Section 7
-
Mesures relatives à la trésorerie

Art. 29
Simplification des relations financières entre l'ACOSS et les URSSAF

Objet : Cet article prévoit que les cotisations recouvrées par les Unions régionales pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) sont transférées directement par virement à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS).

I - Le dispositif proposé


L'article 29 insère au chapitre V du titre V du livre II du code de la sécurité sociale un article L. 255-2 nouveau, précisant que les montants encaissés par les URSSAF sur leurs comptes spéciaux d'encaissement sont obligatoirement transférés par virement pour l'alimentation du compte unique de disponibilités courantes de l'ACOSS.

Les dispositions de cet article entreraient en vigueur au 1 er septembre 2000.

II - La position de votre commission

A l'heure actuelle, les URSSAF déposent à l'encaissement les chèques reçus des cotisants en paiement de leurs cotisations de sécurité sociale sur des comptes spéciaux ouverts auprès d'établissements bancaires ou financiers privés. Les URSSAF déposent ensuite le chèque de couverture représentant le montant de ces cotisations auprès des comptables du Trésor public, qui sont les " préposés " de la Caisse des dépôts, auprès de laquelle est ouvert le compte unique de disponibilités courantes (CUDC) de l'ACOSS. Ces correspondants locaux de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) demandent eux-mêmes la contrepartie des chèques de couverture à la Banque de France, qui peut être amenée à faire un crédit gratuit à l'ACOSS.

Le dispositif proposé par le présent article tend ainsi à considérablement simplifier les circuits financiers, en remplaçant les chèques de couverture par des virements.

Il ne s'appliquerait qu'au 1 er septembre 2000, en raison du projet " GEODE 2 ", tendant à établir de nouvelles relations financières et comptables entre l'ACOSS et la CDC. Votre rapporteur, président du Conseil de surveillance de l'ACOSS, suit avec attention ce projet, qui a pris un certain retard. Il indiquait ainsi dans son avis au Parlement sur l'application de la convention d'objectifs et de gestion signée entre l'Etat et l'ACOSS 33( * ) : " La réforme du mode de gestion du compte unique élaboré par la Caisse des dépôts et consignations en liaison avec l'ACOSS (projet GEODE) devait être effective à compter du 1 er janvier 1999. Elle sera mise en place au 1 er décembre 1999 pour le fonctionnement des lignes territoriales et définitivement déployée au cours du premier semestre 2000. "

On notera que l'effet financier de cet article sur les comptes de la sécurité sociale semble nul et que l'urgence n'est pas avérée, puisque le dispositif ne fonctionnera que le 1 er septembre 2000.

Favorable à cette mesure de simplification, votre commission vous propose, sous le bénéfice de ces observations, d'adopter cet article sans modification.

Art. 29 bis (nouveau)
Neutralité des effets de trésorerie des relations financières entre l'Etat, les organismes concourant au financement des régimes
de protection sociale et ces régimes

Objet : Cet article, résultant d'un amendement de M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des Finances, vise à affirmer un principe général de neutralité des effets de trésorerie entre l'Etat, les organismes concourant au financement des régimes de protection sociale et ces régimes, établi par l'intermédiaire de conventions.

I - Le dispositif proposé


Cet article insère au titre III (Dispositions communes relatives au financement) du livre premier (Généralités - Dispositions communes - tout ou partie des régimes de base) un chapitre IX bis nouveau intitulé " Neutralisation des effets de trésorerie des relations financières entre l'Etat, les organismes concourant au financement de la protection sociale et ces régimes " et constitué d'un seul article, l'article L. 139-2 (l'actuel article L. 139-2, dont la suppression est envisagée par le projet de loi, est relatif à la répartition de la CSG).

Ce nouvel article L. 139-2 tend à préciser que premièrement, les relations financières entre l'Etat et les régimes de protection sociale , deuxièmement, les relations financières entre les régimes de protection sociale et les organismes concourant au financement des régimes de protection sociale et troisièmement, les relations financières entre l'Etat et les organismes concourant au financement des régimes de protection sociale sont régies par des conventions. Ces conventions garantissent en particulier la neutralité des flux financiers pour la trésorerie des régimes de protection sociale.

M. Jérôme Cahuzac a retenu l'expression " d'organismes concourant au financement de la protection sociale " , qui est plus large que celle "d'organismes concourant au financement des régimes de base " , retenue par le législateur organique de 1996.

L'amendement a, en effet, été déposé à un moment où " le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale " n'était pas reconnu comme un organisme concourant au financement des régimes de base.

Cette dénomination permet d'inclure également le fonds de financement de la couverture maladie universelle.

II - La position de votre commission

Cet amendement, adopté par la commission des Finances de l'Assemblée nationale, mais " défendu " par M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, a été adopté dans la nuit du 29 au 30 octobre, peu avant cinq heures du matin.

Il pose un principe tout à fait intéressant, qui n'a pas reçu jusqu'à maintenant de consécration législative. En effet, les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale sont marquées par une grande inégalité de rapport de forces, même si des progrès ont été réalisés, notamment depuis 1994.

La sécurité sociale avance ainsi gratuitement à l'Etat le coût de la majoration d'allocation de rentrée scolaire, ce qui " justifie " le relèvement du plafond d'avances de trésorerie au régime général. L'Etat est bien souvent un " mauvais payeur " de ses cotisations sociales. Les versements au titre de la politique de l'emploi ne sont malheureusement pas neutres ; la Cour des comptes a ainsi chiffré -au 31 décembre 1998- à 6,7 milliards de francs les restes à recouvrer sur l'Etat 34( * ) .

En revanche, l'Etat ne fait pas d'avances à la sécurité sociale pour, par exemple, la CSG sur les revenus du patrimoine, dont le produit n'est versé entièrement qu'en fin d'année.

L'Etat et les régimes de sécurité sociale ont déjà conclu une convention de trésorerie, posant le principe de neutralité. Cette convention a été conclue le 2 mai 1994 entre l'Etat et l'ACOSS afin de neutraliser les effets, sur la trésorerie du régime général, des délais existant entre les dépenses de prestations réalisées par les régimes, ou les exonérations de versement de cotisations par les employeurs, et les remboursements pris en charge par l'Etat. A cette fin, un échéancier annuel de remboursement des dépenses d'un coût annuel supérieur à 1 milliard de francs a été élaboré. Pour l'essentiel, les remboursements mensuels sont égaux au douzième des crédits inscrits en loi de finances initiale, complétés de régularisations, soit en cours d'année, soit l'année suivante.

Les sommes en cause sont considérables : 66 milliards de francs pour les exonérations de cotisations en 1998, 95 milliards de francs pour les prestations prises en charge par l'Etat.

Cette convention fait normalement l'objet d'un avenant annuel. Il s'agissait de l'un des engagements de la convention d'objectifs et de gestion signée entre l'Etat et l'ACOSS le 3 avril 1998. Or, cet avenant n'a été pris ni pour 1998, ni pour 1999.

L'absence de respect de cet engagement n'est pas entièrement imputable à l'Etat. En effet, l'ACOSS mène actuellement un recensement des versements qui pourraient faire l'objet d'un échéancement et donner lieu, le cas échéant, à révision. Ce recensement ne sera complètement analysé qu'à la fin de l'année 1999. Votre rapporteur a d'ailleurs observé, dans l'avis qu'il a remis au Parlement en tant que président du Conseil de surveillance de l'ACOSS : " Il est regrettable qu'une plus large impulsion n'ait pas été donnée à cette action, alors qu'il s'agit d'une des critiques traditionnelles adressées par la branche à l'Etat. " 35( * ) .

L'article 29 bis (nouveau) s'explique notamment par la création, à l'article 2 du projet de loi du " fonds de financement de la réforme des cotisations patronales " , qui remplacerait l'Etat pour le versement de la " ristourne Juppé " (40 milliards de francs), son extension (7,5 milliards de francs en 2000, 25 milliards de francs " à terme ") et les aides liées aux 35 heures (17,5 milliards de francs en 2000, 40 milliards de francs " à terme " ). Il importe effectivement d'affirmer le principe de neutralité en trésorerie des relations entre la sécurité sociale et ce fonds de financement.

Mais la catégorie des organismes concourant au financement des " régimes obligatoires de base " , selon la dénomination retenue par le législateur organique, recouvre également le Fonds de solidarité vieillesse (FSV). Le FSV est lié avec chaque régime par des conventions, qui ne sont pas uniquement des conventions de trésorerie, mais qui prévoient le versement par acomptes des dépenses des régimes qu'il prend en charge.

Votre commission n'est donc pas liée, pour arrêter sa position à l'égard de cet article, par l'amendement de suppression du " fonds de financement de la réforme des cotisations patronales " adopté à l'article 2.

Elle vous propose d'adopter le principe de l'insertion du chapitre IX bis, qui s'intitulerait " Neutralisation des effets de trésorerie des relations financières entre l'Etat, les régimes obligatoires de base et les organismes concourant à leur financement " et qui serait constitué d'un article L. 139-3 nouveau du code de la sécurité sociale 36( * ) . Sous réserve de ces modifications rédactionnelles, votre commission vous propose de conserver l'essentiel du dispositif adopté par l'Assemblée nationale.

En effet, votre commission préfère la dénomination retenue par le législateur organique, même si elle comprend la volonté de l'auteur de l'amendement d'inclure un champ plus vaste.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 30
Ratification du décret portant relèvement du plafond des avances de trésorerie au régime général de sécurité sociale

Objet : Cet article autorise la ratification du décret du 7 octobre 1999, ayant porté le plafond d'avances de trésorerie du régime général de 24 à 29 milliards de francs.

I - Le dispositif proposé


Cet article, dans sa rédaction initiale, visait à demander au Parlement " d'approuver le relèvement du plafond des avances de trésorerie au régime général de sécurité sociale par le décret n° du 1999 " . Le " numéro JO " et la date étaient ainsi laissés en blanc, parce que le projet de loi a été adopté en Conseil des ministres le jour même (7 octobre 1999) de l'adoption du décret relevant ce plafond de trésorerie.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, visant à une rédaction plus conforme à la loi organique du 22 juillet 1996. Celle-ci dispose que la ratification de ce décret est " demandée " au Parlement par " le plus prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale " (article L.O. 111-5 du code de la sécurité sociale). En effet, le Parlement n'a pas à " approuver " le relèvement du plafond des avances de trésorerie, il le ratifie.

III - La position de votre commission

Le relèvement des plafonds des avances de trésorerie est réservé, selon la loi organique du 22 juillet 1996, aux cas " d'urgence " . Les trois plafonds d'avances de trésorerie au régime général fixés par les trois premières lois de financement ont été relevés dans des conditions d'urgence par un décret, dont la ratification est " demandée " au Parlement.

Les " plafonds des avances de trésorerie " se sont révélés un instrument de contrôle décevant du déficit. En effet, le lien n'apparaît guère univoque entre le niveau du déficit et le plafond du recours à l'emprunt .

Les avances de trésorerie et le solde du régime général 1997 - 1999

(en milliards de francs)

 

LFSS 1997

LFSS 1998

LFSS 1999

Plafond inscrit en loi de financement

66,0

20,0

24,0

Solde prévu du régime général

- 29,7

- 12,0

0,0

Solde du régime général

- 33,7

- 17,0

- 4,0

Plafond après mesure réglementaire

80,0

31,0

29,0

Conformément à l'article 8 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997, le Gouvernement a déposé, dans le délai de quinze jours, un rapport présentant les raisons du dépassement des limites prévues au 5° du I de l'article LO. 111-3 du même code et justifiant l'urgence qui exige le recours à la voie réglementaire.

Ce rapport avance deux raisons. Premièrement, la situation de la trésorerie a été moins bonne que prévue, " en raison d'un solde comptable légèrement négatif en 1999, alors que la loi de financement prévoyait l'équilibre ". Deuxièmement, la trésorerie du régime général a été artificiellement dégradée de 6,85 milliards de francs, en raison de la majoration d'allocation de rentrée scolaire : " cette dépense pèse dans un premier temps sur la trésorerie de l'ACOSS, puisqu'elle ne pourra être remboursée par l'Etat qu'en toute fin d'année ou au début de l'année 2000, après le vote de la loi de finances rectificative. "

Cette raison était naturellement prévisible ; le Gouvernement n'avait qu'à prévoir l'inscription en loi de finances pour 2000 la majoration de l'allocation de rentrée scolaire. Il n'est pas légitime que l'Etat bénéficie ainsi d'une avance de trésorerie de la sécurité sociale.

Le rapport justifie l'urgence, ayant conduit à prendre un décret, d'une manière étonnante : " les risques de dépassement étaient prévus dans les premiers jours d'octobre. Selon les prévisions disponibles au moment du relèvement du plafond, la trésorerie devait se situer au dessous de -24 milliards de francs dès la mi-octobre. Ce calendrier justifie l'urgence du relèvement du plafond, et le recours à un acte réglementaire, à un moment où la session parlementaire n'avait pas repris " .

Pourtant, la session parlementaire a repris dès le vendredi 1 er octobre 1999,alors que le décret a été adopté en conseil des ministres du 7 octobre, pour une parution au Journal officiel du 8 octobre 1999.

L'annexe c) précise que le point le plus bas était prévu le 12 octobre, avec 24,114 milliards de francs.

Le Gouvernement avait tout à fait la possibilité de faire voter, entre le 1 er octobre et le 7 octobre 1999, un projet de loi de financement rectificatif, composé de deux articles.

Ce projet de loi de financement rectificatif, qu'avait souhaité votre commission des Affaires sociales il y a un an, aurait tiré les conséquences de la dérive constatée de l'ONDAM 1998 et de la dérive prévisionnelle de l'ONDAM 1999 et aurait fixé un nouveau plafond d'avances de trésorerie au régime général.

Le Gouvernement a préféré utiliser le décret, alors que l'urgence n'était pas avérée.

Votre commission constate que, depuis la création des lois de financement, le plafond des avances de trésorerie a été chaque année et sans exception relevé par le pouvoir réglementaire. Se crée ainsi une jurisprudence aussi univoque que fâcheuse.

En conséquence, votre commission vous propose d'adopter un amendement de suppression de cet article.

Art. 31
Plafonnement des ressources non permanentes

Objet : Cet article, qui fait partie du contenu " obligatoire " des lois de financement de la sécurité sociale, fixe les limites dans lesquelles les besoins de trésorerie des régimes obligatoires de base comptant plus de 20.000 cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres peuvent être couverts par des ressources non permanentes.

I - Le dispositif proposé


Le Gouvernement propose une liste de cinq " régimes " de sécurité sociale (en fait, deux régimes, deux caisses et un fonds) en fixant un plafond d'avances qui correspond au point le plus bas de la trésorerie de ces régimes.

Plafonds d'avances de trésorerie 1997 - 2000

(en milliards de francs)

 

LFSS 1997

LFSS 1998

LFSS 1999

PLFSS 2000

Régime général

66,0

20,0

24,0

29,0

Régime des exploitants agricoles

8,5

8,5

10,5

12,5

CNRACL

 

2,5

2,5

2,5

Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines

2,3

2,3

2,3

2,3

Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat

0,8

0,5

0,5

0,5

II - La position de votre commission

La notion de plafond d'avances recouvre des situations très différentes.

Pour la CNRACL, le plafond proposé de 2,5 milliards de francs correspond à la dégradation du solde comptable de ce régime, mis à mal par la " surcompensation ".

Pour le régime des exploitants agricoles, le plafond proposé de 12,5 milliards de francs correspond à un besoin de trésorerie résultant du décalage entre le versement des prestations et le recouvrement des recettes. La CCMSA est donc autorisée à recourir à l'emprunt pour régler les prestations, auprès du Crédit agricole Indosuez, alors que le régime des exploitants agricoles est -en général- équilibré ou tout au moins proche de l'équilibre. La Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines est dans une situation analogue ; son solde comptable varie depuis 1996 entre - 325 millions de francs et + 7 millions de francs.

Pour le régime général, la dégradation du plafond proposé depuis 1998 est inversement proportionnelle à l'amélioration du solde comptable. L'annexe c) précise que la trésorerie du régime général pour 2000 risque de connaître des mutations importantes, en raison des versements du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, qui se substitueraient aux versements réguliers de l'Etat, et du " fonds de financement de la CMU, qui ne rembourse pas instantanément les prestations versées par les CPAM " .

Votre commission vous propose, comme en 1997 et en 1998, de supprimer l'autorisation d'emprunt accordée à la CNRACL, afin de s'élever solennellement contre le mécanisme de la " surcompensation ".

Elle vous propose également de réduire le plafond d'avances de trésorerie accordé au régime agricole de 12,5 à 10,5 milliards de francs. Son relèvement d'année en année ne paraît pas se justifier, au regard de l'évolution du solde comptable du régime.

Elle vous propose enfin de réduire le plafond d'avances de trésorerie du régime général de 29 à 24 milliards de francs. Cette réduction tient compte de deux éléments : premièrement, la suppression du " fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale " ; deuxièmement, il n'est pas souhaitable d'accepter que le régime général fasse des avances de trésorerie au fonds de financement de la couverture maladie universelle.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

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