b) L'allocation personnalisée d'autonomie : une menace supplémentaire

Lors de sa conférence de presse le 13 février 2001, la ministre de l'Emploi et de la Solidarité a annoncé la mise en place d'une allocation personnalisée d'autonomie (APA) destinée à se substituer à l'actuelle prestation spécifique dépendance (PSD).

Le document remis à la presse le 13 février prévoit un financement « de 5 milliards de francs environ par l'affectation d'un point de CSG actuellement affectée à la sécurité sociale (FSV) » 84 ( * ) .

Cette mesure nouvelle, dont le financement est dénoncé comme « un détournement de l'objet social du FSV 85 ( * ) », va ponctionner de 5 milliards de francs en 2002 les recettes du FSV.

Ce prélèvement de CSG au profit du nouveau fonds « ad hoc » créé pour centraliser les ressources destinées à financer l'APA, augmentera à un rythme de 2 % par an 86 ( * ) .

Par ailleurs, le Gouvernement reconnaît lui-même 87 ( * ) que « le coût en régime de croisière de la prestation devrait atteindre environ 23 milliards de francs », soit 4 à 5 milliards de plus que ce que le schéma financier actuel prévoit.

Il ajoute qu'« un bilan financier sera effectué fin 2003 pour adapter, le cas échéant, les modalités de financement les années suivantes en fonction de l'évolution des dépenses ».

Comme la délégation CGT-FO le dénonce avec vigueur « les perspectives de financement au-delà de 2003 pourraient rendre les régimes de retraite et le FSV premiers contributeurs du financement de l'allocation. » 88 ( * )

Etant donné les perspectives des régimes de retraite, en réalité seul le FSV serait en mesure d'assumer le financement de l'APA pour une nouvelle tranche de 5 milliards de francs.

Dans une note en date du 2 février 2001, la Direction de la Prévision s'inquiétait de la propension du Gouvernement à affecter la même ressource à plusieurs dépenses, en constatant que les « excédents prévisionnels du FSV et de la C3S qui seront effectivement affectés au fonds de réserve (...) semblent gagés en grande partie ».

Dans le dossier de presse précité, la ministre de l'Emploi et de la Solidarité justifie sa ponction sur le FSV en ces termes :

« L'affectation d'une partie des ressources du FSV au financement de l'APA obéit à la prise en compte de l'évolution des besoins sociaux : le FSV a été créé pour assurer le financement des avantages de retraite relevant de la solidarité. Ces derniers sont aujourd'hui peu dynamiques, du fait de l'amélioration de la situation des personnes âgées. Ainsi, chaque année, le niveau des allocataires du minimum vieillesse diminue. »

Cette justification est identique à l'argument avancé par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité 89 ( * ) , afin de rassurer sur la capacité du FSV à enregistrer les excédents nécessaires à l'alimentation du fonds de réserve.

« Les excédents du FSV, qui constituent la première source de financement du fonds de réserve des retraites, résultent des dynamiques structurellement différentes des recettes (CSG pour l'essentiel, qui bénéficie de la croissance économique) et des dépenses (notamment minimum vieillesse dont le nombre d'allocataires diminue régulièrement) ».

Si le FSV est amené à dégager des excédents du fait de la diminution du nombre des allocataires du minimum vieillesse 90 ( * ) , ces excédents ne sont toutefois pas multipliables à l'infini, contrairement à ce que suggère la rhétorique du ministère de l'Emploi et de la Solidarité.

Le manque à gagner des intérêts financiers

Le 21 janvier 2000, une note de la Direction de la Prévision indique que « le FSV participe à la hauteur de 5,5 milliards de francs à la RTT en 2000 et sa contribution atteint 12 milliards de francs en 2002. A partir de cette date, il reverse en effet l'ensemble de ses droits alcools. A l'horizon 2020, le FSV a donc contribué pour 244 milliards de francs au financement de la RTT, montant cumulé hors intérêt ».

S'agissant d'un fonds dont l'objet même est d'accumuler des produits financiers pendant une période d'au moins vingt ans, votre rapporteur a souhaité estimer le manque à gagner en de tels produits financiers qu'entraîne la disparition des flux des ressources qui auraient dû abonder le fonds.

Plusieurs méthodes sont techniquement possibles pour calculer ces produits financiers sur la période 2000-2020.

Mais, afin d'éviter toute contestation, votre rapporteur retiendra ici un calcul très simple qui s'appuie sur les projections du Gouvernement.

Dans son annonce du 21 mars 2000, le Premier ministre propose un plan de financement fondé sur 670 milliards de francs qui doivent générer eux même 330 milliards de produits financiers.

Selon cette hypothèse fondée sur un taux d'intérêt de 4 %, les flux de ressources génèrent un montant de produits financiers égal à la moitié de ces flux.

Ainsi, les sommes prélevées sur les excédents du fonds de solidarité vieillesse destinés au fonds de réserve auraient pu générer, sur le modèle du plan de financement Gouvernemental, des montants de cet ordre :

en milliards de francs

Flux 2000-2020 Produits financiers 2020

Trente-cinq heures - 411 - 205

APA - 115 - 57

AGIRC-ARRCO - 14 - 7

TOTAL - 540 - 269

L'ampleur des masses financières concernées soit, au total près de 800 milliards de francs, montre l'impact considérable des décisions prises aujourd'hui par le Gouvernement.

* 84 Document de presse, présentation de l'allocation personnalisée d'autonomie.

* 85 Conseil d'administration de la CNAV, 1 er mars 2001, délégation des employeurs.

* 86 Même hypothèse de croissance de CSG selon le FSV.

* 87 Dossier de presse APA, 13 février 2001.

* 88 Conseil d'administration de la CNAVTS, 1 er mars 2001.

* 89 Ministère de l'Emploi et de la Solidarité, communiqué de presse du 26 mars 2001.

* 90 Cf. II-C-1.b.

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