EXAMEN DES ARTICLES

Article premier
Définition des autorités administratives

L'article premier définit, d'un point de vue organique, le champ d'application du projet de loi. Il s'agit des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics à caractère administratif, des organismes de sécurité sociale et des autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif.

En première lecture, le Sénat a supprimé ou modifié les trois articles du titre premier du projet de loi qui faisaient référence à l'article premier. En conséquence, afin d'améliorer la cohérence du texte, le Sénat a transféré cet article en tête du titre II du projet de loi, consacré aux relations entre les citoyens et les administrations ( article 14 A ).

L'Assemblée nationale, sur proposition de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, a rétabli l'article premier et supprimé l'article 14 A.

Votre rapporteur constate l'absence de divergence de fond entre les deux assemblées, l'énumération des autorités administratives à l'article premier n'ayant fait l'objet d'aucune modification en première lecture. Il n'en reste pas moins que le Sénat a modifié en première lecture le champ d'application de certains articles du projet de loi, rendant moins utile la référence à l'article premier.

Dans un souci de conciliation, votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article premier sans modification .

TITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES A L'ACCES
AUX REGLES DE DROIT ET A LA TRANSPARENCE
CHAPITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES A L'ACCES
AUX REGLES DE DROIT

Article 2
Obligation d'organiser un accès simple aux règles de droit

Cet article confie aux autorités administratives le soin d'organiser un " accès simple " aux règles de droit qu'elles édictent.

En première lecture, le Sénat a supprimé cet article dépourvu de toute valeur normative. Il a en effet constaté que la notion " d'accès simple aux règles de droit " n'était pas définie, conférant ainsi à l'article 2 le caractère d'une déclaration d'objectifs, laquelle ne peut avoir sa place dans la loi.

L'Assemblée nationale a ensuite entièrement réécrit cet article sur proposition de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement.

Elle a repris les termes de l'article 1 er de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public, selon lequel " le droit de toute personne à l'information est précisé et garanti par le présent titre en ce qui concerne la liberté d'accès aux documents administratifs de caractère non nominatif ". Elle a établi un parallèle avec cet article de principe, concernant " la liberté d'accès aux règles de droit applicables aux citoyens ".

Alors que votre commission des Lois avait mis en garde contre le risque de surcharger la loi, au détriment de la lisibilité de l'ordonnancement juridique, il est regrettable que l'Assemblée nationale ait considérablement alourdi la rédaction de l'article 2, sans le rendre plus normatif pour autant.

Il ne paraît pas contestable que la " liberté d'accès aux règles de droit applicables aux citoyens " constitue l'essence même de l'activité des autorités administratives, comme le rappelait votre rapporteur en première lecture. Cependant, il existe une différence de nature entre l'accès aux documents administratifs non nominatifs et l'accès aux règles de droit, s'opposant au parallèle établi par l'Assemblée nationale. Alors que la loi du 17 juillet 1978 reconnaissait un nouveau droit, le libre accès aux documents administratifs, le présent projet de loi ne fait que rappeler que les citoyens doivent être en mesure de consulter les normes applicables. En ce sens, la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale ne " précise " pas le contenu dans ce libre accès, pas plus qu'elle ne " garantit " ce droit à l'information, aucune sanction n'y étant attachée.

Ensuite, l'Assemblée nationale a souhaité inscrire dans la loi que la mise à disposition et la diffusion des textes juridiques constituent une mission de service public .

L'Assemblée nationale a donc repris les termes de l'arrêt du Conseil d'Etat du 17 décembre 1997 " Ordre des avocats à la Cour de Paris ". Le Conseil d'Etat était alors saisi d'une demande d'annulation du décret n° 96-481 du 31 mai 1996 relatif au service public des bases de données juridiques.

Saisi de la question de la conformité du décret aux règles de la concurrence, le Conseil d'Etat avait rappelé qu'aucune des dispositions du décret ne faisait obstacle au libre accès des tiers aux documents juridiques, à leur transformation en bases de données, ou à la commercialisation des bases de données que ces tiers auraient ainsi créées. Il en a conclu que le décret attaqué n'était pas intervenu en méconnaissance de la liberté du commerce et de l'industrie.

Puis, saisi sur le terrain de la répartition des compétences entre le législateur et le pouvoir réglementaire, le Conseil d'Etat a établi un considérant de principe : " la mise à disposition et la diffusion de textes, décisions et documents juridiques de la nature de ceux mentionnés à l'article premier du décret attaqué, dans des conditions adaptées à l'état des techniques, s'appliquant, sans exclusive ni distinction, à l'ensemble de ces textes, décisions et documents -et notamment ceux dont la diffusion ne serait pas économiquement viable- et répondant aux exigences d'égalité d'accès, de neutralité et d'objectivité découlant du caractère de ces textes, constituent, par nature, une mission de service public au bon accomplissement de laquelle il appartient à l'Etat de veiller ". Le Conseil d'Etat a estimé que l'organisation de ce service public de l'Etat relevait de la compétence du pouvoir réglementaire.

Votre commission des Lois n'estime pas possible de recopier dans la loi les solutions proposées par la jurisprudence administrative lorsque celles-ci ne présentent pas de caractère législatif. En l'occurrence, la définition, à l'article premier du décret du 31 mai 1996, du " service public des bases de données juridiques ", n'a pas été censurée par le Conseil d'Etat comme étant de nature législative.

De plus, votre commission des Lois relève que l'Assemblée nationale, sans en fournir l'explication, confie à l'ensemble des autorités administratives la mission de service public de diffusion des textes juridiques, alors que le Conseil d'Etat confiait cette responsabilité à l'Etat.

Il ne paraît pas réaliste de demander à une collectivité territoriale, à une caisse de sécurité sociale ou à un autre organisme chargé de la gestion d'un service public administratif de veiller à mettre à disposition du public l'ensemble des " textes juridiques ", sans que cette expression ne soit circonscrite. Cette formule excède de loin l'obligation pour une autorité administrative de mettre à disposition du public les normes dont elle est l'auteur.

Votre commission des Lois souhaite que la lutte contre " l'inflation législative ", dénoncée dans le rapport public 1991 du Conseil d'Etat consacré à la sécurité juridique, trouve ici son application.

A cet égard, elle rappelle les termes mêmes du ministre des relations avec le Parlement 2( * ) , qui " veille avec la plus grande attention à ce que la production de normes juridiques évite certaines dérives telles que : la superposition des dispositions nouvelles avec des dispositions existantes, des projets de loi obscurs pouvant susciter des interprétations, des dispositions sans contenu normatif ".

C'est pourquoi votre commission des Lois vous propose un amendement de suppression de l'article 2.

Article 3
Codification des textes législatifs

Cet article définissait un programme législatif de codification devant être adopté avant la fin de la présente législature, posait le principe de la codification à droit constant et prévoyait que le Gouvernement déposerait sur le bureau de chaque assemblée un rapport sur l'état d'avancement de la codification.

Le Sénat en première lecture a supprimé cet article qui constitue une injonction à légiférer et minimise la responsabilité du Gouvernement dans le retard pris par la codification. Cependant, les débats en séance publique 3( * ) ont été l'occasion pour le Sénat de rappeler son attachement à la codification et de demander un engagement solennel du Gouvernement en faveur de l'inscription à l'ordre du jour des assemblées des projets de loi de codification.

En première lecture, l'Assemblée nationale, avec l'avis favorable du Gouvernement, a adopté une nouvelle rédaction de cet article, en supprimant la référence au programme de codification annexé au projet de loi et en définissant les principes généraux encadrant la codification. Elle a donc adopté une définition de la codification législative et de la codification à droit constant, puis elle a rétabli le dernier alinéa relatif au rapport du Gouvernement au Parlement.

1. Le dépôt du projet de loi n° 438 (Sénat, 1998-1999) portant habilitation du Gouvernement à procéder, par ordonnances, à l'adoption de la partie législative de certains codes.

Lors du Conseil des ministres du 16 juin 1999, le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, a présenté un projet de loi habilitant le Gouvernement à codifier au moyen des ordonnances prévues à l'article 38 de la Constitution.

Ce projet de loi a été examiné par votre commission des Lois, saisie en premier lieu, sur le rapport de M. Patrice Gélard, en même temps que l'examen en deuxième lecture du présent projet de loi 4( * ) .

Le premier alinéa du présent article 3 tente de définir le rôle de la codification législative, à savoir " rassembler et classer dans des codes thématiques l'ensemble des lois en vigueur à la date d'adoption de ces codes ". Il s'agit de poser une règle générale, tandis que le projet de loi d'habilitation pose une règle ponctuelle, valable pour l'adoption de neuf codes .

C'est pourquoi une telle définition figure aussi dans l'exposé des motifs du projet de loi d'habilitation précité, selon lequel la codification " permet de trouver rassemblées en un texte unique l'ensemble des dispositions se rapportant à un domaine particulier ", et " donne à ces dispositions une présentation cohérente et ordonnée ", et à l'article premier indiquant que chaque code " regroupe et organise les dispositions législatives relatives à la matière correspondante ".

Le deuxième alinéa du présent article 3 dispose que la codification s'effectue à droit constant, mais ménage des exceptions, afin de préserver la cohérence des textes ainsi rassemblés, de respecter la hiérarchie des normes et d'harmoniser le droit en vigueur.

Là encore, le projet de loi d'habilitation apporte les mêmes précisions pour l'adoption des neuf codes qu'il vise, ceux-ci étant " rédigés selon le principe du «droit constant» c'est-à-dire que les dispositions qui y sont rassemblées sont celles en vigueur au moment de leur adoption ".

En première lecture, le Sénat avait indiqué que le rapport du Gouvernement au Parlement sur l'état d'avancement de la codification faisait double emploi avec le rapport public annuel de la Commission supérieure de codification. Votre commission des Lois vous propose en deuxième lecture de maintenir cette position, en supprimant, par un amendement , le dernier alinéa de cet article 3.

En conséquence, votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 3 ainsi modifié .

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