13. Audition de M. François Dufour, Porte-parole de la Confédération paysanne

La commission a enfin procédé à l'audition de M. François Dufour, porte-parole de la Confédération paysanne, accompagné de MM. Francis Poineau, secrétaire général, et Paul Bonhommeau, chargé des questions juridiques.

M. François Dufour, porte-parole de la Confédération paysanne, a exposé, pour commencer, les raisons pour lesquelles la Confédération paysanne souhaitait une loi d'orientation agricole. En premier lieu, a-t-il estimé, une réorientation de la politique agricole française est nécessaire dans un contexte où l'évolution de la politique agricole commune, conjuguée à celle des marchés mondiaux, a conduit à une réduction massive du nombre d'exploitants agricoles, et où il serait, selon lui, dangereux de laisser passer ce chiffre sous la barre des 2 % de la population française. Il a considéré, en outre, que l'objectif de sécurité et d'indépendance alimentaire, fixé par les lois de 1960 et 1962, était atteint.

Il a ensuite insisté sur le rôle qui devait être celui de l'agriculture, tant en termes d'emplois (le nombre d'actifs agricoles diminue de 40.000 par an) que de préservation de l'espace rural.

Il a considéré que la loi devrait permettre de réduire les inégalités entre agriculteurs et les disparités entre régions.

Estimant qu'au développement d'une agriculture " de masse " succédait actuellement l'aspiration à une production de qualité, il a insisté sur la nécessité de valoriser les ressources des terroirs français et d'identifier clairement, par l'étiquetage, les produits de qualité.

M. François Dufour, porte-parole de la Confédération paysanne, a ensuite abordé les souhaits de la Confédération paysanne concernant le projet de loi. Le premier est que soit reconnu le " tryptique agricole " correspondant aux trois fonctions de l'agriculture : la production, l'emploi et la préservation des ressources naturelles.

Le second est que la loi ne favorise pas le développement d'une agriculture à deux vitesses, qui distinguerait une production de masse à bas prix et une production de meilleure qualité destinée aux consommateurs les plus aisés.

Il a également préconisé qu'une organisation économique améliorant la sécurité des agriculteurs soit recherchée. Il a d'autre part souhaité un plafonnement des aides, dans un objectif " d'écoconditionnalité ", de façon à réorienter la politique agricole vers un meilleur équilibre. Il a, enfin insisté, sur l'importance de la politique des structures, de la production et de la diffusion des savoirs et du statut des actifs.

Enfin, M. François Dufour, porte-parole de la Confédération paysanne, a souligné l'enjeu représenté par ce projet de loi, dans lequel il a relevé des carences, des fragilités, des ambiguïtés et des interrogations.

M. Francis Poineau, secrétaire général de la Confédération paysanne, a ensuite exposé dans quels sens la Confédération paysanne souhaitait voir amender le projet de loi. Il s'est dit notamment attaché à :

- une réorientation de la politique agricole dans un objectif de multifonctionnalité ;

- la procédure d'élaboration des contrats territoriaux d'exploitation (CTE) ;

- une modulation et un plafonnement des aides, de façon à ce qu'elles favorisent les exploitations moyennes ;

- une meilleure protection sociale, avec notamment un rétablissement des droits sociaux pour les agriculteurs en difficulté ;

- en matière de contrôles des structures, une égalité de traitement pour toutes les exploitations ;

- la mise en place d'interprofessions spécifiques pour les productions biologiques ;

- la création d'un institut de l'agriculture durable ;

- la représentation des syndicats dans les instances agricoles.

M. Michel Souplet, rapporteur, s'est alors interrogé sur la " conception administrée de l'agriculture " qui lui semblait être celle de la Confédération paysanne, dans le contexte d'une économie libérale et mondialisée. Réagissant aux propos de M. François Dufour, selon lesquels l'objectif de sécurité alimentaire était désormais atteint, il a attiré l'attention de celui-ci sur le problème de la faim dans le monde. Il a enfin demandé quelles étaient les propositions de la Confédération paysanne en matière de plafonnement des aides et d'incitation à l'installation.

En réponse à M. Michel Souplet, rapporteur, M. Paul Bonhommeau, chargé des questions juridiques, a suggéré, pour favoriser l'installation de jeunes agriculteurs, le recours à des mécanismes de solidarité familiale, mais aussi publique et privée. Il a considéré que les voies d'une transmission échelonnée dans le temps, ou d'un prêt par l'Etat à remboursement progressif, pouvaient également être explorées.

M. François Dufour, porte-parole de la Confédération paysanne, a alors regretté que le projet de loi d'orientation agricole ne prenne pas la mesure du déficit d'installations actuel, et de l'importance de la proportion (40 %) de jeunes agriculteurs ne bénéficiant pas d'aides.

S'agissant de sa conception " administrée " de l'agriculture, il a estimé que le revenu agricole devait davantage dépendre des prix que des aides ; il s'est dit attaché au principe de " préférence communautaire ", mais a considéré qu'il n'était pas souhaitable que les prix agricoles soient fixés en fonction des cours mondiaux, qui font l'objet de variations trop importantes.

M. Francis Poineau, secrétaire général de la Confédération paysanne, a également jugé que l'Etat devait avoir un rôle régulateur.

Enfin, eu égard à la spécificité de ces productions, M. Paul Bonhommeau, chargé des questions juridiques, s'est déclaré favorable à la création d'interprofessions " biologiques ", mais s'est montré plus réservé sur d'éventuelles interprofessions " montagne ".

Page mise à jour le

Partager cette page