d) Réformes pouvant être envisagées

Les règles relatives à l'urbanisme en montagne présentent un double inconvénient :

- elles constituent plus qu'ailleurs une source d'insécurité juridique ;

- elles ne peuvent pas être adaptées aux spécificités locales.

(1) Améliorer la sécurité juridique

La sécurité juridique ne pourra être pleinement satisfaisante tant que l'on n'aura pas donné à la juridiction administrative les moyens nécessaires pour traiter les recours pour excès de pouvoir dans un délai satisfaisant. En effet, la longueur intolérable des délais aboutit au blocage de fait de nombreux projets.

Cette situation étant rappelée, il est possible de faire les propositions suivantes.

(a) Mieux préciser certaines notions par voie de circulaire

Tout d'abord, il pourrait être utile de mieux préciser certaines notions, par voie de circulaire.

Tel est tout d'abord le cas de la notion de continuité. Pour citer un exemple parmi d'autres, votre rapporteur a eu connaissance, dans le département de Haute-Savoie, d'un cas où l'administration avait accordé un certificat d'urbanisme positif pour une parcelle de terrain au mois de juillet 2001, puis l'avait refusé au mois de décembre de la même année pour une parcelle contiguë, sans que rien ne semble justifier cet écart de traitement 47( * ) . S'il n'est sans doute pas souhaitable de préciser cette notion par la loi (l'objectif essentiel étant d'améliorer la sécurité juridique, une certaine stabilité de la législation est nécessaire afin d'éviter d'obliger le juge à abandonner sa jurisprudence antérieure), il pourrait en revanche être utile de mieux la préciser à l'administration, à travers à une circulaire.

De même, la notion d'adaptation, de réfection et d'extension limitée des constructions existantes semble interprétée de manière parfois trop restrictive par l'administration. En effet, le code de l'urbanisme ne définit ni les constructions existantes, ni la notion de ruine. C'est pour cette raison que pour autoriser la restauration de la ferme de Fretma 48( * ) , dans le parc national des Cévennes, le préfet de Lozère s'est référé aux dispositions relatives aux chalets d'alpage, estimant que ce bâtiment était une ruine. La notion de ruine n'est pas juridiquement définie par le code de l'urbanisme, et la jurisprudence l'utilise différemment selon qu'elle est amenée à appliquer un texte qui n'autorise que la réfection ou l'extension d'habitations existantes, ce qui exclut le changement de destination des bâtiments, ou un texte qui autorise l'adaptation, la réfection ou l'extension des constructions existantes, comme le font l'article L. 111-1-2 et, depuis la loi SRU, l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme. Dans le premier cas, les tribunaux examinent si l'état de la construction permet de considérer qu'elle reste affectée à l'habitation, et ils qualifient de ruine non habitable un bâtiment auquel il manque une partie du toit ou des murs extérieurs. Dans le second cas, ils vérifient si l'importance des constructions restant sur le terrain est suffisante pour estimer qu'elles ont une réalité et ne sont pas totalement détruites. Là encore, une précision, par voie de circulaire, serait utile.

En outre, la notion de « terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières » est ambiguë, même si la loi mentionne certains critères devant être pris en compte 49( * ) . Tel est également le cas de celle d' « espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard ». Comme le souligne M. François Servoin, « ces notions souvent subjectives ne sont pas toutes définies avec précision par les textes juridiques et sont, finalement, en cas de litiges, souvent laissées à l'appréciation du juge » 50( * ) .

Enfin, il pourrait être précisé que la notion de chalet d'alpage doit être comprise au sens large, et inclut en particulier les bâtiments d'estive. Cette précision serait particulièrement utile dans le cas du Massif central et des Pyrénées. Elle semble devoir être apportée par voie de circulaire, dans la mesure où une modification de la loi pourrait être interprétée par le juge comme signifiant que la notion de chalet d'alpage était auparavant plus restrictive.

Proposition n° 59. : Préciser par voie de circulaire certaines notions utilisées par la loi « montagne » (continuité ; adaptation, réfection et extension limitée des constructions existantes ; terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières ; patrimoine naturel et culturel montagnard ; chalet d'alpage).

(b) La nécessité d'une meilleure autorégulation de l'administration

Une meilleure autorégulation de l'administration est en outre nécessaire.

En effet, il arrive que le préfet décide de retirer un certificat d'urbanisme, alors que la phase de validité de celui-ci n'est pas expirée. Or, le fait qu'un terrain soit soudainement considéré comme inconstructible peut avoir des conséquences dramatiques. Les membres de la mission commune d'information connaissent de ce phénomène des exemples hélas trop nombreux, comme votre rapporteur a pu s'en rendre compte dans le département de la Haute-Savoie. Ainsi, l'administration a demandé, dans le cadre de la révision d'un plan d'occupation des sols, qu'une parcelle soit classée en zone inconstructible, s'opposant par là même aux avis du commissaire enquêteur et au choix du conseil municipal 51( * ) . De même, un propriétaire s'est vu indiquer, lors du renouvellement de son certificat d'urbanisme, qu'en application de la loi « montagne » sa parcelle était inconstructible 52( * ) . Dans les deux cas, les personnes concernées avaient réalisé d'importants travaux.

Pour ces personnes, ces traitements sont ressentis comme de véritables expropriations, sans indemnité, ce qui est contraire aux principes fondamentaux de notre démocratie. Cela est d'autant plus choquant que les personnes concernées ont acquitté les droits et la TVA correspondant à un terrain à bâtir.

Certes, le principe de légalité impose de retirer un acte illégal. Il n'en demeure pas moins que les modalités d'application de ce principe sont, dans certains départements, difficilement acceptables.

Proposition n° 60. : Harmoniser par circulaire les modalités de retrait des certificats d'urbanisme par l'administration.

(2) Adapter certaines règles
(a) Faut-il supprimer la notion de hameau ?

Actuellement le hameau est défini par l'arrêt Commune de Saint Gervais (Conseil d'Etat, 5 février 2001). Selon cet arrêt, un hameau est « caractérisé par l'existence de plusieurs bâtiments suffisamment proches les uns des autres pour être regardés comme groupés ». Plus précisément, les constructions d'un hameau doivent être distantes de 30 mètres au maximum. Ce critère était justifié dans le cas de la commune de Saint Gervais mais ne peut constituer une définition générale du hameau. Ainsi, dans certaines régions on considère traditionnellement qu'un hameau peut réunir des bâtiments distants de 150 mètres.

L'existence d'un problème au sujet de la définition du hameau fait l'objet d'un consensus parmi les élus. Ainsi, selon le groupe de travail de la commission des affaires économiques sur la modernisation du droit de l'urbanisme 53( * ) , « la principale difficulté relative à l'application de la loi « montagne » concerne la construction en zone historiquement mitée. Elle pourrait être résolue grâce à une appréciation souple de la notion de « hameau » (...) ».

De même, à l'occasion de la discussion du projet de loi SRU, l'Assemblée nationale et le Sénat ont adopté des dispositions tendant à préciser la notion de hameau, qui ont ensuite été supprimées par l'Assemblée nationale 54( * ) .

Dans ces conditions, il est parfois envisagé de supprimer la référence faite par la loi « montagne » à la notion de hameau. On pourrait en particulier revenir à la notion de « parties actuellement urbanisées », utilisée par plusieurs articles du code de l'urbanisme et dont l'interprétation a été bien précisée par la jurisprudence. Une solution alternative, étudiée plus loin, consisterait à faire préciser la notion de hameau dans le cadre des prescriptions particulières de massif.

Proposition n° 61. : Supprimer la référence à la notion de hameau, ou faire préciser cette notion par les prescriptions particulières de massif.

(b) Les travaux effectués sur des bâtiments d'alpage ou d'estive

Un autre domaine où la législation mériterait d'être assouplie est celui des travaux effectués sur les chalets d'alpage et des bâtiments analogues.

(i) Autoriser la restauration de chalets non raccordés à la voirie et aux principaux réseaux

Actuellement, selon la loi n° 94-112 du 9 février 1994 portant diverses dispositions en matière d'urbanisme et de construction, « peuvent être (...) autorisées, par arrêté préfectoral, après avis de la commission départementale des sites, dans un objectif de protection et de mise en valeur du patrimoine montagnard, la restauration ou la reconstruction d'anciens chalets d'alpage, ainsi que les extensions limitées de chalets d'alpage existants lorsque la destination est liée à une activité professionnelle saisonnière » (I de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme).

Cette disposition a pu être appliquée en moyenne montagne, comme dans le Cantal (restauration de burons sur l'Aubrac) et la Lozère (restauration de la ferme de Fretma, présentant un intérêt historique, dans le parc national des Cévennes).

Il convient de préciser que dans ce dernier cas, le permis de construire a finalement été retiré par le préfet, à la demande des ministres concernés. En effet, le projet avait suscité de fortes polémiques, du fait en particulier de l'opposition du parc national des Cévennes. Le projet n'est cependant pas abandonné, mais doit être rendu compatible avec les objectifs du parc national. Cet exemple illustre la difficulté qu'il peut y avoir à concilier différents aspects de la protection du patrimoine montagnard.

On peut rappeler par ailleurs que depuis une disposition adoptée par le Sénat lors de la discussion de la loi SRU, le III de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme prévoit que la règle de continuité ne s'applique pas dans le cas « de l'adaptation, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes ».

Cependant, l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme prévoit que la certitude d'un raccordement aux réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité est obligatoire pour que soit délivré le permis de construire 55( * ) . Cette disposition ne semble pas adaptée au cas des chalets utilisés seulement l'été : pour ces chalets, seul l'assainissement autonome (au moyen de toilettes chimiques) semble devoir être imposé, l'absence d'eau et d'électricité ne constituant pas une nuisance pour un tiers. Un problème analogue se pose en cas d'absence de raccordement à la voirie.

De même, s'il ne semble pas acceptable que la restauration de chalets d'alpage oblige la commune à effectuer l'hiver de coûteux travaux de déneigement, ce problème pourrait être évité si le chalet était occupé seulement l'été.

Ainsi, certains maires accordent le permis de construire en y prévoyant que le chalet ne sera pas utilisé l'hiver, mais ce document n'est ni légal, ni opposable aux utilisateurs ultérieurs.

Une solution serait d'instaurer, pour les utilisateurs du bâtiment, une servitude administrative, publiée aux hypothèques, interdisant l'utilisation du chalet l'hiver.

Proposition n° 62. : Permettre la réalisation de travaux sur des chalets d'alpage, même en l'absence de raccordement à la voirie ou aux réseaux d'eau et d'électricité, moyennant l'instauration d'une servitude administrative, publiée aux hypothèques, interdisant l'utilisation du chalet l'hiver.

(ii) Empêcher le démontage de certains chalets

Un second problème lié aux chalets d'alpage est celui de la pratique qui consiste à démonter un chalet pour le reconstruire dans une autre commune. Cette pratique conduit à l'appauvrissement du patrimoine architectural des vallées concernées.

En effet, l'article L. 430-1 du code de l'urbanisme prévoit que le permis de construire n'est nécessaire que pour certaines communes, dont celles disposant d'un POS ou d'un PLU. Sauf dans certains cas particuliers, la délivrance d'un permis de construire n'est pas obligatoire si la commune ne dispose d'aucun de ces documents.

Il semblerait donc souhaitable de modifier la législation, de manière à prévoir que le conseil municipal d'une commune dépourvue de document d'urbanisme puisse décider de rendre obligatoire le permis de démolir.

Proposition n° 63. : Dans les communes dépourvues de document d'urbanisme, autoriser la mise en place du permis de démolir par une délibération du conseil municipal.

(c) L'urbanisation à la périphérie des lacs

Les règles relatives à la distance d'urbanisation par rapport à la rive des lacs imposent également des contraintes très strictes, appliquées uniformément. Il ne s'agit nullement de remettre en cause cette règle, mais de permettre, pour son application, de prendre en compte les réalités du terrain, dans le strict respect de la protection de l'environnement.

Actuellement, l'article L. 145-5 du code de l'urbanisme prévoit que « les parties naturelles des rives des plans d'eau naturels ou artificiels d'une superficie inférieure à mille hectares sont protégées sur une distance de trois cent mètres à compter de la rive ». Y sont interdits toutes constructions, installations et routes nouvelles ainsi que toutes extractions et tous affouillements.

Peuvent être cependant autorisés :

- les bâtiments à usage agricole, pastoral ou forestier ;

- les refuges et gîtes d'étapes ouverts au public pour la promenade et la randonnée ;

- les installations à caractère scientifique si aucune autre implantation n'est possible ;

- les équipements d'accueil et de sécurité nécessaires à la pratique de la baignade ou des sports nautiques ainsi que l'adaptation, la réfection ou l'extension des constructions existantes.

Le PLU peut adapter ces dispositions dans deux cas de figure :

- l'extension mesurée des agglomérations ;

- l'ouverture d'un terrain de camping dans le respect du paysage et des caractéristiques propres à cet espace sensible.

Par ailleurs, il est possible de créer, « à titre exceptionnel », des « hameaux nouveaux intégrés à l'environnement », à condition qu'il existe soit un SCOT ou un schéma de secteur pour l'ensemble des communes riveraines, soit un PLU si le plan d'eau est situé à l'intérieur du territoire administratif d'une seule commune.

Dans le cas des plans d'eau artificiels existant à la date du 10 février 1994 56( * ) , les ministres de l'urbanisme et de l'environnement peuvent, « à titre exceptionnel », autoriser l'implantation « d'une opération d'urbanisation intégrée à l'environnement dont la surface de plancher hors oeuvre nette n'excède pas 30.000 mètres carrés », après avis de la commission départementale des sites. Cette disposition, dite « amendement Fabrège », est de portée limitée car elle était destinée essentiellement à régulariser une opération de près de 30.000 mètres carrés déjà réalisée sur les bords du lac de Fabrège, et n'a été utilisée que pour cette seule opération.

Dans le cas des lacs de superficie supérieure à 1.000 hectares, soumis à la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, à la protection et à la mise en valeur du littoral, des règles spécifiques s'appliquent. Ces règles sont, d'une manière générale, plus strictes. Cependant, elles ne s'appliquent que dans une bande de 100 mètres à partir du rivage.

Ces règles posent un certain nombre de difficultés, en particulier dans les cas où le respect de la règle des 100 ou des 300 mètres conduit à construire des bâtiments sur un terrain pentu, ce qui est fréquemment le cas en montagne. On pourrait imaginer d'adapter ces dispositions, dans une « logique de projet ». Ainsi, on pourrait prévoir que les documents d'urbanisme peuvent, après réalisation d'une étude paysagère intégrée au document d'urbanisme et donc soumise à enquête publique, pour la portion de la rive les concernant, déterminer la zone dans laquelle l'urbanisation est interdite, en respectant la contrainte d'une distance moyenne de la rive de 100 ou 300 mètres ; la règle des 100 ou 300 mètres continuant à s'appliquer, sous sa forme actuelle, pour les communes dépou rvues de documents d'urbanisme.

Proposition n° 64. : Dans le cas des lacs de montagne, prévoir que les documents d'urbanisme peuvent, après réalisation d'une étude paysagère (soumise à enquête publique), pour la portion de la rive les concernant, déterminer la zone dans laquelle l'urbanisation est interdite, en respectant la contrainte d'une distance moyenne de la rive de 100 ou 300 mètres (selon que le lac concerné est soumis à la loi « montagne » ou à la loi « littoral »).

(3) Prendre en compte les spécificités de la moyenne montagne

L'un des principaux problèmes posés par la législation actuelle semble être son inadéquation à la situation de la moyenne montagne, dont l'urbanisation est, par nature, discontinue.

(a) Le problème

Comme le souligne le rapport du groupe de travail de la commission des affaires économiques du Sénat sur la modernisation du droit de l'urbanisme 57( * ) , « la loi « montagne » a été principalement conçue pour protéger les espaces de haute montagne. Elle a permis de préserver des pans entiers du territoire d'une urbanisation galopante. Il ne saurait donc être question de revenir sur ses acquis. Cependant, son application pose des problèmes récurrents en zone de moyenne montagne où, depuis toujours, l'habitat est dispersé. (...) Une interprétation par trop restrictive des textes empêche tout développement des communes intéressées. (...) C'est pourquoi il serait souhaitable, au sein des zones montagnardes, de distinguer entre les zones de haute montagne qui doivent continuer à bénéficier d'une protection absolue et les régions de moyenne montagne où l'habitat est structurellement et historiquement « mité » ».

En particulier, certaines zones ont été qualifiées de zones de montagne afin de pouvoir les faire bénéficier des primes à l'élevage et à l'agriculture de montagne. Si cette revendication était légitime, elle a eu pour conséquence d'entraîner pour ces zones des contraintes en matière d'urbanisme qui n'avaient pas lieu d'être.

Ainsi, il arrive que le principe de continuité soit inadapté, soit parce que la totalité de certains territoires n'est pas exploitée par l'agriculture (comme dans le cas de certaines zones du Massif central), soit parce que l'extension urbaine est inévitable (comme dans celui des communes de l'arrière-pays niçois).

(b) Diverses possibilités ont pu être envisagées

On pourrait donc distinguer deux niveaux de zonage :

- un premier niveau , constituant la protection de base, aurait pour objectif essentiel de maintenir les activités agricoles . Il comprendrait les dispositions figurant actuellement à ce sujet au I de l'article L.145-3 du code de l'urbanisme (préservation des terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières), et permettrait aux communes concernées de bénéficier des primes prévues pour l'agriculture de montagne ;

- un second niveau , constituant une protection complémentaire dans certaines zones, aurait pour objectif de limiter les extensions urbaines (comme l'implantation des stations de sports d'hiver en haute montagne). Il comprendrait les dispositions figurant actuellement à ce sujet au III de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme (obligation de construire en continuité avec les bourgs et les villages existants).

Une autre possibilité, envisagée par le groupe de travail de la commission des affaires économiques sur la modernisation du droit de l'urbanisme 58( * ) , consisterait à distinguer deux niveaux de contrainte en matière d'urbanisme : dans les régions historiquement « mitées », « le POS [devenu PLU] devrait comporter trois grands types de zonages seulement. L'un couvrirait les zones inconstructibles, le deuxième les zones urbanisées, et le troisième les zones « mitées » et susceptibles de recevoir de nouvelles constructions selon un coefficient maximal d'occupation qu'il conviendrait de définir compte tenu des spécificités locales ».

Certains envisagent d'aller plus loin.

Ainsi, notre collègue Michel Teston a proposé, lors de l'examen du projet de loi sur l'aménagement et le développement durable du territoire, que dans les communes dotées d'un document de planification, la règle de construction en continuité avec les bourgs et hameaux existants soit assouplie lorsque l'intérêt de la commune affirmé par une délibération du conseil municipal, le justifie. Bien évidemment, ces extensions ne pourraient s'effectuer que sous réserve des impératifs de sauvegarde des espaces naturels, des paysages, de la salubrité et de la sécurité publiques.

De même, le groupe de travail de la commission des affaires économiques sur la modernisation du droit de l'urbanisme 59( * ) , estimant que « l'application de la loi « montagne » peut conduire à interdire tout développement à certaines localités », considère qu' « il serait souhaitable de préciser son champ d'application en astreignant l'Etat à produire, lorsqu'une commune voit son développement presque totalement entravé par cette loi, une étude sur la constructibilité résiduelle. Sur la base de ces études, la commune pourrait demander au préfet d'autoriser, après avis de la commission des sites, la création d'une ou de zones de « mutations foncières » destinées à accueillir de nouvelles activités, en fonction des besoins ».

(c) Etendre à la montagne les bénéfices des mesures d'assouplissement de la loi SRU

La solution proposée par la mission commune d'information est d'étendre aux zones de montagne le bénéfice des mesures d'assouplissement de la loi SRU.

A la suite d'un amendement adopté au Sénat sur proposition de sa commission des lois, le 4° de l'article L.111-1-2 du code de l'urbanisme prévoit qu'en l'absence de documents d'urbanisme, sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune, les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l'intérêt de la commune le justifie, dès lors que cette construction ne porte pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. Il est précisé que cet intérêt peut consister à éviter une diminution de la population communale.

Cependant, cette disposition ne concerne pas les zones de montagne, dans la mesure où pour celles-ci, ce sont les dispositions, plus restrictives, de la loi « montagne », qui s'appliquent. On peut s'interroger sur la pertinence d'une telle restriction. Le dernier recensement a en effet malheureusement permis de constater que, dans certains départements -dont le Cantal-, la baisse démographique avait pu représenter, en dix ans, jusqu'à 20 % de la population totale. Cette situation extrêmement préoccupante, si elle perdure, risque de conduire rapidement à une véritable « fracture territoriale ». C'est pourquoi il est vital de ne pas amplifier cette désertification en interdisant trop systématiquement la construction dans ces secteurs, même si les constructions qui seraient ainsi autorisées doivent s'insérer dans leur environnement de façon maîtrisée et faire l'objet d'une attention particulière sur le plan de la qualité tant architecturale que paysagère.

Ainsi, il serait utile de prévoir que dans les communes de montagne où la pression urbanistique est faible (cette pression pouvant être évaluée par référence à des critères relatifs à la démographie et aux constructions de résidences secondaires), le conseil municipal et le préfet peuvent autoriser des constructions ou installations en-dehors des parties actuellement urbanisées de la commune.

Proposition n° 65. : Prévoir que dans les communes de montagne où la pression urbanistique est faible (cette pression pouvant être évaluée par référence à des critères relatifs à la démographie et aux constructions de résidences secondaires), le conseil municipal et le préfet peuvent autoriser des constructions ou installations en-dehors des parties actuellement urbanisées de la commune.

(4) Les communes soumises à la fois à la loi « littoral » et à la loi « montagne »

Il convient également de mentionner la situation des communes soumises à la fois à la loi « littoral » et à la loi « montagne ».

L'article L.146-9 du code de l'urbanisme prévoit que dans les espaces proches du rivage des communes riveraines de la mer et incluses dans le champ d'application de la loi « montagne », la loi « littoral » s'applique seule. Cependant, il n'existe pas de telle disposition dans le cas des communes de montagne riveraines de lacs de superficie supérieure à 1.000 hectares (soumis à la fois à la loi « montagne » et à la loi « littoral »).

Afin de supprimer cette contrainte excessive pesant sur certaines communes, à l'occasion de la discussion de la loi SRU, le Sénat a adopté une disposition instituant un droit à une constructibilité minimale pour les communes soumises à la fois à la loi « montagne » et à la loi « littoral », qui s'exercerait, même en l'absence de document d'urbanisme, sur la base d'une étude de constructibilité résiduelle élaborée par l'Etat. Cette disposition a ensuite été supprimée par l'Assemblée nationale.

Une solution peut-être plus aisément applicable serait de prévoir que les règles de la loi « montagne » en matière d'urbanisme ne s'appliquent pas dans les espaces proches du rivage des communes riveraines de lacs de superficie supérieure à 1.000 hectares et incluses dans le champ d'application de la loi « montagne ».

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