EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 er A
(articles 43-6-1, 43-6-2, 43-6-3 et 43-6-4 nouveaux
de la loi du 30 septembre 1986)

Responsabilité des prestataires techniques
à raison des contenus des services de communication audiovisuelle
en ligne. Obligation d'identification des éditeurs de ces services

Issu d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, cet article tend à compléter le titre II de la loi de 1986 par un chapitre VI nouveau comportant des dispositions clarifiant la responsabilité des fournisseurs de prestations techniques d'accès et d'hébergement du fait des contenus des services de communication audiovisuelle en ligne.

•  Tout en regrettant que ces dispositions anticipent sur un projet de loi annoncé, le Sénat s'était associé à la démarche de l'Assemblée nationale, reconnaissant la nécessité de mettre un terme aux polémiques soulevées par certaines décisions de justice, de ne pas laisser s'accréditer l'idée fausse selon laquelle l'Internet est une zone de non-droit et de rappeler que, sur la Toile comme ailleurs, la liberté d'expression et de communication trouve ses limites dans le respect des lois et des droits d'autrui.

Il avait cependant, en s'inspirant notamment des travaux du Conseil d'Etat et de la jurisprudence, adopté une nouvelle rédaction de cet article afin d'expliciter, par référence au droit commun et notamment à l'obligation de prudence et de diligence prévue par l'article 1383 du code civil, le régime de responsabilité des prestataires techniques et les obligations que l'on pouvait leur imposer, ces dernières portant notamment sur la collecte des informations permettant de " remonter " jusqu'aux auteurs et éditeurs de contenus contraires à la loi.

•  En deuxième lecture, l'Assemblée nationale est revenue pour l'essentiel à l'architecture et à la rédaction des dispositions relatives à la responsabilité des prestataires techniques qu'elle avait retenues en première lecture. Elle s'est toutefois inspirée du texte du Sénat sur trois points :

- elle a étendu la portée du texte à la responsabilité pénale des prestataires techniques ;

- elle a soumis les " hébergeurs " à une obligation de diligence ;

- elle a précisé que les prestataires de services techniques sont tenus " de détenir ou de conserver des données concourant à l'identification " des auteurs de contenus : on notera toutefois que cette obligation, peu précisément définie, n'est pas sanctionnée.

En outre, en adoptant un amendement du gouvernement, elle a complété le dispositif relatif à la responsabilité des prestataires techniques par un article nouveau prévoyant une " obligation d'identification directe ou indirecte " des éditeurs de services de communication en ligne.

Il convient, avant de présenter les propositions de la commission, de rappeler succinctement les modifications apportées par l'Assemblée nationale à chacun des éléments du dispositif de l'article 1 er A.

* Intitulé du chapitre VI (nouveau) du titre II de la loi de 1986

• Alors que l'Assemblée nationale avait intitulé en première lecture le chapitre nouveau de la loi de 1986 " dispositions relatives aux services en ligne autres que de correspondance privée ", le Sénat avait préféré l'intituler " dispositions relatives aux services de communication audiovisuelle en ligne ", en observant que la définition que donnait de ces services les dispositions de ce chapitre reprenait celle de la communication audiovisuelle figurant à l'article 2 de la loi de 1986.

•  En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a retenu une nouvelle rédaction : " Dispositions relatives aux services de communication en ligne autres que de correspondance privée ".

Ce choix tiendrait à la volonté de distinguer de la communication audiovisuelle " la communication par réseau dont la définition reste à trouver dans une loi qui lui serait spéciale " , comme le note le rapporteur de l'Assemblée nationale.

Pourtant, les deux versions successives de l'article 43-6-2 adoptées en première et en deuxième lecture par l'Assemblée nationale comportent déjà une telle définition, d'ailleurs identique à celle de la communication audiovisuelle...

Par ailleurs, cette nouvelle dénomination reste une définition " en creux " ou " négative ". Il serait donc sans doute préférable de dénommer simplement les services concernés " services de communication en ligne ", la référence à la communication pouvant suffire, dans le cadre de la loi de 1986, à exclure les services de correspondance privée.

* Article 43-6-1 de la loi du 30 septembre 1986 : moyens techniques de restriction de l'accès aux services en ligne.

• Observant que cet article reprenait les dispositions de l'article 43-1 de la loi de 1986, qui fait obligation aux fournisseurs d'accès de proposer à leurs clients des logiciels de filtrage permettant de contrôler l'accès aux services, le Sénat en avait retenu une rédaction plus proche du texte en vigueur.

• Bien que le rapporteur de la commission des affaires culturelles familiales et sociales ait noté que cette rédaction comportait " d'utiles précisions rédactionnelles ", l'Assemblée nationale est revenue, en deuxième lecture, à son texte de première lecture.

* Article 43-6-2 de la loi du 30 septembre 1986 : obligations et responsabilités des prestataires techniques.

• l'Assemblée nationale avait prévu à cet article que la responsabilité civile des prestataires techniques ne pouvait être mise en cause, à raison des contenus des services en ligne à la production ou à la création desquels ils n'avaient pas contribué, que dans le seul cas où, exerçant la fonction " d'hébergeur ", ils ne déféreraient pas à l'injonction d'une autorité judiciaire d'empêcher l'accès à ces contenus. Le Sénat avait quant à lui défini à cet article :

- d'une part, les obligations de collecte et de conservation d'informations auxquelles devaient être astreints les fournisseurs d'accès ou d'hébergement pour permettre l'identification des auteurs de contenus litigieux ;

- d'autre part, les conditions de la mise en jeu de la responsabilité civile ou pénale des prestataires de services, qui devait essentiellement résulter du non accomplissement des " diligences " auxquelles la jurisprudence a estimé qu'ils étaient tenus en application de l'article 1383 du code civil.

Etait également mentionné le cas où les prestataires avaient eux-mêmes agi en tant que producteur, auteur ou éditeur des contenus fautifs. Enfin, avait été prévue, d'ailleurs contre l'avis de la commission et du gouvernement, la responsabilité du prestataire qui aurait supprimé un dispositif technique de protection d'une oeuvre -la responsabilité du prestataire étant alors de son fait-, ou qui n'appliquerait pas une " charte contractuelle " rappelant à ses clients la nécessité de respecter la loi.

• En deuxième lecture, l'Assemblée nationale est revenue à l'architecture de son texte de première lecture. Cependant, outre qu'elle a, à juste titre, élargi son champ d'application à la responsabilité pénale, aussi bien que civile, des prestataires techniques, elle a étendu à deux hypothèses nouvelles les cas, toujours limitativement énumérés, d'engagement de cette responsabilité :

a) La suppression d'un dispositif de protection des droits

Au deuxième alinéa de l'article, outre le cas où le prestataire technique interviendrait également en tant que fournisseur de contenu, est prévu celui où il n'aurait pas respecté les conditions d'accès à un contenu ou " ses mises à jour ", " telles que déterminées par les titulaires de droits ".

Cette disposition, qui résulte d'un amendement du gouvernement, a pour objet, comme l'a précisé Mme Catherine Trautmann, " de renforcer la protection des droits d'auteurs en imposant aux prestataires d'internet de respecter l'intégrité des dispositifs techniques de protection des droits ".

Le deuxième alinéa de l'article 43-6-2 vise donc désormais deux cas où la responsabilité du prestataire résulte non pas d'un comportement constitutif d'une complicité dans la production ou la diffusion d'un contenu illicite, mais d'une intervention directe de sa part, soit qu'il ait été l'auteur ou le coauteur d'un contenu illicite -agissant alors en tant que fournisseur de contenu- soit qu'il ait modifié les conditions techniques de diffusion d'un contenu d'une manière qui le rende contrefaisant.

Ce qui soulève deux interrogations :

- on peut en premier lieu se demander si ces hypothèses ont bien leur place dans un texte dont l'objet est de définir les cas où la responsabilité du prestataire, même s'il n'est en rien responsable du caractère illicite ou dommageable d'un contenu, peut être néanmoins mise en cause parce qu'il n'a rien fait pour prévenir le trouble causé par ce contenu 2( * ) ou y mettre fin.

En effet, lorsque le prestataire est lui-même à l'origine du caractère illicite ou dommageable d'un contenu, soit qu'il en soit l'auteur ou l'éditeur, soit qu'il en ait modifié les conditions d'accès, on peut considérer, d'une part, qu'il n'intervient pas dans le cadre normal d'une activité de prestataire technique et, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu de définir restrictivement la responsabilité qu'il encourt de ce fait.

- en second lieu, si l'on choisit de mentionner expressément dans le texte l'hypothèse où le prestataire technique " manipulerait " un contenu de manière à en modifier les conditions d'accès, il conviendrait de ne pas se limiter au seul cas où cette manipulation consisterait dans la suppression d'un dispositif technique de protection des droits.

Dans le cadre d'un texte définissant de manière limitative la responsabilité des prestataires, cela aurait en effet pour conséquence d'exonérer dans tous les autres cas le prestataire qui ne respecterait pas les conditions d'accès au contenu d'un service prévues par le fournisseur de ce service, même si son intervention avait des conséquences dommageables ou était constitutive d'une infraction (par exemple celle prévue à l'article 227-24 du code pénal : diffusion d'un message à caractère violent ou pornographique susceptible d'être vu ou perçu par un mineur).

Enfin, il faut aussi être attentif au risque que la disposition prévue par l'Assemblée nationale soit considérée comme définissant limitativement la responsabilité des prestataires de services en matière de contrefaçon ou de complicité de contrefaçon, ou qu'elle nuise à la cohérence de la future transposition, en droit français, des dispositions du traité de l'OMPI de décembre 1996 relatives aux dispositifs techniques de protection des oeuvres, reprises dans la proposition de directive sur l'harmonisation du droit d'auteur dans la société de l'information.

b) Le respect par les hébergeurs d'une obligation de diligence

Le dernier alinéa du texte adopté en seconde lecture pour l'article 43-6-2 marque, comme on l'a déjà indiqué, un rapprochement avec la position du Sénat en tant qu'il reconnaît que les hébergeurs de services sont tenus à une obligation de diligence .

Toutefois, cette obligation s'inscrit dans certaines limites.

- En premier lieu, il faudrait, avant d'être obligé de " procéder aux diligences appropriées ", que l'hébergeur ait été " mis en demeure " par un tiers estimant qu'un contenu est illicite ou lui cause préjudice. Cette réserve paraît peu justifiée : pourquoi l'hébergeur serait-il dispensé d'agir s'il découvrait lui-même qu'un contenu est illicite ou dommageable, ou s'il était simplement alerté par un tiers ? En outre, quelle forme devra prendre cette mise en demeure ?

Il doit suffire, pour être tenu à l'obligation de diligence, que l'hébergeur ait eu connaissance, de quelque manière que ce soit, du caractère illicite ou dommageable d'un contenu, ce qui ne veut d'ailleurs pas dire qu'il soit tenu pour autant à une quelconque obligation générale de surveillance des sites hébergés sur son serveur. On notera d'ailleurs que l'exigence d'une " mise en demeure " ne serait pas conforme aux dispositions de la directive " commerce électronique " définitivement adoptée par le Parlement européen le 4 mai dernier.

- En deuxième lieu, cet alinéa, tout en prévoyant l'engagement de la responsabilité de l'hébergeur qui n'aurait pas " procédé aux diligences appropriées " précise in fine que l'autorité judiciaire demeure seul juge (sic) du caractère illicite du contenu en cause.

Il est permis de s'interroger sur la portée de cette précision, qui néglige le fait que c'est d'abord la loi -que nul n'est censé ignorer- qui définit le " licite " et " l'illicite ". On ne peut guère, semble-t-il, l'interpréter que comme un rappel, un peu maladroit et certainement superfétatoire, du principe de la présomption d'innocence. Mais on ne saurait en tout cas la considérer comme une limitation a priori des diligences qui devront être accomplies par le prestataire, ni comme une justification de son éventuelle inaction : ce serait en effet oublier que l'autorité judiciaire demeurera également " seul juge " du caractère approprié de ces diligences...

En outre, la directive " commerce électronique " fait expressément obligation aux hébergeurs, sauf à engager leur responsabilité, " d'agir promptement " pour retirer des informations illicites ou pour en rendre l'accès impossible.

On ne peut donc exclure que le juge estime, comme le cas s'en est déjà produit, que les " diligences appropriées " imposent à l'hébergeur de couper de sa propre autorité l'accès à un contenu " manifestement illicite ", par exemple un site pédophile.

Reste que, dans nombre de cas, il pourra être difficile à l'hébergeur de discerner quelles sont les " diligences " qui seront attendues de lui. La gamme peut en effet en être vaste, comme le démontre la jurisprudence sur la responsabilité du fournisseur d'hébergement : ne pas inciter ses clients à l'infraction ou à l'irresponsabilité en leur permettant d'agir dans l'anonymat ; ne pas être dans l'incapacité de révéler aux tiers qui y auraient un intérêt légitime l'identité du créateur d'un site ; attirer l'attention des créateurs de site sur le nécessaire respect des droits des tiers ; prendre (sans être tenu d'exercer une surveillance minutieuse et approfondie des sites qu'il abrite) des mesures " raisonnables " pour évincer de son serveur les sites dont le contenu illicite est apparent ; mettre en place des procédures permettant de mettre en demeure les éditeurs de sites de se conformer à leurs obligations ou de justifier du caractère licite de contenus apparemment contrevenants avant de procéder à leur fermeture...

Le texte adopté par le Sénat en première lecture avait tenté d'expliciter certaines de ces " diligences " et la possibilité d'une " riposte graduée ", en prévoyant, par exemple, une mise en demeure du fournisseur de contenu préalable à la fermeture d'un site.

Il est clair cependant qu'il n'est pas possible de dresser dans un texte l'inventaire complet des mesures possibles ni de préciser les conditions dans lesquelles il peut y être recouru.

Aussi serait-il indispensable de prévoir, dans le cadre de la future loi sur la société de l'information, des procédures inspirées de la procédure américaine dite de " Notification et Retrait " (Notice and Take down) mise en place dans le cadre du " Digital Millenium Copyright Act " de 1998, relatif à la protection du droit d'auteur sur les réseaux.

Il s'agit d'une procédure de notification à l'hébergeur du caractère contrefaisant d'un contenu qui, si les arguments invoqués sont sérieux, déclenche son retrait pour un délai donné. Pendant ce délai, le fournisseur du contenu peut faire valoir ses propres arguments . Si ce " dialogue " ne permet pas de résoudre le conflit à l'amiable, il sera ensuite porté devant le juge et tranché par lui.

La transposition d'une telle procédure, par exemple en prévoyant le recours à des médiateurs chargés d'apprécier le sérieux des arguments présentés de part et d'autre, pourrait permettre de " sécuriser " à la fois les hébergeurs et les personnes lésées, et pourrait par ailleurs éviter de nombreux contentieux.

* Article 43-6-3

Le Sénat avait prévu à cet article les sanctions pénales applicables aux prestataires qui n'auraient pas rempli leurs obligations en matière de collecte et de conservation des données permettant d'identifier les auteurs de contenus litigieux, ou qui auraient refusé de communiquer à l'autorité judiciaire l'identité d'utilisateurs de leurs services.

• Dans le texte adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, comme dans celui qu'elle avait adopté en première lecture, l'article 43-6-3 a pour objet d'imposer aux prestataires techniques de communiquer, à la demande d'une autorité judiciaire, des données relatives à l'identification des auteurs de contenus. Le texte adopté en deuxième lecture comporte cependant des modifications :

- l'obligation qu'il définit ne s'impose plus aux seuls fournisseurs d'hébergement ;

- il est précisé que les prestataires doivent " détenir et conserver " des données concourant à l'identification des auteurs des " contenus en cause "(cette définition n'étant pas très opérationnelle), mais la nature de ces données n'est pas précisée. Leur définition, comme la durée et les modalités de leur conservation, sont en effet renvoyées à un décret en Conseil d'Etat, ce qui évite de mentionner expressément que, pour permettre d'identifier les auteurs de contenus litigieux, ces données devront inclure les données de connexion...

Par ailleurs, le texte adopté pour l'article 43-6-3 appelle deux observations :

- il nécessite d'être coordonné avec les dispositions de l'article 43-6-4 relatives à l'obligation d'identification des éditeurs de services ;

- l'obligation imposée aux prestataires techniques n'est pas sanctionnée.

* Article 43-6-4 (nouveau) - Identification des éditeurs de services

• Cet article nouveau, qui résulte de l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement du gouvernement, impose aux éditeurs " de services en ligne autres que de correspondance privée " une obligation d'identification dont la définition est inspirée des dispositions ayant même objet applicables, aux termes de la loi de 1986, aux services de communication audiovisuelle soumis à autorisation ou à déclaration.

a) L'étendue de l'obligation d'identification

L'article 43-6-4 prévoit que tout éditeur d'un service en ligne tient à la disposition du public :

- s'il ne s'agit pas d'une personne morale, les nom, prénom et domicile de la ou des personnes physiques propriétaires ou copropriétaires ;

- s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination ou sa raison sociale et son siège social ;

- le nom du directeur de la publication et, " le cas échéant ", celui du responsable de la rédaction. Cette dernière exigence appelle deux observations :

- en premier lieu, il n'existe pas de définition " universelle " du directeur de la publication : la loi ne définit en effet le directeur de la publication que dans le cas des publications de presse périodique (article 6 de la loi du 29 juillet 1881) et des services de communication audiovisuelle (article 93-2 de la loi du 29 juillet 1982). Sauf à ce que l'exigence posée par l'article 43-6-4 demeure vide de sens, il faut donc se référer à l'une de ces définitions pour préciser ce qu'il faut entendre par le directeur de la publication d'un " service en ligne autre que de correspondance privée ".

- en second lieu, l'exigence de la désignation d'un directeur de la publication pour un service de communication en ligne tel qu'une page personnelle, un " webzine " ou le site d'une association confidentielle, peut apparaître un peu excessive ou " surdimensionnée ". Cependant, cette exigence se justifie dans la mesure où l'on ne peut exclure que le contenu de n'importe quel service de communication en ligne soit constitutif d'un " délit de presse " (diffamation, injure, provocation à un crime ou à un délit...) ni que l'auteur de ce contenu puisse, du fait du caractère interactif de ces services, n'être pas facilement identifiable. La désignation d'un directeur de la publication, considéré comme le principal auteur des infractions de presse, facilitera donc la poursuite des infractions de cette nature commises sur Internet. Sans doute sera-t-il néanmoins nécessaire que la future loi sur la société de l'information circonscrive clairement l'obligation de désignation d'un directeur de la publication, qu'il serait par exemple inutile d'imposer à des services de commerce en ligne....

b) L'obligation d'identification " indirecte "

Le sixième alinéa prévoit une obligation d'identification qualifiée d'" indirecte ", qui s'applique aux personnes n'exerçant pas " à titre professionnel " l'activité d'éditeur de service en ligne. Elle pourront se contenter de ne mettre à la disposition du public qu'un pseudonyme et le nom de l'hébergeur de leur service, à condition de communiquer à ce dernier les éléments d'identification requis des éditeurs " professionnels ".

c) Le rôle des hébergeurs de services

Assez curieusement, le onzième alinéa de l'article fait obligation aux hébergeurs de " s'assurer du respect " par les éditeurs des services qu'ils hébergent de leurs obligations d'identification " directe ou indirecte ". L'intérêt de cette obligation, qui ne s'étend pas à la vérification des éléments d'identification fournis -vérification que les hébergeurs n'auraient d'ailleurs aucune compétence pour opérer- paraît très limité.

d) Les sanctions pénales

- L'article 43-6-4 ne prévoit pas de sanction du non-respect de l'obligation d'identification, car cette infraction ne serait constitutive que d'une contravention de la 5° classe, prévue par conséquent par un texte réglementaire. Cette " clémence " peut être compréhensible -encore que, concrètement, l'absence d'identification puisse avoir les mêmes effets que la production de faux éléments d'identification qui est, elle, définie comme un délit. On peut s'étonner cependant que la même infraction, commise par le fournisseur d'un service de communication audiovisuelle soumis à déclaration, soit punie d'une amende de 40.000 F.

- La fourniture de faux éléments d'identification est quant à elle passible de six mois d'emprisonnement et de 50.000 F d'amende et, pour les personnes morales, d'une peine d'amende de 250.000 F éventuellement assortie de peines complémentaires (interdiction d'activité, fermeture du ou des établissements ayant servi à la commission de l'infraction, publication du jugement).

- est également puni de 50.000 F d'amende et de 6 mois d'emprisonnement le fait pour un hébergeur de ne pas communiquer à une autorité judiciaire, à sa demande, les éléments d'identification des éditeurs de services soumis à une obligation d'identification " indirecte ".

e) Identification des messages publicitaires

Le dernier alinéa de l'article 43-6-4 prévoit, par référence aux dispositions de la loi de 1986 relatives aux services soumis à déclaration, que les messages publicitaires diffusés par les services en ligne doivent être identifiés comme tels : cette obligation, qui n'a pas grand rapport avec les autres dispositions de l'article, résulte de la législation communautaire.

Position de la commission

Votre commission a adopté un amendement proposant une nouvelle rédaction de cet article et tendant, sans remettre en cause les acquis des lectures précédentes, à alléger la rédaction du dispositif proposé et à lui apporter quelques aménagements de fond.

• L'amendement de votre commission retient l'architecture générale du texte adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale. Il prévoit cependant d'insérer les dispositions pénales qu'il comporte dans le titre correspondant de la loi du 30 septembre 1986 : tel est l'objet du paragraphe II de l'amendement, dont le paragraphe I reprend le chapitre VI nouveau du titre II de la même loi.

• Quant à la forme, l'amendement propose de dénommer simplement " services de communication en ligne " les services visés à l'article 1 er A. Dans le même but de simplification terminologique, votre commission vous propose également de revenir à la définition des opérateurs techniques qu'elle avait retenue en première lecture, plus condensée que celle de l'Assemblée nationale et qui reprenait les deux fonctions distinguées par le rapport du Conseil d'Etat : la fourniture d'accès et l'hébergement. D'une façon plus générale, votre commission s'est efforcée de simplifier et d'améliorer la rédaction du dispositif proposé par cet article.

• Quant au fond, les aménagements proposés par votre commission, qui a pris acte de la reconnaissance par l'Assemblée nationale de l'obligation générale de prudence et de diligence des hébergeurs, ainsi que de l'obligation d'identification imposée aux fournisseurs de services de communication en ligne, ont pour objet, sans remettre en cause l'équilibre général du dispositif, d'en renforcer la cohérence :

* A l'article 43-6-2 , il est ainsi proposé :

- de supprimer, au 1° de cet article, la référence à la responsabilité encourue par le prestataire de services ayant " contribué à la création " d'un contenu fautif et qui a donc, de ce fait, agi en tant que fournisseur de contenu ;

- de formuler, au même alinéa, de manière plus générale le cas où la responsabilité du prestataire technique peut être engagée par une modification des conditions techniques de transmission d'un contenu, cette responsabilité ne pouvant être limitée, pour les raisons précédemment exposées, aux atteintes à la propriété littéraire et artistique. En outre, il est proposé de préciser que ces modifications doivent être appréciées par rapport à celles imposées par le fournisseur du service ;

- de ne pas subordonner, au 2° de cet article, l'obligation de diligence de l'hébergeur à la mise en demeure préalable d'un tiers ;

- de ne pas limiter aux hébergeurs, au 3° de l'article, l'obligation d'empêcher l'accès à un contenu sur injonction de la justice. La directive " commerce électronique " réserve en effet le droit des juridictions des Etats membres d'exiger de tout prestataire technique " qu'il mette fin à une violation ou prévienne une violation " : il appartiendra donc à l'autorité judiciaire d'apprécier, par exemple, l'opportunité ou la possibilité d'imposer à un fournisseur d'accès d'empêcher ses abonnés d'accéder à tel ou tel site étranger.

* à l'article 43-6-3 , la commission a retenu une définition plus précise des obligations prévues à cet article, et en a coordonné les dispositions avec celles de l'article 43-6-4 ;

* à l'article 43-6-4 , le texte adopté par la commission définit le directeur ou le codirecteur d'un service de communication en ligne par référence aux dispositions de la loi du 29 juillet 1982 relatives au directeur ou au codirecteur de la publication d'un service de communication audiovisuelle. Il supprime en outre l'obligation faite aux hébergeurs de s'assurer du respect par les fournisseurs de services de leur obligation d'identification.

* enfin, le paragraphe II de l'amendement adopté par votre commission propose de compléter le dispositif pénal applicable aux prestataires techniques qui refuseraient de déférer à une demande de communication à l'autorité judiciaire des éléments d'identification des fournisseurs de services :

- en étendant les sanctions prévues, dans un souci de cohérence, à l'ensemble des obligations de communication à la justice des informations qu'ils sont tenus de conserver en application de l'article 43-6-3 ;

- en prévoyant, pour les personnes physiques, une peine complémentaire d'interdiction temporaire d'exercer l'activité dans laquelle ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ;

- en prévoyant que les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables des mêmes infractions.

Article 1 er
(article 43-7 nouveau de la loi du 30 septembre 1986)

Missions du secteur public de la communication audiovisuelle

Le Sénat avait procédé à une nouvelle rédaction de cet article afin de substituer à l'énumération de missions élaborée par l'Assemblée nationale une définition concise et synthétique des missions des diffuseurs de l'audiovisuel public, et afin de poser le principe selon lequel l'ensemble des financements est destiné à l'ensemble des programmes.

L'Assemblée nationale a rétabli la définition des missions adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture, sans reprendre toutefois la référence à la notion de développement durable qui figurait dans ce texte, et en prévoyant en outre la présentation au Parlement d'un rapport annuel sur l'application de cet article.

Position de la commission

La description des missions des organismes de l'audiovisuel public peut répondre à deux objectifs pas nécessairement compatibles.

On peut souhaiter dessiner le profil idéal de l'audiovisuel public dans une énumération aussi exhaustive que possible de ses objectifs et de ses obligations. L'Assemblée nationale s'est essayée à cet exercice qui tient un peu de l'exécutoire.

On peut aussi tenter de saisir la raison d'être de l'audiovisuel public, ce qui fait sa spécificité, ce qui justifie sa permanence et son développement à côté d'un secteur privé en croissance continue, soumis à de larges sujétions d'intérêt général, voué à prendre en charge une partie croissante des activités habituellement considérées comme relevant des missions spécifiques de l'audiovisuel public.

Cet exercice, plus austère que le premier, est sans doute plus utile car il permet de dire ce qu'est l'audiovisuel public, ce par quoi il n'est pas réductible au secteur privé, ce pourquoi les similitudes faciles à relever entre les programmes des uns et des autres n'ont pas la portée que l'on croit parfois pouvoir leur attribuer.

Les circonstances plaident en faveur de cette démarche. On sait en effet que la direction générale de la Commission européenne chargée de la concurrence a entrepris d'examiner la conformité au droit européen du financement mixte du secteur public, à partir de l'idée qu'il convient de réserver les fonds publics au financement des programmes de service public, les autres programmes devant être financés par des recettes propres. Ceci implique l'élaboration d'une liste des programmes de service public, et l'identification de leur mode de financement sur la base d'une comptabilité analytique des chaînes publiques.

La liste énumérative des missions de l'audiovisuel public retenue par l'Assemblée nationale s'inscrit implicitement dans cette logique, dans la mesure où cette liste peut aisément constituer le point de départ d'une discussion aboutissant à l'établissement d'une liste de programmes de service public reconnus par la Commission, pour lesquels le financement public serait admis, la même liste étant susceptible d'être rediscutée au fur et à mesure que le secteur privé prendrait en charge tel ou tel de ses éléments.

Ce processus serait destructeur pour l'audiovisuel public de la France, fondé sur l'idée que la télévision publique est essentiellement une télévision généraliste destinée à favoriser le contact de tous les publics avec tous les programmes, et doit à cet effet offrir une programmation complète attirant le plus large public. Dans cette optique, la distinction des modalités de financement à partir d'une comptabilité analytique n'a guère de sens.

Auditionnée par votre commission le 25 janvier dernier, Mme Viviane Reding, membre de la Commission européenne, chargée de l'éducation et de la culture, admettait implicitement le danger de la méthode énumérative en répondant à une question de votre rapporteur qu'une définition globale du rôle de la télévision publique était préférable à une énumération de missions.

C'est pourquoi votre commission a adopté un amendement rétablissant, dans une rédaction plus précise, la définition des missions de l'audiovisuel public adoptée par le Sénat en première lecture.

Article 2
(article 44 de la loi du 30 septembre 1986)

Création de la société holding France Télévision, définition de
ses missions et de celles des autres sociétés nationales de programmes

Le Sénat avait modifié cet article :

- pour préciser la définition des missions de RFO et celle de ses moyens d'action ;

- pour renoncer, sur la proposition du gouvernement, à la fusion, prévue par le projet de loi, entre la Sept-ARTE et la Cinquième, en maintenant cette dernière seule dans le groupe France Télévision.

L'Assemblée nationale a adopté à cet article :

- un amendement modifiant l'énoncé des missions de la holding France Télévision afin d'étendre son rôle à la conduite des politiques de programmes et de l'offre de services de ses filiales ;

- un amendement rédactionnel précisant que France 2 propose une programmation généraliste " de référence ", et un amendement imposant à la chaîne de favoriser la création de productions télévisuelles originales ;

- un amendement introduisant dans l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986 la définition des missions de la Cinquième figurant actuellement dans l'article 45 de la même loi, et étendant à cette chaîne la qualité de société nationale de programme ;

- un amendement permettant la création par France Télévision de filiales consacrées à l'édition de chaînes numériques gratuites de service public, dont le capital serait détenu directement ou indirectement par des personnes publiques ;

- un amendement reprenant la définition des missions de RFO adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale ;

- un amendement rédactionnel relatif à la couverture territoriale des antennes régionales et locales de Radio France ;

- un amendement appliquant aux filiales de France Télévision consacrées à l'édition de télévisions numériques de service public le dispositif réglementaire relatif à la production d'oeuvres audiovisuelles par les sociétés nationales de programmes.

Position de la commission

En ce qui concerne la définition des missions de la holding France Télévision, votre commission a considéré, d'une part, que le texte adopté par l'Assemblée nationale, en substituant la notion de conduite des politiques de programmes des chaînes à celle de coordination, encourageait des empiétements inopportuns sur les responsabilités spécifiques des chaînes en matière de programmation (chaque société nationale de programme est chargée de " concevoir et de programmer des émissions "). Elle a considéré, d'autre part, que la suppression de la notion de pôle industriel retirait à la définition des missions de la holding une part essentielle de son contenu le plus dynamique.

Votre commission a donc adopté un amendement rétablissant l'énoncé des missions de France Télévision dans la rédaction du Sénat.

En ce qui concerne les modalités d'intervention du groupe France Télévision dans le numérique de terre, votre commission a estimé contestable le choix de prévoir la création de chaînes numériques de service public sous la forme de filiales de France Télévision à capital éventuellement partagé avec d'autres personnes publiques, soumises à un cahier des charges et dotées de contrats d'objectifs comme les sociétés nationales de programmes (cf. article 6 § II), et percevant comme France 2, France 3 et la Cinquième une part de la redevance versée à France Télévision (cf. article 6 § III). Seule l'absence de disposition concernant les organes directeurs de ces nouvelles chaînes de service public différencie ces filiales des sociétés nationales de programmes. Dans la logique de ce dispositif, il est probable que les chaînes numériques de service public recevront en fin de compte un statut proche de celui des sociétés nationales de programmes proprement dites : leur personnel pourrait en bonne logique être soumis à la convention collective de l'audiovisuel public. Ce dispositif ouvre ainsi la voie à un essaimage systématique du service public sans que le Parlement ait à se prononcer sur son opportunité, sur sa pertinence, sur son financement.

La mise en oeuvre du numérique de terre, par le biais de nouvelles structures dont le coût de fonctionnement sera nécessairement significatif -et dont la coordination avec les sociétés nationales de programmes est rien moins que certaine compte tenu de l'expérience passée du service public en ce domaine- paraît en outre potentiellement contradictoire avec l'idée de rassemblement des moyens et de cohérence des objectifs qui préside à la création du groupe France Télévision.

Votre commission, sensible comme l'Assemblée nationale à la nécessité d'éviter la déperdition des ressources publiques affectées à France Télévision dans des dépenses de structures (rappelons à cet égard que l'article 6 prévoit que les remboursements d'exonérations de redevance financeront exclusivement les dépenses de programmes et de développement des chaînes), et désireuse d'étendre ce principe de bonne gestion à l'ensemble des ressources, a estimé inopportune la disposition adoptée par l'Assemblée nationale concernant la filialisation des chaînes numériques de service public. Elle a considéré que la mobilisation de France Télévision en faveur du numérique passait par l'implication directe de France 2, France 3 et la Cinquième, chacune dans la logique de sa mission particulière et dans le cadre de la stratégie globale déterminée par la holding. Il n'est pas nécessaire d'inscrire dans la loi des dispositions particulières à cet égard.

En fonction de ces éléments, votre commission a adopté un amendement de suppression de la disposition prévoyant la création de filiales diffusant en numérique des programmes de service public.

Elle a par ailleurs adopté un amendement précisant que la programmation généraliste de France 2 s'adressait au public " le plus divers ", et un amendement rédactionnel à l'alinéa énonçant les missions de France 3.

Elle a enfin adopté un amendement rétablissant dans la rédaction du Sénat les dispositions relatives aux missions de RFO.

Article 2 bis
(article 44-1 nouveau de la loi du 30 septembre 1986)

Activités de diversification de France Télévision

• Cet article additionnel introduit par l'Assemblée nationale résulte d'un amendement du Gouvernement. Il permet à France Télévision de créer des filiales exerçant des activités de diversification non directement liées à l'exécution des missions de service public définies à l'article 1 er du projet de loi.

Selon les explications données en séance par le ministre, ces filiales pourront fournir des services payants, ne seront pas attributaires de redevance, et ne seront pas régies par un cahier des charges. Elles ne devront pas empiéter sur les attributions des sociétés nationales de programmes.

Bien que le texte adopté ne le précise pas, et que le ministre ait eu à cet égard un propos ambigu (" l'objet social de ces dernières [filiales] est différent de celui des filiales destinées à développer les services numériques ") il semble que cette disposition prépare essentiellement la diversification concurrentielle de France Télévision dans le numérique.

Position de la commission

La rédaction actuelle de la loi du 30 septembre 1986 n'a pas empêché les chaînes publiques de créer des filiales pour l'exercice d'activités conformes à leur objet social. C'est le cas de France Publicité, chargée de la régie publicitaire de France 2 et France 3, ou France Distribution.

Il peut cependant être opportun de préciser expressément dans la loi le cadre juridique dans lequel France Télévision développera, à côté de sa mission de service public proprement dite, les services payants qui joueront probablement un rôle important dans l'économie du numérique de terre, y compris pour le service public confronté sur ce plan, comme on le verra dans le commentaire de l'article 20 A, à une double contrainte financière et juridique.

Dans la mesure où le texte de l'article 2 bis régira les activités concurrentielles de diversification de France Télévision dans le numérique, il importe cependant de préciser les contraintes auxquelles ces activités seront soumises et les modalités qu'elles pourront revêtir. Il convient en effet de prévenir le risque d'une diversification imprudente dans des activités non rentables qu'il serait à terme nécessaire de subventionner par des financements publics ponctionnant les ressources disponibles pour l'exécution des missions de service public, ce processus accentuant la fragilité de l'audiovisuel public à l'égard du droit communautaire de la concurrence. Il importe de prévenir les doutes que pourrait avoir à cet égard une commission européenne dont la direction générale de la concurrence étudie actuellement avec une attention critique la conformité du financement mixte de France Télévision au droit de la concurrence.

C'est en évoquant ces questions que votre rapporteur avait, dans le rapport " Etat des lieux de la communication audiovisuelle 1998 " établi au nom de votre commission, présenté les observations suivantes :

" Il est possible de concilier ces contradictions en soumettant l'investissement public dans le numérique à des modalités particulières. Le financement des chaînes thématiques ne serait pas assuré par des ressources publiques, mais par le marché, ce qui suppose que chaque chaîne ait un compte d'exploitation et un plan d'équilibre financier à court terme excluant de la part des chaînes publiques des apports financiers au sein desquels il paraît impossible de distinguer ce qui provient de la redevance et des subventions budgétaires et ce qui provient de leurs ressources propres.

L'apport initial d'investissement ferait bien entendu exception à la règle du financement autonome. En d'autres termes, les chaînes publiques ne devraient développer une offre thématique numérisée que si les perspectives de rentabilité apparaissent raisonnablement sûres. Et les expériences qui aboutiraient à un échec économique ne devraient pas être prolongées. "


Dans une logique identique, votre commission a adopté un amendement précisant certaines modalités d'intervention dans le numérique des filiales concurrentielles de France Télévision.

Article 3
(article 45 de la loi du 30 septembre 1986)

Missions de la société la Sept-ARTE

Le Sénat avait, sur proposition du gouvernement, modifié cet article afin de supprimer la fusion initialement prévue entre la Sept-ARTE et la Cinquième.

L'Assemblée nationale a inséré à l'article 3, libéré par le transfert à l'article 1 er de la définition des missions de la Cinquième, la définition des missions de la Sept-ARTE figurant auparavant à l'article 3 bis A.

Position de la commission

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 3 bis A
(article 45 de la loi du 30 septembre 1986)

Missions de la société la Sept-ARTE

Le Sénat avait inséré dans cet article la définition des missions de la Sept-ARTE.

L'Assemblée nationale a supprimé cet article par coordination avec la nouvelle rédaction de l'article 3 adoptée par elle.

Position de la commission

Votre commission a approuvé la suppression de l'article 3 bis A.

Article 3 bis
(article 46 de la loi du 30 septembre 1986)

Conseil consultatif des programmes

Le Sénat avait substitué au Conseil consultatif des programmes recruté par tirage au sort un comité consultatif d'orientation des programmes composé de personnalités qualifiées de la société civile.

L'Assemblée nationale a réintroduit le conseil consultatif tiré au sort en diminuant de 40 à 20 le nombre de ses membres.

Position de la commission

Composée de téléspectateurs désignés par tirage au sort, l'instance créée par l'Assemblée nationale n'aura très vraisemblablement ni l'autorité, ni la capacité technique nécessaires pour élaborer une ligne de conduite. Elle réagira aux documents que la direction de France Télévision lui transmettra de façon vraisemblablement aussi aléatoire que son mode de désignation.

Si la démocratie athénienne voyait dans le tirage au sort de certains magistrats une façon de confier leur choix aux dieux, la démocratie moderne privilégie soit la représentativité soit l'autorité des organes consultatifs, ce qui exclut leur désignation par tirage au sort.

Votre commission a donc adopté un amendement rétablissant à cet article le texte adopté par le Sénat.

Article 4
(article 47 et articles 47-1 à 47-4 nouveaux de la loi du 30 septembre 1986)

Organes de direction de la société France Télévision
et des sociétés nationales de programmes

Le Sénat avait modifié cet article afin de rendre au CSA son entière liberté dans le choix des membres du conseil d'administration de France Télévision dont la désignation lui revient, de prévoir la nomination des présidents de France Télévision, RFO et Radio France par décret en Conseil des ministres sur une liste de deux noms les moins présentés par le CSA, et de modifier dans cette logique le mode de révocation des mêmes présidents.

L'Assemblée nationale a adopté à cet article plusieurs amendements de retour au texte adopté par elle en première lecture ainsi que deux amendements du gouvernement qui introduisent des éléments nouveaux. Le premier écarte l'application des articles 101 à 105 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales aux conventions conclues entre l'Etat et France Télévision ainsi qu'à celles conclues entre France Télévision, France 2, France 3 et La Cinquième. Le second permet aux conseils d'administration de France Télévision et des sociétés nationales de programmes de délibérer en cas de vacance de sièges, si les conditions de quorum sont satisfaites.

Position de la commission

Votre commission persiste à croire en la pertinence des objectifs qui ont en première lecture amené le Sénat à transférer à l'actionnaire le pouvoir de nomination des présidents des organismes de l'audiovisuel public selon des modalités associant le CSA à ce choix : objectif de cohérence, dans la mesure où il est naturel que le responsable ultime du financement et de la stratégie de l'audiovisuel public dispose de la possibilité de choisir et éventuellement de sanctionner les dirigeants ; objectif de transparence, dans la mesure où nul n'ignore que des circuits plus ou moins opaques permettent actuellement de vérifier l'acceptation par l'Etat des choix du CSA. Votre commission considère de même la modification du pouvoir de révocation comme le complément nécessaire de celle du pouvoir de nomination. Elle observe au demeurant que ses analyses sont partagées sur ces questions sur de nombreux bancs de l'Assemblée nationale, comme le débat en première lecture l'a amplement démontré.

Votre commission considère par ailleurs que le CSA doit conserver toute latitude dans le choix des membres du conseil d'administration de France Télévision dont la désignation lui revient.

En ce qui concerne les deux novations introduites sur la proposition du gouvernement, votre commission a estimé possible de conserver la disposition relative à la validité des délibérations des conseils d'administration en cas de vacance d'un ou plusieurs sièges.

Elle n'a en revanche pas retenu la disposition qui écarte l'application des articles 101 à 105 de la loi du 24 juillet 1966 aux conventions conclues par France Télévision avec l'Etat.

Il convient de rappeler que ces articles soumettent à des conditions particulières les conventions intervenant entre une société et l'un de ses administrateurs ou directeurs généraux et les conventions intervenant entre une société et une entreprise dont l'un de ses administrateurs ou directeurs généraux est dirigeant à un titre ou à un autre.

La présence d'administrateurs communs dans les conseils d'administration de France Télévision et de ses filiales imposerait inutilement le recours à la procédure d'autorisation prévue par les articles 101 à 105 pour chaque contrat conclu entre France Télévision d'une part, France 2, France 3 ou La Cinquième de l'autre, ce qui n'apparaît pas utile dans la mesure où les relations contractuelles entre France Télévision et ses filiales ne présentent guère le risque de manoeuvres frauduleuses de la part des administrateurs communs.

Les conventions passées entre France Télévision et l'Etat n'entrent en revanche manifestement pas dans le champ d'application de ces dispositions.

En fonction de ces observations, votre commission a adopté à cet article cinq amendements rétablissant le texte adopté par le Sénat en première lecture et un amendement limitant aux conventions passées entre France Télévision et l'une ou l'autre des ses filiales la non application des articles 101 à 105 de la loi du 24 juillet 1966.

Article 4 bis
(article 48-1 A nouveau de la loi du 30 septembre 1986)

Interdiction des clauses d'exclusivité
pour la reprise des programmes des chaînes publiques

Le Sénat avait procédé à une nouvelle rédaction de cet article afin de préciser que l'exercice par les chaînes publiques du droit défini à l'article 216-1 du code de la propriété intellectuelle doit être concilié avec l'objectif de mise à disposition du public de leurs programmes sur l'ensemble des supports disponibles.

L'Assemblée nationale a adopté à cet article une rédaction résultant d'un amendement du gouvernement, qui interdit aux organismes de l'audiovisuel public d'accorder ou de maintenir, à compter de l'entrée en vigueur de la loi, un droit exclusif de reprise de leurs programmes diffusés par voie hertzienne terrestre.

Position de la commission

Votre commission n'a pas modifié son analyse sur les clauses de reprise exclusive des programmes des chaînes publiques. Elle estime indispensable de maintenir le droit que l'article 216-1 du code de la propriété intellectuelle reconnaît aux chaînes publiques, comme à l'ensemble des diffuseurs, d'autoriser ou de refuser la télédiffusion de leurs programmes. Ceci implique qu'elles disposent du droit d'octroyer les autorisations notamment en fonction de leurs intérêts commerciaux et de leurs stratégies de développement. C'est d'ailleurs dans cette optique, pour préparer son entrée dans les métiers du numérique et du multimédia, que France Télévision a souhaité participer au tour de table de TPS et lui a accordé l'exclusivité de la diffusion satellitaire de ses programmes.

Votre commission a donc adopté un amendement rétablissant dans la rédaction du Sénat les dispositions relatives à la reprise des programmes des chaînes publiques.

Article 5
(article 49 de la loi du 30 septembre 1986)

Institut national de l'audiovisuel (INA)

• En première lecture, le Sénat avait adopté une nouvelle rédaction de cet article tendant :

- à en alléger et à en clarifier la rédaction, pour mieux distinguer entre les différentes missions de l'INA (conservation des archives audiovisuelles publiques, responsabilité du dépôt légal des documents audiovisuels radiodiffusés ou télévisés, droit d'exploitation d'une partie des archives audiovisuelles publiques) et en particulier pour définir plus clairement les cas dans lesquels l'INA exerce les droits d'exploitation ;

- à revenir à la définition des missions de recherche et de formation de l'institut définies par le texte initial du projet de loi.

• En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a conservé l'architecture générale du texte adopté par le Sénat, en y apportant néanmoins un certain nombre de modifications tendant essentiellement à un retour à son texte de premier lecture :

* au paragraphe I de l'article, l'Assemblée nationale est revenue à son texte de première lecture au motif que celui du Sénat, qui visait la participation de l'INA à la conservation et à la commercialisation des archives des sociétés nationales des programmes (catégorie à laquelle serait désormais agrégée " La Cinquième ") excluait " toute possibilité d'exploitation à titre gratuit ".

Cette analyse méconnait le fait que la " contribution à l'exploitation des archives " mentionnée par le texte initial du projet de loi vise, d'après les termes mêmes des conventions entre l'INA et les sociétés nationales de programmes, l'ensemble des prestations documentaires (archivage, catalogage, indexation) qui permettent cette exploitation. Il ne s'agit pas ici, en effet, du cas où l'INA pourrait être autorisée, comme toute autre personne, à utiliser les archives des sociétés de programmes, que ce soit à des fins commerciales ou non commerciales.

En outre, le texte de l'Assemblée nationale ne rend pas compte de la nouvelle mission de l'INA, appelé à participer, en tant que mandataire des chaînes publiques, à la commercialisation des programmes dont ces dernières conserveront désormais les droits d'exploitation sous leur forme intégrale.

Il ne paraît donc pas souhaitable de modifier la rédaction de ce paragraphe, qui décrit simplement la mission de l'INA à l'égard des sociétés nationales de programmes, à savoir son rôle de prestataire de services documentaires et de mandataire commercial.

* Au premier alinéa du paragraphe II , l'Assemblée nationale est également revenue à son texte de première lecture, qui prévoit que le droit d'exploitation des extraits des archives des sociétés nationales de programmes serait transféré à l'INA aux termes des cahiers des charges, alors qu'il suffit qu'il soit prévu par la loi : il est vrai que l'Assemblée nationale avait compris le texte du projet de loi comme prévoyant un partage de ce droit d'exploitation des extraits entre les chaînes et l'INA, et non son transfert à l'INA.

L'Assemblée nationale a également modifié le deuxième alinéa de ce paragraphe pour préciser que l'INA demeurait non seulement détenteur des droits d'exploitation qui lui ont été transférés par les lois de 1982 et 1986 mais également " propriétaire des supports originaux ". Outre que la notion de " support original " est elle-même originale, on notera que cette précision, introduite à la demande de l'INA, est inutile et procède d'une méconnaissance du droit de la propriété littéraire et artistique dont l'institut a malheureusement donné d'autres exemples.

- En premier lieu, on ne voit pas ce qui peut faire craindre à l'INA qu'on le dépossède des supports des archives qu'il exploite, ne serait-ce que parce que, titulaire ou non des droits d'exploitation, l' INA est dans tous les cas dépositaire des archives de l'audiovisuel public, au titre de sa double mission de conservateur de ces archives et de responsable du dépôt légal. On notera cependant qu'il lui incombe moins, au titre de sa mission patrimoniale, de revendiquer un droit de propriété sur des " supports originaux " (du reste sujets à une dégradation rapide) que de s'acquitter d'un devoir de conservation des oeuvres elles-mêmes, ce qui nécessite, pour bon nombre d'entre elles, leur transfert sur d'autres supports.

- En second lieu, il n'existe aucun rapport entre la propriété matérielle d'une oeuvre ou d'un support (fût-il " original ") de cette oeuvre et les droits de propriété intellectuelle sur cette oeuvre. Le propriétaire d'un manuscrit ne peut s'en faire l'éditeur, non plus que le propriétaire d'une vidéocassette ne peut en faire une diffusion publique, en commercialiser des reproductions ou en autoriser l'exploitation par un tiers. Symétriquement, le titulaire des droits d'exploitation d'une oeuvre, qu'elle soit plastique, littéraire ou audiovisuelle, n'a pas besoin de détenir l'original ou un exemplaire de cette oeuvre pour exercer ses droits. L'INA pourrait donc garder ses prérogatives de titulaire des droits d'exploitation de certains programmes même s'il n'en détenait aucun exemplaire. Mais, comme on l'a déjà souligné, il peut être pleinement rassuré : personne ne peut lui reprendre les archives dont il est dépositaire.

* Au paragraphe III , l'Assemblée nationale a adopté un amendement du gouvernement tendant à permettre à l'INA de recourir à l'arbitrage sans avoir à recourir pour cela à la procédure d'autorisation par décret prévue au deuxième alinéa de l'article 2060 du code civil.

Cette disposition, dont il ne faut sans doute pas exagérer l'utilité, aurait mieux sa place au dernier paragraphe de l'article qu'à la suite de dispositions permettant à l'INA de passer des conventions pour l'exploitation d'archives audiovisuelles, d'acquérir des droits d'exploitation ou de recevoir des dons et legs.

* Le paragraphe V de l'article, relatif au rôle de l'INA en matière de formation et de recherche, a été rétabli par l'Assemblée nationale dans son texte de première lecture, auquel le Sénat avait préféré le texte initial du projet de loi. Cependant, le gouvernement ayant accepté cet amendement, votre commission n'a aucune raison de se substituer à lui dans la défense de son propre texte, et ne proposera donc pas au Sénat de rétablir une nouvelle fois le libellé du projet initial.

* Enfin, au paragraphe VI , l'Assemblée nationale, en adoptant contre l'avis du gouvernement un amendement présenté par M. Noël Mamère et plusieurs de ses collègues, a soumis à " l'avis consultatif " du CSA le cahier des charges de l'INA. Cette précision étant évidemment sans objet, mais dépourvue d'inconvénients sérieux, votre rapporteur laissera au gouvernement, s'il le souhaite, le soin de proposer au Sénat de la supprimer.

Position de la commission

Au bénéfice des observations qui précèdent, votre commission a adopté à cet article six amendements tendant à :

• rétablir dans le texte du Sénat le paragraphe I et le paragraphe II de l'article ;

• réaliser au paragraphe II une coordination oubliée ;

• transférer au dernier paragraphe de l'article la mention du droit de l'INA de recourir à l'arbitrage.

Article 5 bis A
(article L.321-5 et L.321-13 (nouveau) du code de la propriété intellectuelle)

Contrôle des comptes et de la gestion des sociétés de perception
et de répartition des droits (SPRD)

•  Cet article résulte d'un amendement présenté par M. Michel Charasse et les membres du groupe socialiste et apparentés, adopté par le Sénat en première lecture et qui avait pour objet de soumettre au contrôle de la Cour des comptes les sociétés de perception et de répartition des droits d'auteur et des droits voisins (SPRD).

A cet effet, le paragraphe I de l'article tendait à insérer dans le code de la propriété intellectuelle un article L.321-13 (nouveau) prévoyant que la Cour des comptes pouvait contrôler les comptes et la gestion des SPRD ainsi que de leurs filiales et des organismes qui en dépendent, et son paragraphe II un article 111-8-3 (nouveau) ayant même libellé dans le code des juridictions financières.

L'Assemblée nationale a exprimé, comme le Sénat, le souci d'assurer, selon l'expression de M. Didier Mathus, rapporteur, " un légitime progrès dans la transparence " des comptes des SPRD. Cette position commune des deux assemblées rejoint d'ailleurs également, il convient de le souligner, les conclusions du rapport de la mission d'évaluation des sociétés de perception et de répartition des droits conduite depuis octobre 1998 par Mme Francine Mariani-Ducray, chef du service de l'inspection générale de l'administration des affaires culturelles, rapport dont la diffusion sur Internet a coïncidé avec le débat à l'Assemblée nationale.

L'Assemblée nationale a cependant écarté la solution retenue par le Sénat et proposé un autre dispositif, fondé d'une part sur un renforcement du droit à l'information des associés des SPRD et, d'autre part, sur la mise en place d'une commission de contrôle ad hoc .

a) Le renforcement du droit à l'information des associés

La loi de 1985 a défini un régime d'information des associés des SPRD dérogatoire aux dispositions applicables en la matière aux sociétés civiles, prévues par l'article 1855 du code civil.

Inspiré des dispositions de l'article 168 de la loi de 1966 sur les sociétés commerciales, relatif à l'information des " petits " actionnaires des sociétés par action, ce régime dérogatoire est défini par l'article L. 321-5 du code de la propriété intellectuelle.

Il donne droit à tout associé d'une SPRD, " dans des conditions et délais déterminés par décret ", d'obtenir communication :

" 1° des comptes annuels et de la liste des administrateurs ;

" 2° des rapports du conseil d'administration et des commissaires aux comptes qui seront soumis à l'assemblée ;

" 3° le cas échéant, du texte et de l'exposé des motifs des résolutions proposées, ainsi que des renseignements concernant les candidats au conseil d'administration ;

" Du montant global, certifié exact par les commissaires aux comptes, des rémunérations versées aux personnes les mieux rémunérées, le nombre de ces personnes étant de dix ou de cinq selon que l'effectif excède ou non 200 salariés. "


Comme le souligne le rapport de la mission Mariani-Ducray, ce dispositif ne semble pas à la hauteur des exigences légitimes que les associés et les ayants droit pourraient avoir vis-à-vis des SPRD.

C'est pourquoi, tout en notant que l'application -à compter de l'exercice 1998- du décret n° 98-1040 du 18 novembre 1998, qui rend obligatoire l'établissement d'un certain nombre de tableaux relatifs à la gestion financière des SPRD, devrait remédier en partie aux lacunes et insuffisances qu'elle a relevé dans la présentation de cette information, la mission propose de " donner aux associés et aux ayants droit les mêmes pouvoirs d'information et de contrôle des SPRD que ceux conférés par l'article 1855 du code civil aux associés des sociétés civiles de droit commun ".

Une proposition analogue, mais limitée aux associés des SPRD, avait été formulée en 1997 par les auteurs de l'audit sur ADAMI, Mme Anne Bolliet, inspecteur général des finances, et M. Francis Beck, inspecteur de l'administration des Affaires culturelles, qui avaient souligné qu'il était " indispensable d'améliorer de façon significative l'information des associés et leurs possibilités effectives de contrôle des SPRD. "

L'Assemblée nationale a eu la même idée : le paragraphe I de la rédaction qu'elle a adoptée pour l'article 5 bis A prévoit en effet de compléter l'article L. 321-5 par un alinéa prévoyant que les sociétés de perception et de répartition des droits sont soumises " aux obligations portées à l'article 1855 du code civil , dans le respect des règles de confidentialité relatives aux informations concernant chaque associé ".

Rappelons que l'article 1855 du code civil donne " au moins une fois par an " (sauf dispositions statutaires plus favorables), le droit aux associés des sociétés civiles d'obtenir communication des livres et documents sociaux et " de poser par écrit " au gérant des questions auxquelles il doit être répondu par écrit dans le délai d'un mois.

L'article 48 du décret 78-704 du 3 juillet 1978 précise qu'en application de ces dispositions, chaque associé peut prendre connaissance et prendre copie de " tout document établi par la société ou reçu par elle ", et qu'il peut, dans l'exercice de ces droits, bénéficier de l'assistance d'un expert.

Comme le relève le rapport Mariani-Ducray, cette application du droit commun donnerait aux associés un accès à tous les livres et documents de gestion et donc une capacité d'information nettement plus étendue que celle prévue par l'actuel article L. 321-5 du CPI.

Cette proposition a cependant été critiquée par certains intervenants dans le débat à l'assemblée, et par les SPRD :

- le principal argument qui lui est opposé réside dans le risque de paralysie qui en résulterait pour les SPRD, compte tenu du nombre de leurs associés : cet argument est d'ailleurs celui qui avait motivé, en 1985, le choix du régime dérogatoire de l'actuel article L. 321-5 du CPI.

Il semble qu'au vu de l'expérience de l'application de l'article L. 321-5, on puisse en relativiser la portée. Les demandes adressées sur le fondement de cet article aux sociétés sont en effet fort peu nombreuses. A l'ADAMI, qui compte 15.000 associés, elle n'atteignent pas le nombre de 10 par an -même après la réalisation de l'audit de 1997 dont on aurait pu penser qu'il provoquerait un intérêt accru des associés pour la gestion de leur société- et le nombre des demandes d'envoi des documents qui doivent être communiqués avant l'assemblée portant sur la reddition des comptes est également inférieur à la dizaine. On constate d'autre part que les taux de présence aux assemblées des SPRD sont très faibles.

Il n'y a aucune raison de penser que l'extension du pouvoir d'information des associés changera du tout au tout le comportement qui est le leur depuis 15 ans.

Au demeurant, avant la loi de 1985, les principales sociétés de gestion de droit étaient déjà des sociétés civiles qui comptaient de très nombreux associés (50.000 pour la SACEM) et il ne semble pas que l'application de l'article 1855 du code civil ait jamais paralysé leur fonctionnement.

- Les sociétés de droits invoquent aussi le fait qu'elles sont désormais en concurrence au sein de l'Union européenne -une concurrence dont on permettra à votre rapporteur d'observer qu'elle est sans doute moins âpre que dans d'autres secteurs- et contraintes dès lors à élaborer des stratégies confidentielles, confidentialité qui s'applique également aux rapports avec leurs usagers. Cette objection est quant à elle plus difficilement recevable, tout particulièrement d'ailleurs en ce qui concerne les relations des sociétés et de " leurs usagers " : il convient en effet de rappeler que ces " usagers " sont les utilisateurs des oeuvres et des prestations des associés, qui sont tout de même fondés à savoir comment et dans quelles conditions la société négocie leurs droits.

- Enfin, les sociétés font valoir la confidentialité des rémunérations versées individuellement à chaque associé. Cet argument est quant à lui tout à fait admissible et l'Assemblée en a d'ailleurs tenu compte, même si c'est dans une rédaction sans doute perfectible.

En tout cas, et même, comme le note le rapport Mariani-Ducray, si l'application de l'article 1855 devait représenter une charge supplémentaire pour les SPRD, il paraît légitime de donner aux associés des SPRD des pouvoirs plus importants que ceux concédés aux petits actionnaires des sociétés par actions, pour plusieurs raisons :

- les SPRD sont, il convient de le rappeler, des sociétés civiles et donc des sociétés à responsabilité illimitée ;

- la situation de leurs associés n'a rien à voir, comme le notait l'audit sur l'ADAMI, avec celle de l'actionnaire d'une SA : si ce dernier désapprouve la gestion de la société et en redoute les conséquences, il peut céder ses actions et placer ailleurs son épargne.

En revanche, l'associé d'une SPRD en situation de monopole peut certes se retirer de la société civile -sauf à y perdre une partie de ses rémunérations- mais il restera un ayant droit ; il ne peut ni confier la gestion de ses droits à une autre société, ni les gérer tous individuellement, ne serait-ce que parce qu'une partie de ceux-ci sont soumis à une obligation de gestion collective.

- Les SPRD, comme le notait également l'audit sur l'ADAMI, ne perçoivent ni ne répartissent pour leur propre compte : elles sont, au sens de l'article 2236 du code civil, le " détenteur précaire " des rémunérations dues aux titulaires de droits. Cette situation particulière donne aussi à leurs associés un droit particulier à contrôler leur gestion.

On peut donc approuver l'Assemblée nationale d'avoir suivi, par anticipation, les propositions du rapport Mariani-Ducray.

On peut s'étonner cependant, de la méthode suivie, qui consiste à superposer le régime de droit commun de l'article 1855 du code civil au régime dérogatoire de l'article L. 321-5 du code de la propriété intellectuelle.

Il semblerait plus logique de substituer l'un à l'autre.

Par ailleurs, il est à souhaiter que soit également retenue une autre suggestion du rapport Mariani-Ducray qui n'est pas de nature législative : celle qui consiste à prévoir l'obligation pour les SPRD de diffuser à leurs associés un certain nombre de documents " en ligne ". Cette proposition serait notamment fort utile pour leur communiquer de manière peu coûteuse les documents visés à l'article 41 du décret du 3 juillet 1978 qu'ils n'ont actuellement que le droit de demander avant la tenue des assemblées portant sur la reddition des comptes (article R. 321-6 du CIP), par dérogation aux dispositions du décret de 1978 qui en prévoient, en application de l'article 1856 du code civil, l'envoi automatique à tous les associés.

b) La création d'une commission de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits

Le paragraphe II du texte adopté par l'Assemblée nationale prévoit la création d'une " commission de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits ", dont la compétence s'étendrait également aux filiales de ces sociétés et aux organismes qu'elles contrôlent.

La composition et les compétences de cette commission paraissent avoir été un peu hâtivement définies.

* la composition de la commission :

La commission se composerait de neuf membres nommés par décret : un membre de la Cour des comptes, qui en serait le président, un membre du Conseil d'Etat, un membre de l'Inspection générale de l'administration des affaires culturelles, deux membres de l'Inspection générale des finances et quatre personnalités qualifiées dans le domaine de la propriété littéraire et artistique désignées par le ministre chargé de la culture.

Cette composition semble mal adaptée à une mission centrée sur un contrôle comptable et de gestion : la présence de quatre " personnalités qualifiées dans le domaine de la propriété littéraire et artistique " paraît en particulier assez peu justifiée.

En outre, si la présence d'un représentant du Conseil d'Etat est en revanche opportune, il serait également souhaitable de prévoir la participation à la commission d'un magistrat de l'ordre judiciaire.

On peut également s'étonner de la place prépondérante donnée aux représentants du ministère de la culture, qui désignerait cinq des neuf membres de la commission. Le code de la propriété intellectuelle donne en effet déjà au ministère de la culture certains pouvoirs de contrôle sur les SPRD, dont il a d'ailleurs fort peu usé. Il paraît donc peu indiqué de dupliquer ce contrôle direct par un contrôle indirect, surtout s'il devait être exercé dans les mêmes conditions.

* Le texte de l'Assemblée nationale est aussi très léger en ce qui concerne les moyens juridiques donnés à la commission.

Il est prévu qu'elle reçoive " systématiquement " communication des documents prévus par l'article L. 321-5 et qu'elle puisse recueillir " sur pièces et sur place " tout " renseignement " relatif à la perception et à la répartition des droits ainsi qu'à la gestion des sociétés.

En somme elle disposerait d'un " droit d'information " dont il n'est même pas sûr qu'il serait équivalent à celui que le paragraphe I de l'article propose de donner aux associés. Ce qui ne paraît pas très sérieux.

Quant aux moyens de fonctionnement , notamment en personnel, dont pourra disposer la commission, il n'en est même pas question.

* Enfin, il est précisé, ce qui en revanche est une bonne idée, que la commission serait chargée de présenter un rapport annuel au Parlement, au ministre chargé de la culture et aux assemblées générales des SPRD.

• Au total, la position prise par l'Assemblée nationale peut surprendre à un double titre . On peut s'étonner, d'une part, de la manière expéditive dont l'Assemblée nationale a rejeté d'emblée la solution proposée par le Sénat, qui n'avait pourtant rien d'aberrant, et qui aurait sans doute mérité un débat plus approfondi et plus serein. On peut regretter, d'autre part, qu'elle n'ait pas présenté à cette proposition une alternative plus crédible.

* Sur le premier point, les arguments invoqués, lors de la discussion en commission et pendant le débat en séance publique, contre la compétence de la Cour des comptes paraissent, c'est le moins qu'on puisse dire, un peu sommaires : le contrôle de la Cour des comptes sur les SPRD aboutirait " à une étatisation de l'économie " ou serait " inconstitutionnel " ; la Cour des comptes n'aurait mission de contrôler que " des structures percevant des fonds publics ", et non " des sociétés de droit privé gérant des fonds privés " ; enfin, le contrôle de la Cour des comptes remettrait en cause l'indépendance des SPRD vis-à-vis de l'Etat...

On rappellera pourtant :

- que la loi a déjà étendu le contrôle de la Cour des comptes à de nombreux organismes de droits privés gérant des fonds privés, en dehors de ceux qui sont soumis à son contrôle pour la seule raison qu'ils perçoivent de subventions publiques. Ainsi la Cour des comptes contrôle-t-elle :

- l'emploi des ressources collectées auprès du public, dans le cadre des campagnes menées à l'échelon national, par les associations caritatives et autres organismes soutenant une cause " scientifique, sociale, familiale, humanitaire, philanthropique, éducative, sportive ou culturelle " 3( * ) , ce contrôle pouvant s'étendre aux organismes qui reçoivent des organismes collecteurs une partie des ressources ainsi collectées (article L. 111-8 du code des juridictions financières) ;

- la Fondation du patrimoine, qui est une personne morale de droit privé financée par des fonds privés (article L. 111-8-1 du code des juridictions financières) ;

- l'Union d'économie sociale du logement, qui est une société anonyme coopérative à capital variable (article L. 111-8-2 du code des juridictions financières) réunissant les organismes chargés de la collecte et de la gestion de la participation des employeurs à l'effort de construction.

- que le contrôle de la Cour des comptes (ou des cours régionales des comptes) est évidemment sans influence aucune sur le statut juridique et " l'indépendance vis-à-vis de l'Etat " des innombrables sociétés et organismes privés que les juridictions financières peuvent être amenées à contrôler, soit en application des dispositions ci-dessus rappelées, soit parce que ces organismes ont reçu une subvention publique.

On notera d'ailleurs que le Conseil constitutionnel a jugé que le contrôle de la Cour des comptes sur les associations faisant appel à la générosité publique, " qui n'a d'autre objet que de permettre aux adhérents de ces organismes, ainsi qu'aux donateurs, d'être en mesure de s'assurer de la conformité des dépenses engagées par l'organisme aux objectifs poursuivis par l'appel à la générosité publique ", ne constituait pas une entrave à la liberté d'association, et ne portait " atteinte à aucun autre principe non plus qu'à aucune règle de valeur constitutionnelle ".

Il n'y aurait donc certainement rien d'inconstitutionnel, ni non plus rien de choquant, à étendre le contrôle de la Cour des comptes aux SPRD.

La loi les a en effet dotées de prérogatives très importantes, et leur a notamment conféré un monopole de droit ou de fait qui oblige les titulaires de droits à avoir recours à elles pour obtenir rémunération de ces droits, et les " utilisateurs " d'oeuvres ou de prestations protégées pour avoir l'autorisation de les utiliser. On peut discuter à l'infini du point de savoir si leur mission doit ou non être qualifiée de mission " de service public " : on ne peut en tout cas nier que ce soit une mission d'intérêt général, qui revêt une énorme importance sociale, économique et culturelle, ni qu'il soit également d'intérêt général que cette mission soit exécutée d'une manière qui ne puisse soulever aucune contestation. Il y a donc au moins autant de raisons de soumettre les sociétés de droits à la Cour des comptes que les associations caritatives ou la Fondation du patrimoine.

* Pour autant, on peut tout à fait concevoir que le contrôle des SPRD ne soit pas assuré par la Cour des comptes mais, comme le propose l'Assemblée nationale, par un organe de contrôle spécifique.

Cela peut même présenter des avantages, car le contrôle pourrait alors être plus suivi, plus régulier, plus " qualitatif ".

Il pourrait permettre, au delà d'un contrôle de régularité comptable et financière, une appréciation de la stratégie des SPRD, de leur action en matière de défense des intérêts de leurs associés et des droits de propriété littéraire et artistique, car, comme le note le rapport Mariani-Ducray, elles ont dégagé, dans ces domaines cruciaux pour l'avenir du droit d'auteur, " des marges d'initiative qui ne relèvent plus du contrôle classique de leurs mandants " : " l'argument de " la défense de vos droits " est toujours tenu pour opérant et les modalités techniques de cette défense pour une besogne dont les sociétés déchargeraient en quelque sorte les associés ".

Une commission " ad hoc " pourrait aussi se pencher sur la mission, la compétence et les statuts des SPRD, sur leurs relations avec les titulaires de droits comme avec les utilisateurs de leur répertoire...

Mais encore faut-il que cette solution alternative soit sérieuse et crédible, ce qui n'est pas tout à fait le cas, il faut bien le dire, de la commission dont l'Assemblée nationale propose la mise en place.

Créer un organe de contrôle dont ni la composition, ni les pouvoirs, ni les moyens ne seraient à la hauteur de sa mission serait en effet un remède pire que le mal, et les ayants droit ou les utilisateurs d'oeuvres protégées pourraient légitimement reprocher au législateur de leur avoir ainsi donné une fausse assurance.

Position de la commission

Même s'il ne paraît pas en l'état satisfaisant, le texte adopté par l'Assemblée nationale a le mérite d'ouvrir la perspective d'un choix entre deux options qui ont chacune des avantages et des inconvénients :

- le recours à un contrôle des SPRD par la Cour des comptes présente l'avantage d'apporter une solution immédiatement opérationnelle au problème posé. Il représente aussi un choix " incontestable " compte tenu du statut et de l'autorité de cette prestigieuse institution. Mais il ne serait évidemment pas possible à la Cour de contrôler de manière régulière, et encore moins permanente, l'ensemble des sociétés de gestion, et il n'entre pas non plus dans sa mission de réfléchir sur l'évolution du rôle, de la mission, des statuts des SPRD,

- En revanche, un organe spécialisé, au-delà de son rôle de contrôle, et d'information des ayants droit et des pouvoirs publics, pourrait devenir une " force de proposition " et un véritable partenaire pour les SPRD, en même temps qu'il pourrait contribuer à créer des relations nouvelles entre les sociétés, les titulaires de droits et le secteur en pleine évolution des " industries et services " culturels. Cependant, il faut aussi tenir compte du fait que la création d'une instance nouvelle représente toujours un pari et que l'on ne peut être assuré d'avance qu'elle acquerra, et dans quels délais, l'autorité nécessaire à sa mission.

Quoi qu'il en soit, deux options apparaissant possibles, votre commission estime que le législateur doit être en mesure d'effectuer entre elles un véritable choix.

C'est pourquoi elle a adopté un amendement susceptible d'offrir une alternative crédible à la compétence de la Cour des comptes.

Le dispositif de cet amendement conserve la même architecture que celui adopté par l'Assemblée nationale mais propose une nouvelle rédaction de l'article 5 bis A.

* Le paragraphe I propose, afin de renforcer le droit à l'information des associés, une nouvelle rédaction de l'article L. 321-5 CPI prévoyant l'application de l'article 1855 du code civil aux SPRD, sous réserve de l'interdiction de communication à un associé du montant des rémunérations perçues par tout autre associé ou ayant droit.

* Le paragraphe II prévoit la constitution d'une commission dont la composition et les pouvoirs lui permettraient d'exercer un véritable contrôle sur les SPRD, leurs filiales et les organismes qu'elles contrôlent :

- son effectif serait ramené à sept membres, et elle serait uniquement composée de magistrats et de représentants des grands corps de contrôle : deux conseillers-maîtres à la Cour des comptes, dont le président de la commission, un conseiller d'Etat, un conseiller à la Cour de Cassation, un inspecteur général des finances et deux inspecteurs généraux de l'administration générale des affaires culturelles.

La commission pourrait se faire assister de rapporteurs, bénéficier de la mise à disposition de fonctionnaires et recourir à des experts.

- Elle serait dotée de pouvoirs d'investigation adaptés à sa mission, à laquelle les organismes contrôlés seraient obligés de prêter leur concours, ainsi que les commissaires aux comptes des sociétés centrales, déliés à son égard du secret professionnel.

- Elle pourrait effectuer ses contrôles sur pièces et sur place. Enfin, toute entrave au contrôle de la commission serait passible d'un an d'emprisonnement et de 100.000 F d'amende.

Article 6
(article 53 de la loi du 30 septembre 1986)

Contrats d'objectifs et de moyens,
financement des organismes de l'audiovisuel public

Le Sénat avait modifié cet article :

- pour prévoir la signature par le ministre chargé de la communication et le ministre chargé des finances des contrats d'objectifs et de moyens conclus entre l'Etat et les organismes de l'audiovisuel public ;

- pour préciser que les contrats d'objectifs et de moyens devaient respecter les missions de service public définies à l'article 43-7 nouveau de la loi de 1986 ;

- pour que figurent dans les mêmes contrats des indicateurs qualificatifs d'évaluation des attentes du public ;

- pour étendre à l'ensemble des présidents des organismes publics l'obligation de présenter chaque année un rapport sur l'exécution des contrats devant la commission chargée des affaires culturelles de chaque assemblée ;

- pour préciser que le rapport sur la situation et la gestion des organismes du secteur public annexé au projet de loi de finances fournira les informations figurant actuellement dans le " jaune budgétaire " consacré à l'audiovisuel public ;

- pour prévoir expressément la communication de ce rapport au CSA ;

- pour refuser l'affectation exclusive des remboursements d'exonérations aux dépenses de programmes et d'équipement.

L'Assemblée nationale a apporté à cet article plusieurs modifications afin :

- de revenir au texte adopté par elle en première lecture en ce qui concerne les contrats d'objectifs et de moyens, la présentation d'un rapport annuel d'exécution des contrats par le seul président de France Télévision aux commissions chargées des affaires culturelles, le contenu allégé du " jaune budgétaire ", la répartition intégrale de la redevance perçue par France Télévision entre ses filiales de service public, l'affectation intégrale des remboursements d'exonérations aux dépenses de programmes ou de développement des affectataires ;

- d'étendre aux filiales qui seront créées pour gérer des chaînes numériques de service public les dispositions de cet article ;

- d'autoriser les redevables à payer la redevance de façon fractionnée.

Position de la commission

Toujours convaincue de l'utilité des modifications apportées par le Sénat à cet article en première lecture, votre commission a adopté cinq amendements rétablissant cette rédaction (en conservant toutefois la sympathique disposition insérée par l'Assemblée nationale afin de prévoir l'affectation intégrale des remboursements d'exonérations aux dépenses de programme ou de développement).

Votre commission juge en particulier indispensable que le ministre chargé des finances soit engagé par le contenu des contrats d'objectifs et de moyens. En l'absence de cette signature, les contrats pourraient être plus facilement remis en cause à l'occasion de la procédure budgétaire.

Votre commission tient aussi à ce que le " jaune budgétaire " précise pour chaque société nationale de programme les prévisions de dépenses et de recettes publiques et propres, faute de quoi la création du groupe France Télévision aboutira à la marginalisation du contrôle parlementaire sur l'évolution de la télévision publique. Si l'on peut comprendre le souhait des dirigeants de la holding de disposer d'une assez grande latitude dans la gestion du groupe France Télévision, la répartition des ressources publiques entre les filiales traduit, compte tenu des missions spécifiques assignées à chacune, des choix politiques sur lesquels il appartient au Parlement de se prononcer dans le cadre de la procédure budgétaire.

Votre commission a par ailleurs adopté trois amendements de coordination supprimant l'application des dispositions de cet article aux filiales numériques de service public de France Télévision.

Elle a enfin adopté un amendement maintenant avec une insertion différente et quelques modifications rédactionnelles la disposition prévoyant la possibilité d'un paiement fractionné de la redevance.

Article 7

(articles 18, 24, 26, 34-1, 48, 48-2, 48-3, 48-9, 48-10, 51, 56, 62, 73
de la loi du 30 septembre 1986,
article L. 4433-28 du code des collectivités territoriales
et annexe II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983)

Coordination

Le Sénat avait adopté plusieurs amendements de coordination à cet article.

L'Assemblée nationale a supprimé la disposition relative à l'affectation des fréquences hertziennes terrestres utilisées par les sociétés nationales de programmes, pour en inscrire la substance à l'article 20 A.

Elle a exempté les programmes des chaînes publiques et les programmes des services autorisés de la condition de reprise intégrale et simultanée, pour la distribution par câble, dans les DOM, les TOM, les collectivités territoriales d'outre-mer et la Nouvelle-Calédonie, sans passer avec le CSA la convention prévue à l'article 34-1 de la loi de 1986.

Elle a enfin inséré trois articles additionnels après l'article 28 bis, qui seront examinés ci-dessous.

Position de la commission

Votre commission a adopté à cet article un amendement de coordination.

Article 8

Dispositions transitoires

Le Sénat avait adopté cet article avec un amendement de coordination.

L'Assemblée nationale a adopté une nouvelle rédaction qui fixe les modalités de mise en place du groupe France Télévision en ce qui concerne le délai de nomination du président de la holding et de publication de ses statuts (trois mois à compter de la publication de la loi) ; le délai de modification des statuts de France 2, France 3 et La Cinquième (trois mois) ; la date de cessation des mandats des membres des conseils d'administration de ces sociétés ; la capacité délibératoire des nouveaux conseils d'administration à partir de la désignation de deux tiers de leurs membres ; les transferts de biens, droits et obligations par France 2, France 3 et La Cinquième à France Télévision.

Position de la commission

Votre commission a adopté cet article sans modification.

TITRE II

TRANSPOSITION DE DIVERSES DISPOSITIONS
DE LA DIRECTIVE 89/552/CEE DU 3 OCTOBRE 1989
MODIFIÉE PAR LA DIRECTIVE 97/36/CE DU 30 JUIN 1997


Article 9
(article 15 de la loi du 30 septembre 1986)

Protection des mineurs vis-à-vis de programmes ou de messages
susceptibles de nuire à leur épanouissement
et respect de la dignité de la personne

Le Sénat avait adopté une nouvelle rédaction de cet article afin de mieux assurer sa conformité aux articles 22 et 22 bis de la directive 89/552/CEE du 3 octobre 1989 modifiée, qu'il transpose dans la loi du 30 septembre 1986.

L'Assemblée nationale a rétabli le texte qu'elle avait adopté en première lecture.

Position de la commission

Votre commission continue de croire que le premier souci du législateur doit être, en matière de transposition d'une directive, de veiller au respect intégral des engagements pris au sein des institutions européennes.

Elle constate que la fidélité du texte de l'Assemblée nationale aux articles 22 et 22 bis de la directive reste douteuse à maints égards. En effet, en confiant au CSA une mission de veille alors que la directive prévoit que " les Etats membres prennent des mesures " et " veillent à ce que ", le projet de loi se situe en-deçà de obligations assumées au sein de conseil de l'Union européenne.

Votre commission rappelle à cet égard que, dans le cadre des missions de veille que la loi de 1986 lui attribue, le CSA dispose d'un pouvoir essentiellement incitatif qui ne peut que difficilement déboucher sur la mise en oeuvre de la procédure de sanction à l'égard des diffuseurs rétifs.

Par ailleurs, le premier alinéa de l'article 22 de la directive invite les Etats membres à prohiber la diffusion d'émissions de télévision susceptibles de nuire gravement à l'épanouissement des mineurs, " notamment des programmes comprennent des scènes de pornographie et de violence gratuite ". Or, le troisième alinéa du texte proposé pour l'article 15 de la loi de 1986 ne mentionne pas cette précision.

Votre commission a donc adopté à cet article un amendement rétablissant le texte adopté par le Sénat.

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