III. CONTRAT DE CONCESSION

Contrat de concession : nouvelles dispositions

L'article 720 du code de procédure pénale enjoint à l'administration pénitentiaire de mettre en oeuvre les moyens permettant de procurer une activité professionnelle aux personnes détenues qui en font la demande.

La possibilité ainsi offerte aux détenus de travailler participe de la mission de réinsertion sociale et professionnelle confiée à l'administration pénitentiaire, qui s'efforce de les placer en situation proche des conditions habituelles d'exercice de ces activités, leur permettant ainsi d'acquérir une expérience ou une qualification professionnelle.

Le contrat de concession autorise toute personne physique ou morale de droit privé ou public à faire réaliser par des détenus à l'intérieur ou l'extérieur des établissements des opérations de production de biens ou de services.

Ce contrat décrit l'ensemble des relations qui régissent les rapports entre le concessionnaire et l'administration pénitentiaire : conditions de mise à disposition éventuelle de locaux, organisation des activités, règles de rémunérations et de protection sociale des détenus.

La réglementation de droit commun relative à l'hygiène et à la sécurité du travail s'applique à ce contrat.

Les présentes clauses et conditions générales sont applicables, sauf dérogation particulière stipulée par écrit, aux concessions conclues pour des activités exercées à l'intérieur des établissements pénitentiaires ainsi qu'à l'extérieur, sans surveillance continue.

Article 1 : qualité du concessionnaire

1.1. Lorsque le concessionnaire est commerçant ou industriel, il fournit à l'administration un extrait de son inscription au registre du commerce et des sociétés délivré depuis moins d'un mois.

Toute modification des mentions portées au registre du commerce et des sociétés devra être portée à la connaissance de l'administration par le concessionnaire.

1.2. En cas de changement de la personne physique ou morale cocontractante, la poursuite de l'exploitation est soumise à l'agrément préalable et écrit de la nouvelle personne morale ou physique par l'administration pénitentiaire.

Article 2 : conditions d'établissement du contrat

2.1. Les contrats de concession envisagés pour une durée inférieure à trois mois ou pour un effectif égal ou inférieur à cinq détenus sont signés par l'entreprise concessionnaire et le chef d'établissement. Les autres contrats sont signés par l'entreprise concessionnaire, le chef d'établissement et selon le cas, le directeur régional ou le chef de la mission outre-mer.

2.2. Le contrat conclu pour des travaux exécutés à l'extérieur de l'établissement pénitentiaire ne peut entrer en vigueur qu'après accord de l'autorité préfectorale lorsque le chantier emploie plus de trois détenus.

Article 3 : durée du contrat de concession

3.1. Le contrat de concession est, sauf clause particulière, conclu pour une durée indéterminée. Il peut prendre fin à tout moment, sous réserve d'un préavis minimum de dénonciation de trois mois de la part du concessionnaire ou de l'administration.

3.2. L'administration se réserve le droit de suspendre la concession sans préavis en cas de situation d'urgence en lien avec l'exercice de ses missions. Les préjudices subis par le concessionnaire du fait d'une telle situation pourront donner lieu à indemnisation. Un dossier sera constitué à cet effet en relation avec les services de la direction régionale, qui fourniront au concessionnaire l'information nécessaire sur ses droits et la procédure à suivre.

Article 4 : locaux et installations

4.1. L'administration met à la disposition du concessionnaire des locaux en rapport avec la nature de l'activité et l'effectif des détenus employés. Sauf indications contraires, la surface des locaux attribués ne peut être modifiée qu'après signature d'un avenant au contrat initial.

4.2. L'administration est responsable de la conformité des locaux mis à la disposition des concessionnaires avec la législation du travail et la réglementation relative à la lutte contre l'incendie dans des conditions conformes aux impératifs de sécurité.

4.3. Le concessionnaire est tenu informé, lors de la signature du contrat, des modalités d'accès aux ateliers pour lui-même ou ses préposés. Le chef d'établissement prend toutes dispositions utiles, en accord avec le concessionnaire, pour s'assurer de la conservation des marchandises, matériel, outillage ou véhicules déposés dans les locaux mis à disposition.

L'article 4 ne s'applique pas aux contrats conclus pour la réalisation de travaux à l'extérieur de l'établissement pénitentiaire.

Article 5 : organisation du travail

5.1. Le concessionnaire est responsable de l'organisation et du suivi de la production.

5.2. Bien que la relation d'emploi établie avec le détenu soit, conformément au code de procédure pénale, exclusive de tout contrat de travail, l'administration et le concessionnaire s'efforceront chacun pour ce qui le concerne d'organiser la production dans les conditions les plus proches de ce qu'elles seraient dans une situation habituelle de travail.

5.3. Le concessionnaire s'engage à mettre en oeuvre l'ensemble des moyens mis à sa disposition, à utiliser de façon optimale les surfaces et à assurer l'emploi effectif des détenus classés pour son activité. Le concessionnaire informe régulièrement le chef d'établissement du plan de charge de l'atelier et de son incidence sur l'effectif employé.

L'administration s'emploie à fournir au concessionnaire l'ensemble des moyens qu'elle s'est engagée à mettre à sa disposition. Le chef d'établissement veille tout particulièrement à ce que l'effectif des détenus au travail ainsi que les horaires de fonctionnement des ateliers soient conformes aux engagements portés aux clauses et conditions particulières du contrat.

Toute difficulté relative aux conditions d'emploi des détenus, ou plus largement au déroulement de l'activité doit être portée à la connaissance du chef d'établissement par le concessionnaire ou ses préposés. Dans tous les cas, le chef d'établissement informe le concessionnaire des suites données.

5.4. Le chef d'établissement et le concessionnaire coopèrent dans la mise en oeuvre des règles d'hygiène et de sécurité du travail.

Les règles générales d'hygiène et de sécurité doivent être communiquées au détenu lors de sa mise à l'emploi ; elles peuvent également être affichées.

Les règles spécifiques à l'activité exercée sur le poste de travail doivent également être communiquées au détenu ; ces règles seront portées à sa connaissance par une fiche de poste élaborée par le concessionnaire et agréée par le chef d'établissement.

Les horaires de travail et les règles d'hygiène et de sécurité seront affichés sur le lieu de travail. Le chef d'établissement veillera à ce que les détenus concernés en prennent connaissance.

Dans le cas où le contrat est conclu pour des travaux réalisés à l'extérieur de l'établissement pénitentiaire, le concessionnaire est seul responsable de l'ensemble de l'organisation et de la mise en oeuvre des mesures décrites à l'article 5.

5.5. L'administration examine les demandes formulées par les concessionnaires en vue de permettre la préparation et l'adaptation des détenus à l'emploi. Le chef d'établissement informe le concessionnaire des suites données à ces projets.

5.6. Le chef d'établissement transmet au concessionnaire un exemplaire du règlement intérieur de l'établissement et l'informe dans les meilleurs délais de toute modification dans l'organisation de l'établissement ayant une incidence sur le déroulement habituel des activités. Il lui propose des solutions compensatoires lorsque ces modifications ont des répercussions sur l'activité de l'entreprise.

5.7. En cas d'empêchement temporaire d'accès des personnels agréés de l'entreprise pour des motifs relevant des missions de l'administration, le chef d'établissement en informe sans délai le représentant de l'entreprise et recherche avec lui les mesures conservatoires qu'il convient de prendre.

Article 6 : dispositions particulières pour la réalisation de travaux à l'extérieur des établissements pénitentiaires

6.1. Un ou plusieurs détenus peuvent être employés à des travaux exécutés à l'extérieur des établissements sans la surveillance continue du personnel pénitentiaire conformément aux dispositions du code de procédure pénale. L'activité des détenus est alors organisée directement par le concessionnaire, signataire du contrat de concession.

6.2. Le chef d'établissement et le concessionnaire déterminent l'ensemble des conditions d'emploi et éventuellement d'hébergement des détenus : la nature et le lieu de l'activité, le mode de transport sur le lieu de travail, les horaires de travail, le lieu d'hébergement et le niveau de rémunération qui devra être précisé dans les dispositions particulières du contrat.

6.3. Le chef d'établissement et le concessionnaire échangent régulièrement leurs informations sur le déroulement de l'activité et sur le respect des obligations particulières relatives à la situation du détenu. En cas d'incident, le concessionnaire avertit le chef d'établissement dans les plus brefs délais.

6.4. Le chef d'établissement ou l'agent désigné à cet effet, s'assure des conditions de déroulement de l'activité ; il détermine avec le concessionnaire les modalités de ce suivi.

Article 7 : taux et paiement des rémunérations

7.1. Fixation et taux de rémunération

Les taux horaires ou journaliers, les tarifs journaliers, les tarifs à la tâche ou à la pièce sont fixés d'un commun accord entre le concessionnaire et le chef d'établissement. Ils sont affichés dans les ateliers. Ces taux sont établis par référence au salaire minimum interprofessionnel de croissance ou aux salaires conventionnels applicables, en fonction du niveau moyen de productivité déterminé après essai.

7.2. Suivi des rémunérations

Après accord définitif sur les tarifs, lorsqu'un écart significatif est observé, le chef d'établissement et le concessionnaire se concertent pour en déterminer la cause et mettre en oeuvre toute mesure utile en vue d'y remédier.

7.3. Etablissement des feuilles de rémunération

Les éléments permettant de déterminer le montant des rémunérations individuelles sont communiqués au chef d'établissement par le concessionnaire. Ils serviront à calculer et à éditer les feuilles de rémunérations qui seront remises aux détenus.

7.4. Versement des rémunérations

Les rémunérations des détenus et les charges sociales correspondantes sont réglées en fin de mois par l'administration qui effectue le reversement des cotisations sociales aux organismes de recouvrement et procède à l'inscription et à la répartition des rémunérations nettes sur le compte nominatif des détenus. Le concessionnaire rembourse ces montants à l'administration sur la base d'un relevé établi par le comptable public de l'établissement. Le paiement intervient au plus tard dans les trente jours à compter de la fin du mois correspondant au travail facturé.

7.5. Retard et défaut de paiement

Pour les sommes non réglées à la date prévue, l'administration informe le concessionnaire qu'il sera dû, à compter de la date d'émission de la facture, un intérêt moratoire égal au taux d'intérêt légal de la Banque de France en vigueur majoré de deux points.

Dans le cas visé à l'alinéa précédent et sans réponse après dix jours ouvrables au courrier recommandé qui lui a été envoyé, le chef d'établissement engage la procédure de recouvrement par voie de contentieux en faisant procéder à l'émission d'un état exécutoire à son encontre.

Article 8 : garanties

Le chef d'établissement peut demander au concessionnaire qu'il s'engage à apporter pour garantie du paiement des rémunérations et charges, un chèque bancaire ou un cautionnement avalisé par une banque à hauteur des sommes à devoir. Ce chèque sera remis à l'encaissement en cas de retard de règlement. En cas de rejet du chèque à l'encaissement, le chef d'établissement engagera la procédure de recouvrement par voie de contentieux.

Article 9 : Protection sociale

9.1. Accidents du travail

Les détenus sont garantis contre les accidents du travail par l'application du régime spécial de sécurité sociale couvrant le risque des accidents du travail et des maladies professionnelles. Le concessionnaire assume la charge financière de cette protection. Le taux de cotisation de droit commun mis à la charge du concessionnaire est déterminé par la caisse primaire d'assurance maladie selon le type d'activité.

9.2. Maladie - Maternité - Vieillesse

Les détenus sont affiliés à compter de leur incarcération au régime général de l'assurance maladie et maternité. Le taux de cotisation est fixé conformément aux dispositions de l'article L 381-30-4 du code de la sécurité sociale.

Pour l'assurance vieillesse, le régime applicable est celui du droit commun conformément aux dispositions de l'article L 381-31 du code de la sécurité sociale.

Article 10 : Hygiène et sécurité

10.1. L'administration pénitentiaire est responsable de la sécurité liée au risque incendie. Cependant, en cas de risque spécifique du fait des matières ou des procédés mis en oeuvre, le concessionnaire doit faire installer dans les locaux mis à sa disposition des appareils de lutte contre l'incendie homologués et adaptés. Il veille à ce qu'ils soient convenablement entretenus et vérifiés selon la réglementation en vigueur.

Une consigne pour les cas d'incendie est affichée par l'administration dans les locaux destinés au travail. Ces consignes feront l'objet d'une information particulière aux détenus travaillant dans l'atelier.

Lorsque l'activité se déroule à l'extérieur de l'établissement pénitentiaire, l'ensemble e ces dispositions incombent au concessionnaire.

10.2. Le concessionnaire assure la formation des détenus à l'hygiène et à la sécurité, préalablement au démarrage effectif du travail, dans les cas où la nature de l'activité l'impose.

10.3 . Lorsque la nature des travaux réalisés par les détenus justifie la mise en place d'une surveillance médicale spéciale conformément à l'article R 231-65 et suivants du code du travail, la charge en incombera au concessionnaire.

10.4. En cas d'inobservation de la réglementation susceptible d'entraîner des conséquences graves sur la sécurité des personnes ou des installations, l'administration se réserve la possibilité de suspendre l'activité. La remise en conformité des installations, des modes opératoires et des locaux se fera dans le respect des obligations et charges réciproques du concessionnaire et du chef d'établissement après examen concerté des dispositions à prendre.

10.5. L'administration se réserve le droit d'exercer un recours contre le concessionnaire dans le cas où elle-même serait tenue vis-à-vis de tiers, en raison d'un dommage survenu du fait de l'inobservation d'une disposition légale ou réglementaire concernant son activité industrielle.

Article 11 : Responsabilité et assurances

11.1. Le concessionnaire garantit dans le cas d'incendie ou d'explosion affectant les locaux mis à sa disposition et ayant pour origine son activité industrielle :

- les dommages matériels causés à ces locaux afin de permettre à l'administration, en cas de destruction partielle ou totale, de reconstituer un espace de travail similaire,

- le recours des voisins et des tiers dans le cadre de l'application des articles 1382, 1383 et 1384 du code civil,

- les dommages matériel causés aux marchandises, matériels industriels et commerciaux, outillages, effets et objets appartenant tant à l'entreprise qu'à son personnel et/ou à des tiers se trouvant dans le local mis à disposition.

11.2. L'administration indemnise le concessionnaire en cas de préjudice du fait de sa responsabilité.

Article 12 : Charges diverses

12.1. Sont à la charge du concessionnaire la fourniture d'énergie pour l'éclairage et le chauffage des locaux, ainsi que la fourniture du courant électrique et des fluides nécessaires au fonctionnement des machines utilisées pour son industrie.

12.2. Sont à la charge du concessionnaire, le nettoyage des locaux et leur entretien courant, ainsi que la fourniture de vêtements, chaussures ou matériel de protection nécessaires à l'hygiène et à la sécurité du travail, sauf dispositions particulières convenues avec le chef d'établissement .

Article 13 : Litiges

13.1. Les parties s'efforceront de régler leurs différends par la négociation. Le directeur régional des services pénitentiaires y contribue en tant que signataire du présent contrat.

13.2. L'administration se réserve le droit de suspendre la concession, sans préavis ni indemnité, en cas d'inobservation par le concessionnaire de ses obligations légales ou contractuelles. Cette mesure conduira à la résiliation de plein droit du contrat, dix jours ouvrables après l'envoi d'un courrier recommandé resté sans réponse, mettant le concessionnaire en demeure de se conformer à ses engagements.

Lorsque l'administration envisage d'étendre ces mesures à d'autres contrats dont la même entreprise serait titulaire dans d'autres établissements, elle en avertit au préalable son représentant.

13.3. En cas d'infraction grave, de la part du concessionnaire ou de celle de son personnel à la discipline et à la réglementation pénitentiaire, le chef d'établissement prend dans un premier temps toute mesure immédiate adaptée à la situation. Lorsqu'il envisage de mettre fin à l'autorisation d'accès du concessionnaire et de ses préposés, ou à l'activité, il en avertit le représentant de l'entreprise qu'il reçoit avant de prendre toute mesure définitive.

13.4. Le contentieux relatif au contrat de concession relève de la compétence du tribunal administratif dans le ressort duquel se situe l'établissement pénitentiaire.

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