du statut de sous-officier de gendarmerie entraîne la perte de la concession du logement par nécessité de service, de l'indemnité spéciale de sujétion de police (ISSP) et enfin, des sommes retenues pour pension au titre de l'intégration de l'ISSP.

Les effets du changement de statut ne pourraient-ils pas s'échelonner dans le temps ? Par ailleurs, il paraît légitime que les sous-officiers assujettis à une retenue majorée, au titre de l'article 131 de la loi de finances du 29 décembre 1983, bénéficient d'une pension de retraite intégrant l'indemnité de sujétion spéciale de police. La direction générale a entrepris des démarches dans ce sens auprès de Bercy : il est important qu'elles puissent connaître un aboutissement positif.

Les militaires destinés à revenir sur le terrain bénéficient d'un traitement personnalisé : information par un officier de la transformation de leur poste, possibilité de manifester des préférences d'affectation, entretien de carrière par le commandant de légion, ou l'autorité assimilée. La mutation revêt un caractère prioritaire sur tous les autres mouvements de personnel. Ainsi, jusqu'à présent, les premiers choix d'affectation ont pu être satisfaits dans 90 % des cas ,

Par ailleurs, les intéressés reçoivent une formation de recyclage d'une durée de deux à huit semaines, adaptée à leur grade, leur profil et leurs nouvelles fonctions. En outre, les possibilités d'avancement dans leur ancien cadre de gestion sont prises en compte. Enfin, la pratique du tutorat sera systématisée afin de favoriser l'intégration au sein des unités d'accueil.

b) La nécessaire mobilité du personnel et sa contrepartie, une gestion des carrières plus personnalisée

. La mobilité des militaires de la gendarmerie répond à la fois aux nécessités du service et, aussi, à l'intérêt du personnel.

Inscrite dans le plan d'action "gendarmerie 2002", elle fait écho à une lettre de mission du ministre de la défense du 31 juillet 1995, assignant à la gendarmerie l'objectif "d'accroître progressivement la mobilité des personnels, afin que ne perdure pas une trop grande sédentarité incompatible avec la nécessaire disponibilité et le caractère militaire de la gendarmerie".

La règle de mobilité ouvre pour l'institution la possibilité d'utiliser au mieux les compétences professionnelles acquises par les personnels -elle apparaît ainsi comme un atout pour procurer aux brigades situées dans les zones périurbaines les militaires expérimentés qui leur sont nécessaires. Mais elle ouvre aussi aux personnels les perspectives d'une carrière plus diversifiée et plus équitable (l'immobilisme des uns constituant un frein pour les changements d'affectation des autres).

La mise en place de la mobilité s'organisera de façon progressive :

- une phase de concertation, ouverte au printemps 1996, avec la treizième session du Conseil de la fonction militaire gendarmerie prolongée à l'occasion des autres réunions de cette instance de concertation ;

- une phase préparatoire, en cours aujourd'hui, dont la conclusion sera marquée par l'adoption d'un décret en Conseil d'Etat avant la fin du premier semestre 1998 ;

- une phase de mise en oeuvre en deux étapes : d'une part, une période transitoire jusqu'en 2007 prévoyant la mutation de tous les militaires dont la présence dans une même unité excède dix ans (avec une exécution dès 1998 pour les anciennetés de présence de plus de vingt ans), d'autre part, une période de généralisation à partir de 2008 pour les militaires n'ayant pas connu professionnellement d'autre cadre juridique.

. La mise en oeuvre de la réforme doit s'inscrire dans le cadre d'une gestion du personnel rénovée.

D'une part, l'application de la règle de mobilité devra, dans un premier temps, tenir compte des cas particuliers. La situation des militaires dont le départ à la retraite se situe à une échéance rapprochée mériterait sans doute une dérogation. A plus long terme, les mutations s'inscriront dans une politique de ressources humaines personnalisée. A cet égard, le dispositif d'accompagnement de la réforme, fondé sur la possibilité d'exprimer des préférences au moyen d'une fiche de voeux et sur l'instauration d'entretiens avec les responsables du personnel, constitue une garantie appréciable.

2. Le risque d'un accroissement des charges sans contrepartie

D'importantes incertitudes demeurent sur la mise en place du volontariat et des nouvelles réserves prévues dans le cadre de la loi de programmation. Or les volontaires comme les réservistes représentent pour la gendarmerie une ressource indispensable pour assumer l'ensemble de ses missions.

a) Le volontariat : des perspectives préoccupantes

Aux termes de la loi de programmation, la gendarmerie devrait disposer en 2002 de 16 232 emplois de volontaires, soit près des deux tiers des 27 171 emplois de volontaires prévus pour l'ensemble des armées.

La réforme se mettra en place progressivement selon le schéma suivant :

Catégories

1998

1999

2000

2001

2002

Appelés

12.644

9.468

6.312

3.156

0

Volontaires

0

4.058

8.116

12.174

16.232

Cette évolution représente un double enjeu pour la gendarmerie.

D'une part, il lui faudra remplacer les gendarmes auxiliaires au nombre de 12 644 en 1998. Cette ressource est devenue pour l'Arme une ressource indispensable : 90 % d'entre eux servent dans la gendarmerie départementale et 72 % sont affectés à des unités opérationnelles. S'ils ne disposent pas de toutes les attributions des militaires professionnels (et notamment des responsabilités en matière de police judiciaire), ils participent pleinement aux tâches liées à la police de la circulation, aux opérations de sécurité publique, de surveillance générale, d'assistance et de sécurité. Les gendarmes ont, du reste, depuis leur création payé un lourd tribut au service dans l'Arme : 21 décédés et 1 778 blessés en service. En 1996, 2 d'entre eux sont décédés en service commandé et 86 autres ont été blessés.

D'autre part, la Gendarmerie trouvera dans le volontariat la seule ressource supplémentaire dont elle bénéficiera pour faire face à l'augmentation de ces charges. Or, après la suppression de l'obligation du service national, la gendarmerie ne pourra se procurer une ressource de qualité sans les mesures d'incitation nécessaires et la mise en place d'une formation adaptée.

Les incitations reposent sur deux éléments.

. L'ouverture des perspectives de carrière

Or, compte tenu de la diminution conjoncturelle du nombre des départs par limite d'âge dans les premières années de la programmation militaire liée aux facteurs démographiques, la possibilité d'entreprendre une carrière dans le corps des sous-officiers apparaît limitée ; en outre, le principe de l'égalité d'accès des citoyens à la fonction publique interdit de donner aux volontaires une priorité d'accès aux emplois de la gendarmerie.

D'autres voies peuvent sans doute être explorées. Ainsi, la gendarmerie a signé en 1996 une convention avec l'Union fédérale des industries et des services de la sécurité. La création d'un Bureau de la reconversion, le ler septembre 1997, au sein de la Direction générale permettra sans doute de multiplier des initiatives comparables.

Toutefois, la principale incitation reposera sur une rémunération attractive.

. Une rémunération satisfaisante apparaît indispensable

Compte tenu des responsabilités particulières assumées, de la disponibilité requise (horaires et durée de travail) et, enfin, des risques professionnels encourus, la rémunération aurait du dépasser le niveau prévu pour les emplois-jeunes. Or, on le sait, tandis que le bénéficiaire d'emploi-jeune disposera d'une rémunération comparable au SMIC, les volontaires se satisferont d'une somme de 4 000 F -logement et repas compris-. La concurrence entre les deux types d'emplois risque de jouer au détriment du volontariat. Il apparaît donc très souhaitable d'accorder aux volontaires la prime de sujétion spéciale équivalente à 20 % de la solde de base (soit 800 F par mois environ) afin de tenir compte des contraintes particulières auxquelles les volontaires seront soumis au sein de l'Arme.

Car il ne s'agit pas seulement d'obtenir le nombre de volontaires prévu mais aussi d'appeler auprès de la gendarmerie des personnels de qualité.

Certes, le dispositif envisagé offre des garanties non négligeables. La période du volontariat -un an renouvelable jusqu'à cinq ans- permettra d'organiser un cursus de formation approfondie : quatre semaines de formation initiale de base suivies de six semaines de formation -soit au total dix semaines en centre d'instruction- et six semaines de stage d'application pratique en unité. Au terme du cursus de formation, les volontaires obtiendront un diplôme utile pour leur reconversion éventuelle. En outre, la durée de cette formation leur donnera un niveau de qualification supérieur à celui des gendarmes auxiliaires et leur permettra en particulier de bénéficier de la qualité d'agent de police judiciaire adjoint (article 21 du code de procédure pénale). Grâce à ces garanties, les volontaires pourront occuper des fonctions opérationnelles au sein des unités où ils seront affectés.

Malgré ces garanties, la qualité initiale des volontaires demeure un sujet de préoccupation.

Convient-il de compléter le volontariat par des "agents locaux de médiation" prévus dans le cadre du plan emploi-jeunes ? Votre rapporteur ne le pense pas.

. Les "agents locaux de médiation "appellent plusieurs réserves.

Certes, la décision de créer dans le cadre du plan emploi-jeunes quelque 35 000 emplois au profit de la police dont 15 000 appelés à occuper des tâches de médiation et d'animation sur un financement conjoint du ministère de l'emploi (80 %) et des partenaires locaux, pouvait justifier le souci manifesté par la gendarmerie de disposer d'un renfort comparable. Ainsi, comme l'a indiqué M. Bernard Prévost lors de son audition devant notre commission, 10 000 agents locaux de médiation pourraient être recrutés dans la zone exclusive de gendarmerie à l'initiative des collectivités locales, responsables de leurs conditions d'emploi même si la gendarmerie devait participer au recrutement et à la formation de jeunes gens concernés ainsi qu'à la coordination de leur activité. Par ailleurs, ces agents relèveraient des maires et ne seraient pas intégrés à la gendarmerie. Aujourd'hui les modalités d'emplois de ces agents demeurent très imprécises, leur formation représentera une charge pour la gendarmerie alors que leur activité échappera en fait à l'autorité de l'Arme.

Est-il souhaitable d'associer une catégorie de personnel aux contours si imprécis aux missions assumées par la sécurité ? Ne serait-il pas plus pertinent de demander qu'un effort -financier- comparable puisse bénéficier à la mise en oeuvre du volontariat ? Autant de questions qui conduisent en tout cas à se défier de la formule séduisante mais trompeuse des "agents locaux de médiation".

b) Les réserves, facteur indispensable de souplesse

Les incertitudes liées au volontariat pèsent également sur la mise en place d'une nouvelle réserve de la gendarmerie. En effet, les gendarmes auxiliaires représentaient une source de recrutement importante pour la formation des actuelles réserves : ce gisement risquerait de se tarir à la suite de la suppression du service national obligatoire si le volontariat n'assurait pas une relève satisfaisante. Or, compte tenu de l'évolution de leur concept d'emploi destiné, dans le cadre des orientations fixées par la loi de programmation, à assurer des missions dès le temps de paix 6( * ) , les réserves apporteront à la gendarmerie la souplesse indispensable à l'exercice de ces missions.

Les ressources destinées aux réserves ne paraissent guère à la mesure des besosins observés. Sans même évoquer les équipements dont il sera fait état dans le chapitre suivant, il convient d'insister ici sur l'urgence de clarifier un système de rémunération, aujourd'hui inadéquat.

En effet, en principe, la solde du Fonds d'accompagnement de la professionnalisation devrait être utilisée pour le financement de dépenses liées à l'utilisation des réservistes en temps de paix . Or les ressources dégagées par ce Fonds demeurent insuffisantes. En 1994, les frais associés à l'emploi des réservistes ont représenté 13 millions de francs alors même que les moyens financiers affectés à ce poste n'ont pas dépassé 4,7 millions de francs.

Les années passées, la gendarmerie a pu bénéficier d'un accroissement de ses effectifs 7( * ) . En fait, en l'absence de ressources supplémentaires en personnels professionnels, volontaires et réservistes représentent, jusqu'à l'échéance de la loi de programmation, le seul facteur de développement des effectifs nécessaires pour faire face à des charges accrues.

La pression qui s'exerce sur la gendarmerie se traduit au quotidien par l'augmentation de la durée moyenne du temps de travail depuis 1990 (8 h 50 en 1990, 9 h 10 en 1996). Dans ces conditions, une réduction des astreintes apparaît difficile. Ainsi, l'objectif d'accorder au personnel cinq quartiers libres par quinzaine, réaffirmé par la circulaire ministérielle du 8 février 1994, a reçu une application seulement partielle : les militaires continuent de bénéficier de quatre quartiers libres en moyenne.

Aujourd'hui, entre les incertitudes liées à la mise en place du volontariat et des réserves et les risques soulevés par le développement des charges confiées à la gendarmerie, la marge de manoeuvre apparaît étroite. Elle repose presque entièrement sur l'organisation des redéploiements territoriaux.

IV. L'ÉQUIPEMENT DE LA GENDARMERIE : DES PERSPECTIVES PRÉOCCUPANTES

Le programme de télécommunications Rubis continue de drainer une part prédominante des crédits dévolus aux matériels de la gendarmerie : en 1998, 512 millions de francs de crédits de paiement (sur 2 099 millions de francs soit plus de 24 % de la dotation), compte tenu également des dépenses liées au maintien en condition opérationnelle (63 millions de francs). Dans une enveloppe budgétaire étroite et frappée régulièrement par des annulations de crédits, un tel effort, au demeurant justifié, requiert des sacrifices pour les autres équipements dont certains -au premier chef, dans le domaine de la mobilité- appellent pourtant un renouvellement rapide.

L'inquiétude se cristallise cependant aujourd'hui sur les infrastructures dont les crédits baissent de près de 12 % (782 millions de francs au lieu de 885 millions de francs en 1997). Les contraintes imposées au fonctionnement de la gendarmerie et aux conditions de vie des militaires par de nouveaux retards dans la mise en chantier ne sont pas sans limites.

A. UNE MARGE DE MANOEUVRE ÉTROITE

1. La priorité dévolue aux télécommunications

a) Le programme Rubis

Destiné à renouveler et fédérer la composante radioélectrique du réseau Saphir et des réseaux de commandement des unités de la gendarmerie départementale et d'autoroute, le programme Rubis est aujourd'hui déployé dans quarante trois groupements.

. Les derniers déploiements pourront avoir lieu à la fin de l'année 2000

En 1998, dix-sept groupements supplémentaires disposeront des matériels nécessaires. Ainsi malgré les annulations et autres gels de crédits, source de délais supplémentaires, la gendarmerie a su tenir, dans ses grandes lignes, l'échéancier prévu.

Cependant, l'enveloppe financière initiale, fixée à 2 576 millions de francs, a été dépassée. Le coût total du programme s'élève en effet à 2 730,8 millions de francs auxquels il convient d'ajouter les dépenses liées aux travaux d'ingenierie et d'infrastructure des sites effectués par la gendarmerie elle-même (soit 313,2 millions de francs) ainsi que la livraison des 10 700 terminaux portatifs (soit 206,2 millions de francs).

. Aujourd'hui l'attention doit porter sur la reconnaissance de la technologie Tetrapol, issue de Rubis .

Il y a là, en effet, un double enjeu à la fois pour la sécurité (et la coopération policière sur la base de techniques communes) et pour la commercialisation de cette technologie.

C'est pourquoi les utilisateurs de la technologie Tetrapol ont formé un groupe autour de Matra Communication et se sont assignés trois objectifs : défense de positions communes face aux organismes normalisateurs, soutien de Tetrapol comme standard européen de radiocommunication numérique, ouverture de la technologie employée à la concurrence pour favoriser un approvisionnement multiple.

D'ores et déjà plusieurs pays se sont dotés de la technologie Tetrapol. En France, il convient de citer, outre la gendarmerie, le ministère de l'intérieur (AEROPOL) et la SNCF (IRIS). A l'étranger, deux nouveaux contrats ont été signés cette année avec le Mexique et la Suisse.

b) Le matériel quotidien négligé

Si le programme Rubis se poursuit sans trop d'encombres, l'équipement de la gendarmerie en " petit " matériel de télécommunications, comme les télécopieurs, laisse apparaître des lacunes dommageables pour le fonctionnement quotidien des brigades. Certes, en 1996, l'ensemble des brigades de recherche et, à titre expérimental, les brigades du groupement de gendarmerie du Var ont bénéficié d'un équipement en fax. Toutefois, la généralisation de ces matériels aux quelques 3 600 brigades nécessiterait une allocation budgétaire estimée à 18 millions de francs et entraînerait évidemment des coûts de fonctionnement supplémentaires. Au regard de l'étroitesse des ressources financières et malgré les besoins des unités, le programme d'acquisition de télécopieurs au profit des unités territoriales a été reporté à la période 2005-2008.

Au profit de la gendarmerie il convient, à l'inverse, de mentionner l'interconnexion du répartiteur du réseau local du groupement de gendarmerie départementale avec le répartiteur Rubis afin d'assouplir l'emploi des terminaux Rubis dans les locaux du groupement et d'en réduire le coût d'installation. En outre, des modifications techniques ont permis, au cours du second semestre 1997, d'organiser l'acheminement au centre opérationnel de la gendarmerie (COG) de jour comme de nuit de tous les appels d'urgence " 17 " émis à partir des radiotéléphones au sein de la zone de compétence exclusive gendarmerie. Par ailleurs, la Commision nationale informatique et libertés (CNIL) a donné un avis favorable à la demande formulée par la gendarmerie, d'identification des appels en provenance du " 17 " à condition toutefois que ces appels aboutissent en un point unique de chaque département, en l'occurrence le COG. Une expérimentation en cours dans quatre départements (Cantal, Nièvre, Oise, Seine-Maritime), d'une durée de six mois, permettra de prendre la mesure des adaptations techniques nécessaires.

2. Les autres matériels : un effort contrasté

a) Les initiatives, encore incomplètes, en faveur de l'informatique

Les moyens informatiques font l'objet d'adaptations régulières au cours des dernières années. En 1997 ils ont porté en particulier sur l'informatique de service à travers la rénovation du système informatique central Centaure (centre automatisé de recherche), le déploiement de la base départementale de la délinquance afin de favoriser les rapprochements judiciaires au bénéfice des enquêteurs et également les capacités d'analyse de la délinquance locale.

L'équipement en informatique de gestion ne répond pas, quant à lui, à l'ensemble des besoins. Certes, en 1997, les légions et les groupements de gendarmerie départementale auront bénéficié respectivement de 300 et 160 micro-ordinateurs et imprimantes. Cependant votre rapporteur, lors de ses déplacements dans plusieurs brigades territoriales, a pu relever l'insuffisance des dotations et l'utilisation par de nombreux militaires d'un matériel acheté à leur propres frais.

En 1998, toutefois, le déploiement de 1 900 nouvelles configurations permettra de poursuivre le renouvellement du matériel de bureautique

b) La mobilité : un grave sujet de préoccupation

Certes, il faut prendre acte d'évolutions favorables :

- le renouvellement progressif depuis le milieu de l'année 1997 -après un retard d'un an- des 78 derniers fourgons-car CRUISAR PR2 encore en service dans 26 escadrons de gendarmerie mobile par des véhicules conçus par la société LOHR ;

- la commande, au premier semestre 1997, de 76 véhicules expérimentaux pour les pelotons légers d'intervention( PLI) dont quarante seront destinés à la gendarmerie mobile et 36 à la Corse ;

- la commande de 84 véhicules polyvalents pour les écoles dont le parc constitué pour partie de camions SIMCA avait atteint la limite de l'obsolescence.

Toutefois, l'attention se porte sur trois sérieux sujets de préoccupation.

. Le renouvellement du parc de véhicules n'est pas suffisant.

En effet, la commande de 2 486 véhicules (dont 840 motos) en 1998 n'apparaît pas à la mesure des besoins d'un parc automobile extrêmement sollicité -le seuil de réforme a été porté en moyenne au-delà de 225 000 km- il faut l'observer, le principe de diésélisation du parc s'impose désormais pour toutes les commandes -dès 1997, il s'est appliqué à la quasi-totalité des véhicules acquis ;

. Le parc de blindés se réduit, du fait de l'obsolescence d'une partie de ses composantes sans que la perspective de renouvellement des matériels puisse réellement se concrétiser avant 2001 .

En effet, après la mise hors service des 33 véhicules de transport de troupes chenilles (VTT AMX 13), les 121 automitrailleuses légères ont également été retirées du parc en 1997. Désormais, les blindés de la gendarmerie ne comprennent plus que deux types d'engins (155 véhicules blindés à roues de la gendarmerie -VBRG- dont 37 en place outre-mer, 28 véhicules blindés canon -VBC 90-).

La loi de programmation retient l'option d'un engin unique polyvalent capable d'assurer les missions de défense opérationnelle du territoire et de maintien de l'ordre pour se substituer à ce dispositif. A ce titre, elle prévoit d'inscrire les premiers crédits d'étude correspondant à ce projet à partir de 1999. En 2002, 30 véhicules de la nouvelle génération pourraient compléter un parc passablement éprouvé et à l'horizon 2005, la planification prévoit un parc total de 145 véhicules de nouvelle génération. Ces échéances apparaissent cependant excessivement lointaines au regard des nécessités du maintien de l'ordre.

. La capacité de la gendarmerie d'accomplir les missions de secours et d'intervention grâce à ses hélicoptères, risque aujourd'hui d'être compromise.


Deux incertitudes hypothèquent gravement la capacité d'intervention de la gendarmerie en montagne et en zone urbaine. En premier lieu, si le renouvellement des 12 hélicoptères de sauvetage et d'intervention Alouette III s'impose désormais comme une urgence, notamment après la destruction accidentelle de quatre appareils dans des circonstances dramatiques, un renouvellement partiel n'interviendra pas, dans le meilleur des cas, avant 1999 -les dotations prévues dans le projet de loi de finances pour 1998 permettant de passer commande pour deux premiers appareils.

Le choix devrait se porter sur le BK 117, hélicoptères biturbine fabriqué par la société Eurocopter. Dans l'immédiat, pour faire face à ses besoins, la gendarmerie bénéficie, sous la forme d'une cession gratuite, de quatre Alouette III prélevées pour moitié sur le parc de l'armée de terre et de l'armée de l'air.

Cependant, et c'est là pour votre rapporteur un deuxième sujet de préoccupation, la dérogation dont bénéficie la gendarmerie à l'instar d'autres services publics d'utiliser des appareils monoturbines au-dessus des zones urbaines pourrait lui être retirée en vertu de la réglementation communautaire. Or, aujourd'hui limitée à un parc d'appareils monoturbines, la gendarmerie, dans l'hypothèse où une telle décision se confirmerait, serait placée dans l'impossibilité de conduire des missions de sécurité publique .

Aux côtés des moyens dévolus à la mobilité, les matériels consacrés aux réserves représentent également pour votre rapporteur une question très préoccupante.

. Les équipements des réserves se révèlent à la fois inadaptés et très coûteux pour la gendarmerie.

Inadaptés, car une bonne partie des moyens apparaît hors d'usage : ainsi, 500 véhicules très dégradés (Jeep, GMC, Renault 4 X 4) ont dû être réformés en 1997 sans que leur remplacement soit programmé. Coûteux, car comme l'a confirmé le directeur général de la gendarmerie nationale devant notre commission, le stock de matériels existants en partie inutilisés entraîne de lourdes charges de garde et de maintenance.

En tout état de cause, les moyens actuels ne répondent en rien à l'ambition inscrite dans la loi de programmation de créer une réserve resserrée (avec un effectif réduit à 50 000 personnes au lieu des 130 000 hommes actuels) et plus efficace.

B. LES INFRASTRUCTURES : UNE PRESSION BUDGÉTAIRE EXCESSIVE

Les infrastructures bénéficieront en 1998 de 767 millions de francs en autorisations de programmes et de 782 millions de francs en crédits de paiement (soit une baisse de 11,6 % par rapport aux crédits de paiement prévus par la loi de finances initiale pour 1997).

1. Des besoins non satisfaits

Les besoins de renouvellement du parc immobilier de la gendarmerie peuvent être évalués à 1 500 unités-logement par an. Comme le montre le tableau des mises en chantier et des livraisons, les réalisations, faute de moyens budgétaires suffisants, apparaissent très en deçà de ce niveau. Dès lors, l'Etat tend à se défausser sur les collectivités territoriales de ses responsabilités en matière d'infrastructures, sans leur donner toutefois le soutien nécessaire.

Equivalents unités-logement mis en chantier

ANNÉE

ETAT

COLLECTIVITÉ TERRITORIALE ET PARTICULIERS

TOTAL

1994

922

380

1 302

1995

910

300

1 210

1996

800

415

1 215

1997

1 025

310

1 335

1998 (prévision)

824

412

1 236

La livraison intervient dans un délai moyen de dix-huit mois à deux ans selon la taille de l'opération.

Equivalents unités-logement livrés

ANNÉE

ETAT

COLLECTIVITÉ TERRITORIALE ET PARTICULIERS

TOTAL

1993

739

558

1297

1994

944

417

1361

1995

1 035

378

1 413

1996

973

310

1283

1997

891

370

1 261

1998 (prévision)

840

490

1 330

a) Les opérations de l'Etat : l'hypothèque des annulations budgétaires

La dotation budgétaire devrait permettre de livrer 891 équivalents-unités-logement en 1997. L'ensemble des opérations réalisées figure dans le tableau suivant.

. Opérations réalisées au premier semestre 1997 :

- Dugny (Seine-Saint-Denis) - caserne de Rose : construction d'un casernement au profit de la garde républicaine et deux escadrons de gendarmerie mobile déplacés. 2ème et 3ème tranches de travaux.

- Luçon (Vendée) : construction d'un casernement de gendarmerie mobile. 2ème tranche de travaux.

- Châtellerault (Vienne) : construction d'un casernement de gendarmerie mobile. 2ème tranche de travaux.

- Saint-Claude (Jura) : construction d'un casernement de gendarmerie départementale.

- Maisons-Alfort : (Val-de-Marne) : réhabilitation du casernement de gendarmerie mobile. 3ème tranche.

- Bordeaux (Gironde) : construction d'un casernement de gendarmerie départementale.

- Montoir-de-Bretagne (Loire-Atlantique) : construction d'un casernement de gendarmerie départementale.

- Réalisation de travaux d'infrastructure liés à l'implantation du réseau radioélectrique Rubis.

- Travaux de revalorisation dans les casernements domaniaux de la gendarmerie.

- Diverses opérations de construction et d'extension de casernement d'un coût unitaire inférieur à 15 MF.

. Opérations prévues au second semestre 1997 :

- Modernisation des écoles de la gendarmerie.

- Paris -caserne Vérines : (garde républicaine) confortation des fondations et reprise des façades.

- Argentan (Orne) : construction de logements au profit de la gendarmerie départementale.

. En revanche, une dizaine d'opérations prévues pour le second semestre 1997 ont été remises en cause à la suite de mesures d'annulation pour un montant de 44 millions de francs.

. Six grandes opérations pourraient débuter ou se poursuivre en 1998 :

- ORLEANS (Loiret)

Extension du casernement actuel au profit de la circonscription, des légions et unités subordonnées (2ème tranche)

129MF

- PARIS - Nouvelle France

Restructuration du casernement de la garde républicaine (1ère tranche)

85MF

- VANNES (Morbihan)

Construction de locaux et de services techniques de l'escadron de gendarmerie mobile (1ère tranche)

40MF

- VERSAILLES Benjamin Franklin (Yvelines)

Restructuration des locaux de service (groupement GD)

18MF

- DUGNY (Seine-Saint-Denis)

Construction d'un casernement au profit de la garde républicaine (4ème tranche)

200MF

- Nouveau siège social DGGN

24MF

b) L'aide des collectivités locales : un complément mais non une alternative aux responsabilités de l'Etat

Après un long mouvement de baisse au cours des dernières années, l'engagement des collectivités locales dans le financement des programmes immobiliers de la gendarmerie avait repris à compter de 1994. Cette inversion de tendance reposait principalement sur un cadre réglementaire plus favorable : le décret n° 94-1158 du 27 décembre 1992 et la circulaire du Premier ministre du 10 janvier 1995 ont en effet permis de réévaluer les coûts-plafond servant de base au calcul du loyer et de la subvention versée par l'Etat.

L'effet incitatif s'est traduit par une augmentation des dossiers, dans le cadre de la phase " préalable ", (1 300 à ce jour) proposés à l'agrément de la direction générale de la gendarmerie nationale.

L'Etat n'est malheureusement pas en mesure de prendre le relais car la capacité du titre VI consacré aux subventions d'investissement accordées aux opérations conduites par les collectivités territoriales, limité aux termes de la loi de programmation à une moyenne de 40 millions de francs par an, ne permet pas de soutenir la mise en chantier de plus de 275 unités-logement chaque année. Or les seuls besoins du parc locatif supposeraient la livraison annuelle de 950 unités-logement environ. C'est pourquoi le gouvernement souhaite aujourd'hui développer la participation des collectivités locales sans l'aide de l'Etat. Même si les collectivités ont déjà consenti un effort important pour la gendarmerie et sont prêtes à poursuivre dans ce sens comme le montre le nombre de dossiers de phase préalable déposés à la DGGN, elles se refuseront sans doute à assumer seules une charge pour laquelle elles ne recevront aucune contrepartie financière.

2. L'entretien des casernements et l'amélioration des locaux d'accueil : une ambition en quête de moyens

Le montant des crédits alloués pour l'entretien des casernements s'élève à 230 millions de francs contre 255 millions de francs en 1997, soit une baisse de 11 %.

a) Des besoins pour l'entretien courant non satisfaits

En 1997, les opérations ont concerné deux grands types d'opérations :

- les travaux prioritaires de gros oeuvre visant à la conservation du clos et du couvert, à l'amélioration de la sécurité des occupants, de l'hygiène et de la sécurité du travail dans les immeubles appartenant à l'Etat ou pris à bail;

- les travaux d'entretien courant ou locatif dans des immeubles appartenant à l'Etat ou pris à bail. Ces opérations souvent indispensables compte tenu de l'ancienneté du bâti en particulier pour les casernes de la Garde Républicaine, pourront-elles connaître un prolongement en 1998 ? La réduction de l'enveloppe budgétaire contraindra sans doute à concentrer les actions sur les besoins les plus urgents.

b) Un effort impératif pour les zones périurbaines

L'amélioration de l'accueil du public, inscrite au rang des priorités par le plan d'action " gendarmerie 2002 " devrait se traduire par la réalisation systématique d'un module constitué par quatre éléments : un hall d'accueil, un local planton, une salle d'auditions permettant d'assurer la confidentialité, une salle de transmissions. Sept projets de construction, deux de restructuration sont aujourd'hui à l'étude. Trois opérations seulement on commencé de se concrétiser, un même nombre cependant pourrait être lancé avant la fin de l'année. Toutefois, les zones périurbaines comptent plus de 490 brigades dont beaucoup mériteraient des aménagements ou des agrandissements pour leur permettre de recevoir, dans de bonnes conditions, un public croissant.

CONCLUSION

La Gendarmerie ne dispose pas, dans un contexte budgétaire particulièrement contraignant pour la défense, d'une faveur particulière. Votre rapporteur relèvera en particulier trois sujets de préoccupation majeurs :

- la budgétisation incomplète des ressources procurées par les fonds de concours autoroutiers ;

- les incertitudes liées au recrutement des volontaires ;

- l'insuffisance des crédits liés aux infrastructures.


Ces trois éléments risquent de peser sur les conditions de travail et de vie des militaires de la gendarmerie au moment où l'adhésion des personnels apparaît indispensable pour le succès des réformes entreprises dans le cadre de la loi de programmation et le plan d'action " gendarmerie 2002 ".

Par ailleurs le souci d'assurer à nos concitoyens une sécurité de proximité, en particulier dans les zones difficiles, suppose un effort financier prioritaire. Les moyens consacrés par le projet de budget à la gendarmerie ne sont pas à la mesure d'une volonté politique forte pour l'organisation de la sécurité dans notre pays.

Si les grandes lignes de la loi de programmation sont sauvegardées pour la gendarmerie, ce n'est toutefois pas le cas pour l'ensemble de notre instrument de défense, sérieusement affecté par la baisse des crédits, notamment au titre V.

C'est pourquoi votre rapporteur ne peut porter qu'un avis défavorable à l'adoption du budget du ministère de la défense pour 1998.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent avis au cours de sa séance du mercredi 5 novembre 1997.

A l'issue de l'exposé du rapporteur pour avis, un débat s'est instauré entre les commissaires.

M. Daniel Goulet, après avoir relevé que les sociétés concessionnaires d'autoroutes invoquaient souvent l'absence de ressources suffisantes pour entreprendre la construction de tronçons d'autoroutes supplémentaires, s'est inquiété des conditions de substitution d'une redevance aux fonds de concours utilisés par la gendarmerie pour financer une partie essentielle de ses unités d'autoroutes. M. Michel Alloncle a précisé que les ressources procurées par la redevance en 1998 devraient s'élever à 600 millions de francs, tandis que la dotation attribuée à la gendarmerie au titre de la budgétisation des fonds de concours s'élevait à 503 millions de francs.

Le rapporteur a indiqué, à l'intention de M. Charles-Henri de Cossé-Brissac, que la gendarmerie avait obtenu que puissent être commandés, dans le cadre du projet de loi de finances pour 1998, deux hélicoptères qui viendraient s'ajouter aux quatre hélicoptères cédés par l'armée de l'air et l'armée de terre en 1997.

M. Maurice Lombard, après avoir reconnu que les missions exercées par la gendarmerie sur les autoroutes relevaient des pouvoirs régaliens de l'Etat, a estimé que la situation des hélicoptères de la gendarmerie lui paraissait plus inquiétante que celle des blindés, car elle risquait d'hypothéquer durablement les opérations de sécurité de la gendarmerie. Selon M. Michel Alloncle, ce n'était pas la remise en cause des fonds de concours autoroutiers qui lui paraissait préoccupante, mais plutôt les conditions de budgétisation de ces ressources désormais procurées par une redevance. Il a en outre précisé que les blindés de la gendarmerie pouvaient servir dans des opérations de maintien de l'ordre. Il s'est inquiété, par ailleurs, de la réglementation européenne interdisant le survol des zones urbaines par des hélicoptères monoturbine et, donc, de l'obligation à moyen terme, pour la gendarmerie, de remplacer ses appareils actuels par des hélicoptères biturbines plus coûteux.

M. Régis Ploton s'est interrogé sur les conditions d'emploi des pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (PSIG) sur les autoroutes. M. Michel Alloncle a rappelé que les PSIG intégrés au sein des compagnies n'avaient pas pour vocation première d'intervenir sur les autoroutes.

MM. Régis Ploton et Serge Vinçon se sont inquiétés des conséquences de la baisse des crédits de fonctionnement sur l'activité quotidienne des brigades territoriales.

Enfin, M. Michel Alloncle a indiqué à M. Xavier de Villepin, président, que le programme Rubis serait achevé à l'échéance prévue, à la fin de l'an 2000.

M. Xavier de Villepin, président, a alors rappelé que la commission ne voterait sur l'ensemble des crédits de la défense pour 1998 qu'après avoir entendu tous ses rapporteurs pour avis.

La commission a ensuite examiné l'ensemble des crédits du ministère de la défense pour 1998, au cours de sa réunion du mercredi 26 novembre 1997.

M. Xavier de Villepin, président, a exprimé les raisons de sa forte inquiétude devant le projet de budget proposé.

S'agissant des crédits du titre III, dont l'enveloppe globale traduisait la priorité affichée en faveur de la professionnalisation, il a néanmoins exprimé une double préoccupation : d'une part, la compression des crédits de fonctionnement (hors rémunérations et charges sociales) qui, avec l'insuffisance des crédits d'entretien programmé des matériels, menaçait l'activité des forces ; d'autre part, les conséquences potentielles, particulièrement pour l'armée de terre, des dispositions adoptées en matière de reports d'incorporation pour les jeunes gens titulaires d'un contrat de travail, qui fragilisaient la période de transition et rendaient nécessaire l'adoption de mesures de compensation.

En ce qui concerne les crédits du titre V -qui connaissaient une brutale diminution (de 8,7 % en francs courants et de 9,9 % en francs constants)- M. Xavier de Villepin, président, a formulé les observations suivantes :

- il a d'abord déploré que les crédits d'équipement militaire jouent le rôle de " variable d'ajustement " du budget de l'Etat, ce qui constituait un signal négatif adressé à la nation dans son ensemble ; il a particulièrement souligné les conséquences de ces coupes budgétaires sur les crédits consacrés au nucléaire (- 13 %), évolution qui constituait un important sujet d'inquiétude pour l'avenir ; il a également regretté les incidences de ces diminutions de crédits sur les programmes spatiaux militaires et sur le programme Rafale ;

- M. Xavier de Villepin, président, a ensuite estimé que le projet de budget de la défense pour 1998 constituait un mauvais signal adressé aux industries de la défense pour quatre raisons : le coût élevé, et quasi mécanique, de ces réductions budgétaires en termes d'emplois, le surcoût inévitable des équipements faisant l'objet de mesures d'étalement ou de moratoires, la perte de " lisibilité " que la loi de programmation avait précisément pour objet d'apporter aux industriels, et enfin l'affaiblissement qui en résultera pour les industriels français dans la perspective des restructurations indispensables de l'industrie européenne de l'armement ;

- puis M. Xavier de Villepin, président, a souligné que ce projet de budget constituait surtout un signal très négatif adressé à nos armées au moment même où un effort exceptionnel leur était demandé ; il a estimé que les orientations de ce budget, si elles n'étaient pas corrigées après 1998, poseraient des interrogations majeures pour l'avenir : ne risqueraient-elles pas de compromettre la cohérence de la réforme entreprise dans son ensemble ? ne risqueraient-elles pas de remettre en cause le futur modèle d'armée lui-même ?

- M. Xavier de Villepin, président, a estimé que toutes ces interrogations revenaient finalement à poser la question de la validité de la théorie dite de l' " encoche " ; il a estimé que, si les économies imposées à la défense en 1998 avaient un caractère exceptionnel, leurs conséquences, pour regrettables et dommageables qu'elles soient, seraient peut-être surmontables ; si, en revanche, la défense ne retrouvait pas, à partir de 1999, le niveau de ressources prévu par la loi de programmation 1997-2002, l'ensemble de la réforme engagée se trouverait gravement fragilisée et la dernière loi de programmation devrait être considérée comme caduque.

Or, a souligné M. Xavier de Villepin, président, la dernière loi de programmation -contrairement à ses devancières- comportait déjà une forte réduction des crédits d'équipement militaire et constituait la traduction d'une réforme d'ensemble devant aboutir à la mise en place d'un nouveau modèle d'armée. Son non-respect ou -a fortiori- son abandon ne pourrait donc conduire qu'à l'affaiblissement progressif de notre défense ou à la révision de ce modèle d'armée. Il a en outre estimé que, si l'élaboration éventuelle d'une nouvelle programmation venait à être envisagée, il vaudrait mieux alors renoncer à sa traduction législative, devenue sans valeur.

Concluant son propos, M. Xavier de Villepin, président, a estimé que la commission n'avait d'autre choix que de rejeter les crédits du ministère de la défense pour 1998 et l'a invitée à réaffirmer son ferme attachement au respect de la loi de programmation votée en 1996. Il a enfin suggéré à la commission, pour expliquer son avis négatif, d'adopter les principales observations qu'il venait de présenter et de les faire figurer dans chacun de ses rapports pour avis au titre des conclusions de la commission.

M. Bertrand Delanoë a alors indiqué que, s'il partageait certaines des inquiétudes exprimées par M. Xavier de Villepin, président -pour des raisons qui étaient d'ailleurs antérieures au projet de budget pour 1998-, il était globalement en désaccord avec les conclusions proposées et approuvait la démarche générale suivie par le Gouvernement. Il a relevé que les programmes conduits en coopération avec nos partenaires européens étaient poursuivis de manière satisfaisante. Il a estimé que les difficultés rencontrées venaient essentiellement de la méthode employée pour professionnaliser nos forces armées qui ne pouvait aboutir qu'à des pressions de plus en plus fortes sur les crédits d'équipement. M. Bertrand Delanoë a conclu en considérant qu'une " épreuve de vérité " était souhaitable et ne devrait écarter aucun des choix nécessaires, qu'il s'agisse des missions assignées à nos forces ou des équipements retenus.

M. Michel Caldaguès a indiqué qu'il partageait pleinement chacune des observations formulées par M. Xavier de Villepin, président. Il a estimé que le budget très inquiétant qui était présenté trouvait son origine, non pas dans la méthode suivie pour professionnaliser nos armées, mais, beaucoup plus largement, dans la mise en cause progressive des différentes spécificités des forces françaises et dans le processus de " mutualisation " des forces qui ne pouvait conduire, de manière insidieuse, qu'à la réduction de notre effort national de défense. Il a enfin souligné que la politique conduite par le Gouvernement en matière de dépenses publiques civiles conduisait inévitablement à la compression de nos dépenses militaires.

M. Jean Faure a exprimé son entier soutien à chacune des conclusions présentées par M. Xavier de Villepin, président. S'agissant des crédits consacrés au nucléaire, il a estimé indispensable de respecter les calendriers prévus et souligné, dans ce domaine plus que dans tout autre, l'enjeu majeur que représentait la question de la transmission du savoir et du maintien des compétences scientifiques.

M. Philippe de Gaulle a relevé qu'une quinzaine d'années auront été nécessaires entre le lancement du programme Rafale et la constitution de la première flottille de ces appareils.

M. Claude Estier a enfin indiqué que les commissaires socialistes ne s'associaient pas aux conclusions proposées par M. Xavier de Villepin, président.

La commission a alors adopté, le groupe socialiste votant contre, les principales observations présentées par M. Xavier de Villepin, président, et décidé de les faire figurer en tête de chacun de ses rapports pour avis sur le budget de la défense pour 1998, au titre des conclusions de la commission.

Elle a enfin émis un avis défavorable à l'adoption de l'ensemble des crédits du ministère de la défense pour 1998.



1 Texte adopté par la commission au cours de sa réunion du mercredi 26 septembre 1997, le groupe socialiste votant contre.

2 Aujourd'hui, ce dispositif comprend deux FRAD par département.

3 supplément d'information requis à l'entrée nationale

4 A ces échanges se sont ajoutés, en 1997, un jumelage entre les écoles d'officiers de Melun en France et de Queluz au Portugal.

5 L'appellation de la spécialité " emplois administratifs et d'état-major de la gendarmerie " (EAEM) a été transformée en " emplois administratifs et de soutien de la gendarmerie " (EASG) par arrêté du ministre de la défense du 13 décembre 1996.

6 Le schéma d'organisation des réserves, présenté dans le rapport sur le projet de budget de la gendarmerie pour 1997 prévoit en particulier l'emploi des réservistes de manière individuelle en renfort des unités d'active à l'instar de l'actuelle réserve sélectionnée mais aussi en unités constituées.

7 La création de 3 000 postes de sous-officiers sur la période 1990-1993 au titre d'un plan gouvernemental de renforcement des effectifs.


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